L'épée de l'Esprit et l'épée à deux tranchants

E.E Hücking

Dans l'Écriture, la parole de Dieu est appelée «l'épée de l'Esprit» et elle est comparée à «une épée à deux tranchants». Les deux passages qui la présentent ainsi — Éphésiens 6 et Hébreux 4 — sont connus de la plupart des lecteurs de la Bible.

Lorsque nous nous trouvons devant deux expressions présentant une certaine ressemblance, il vaut toujours la peine de se demander en quoi elles diffèrent. Il y a souvent là un enseignement particulier. Le mot traduit par «épée» est le même dans les deux cas, et désigne une épée plutôt courte et maniable, propre à tailler et à frapper. Dans l'épée elle-même, il n'y a donc pas de différence. Il y en a une, en revanche, dans la main qui la manie.

L'épée dans notre main

«Revêtez-vous de l'armure complète de Dieu, afin que vous puissiez tenir ferme contre les artifices du diable; car notre lutte n'est pas contre le sang et la chair, mais contre… la puissance spirituelle de méchanceté qui est dans les lieux célestes… Prenez aussi le casque du salut, et l'épée de l'Esprit, qui est la parole de Dieu» (Éphésiens 6: 11, 12, 17).

Tout au long de notre vie de croyants, nous avons un combat spirituel à mener. Les puissances spirituelles de méchanceté cherchent en effet à nous priver de la jouissance des bénédictions que nous possédons dans les lieux célestes (cf. 1: 3).

Ces bénédictions nous ont été acquises par la mort et la résurrection de Christ. Dieu «nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans le Christ Jésus». C'est là son œuvre, et nous sommes «son ouvrage» (2: 5, 6, 10). À cela nous n'avons pu apporter aucune contribution. Ces choses sont présentées en type dans l'Ancien Testament, lorsque nous voyons Josué introduire le peuple d'Israël dans les bénédictions du pays de Canaan par ses victoires.

Cependant, dès qu'il s'agit de faire valoir nos possessions en face de l'ennemi afin de jouir effectivement de nos bénédictions, quelque chose nous est demandé: nous avons à combattre. Le combat est nécessaire afin que nous puissions sans cesse nous nourrir d'un Christ glorifié — lui qui est la vraie nourriture de la Canaan céleste.

De même, nous avons à combattre pour l'évangile. L'apôtre Paul attendait des Philippiens qu'ils combattent «ensemble d'une même âme, avec la foi de l'évangile» et il rappelle qu'ils avaient «à soutenir le même combat» que lui (Philippiens 1: 27, 30).

Pour cela, nous avons besoin de «l'épée de l'Esprit» — la parole de Dieu. Il s'agit d'un combat contre des puissances spirituelles, contre des influences et des courants mauvais, derrière lesquels se tient Satan, l'ennemi de nos âmes. Combien souvent cela a été oublié dans l'histoire de l'Église! On a alors lutté contre «le sang et la chair» avec les armes de ce monde. Ou bien — et c'est davantage le danger qui nous menace aujourd'hui — nous nous engageons dans le combat spirituel avec nos propres armes: nous nous imaginons que nos bons arguments devraient convaincre nos interlocuteurs, et nous sommes déçus du résultat.

Nous devrions mettre davantage la parole de Dieu en avant, plutôt que nos propres raisonnements, et la laisser agir par sa propre puissance. Lorsqu'on sait que l'épée est bonne, on n'a pas de souci à se faire quant à son efficacité.

Bien sûr, il n'est guère possible de ne parler que sous forme de citations bibliques. Et pourtant nous aurions certainement de nombreuses occasions d'utiliser ce moyen, si seulement nous avions à notre disposition les passages à propos. Mais prenons garde à manier notre épée d'une manière juste. Les paroles de la Bible doivent être utilisées dans leur vrai sens, et en accord avec leur contexte. Et cela doit être fait de manière spirituelle, sous la direction du Saint Esprit. Pour qu'il en soit ainsi, un exercice constant et la prière sont indispensables.

L'épée dans la main de Dieu

«Craignons donc qu'une promesse ayant été laissée d'entrer dans son repos, quelqu'un d'entre vous paraisse ne pas l'atteindre… Appliquons-nous donc à entrer dans ce repos-là, afin que personne ne tombe en imitant une semblable désobéissance. Car la parole de Dieu est vivante et opérante, et plus pénétrante qu'aucune épée à deux tranchants, et atteignant jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit, des jointures et des moelles; et elle discerne les pensées et les intentions du cœur. Et il n'y a aucune créature qui soit cachée devant lui, mais toutes choses sont nues et découvertes aux yeux de celui à qui nous avons affaire» (Hébreux 4: 1, 11-13).

L'auteur de l'épître aux Hébreux rappelle à ses lecteurs l'histoire de leurs ancêtres. Ces derniers, par leur incrédulité, ont perdu le privilège d'entrer dans le repos du pays de Canaan après un voyage d'environ deux ans à travers le désert. Au lieu de cela, ils ont dû errer dans ce lieu aride pendant trente-huit années encore, jusqu'à ce que toute cette génération se soit éteinte. Ainsi, aucun de ces Israélites incrédules n'a pu atteindre le repos du pays de Canaan. L'auteur de l'épître souligne que ce jugement gouvernemental résulte d'une parole sortie de la bouche de Dieu, et il cite le psaume 95: «Ainsi je jurai dans ma colère: S'ils entrent dans mon repos!» (Hébreux 3: 11).

Ensuite, il fait une application de ces faits à ceux auxquels il s'adresse. À eux aussi, la promesse d'entrer dans le repos de Dieu avait été faite; mais dans leur cas, il s'agissait du repos éternel du peuple céleste de Dieu — auquel nous aussi nous appartenons. Que personne, par sa défaillance en cours de route, ne donne l'impression qu'il n'atteindra pas ce repos! (cf. 4: 1). Nous devons nous appliquer «à entrer dans ce repos-là, afin que personne ne tombe en imitant une semblable désobéissance» (verset 11), c'est-à-dire afin qu'il ne lui arrive pas ce qui est arrivé autrefois aux Israélites désobéissants. Et alors, l'écrivain en vient de nouveau à parler de la parole de Dieu: «Car la parole de Dieu est… plus pénétrante qu'aucune épée à deux tranchants…».

En d'autres termes: Prenez garde que «l'épée» qui a frappé autrefois les désobéissants, les incrédules, ne frappe aussi quelqu'un d'entre vous! Cette épée, la parole de Dieu, est encore aussi tranchante qu'autrefois; elle est plus tranchante que la plus tranchante des armes humaines. Là où elle opère, elle distingue sans ménagement ce qui est vrai de ce qui ne l'est pas.

Ici, la Parole est une épée dans la main de Dieu. Il faut nous souvenir que, dans l'épître aux Hébreux, les croyants sont présentés comme le peuple de Dieu qui traverse le désert, étant en route vers le repos céleste. Alors, il apparaît qu'au cours du chemin, il y en a qui tombent. L'épître aux Hébreux n'en dit pas plus à leur sujet. La question de la vie éternelle des individus ne doit pas être soulevée ici, car le passage ne la tranche pas. Mais comme peuple de Dieu, nous devons prendre l'avertissement au sérieux: «Prenez garde, frères, qu'il n'y ait en quelqu'un de vous un méchant cœur d'incrédulité…» (3: 12).

Une épée à deux tranchants était, dans les temps anciens, l'arme offensive la plus efficace. Après avoir opéré dans un sens, on pouvait, au retour, porter un second coup en sens inverse, sans avoir à retirer l'épée à soi, comme on devait le faire avec une arme à un seul tranchant. C'est pourquoi la parole de Dieu est comparée à cette épée-là; et il nous est dit qu'elle est encore «plus pénétrante». Les «deux tranchants» ont été parfois interprétés comme si cette épée avait un tranchant dirigé contre l'ennemi et un autre contre nous-mêmes; mais cette pensée ne paraît pas avoir de fondement. Premièrement, une épée de cette sorte ne pourrait être manipulée; et deuxièmement, il s'agit dans ce passage d'une épée dans la main de Dieu.

Retenons bien le point essentiel: si «elle discerne les pensées et les intentions du cœur», c'est chacun de nos cœurs qui est concerné. Et cela pour notre plus grand bien. En effet, en éveillant nos consciences, elle nous amène à juger l'incrédulité et les convoitises de nos cœurs. Dieu ne veut pas qu'aucun des siens tombe dans le désert. Il veut que nous atteignions tous le but placé devant nous. Et pour cela, il nous a donné des ressources: un Souverain Sacrificateur qui intercède constamment pour nous devant Dieu, et un accès permanent au trône de la grâce, où nous pouvons trouver du secours au moment opportun.