Lévitique

Chapitre 11

Le livre du Lévitique peut, à bon droit, être appelé «le Guide du sacrificateur». Il en a tout à fait le caractère. Il est rempli de principes pour la direction de ceux qui désirent vivre dans la jouissance de la proximité sacerdotale de Dieu. Si Israël avait continué à marcher avec l’Éternel, selon la grâce avec laquelle il les avait fait remonter du pays d’Égypte, ils lui auraient été «un royaume de sacrificateurs et une nation sainte» (Ex. 19:6). Mais c’est ce qu’ils ne firent pas. Ils se mirent à distance. Ils se placèrent sous la loi et ne purent l’observer. C’est pourquoi l’Éternel dut choisir une certaine tribu, et dans cette tribu une certaine famille, et dans cette famille un certain homme; et à lui et à sa maison fut accordé le grand privilège de s’approcher de Dieu, comme sacrificateurs.

Or les privilèges d’une semblable position étaient immenses; mais elle avait aussi ses graves responsabilités. Elle exigeait l’exercice incessant d’un esprit de discernement. «Car les lèvres du sacrificateur gardent la connaissance, et c’est de sa bouche qu’on recherche la loi, car il est le messager de l’Éternel des armées» (Mal. 2:7). Le sacrificateur devait non seulement porter le jugement de l’assemblée devant l’Éternel, mais aussi expliquer les ordonnances de l’Éternel à l’assemblée. Il devait être l’intermédiaire, toujours prêt pour les communications entre l’Éternel et le peuple. Il devait non seulement connaître pour lui-même les pensées de Dieu, mais pouvoir aussi les interpréter au peuple. Tout cela demandait, nécessairement, une vigilance continuelle, une attention soutenue, une étude constante des pages inspirées, afin de bien s’imprégner de tous les préceptes, jugements, statuts, commandements, et de toutes les lois et ordonnances du Dieu d’Israël, pour être à même d’instruire la congrégation des «choses qui devaient être faites».

Il n’y avait là aucune place laissée au jeu de l’imagination, à l’introduction des plausibles inductions de l’homme ou aux habiles accommodements des convenances humaines. Tout était prescrit avec la précision divine et l’autorité péremptoire d’un: «Ainsi a dit l’Éternel». Minutieuse et complète comme elle l’était, l’explication des sacrifices, des rites et des cérémonies ne laissait rien à faire à l’élaboration du cerveau de l’homme. Il ne lui était pas même permis de décider quelle espèce de sacrifice devait être offert en certaines occasions, ni de quelle manière ce sacrifice devait être présenté. L’Éternel prenait soin de tout. Ni l’assemblée, ni le sacrificateur n’avaient la moindre autorité quelconque pour décréter, accomplir ou suggérer un seul détail dans toute la longue série des ordonnances de l’économie mosaïque. La parole de l’Éternel ordonnait tout. L’homme n’avait qu’à obéir.

Pour un cœur obéissant, cela n’était rien moins qu’une grâce inexprimable. On ne peut jamais trop apprécier le privilège d’avoir la facilité de recourir aux oracles de Dieu, et d’y trouver, jour par jour, les plus amples directions sur tous les détails de sa foi et de son service. Ce qu’il nous faut, c’est une volonté brisée, un esprit humble, un œil simple. Le Guide divin est aussi complet que nous pouvons le désirer. Nous n’avons pas besoin d’autre chose. Croire, pour un instant, qu’il reste quoi que ce soit que la sagesse humaine puisse ou doive suppléer, doit être considéré comme une insulte faite aux livres sacrés. Personne ne peut lire le Lévitique sans être frappé des soins extrêmes que s’est donné le Dieu d’Israël pour procurer à son peuple les instructions les plus détaillées sur tout ce qui se rattachait à son service et à son culte. Le lecteur le plus léger peut, au moins, y trouver cette touchante et intéressante leçon.

Et, sûrement, si jamais il y eut un temps où cette même leçon eût besoin d’être répétée aux oreilles de la chrétienté, c’est bien maintenant. De tous côtés on élève des doutes sur la divine suffisance des saintes Écritures. En quelques cas, ces doutes s’expriment ouvertement et de propos délibéré; en d’autres, avec moins de franchise, ils sont secrètement insinués, présentés par des allusions ou des inférences. On dit, directement ou indirectement, au navigateur chrétien, que la carte divine n’est pas suffisante pour tous les détails compliqués du voyage — que tant de changements se sont opérés dans l’océan de la vie depuis la formation de cette carte, que, en bien des cas, elle est totalement défectueuse pour les besoins de la navigation moderne. On lui dit que les courants, les marées, les côtes, les rivages et les abordages de cet océan, sont entièrement différents maintenant de ce qu’ils étaient il y a quelques siècles, et que, par conséquent, il faut qu’il ait recours aux moyens fournis par les progrès de la navigation, afin de suppléer à ce qui manque dans l’ancienne carte, laquelle, on en convient pourtant, était parfaite au temps où elle fut faite.

Mon vif désir est que le lecteur chrétien puisse, en toute assurance, répondre à cette grave insulte, faite au précieux volume inspiré, dont chaque ligne lui arrive du Père, par des plumes guidées par le Saint Esprit. Je désire qu’il puisse y répondre, qu’on la lui présente soit sous la forme d’un audacieux blasphème, soit sous celle d’une savante et plausible induction. De quelque manteau qu’elle se couvre, elle doit son origine à l’ennemi de Christ, à l’ennemi de la Bible, à l’ennemi de l’âme. Si, en effet, la parole de Dieu n’est pas suffisante, alors où en sommes-nous? de quel côté nous tournerons-nous? À qui nous adresserons-nous, quand nous aurons besoin de secours et de lumières, si le livre de notre Père est, à quelque égard, défectueux? Dieu dit que son livre peut nous rendre «parfaitement accomplis pour toute bonne œuvre» (2 Tim. 3:17). L’homme dit que non; qu’il y a bien des choses sur lesquelles la Bible se tait, et que, néanmoins, nous avons besoin de savoir. Qui dois-je croire? Dieu ou l’homme? Notre réponse à quiconque met en doute la divine suffisance de l’Écriture est simplement celle-ci: Ou bien vous n’êtes pas un homme de Dieu, ou bien la chose pour laquelle vous dites manquer de garantie n’est pas «une bonne œuvre»! C’est très clair. Personne ne pourrait le voir autrement, en considérant soigneusement 2 Tim. 3:17.

Oh! puissions-nous avoir un sentiment plus profond de la plénitude, de la majesté et de l’autorité de la parole de Dieu! Nous avons bien besoin d’être fortifiés à cet endroit. Il nous faut un sentiment si vif, si profond et si constant de l’autorité suprême du canon sacré, et de sa complète suffisance pour tous les temps, tous les climats, toutes les positions, tous les états — personnels, sociaux et ecclésiastiques — que nous puissions résister à tous les efforts de l’ennemi pour déprécier la valeur de cet inestimable trésor. Puissent nos cœurs être mieux à l’unisson avec ces paroles du Psalmiste:

«La somme de ta parole est la vérité, et toute ordonnance de ta justice est pour toujours». (Ps. 119:160).

Ce courant de pensées a été amené par l’examen du chapitre onzième du Lévitique. Nous y voyons l’Éternel faisant, avec de merveilleux détails, une description d’animaux, d’oiseaux, de poissons et de reptiles, et donnant à son peuple diverses marques par lesquelles il devait reconnaître ce qui était net et ce qui était impur. Les deux derniers versets de ce remarquable chapitre nous en donnent le résumé complet: «Telle est la loi touchant les bêtes et les oiseaux, et tout être vivant qui se meut dans les eaux, et tout être qui rampe sur la terre; afin de discerner entre ce qui est impur et ce qui est pur, et entre l’animal qu’on mange et l’animal qu’on ne mangera pas».

À l’égard des bêtes à quatre pieds, deux choses étaient essentielles pour qu’elles fussent nettes; il fallait qu’elles ruminassent et qu’elles eussent l’ongle divisé. «Vous mangerez, d’entre les bêtes qui ruminent, tout ce qui a l’ongle fendu et le pied complètement divisé». L’une ou l’autre de ces marques, seule, aurait été tout à fait insuffisante pour constituer la pureté cérémonielle. Les deux devaient être réunis. Et, tandis que ces deux marques suffisaient pleinement pour diriger l’Israélite quant à la distinction des animaux nets et des souillés, indépendamment de toute mention du sens ou des motifs de ces caractères, le chrétien, lui, peut s’enquérir des vérités spirituelles contenues dans ces ordonnances cérémonielles.

Que nous enseigneront donc ces deux traits d’un animal net? L’action de ruminer exprime l’acte de digérer intérieurement ce que l’on mange; tandis que l’ongle divisé représente le caractère de la marche extérieure. Il y a, comme nous le savons, un intime rapport entre ces deux choses, dans la vie du chrétien. Celui qui paît dans les verts pâturages de la parole de Dieu, et digère ce qu’il y prend — celui qui combine la calme méditation à l’étude avec prière, manifestera, sans doute, ce caractère d’une marche qui est à la louange de Celui qui a bien voulu nous donner sa parole pour diriger nos voies et former nos habitudes.

Il est à craindre que beaucoup de ceux qui lisent la Bible ne digèrent pas la parole. Il y a une immense différence entre ces deux choses. On peut lire chapitre après chapitre, livre après livre, et n’en pas même digérer une seule ligne. Nous pouvons lire la Bible, comme si nous accomplissions une froide et vaine routine; mais, par manque de facultés ruminantes, — d’organes digestifs, nous n’en retirons aucun profit quelconque. C’est à quoi il faut prendre bien garde. Le bétail qui broute l’herbe verte peut nous enseigner une salutaire leçon. Il recueille d’abord diligemment la rafraîchissante pâture, puis il se couche tranquillement, pour la ruminer. Belle et frappante image d’un chrétien se nourrissant du précieux contenu du volume inspiré, puis le digérant intérieurement. Plût à Dieu que cela fût plus général parmi nous! Si nous étions plus habitués à faire de la Parole la nourriture nécessaire et journalière de nos âmes, nous serions assurément dans un état plus vigoureux et plus sain. Gardons-nous de faire de la lecture de la Bible une forme morte — un froid devoir — une affaire de routine religieuse.

La même précaution est nécessaire à l’égard de l’exposition de la Parole en public. Que ceux qui expliquent les Écritures à leurs semblables s’en nourrissent et les digèrent d’abord pour eux-mêmes. Qu’ils lisent et ruminent en particulier, non seulement pour les autres, mais pour eux-mêmes. C’est triste de voir un homme continuellement occupé à procurer de la nourriture à autrui, tandis que lui meurt de faim. Et que ceux qui assistent au ministère public de la Parole, ne le fassent pas machinalement et seulement par habitude, mais avec un sincère désir d’apprendre et de digérer intérieurement ce qu’ils entendent. Alors, et ceux qui enseignent et ceux qui sont enseignés seront dans un bon état, la vie spirituelle sera nourrie et soutenue, et le vrai caractère de la marche sera manifesté.

Mais souvenons-nous que l’action de ruminer ne doit jamais être séparée de l’ongle fendu. Un homme, ne connaissant qu’imparfaitement le guide du sacrificateur, inexpérimenté dans les divines ordonnances, en voyant un animal ruminant, pouvait, à la légère, le déclarer net, ce qui eût été une grave erreur. Une plus soigneuse étude de la formule divine lui aurait bientôt montré qu’il devait aussi observer la marche de l’animal — remarquer l’impression laissée par chaque mouvement — chercher le résultat de l’ongle fendu. «Seulement de ceci vous ne mangerez pas, d’entre celles qui ruminent, et d’entre celles qui ont l’ongle fendu: le chameau, car il rumine, mais il n’a pas l’ongle fendu; il vous est impur, etc.» (Vers. 4-6).

De même, l’ongle divisé n’était pas suffisant, s’il n’était pas accompagné de la rumination: «Et le porc, car il a l’ongle fendu et le pied complètement divisé, mais il ne rumine nullement; il vous est impur» (Vers. 7). En un mot, ces deux choses étaient inséparables pour tout animal net; et quant à l’application spirituelle, elle est de la plus haute importance au point de vue pratique. La vie intérieure et la marche extérieure doivent aller ensemble. Un homme peut faire profession d’aimer la parole de Dieu et de s’en nourrir — de l’étudier et de la ruminer — d’en faire la pâture de son âme; mais si les traces de sa marche sur le sentier de la vie ne sont pas telles, que le demande la Parole, il n’est pas net. Et, d’un autre côté, un homme peut paraître marcher avec une exactitude pharisaïque; mais si sa marche n’est pas le résultat de la vie cachée, elle ne vaut rien du tout au fond. Il faut qu’il y ait au-dedans le principe divin qui prend et digère la riche pâture de la parole de Dieu, sans quoi la marque des pas ne servira de rien. La valeur de chacun de ces éléments dépend de sa liaison inséparable avec l’autre.

Cela nous rappelle forcément un bien sérieux passage de la première épître de. Jean, dans lequel l’apôtre nous donne les deux marques auxquelles nous pouvons connaître ceux qui sont de Dieu: «Par ceci sont rendus manifestes les enfants de Dieu et les enfants du diable: quiconque ne pratique pas la justice n’est pas de Dieu, et, celui qui n’aime pas son frère» (1 Jean 3:10). Nous avons ici les deux grands traits caractéristiques de la vie éternelle que possèdent tous les vrais croyants, savoir: «La justice» et «l’amour», le signe extérieur et le signe intérieur. Les deux doivent être réunis. Quelques chrétiens sont tout pour ce qu’ils appellent l’amour; d’autres pour la justice. Selon Dieu, l’un ne peut aller sans l’autre. Si ce qu’on appelle amour existe sans la justice pratique, ce ne sera, en réalité, qu’une disposition d’esprit faible et relâché, qui tolérera toute espèce d’erreur et de mal. Et si ce qu’on appelle justice existe sans l’amour, ce sera une disposition d’âme sévère, orgueilleuse, pharisaïque, égoïste, se contentant de la misérable base de la réputation personnelle. Mais là où la vie divine agit avec énergie, on trouvera toujours la charité intérieure, unie à une sincère justice pratique. Ces deux éléments sont essentiels à la formation du vrai caractère chrétien. Il faut qu’il y ait l’amour qui se montre pour tout ce qui est de Dieu, et en même temps la sainteté qui recule avec horreur devant tout ce qui est de Satan.

Voyons, maintenant, ce que le cérémonial lévitique enseignait à l’égard de «tout ce qui est dans les eaux». Ici encore nous trouvons la double marque. «Vous mangerez de ceci, d’entre tout ce qui est dans les eaux: vous mangerez tout ce qui a des nageoires et des écailles, dans les eaux, dans les mers et dans les rivières. Et tout ce qui n’a point de nageoires et d’écailles, dans les mers et dans les rivières, de tout ce qui fourmille dans les eaux et de tout être vivant qui est dans les eaux, vous sera une chose abominable» (Vers. 9-10). Deux choses étaient nécessaires pour rendre un poisson cérémoniellement net, savoir «les nageoires et les écailles», qui, évidemment, représentaient une certaine aptitude pour l’élément dans lequel l’animal devait se mouvoir.

Mais il y avait plus. Je crois que nous avons le privilège de pouvoir discerner, dans les propriétés naturelles dont Dieu a doué les créatures qui vivent dans les eaux, certaines qualités spirituelles qui appartiennent à la vie chrétienne. S’il faut au poisson des «nageoires» pour se mouvoir dans l’eau, et des «écailles» pour résister à l’action de cet élément, le croyant aussi a besoin de cette force spirituelle qui le met à même de marcher en avant à travers le monde qui l’entoure, et en même temps de résister à son influence — de ne pas s’en laisser pénétrer, de le tenir en dehors. Ce sont de précieuses qualités. Les nageoires et les écailles sont pleines de signification, — pleines d’instruction pratique pour le chrétien. Elles nous représentent, sous la forme cérémonielle, deux choses dont nous avons particulièrement besoin: l’énergie spirituelle pour aller en avant à travers l’élément qui nous entoure, et la force pour nous préserver de son action. L’une ne servira de rien sans l’autre. Il est inutile de posséder la capacité de traverser le monde, si nous ne sommes pas à l’épreuve contre l’influence du monde; et quoique nous puissions paraître capables de nous garantir du monde, cependant, si nous n’avons pas la force pour avancer, nous sommes en défaut.

Toute la conduite d’un chrétien devrait le montrer comme pèlerin et étranger ici-bas. Sa devise devrait être «en avant» — toujours et seulement, en avant. Quelles que soient ses circonstances, ses yeux doivent être fixés sur une demeure au-delà de ce monde périssable. Il est doué, par grâce, de la faculté spirituelle d’aller en avant — de franchir énergiquement tous les obstacles et de réaliser les ardentes aspirations d’une âme née d’en haut. Et tout en se frayant ainsi vigoureusement sa route en avant — tout en forçant son passage jusqu’au ciel, il faut qu’il garde son homme intérieur cuirassé tout à l’entour et fermé soigneusement à toutes les influences du dehors.

Oh! puissions-nous avoir davantage ce besoin d’avancer, ces aspirations en haut! Plus de sainte fixité de l’âme, et d’éloignement de ce monde léger! Nous aurons raison de bénir le Seigneur pour nos méditations sur les ombres cérémonielles du Lévitique, si, par là, nous sommes amenés à désirer plus ardemment ces grâces, qui, quoique si pauvrement dépeintes, nous sont néanmoins si évidemment nécessaires.

Du verset 13 au verset 24 de notre chapitre, nous avons la loi relative aux oiseaux. Tous ceux qui étaient du genre carnivore, c’est-à-dire tous ceux qui se nourrissent de chair, étaient souillés. Les omnivores, ou ceux qui mangeaient de tout, étaient souillés. Tous ceux qui, quoique doués de la faculté de s’élever dans les cieux, se traînaient néanmoins sur la terre, étaient souillés. Quant à cette dernière classe, il y avait quelques cas exceptionnels (versets 21-22); mais la règle générale, le principe fixe, l’ordonnance immuable était aussi explicite que possible: «Tout reptile volant, qui marche sur quatre pieds, vous sera une chose abominable» (Vers. 20). Tout cela est d’une instruction bien simple pour nous. Les oiseaux qui pouvaient se nourrir de chair, ceux qui pouvaient avaler tout ce qui se présentait, et tous les oiseaux rampants devaient être souillés pour l’Israël de Dieu, parce que le Dieu d’Israël les avait déclarés tels, et le cœur spirituel n’aura pas de difficulté à reconnaître la justesse d’une semblable ordonnance. Non seulement nous pouvons voir, dans les habitudes des trois classes d’oiseaux ci-dessus, le sage motif qui les faisait déclarer souillés, mais nous y voyons aussi la frappante représentation de ce dont tout vrai chrétien doit absolument se garder. Il doit repousser tout ce qui est d’une nature charnelle. De plus, il ne peut se nourrir de tout ce qui se présente à lui. Il doit «discerner les choses qui diffèrent»; il doit «prendre garde à ce qu’il entend»; il faut qu’il exerce un esprit de discernement, un jugement spirituel, des goûts célestes. Enfin, il faut qu’il se serve de ses ailes; il faut qu’il s’élève sur celles de la foi, et trouve sa place dans la sphère céleste à laquelle il appartient. En un mot, il ne doit rien y avoir de rampant, rien de confus, rien de souillé chez le chrétien1.

1 On devrait toujours pouvoir appliquer spirituellement au chrétien ce vers d’un poète qui a dit de l’oiseau: «Et même quand il marche, on sent qu’il a des ailes». (Trad.)

Quant aux «reptiles», voici quelle était la règle générale: «Et tout reptile qui rampe sur la terre sera une chose abominable; on n’en mangera pas» (vers. 41). Qu’il est admirable de penser à la grâce pleine de condescendance de l’Éternel! Il pouvait s’abaisser à donner des directions au sujet d’un reptile rampant! Il ne voulait pas laisser son peuple dans l’indécision quant à la plus petite chose. Le Guide du sacrificateur contenait les plus amples instructions sur tous les points. Il voulait que son peuple se conservât pur de toute souillure résultant du contact avec ce qui était souillé. Ils n’étaient pas à eux-mêmes, et par conséquent ils ne devaient pas agir comme bon leur semblait. Ils appartenaient à l’Éternel; son nom était invoqué sur eux; ils étaient identifiés avec lui. Sa parole devait être, en toute chose, leur règle de conduite. C’est là qu’ils devaient apprendre à juger de l’état cérémoniel des bêtes, des oiseaux, des poissons et des reptiles. Ils ne devaient point, sur ces matières, s’appuyer sur leurs propres pensées, exercer leur faculté de raisonnement, ou se laisser guider par leurs propres imaginations. La parole de Dieu devait être leur seul guide. Les autres nations pouvaient manger ce qu’elles voulaient; mais Israël jouissait du grand privilège de ne manger que ce qui plaisait à l’Éternel.

Ce n’est pas seulement de l’acte de manger ce qui était souillé que le peuple de Dieu devait si soigneusement se garder; le simple contact était défendu (voyez les vers. 8, 24, 26-28, 31-41). Il était impossible qu’un membre de l’Israël de Dieu touchât ce qui était souillé, sans contracter une souillure. Ce principe est largement développé dans la loi et dans les, prophètes: «Ainsi dit l’Éternel des armées: Interroge les sacrificateurs sur la loi, disant: Si un homme porte de la chair sainte dans le pan de sa robe, et qu’il touche avec le pan de sa robe du pain, ou quelque mets, ou du vin, ou de l’huile, ou quoi que ce soit qu’on mange, ce qu’il a touché sera-t-il sanctifié? Et les sacrificateurs répondirent et dirent: Non. Et Aggée dit: Si un homme qui est impur par un corps mort touche quelqu’une de toutes ces choses, est-elle devenue impure? Et les sacrificateurs répondirent et dirent: Elle est impure» (Aggée 2:11-13). L’Éternel voulait que son peuple fût saint à tous égards. Nul ne devait ni manger, ni toucher quoi que ce soit de souillé. «Ne rendez pas vos âmes abominables par aucun reptile qui rampe, et ne vous rendez pas impurs par eux, de sorte que vous soyez impurs par eux». Puis vient la raison puissante de toute cette séparation sévère: «Car je suis l’Éternel, votre Dieu: et vous vous sanctifierez, et vous serez saints, car je suis saint; et vous ne rendrez pas vos âmes impures par aucun reptile qui se meut sur la terre. Car je suis l’Éternel qui vous ai fait monter du pays d’Égypte, afin que je sois votre Dieu: et vous serez saints, car je suis saint» (Vers. 43-45).

Il est bon de voir que la sainteté personnelle des serviteurs de Dieu — leur entière séparation de toute espèce de souillure, découle de leurs relations avec lui. Ce n’est pas sur le principe de: «Retire-toi, n’approche point de moi, car je suis plus saint que toi»; mais simplement sur celui-ci: «Dieu est saint», c’est pourquoi tous ceux qui sont mis en rapport avec lui doivent aussi être saints. Il est, à tous égards, digne de Dieu que son peuple soit saint. «Tes témoignages sont très sûrs; la sainteté sied à ta maison, ô Éternel, pour de longs jours». Qu’y a-t-il, qui pût convenir à la maison de l’Éternel, plus que la sainteté? Si l’on eût demandé à un Israélite: «Pourquoi reculez-vous ainsi devant ce reptile qui se traîne sur le sentier?» il aurait répondu: «l’Éternel est saint, et je lui appartiens». Il a dit: «Ne touche pas»! De même, maintenant, si l’on demande à un chrétien pourquoi il se tient à part de tant de choses, auxquelles les hommes du monde prennent part, sa réponse doit tout simplement être: «Mon Père est saint». C’est là le vrai principe de la sainteté personnelle. Plus nous contemplons le caractère divin, et comprenons la puissance de nos relations avec Dieu, en Christ, par l’énergie du Saint Esprit, plus nous serons, nécessairement, saints en pratique. Il ne peut y avoir progrès dans l’état de sainteté où le croyant est introduit; mais il y a, et il doit y avoir progrès dans l’appréciation, dans l’expérience et la manifestation pratique de cette sainteté. Ces choses ne devraient jamais être confondues. Tous les croyants sont dans la même condition de sainteté ou de sanctification, mais leur mesure pratique peut varier à l’infini. Cela est facile à comprendre: notre condition résulte de ce que nous sommes approchés de Dieu par le sang de la croix; la mesure pratique dépend de ceci, savoir si nous nous maintenons près de Dieu, par la puissance de l’Esprit. Ce n’est pas prétendre à quelque chose qui soit au-dessus de notre portée — à un degré de sainteté personnelle plus élevé que d’autres — à être, en quelque manière, meilleur que son prochain. De telles prétentions sont tout à fait méprisables aux yeux de toute personne intelligente. Mais si Dieu, dans sa grâce infinie, s’abaisse jusqu’à nous et nous élève à la sainte hauteur de sa présence bénie, en association avec Christ, n’a-t-il pas le droit de nous prescrire quel doit être notre caractère, comme ayant été ainsi rapprochés? Qui oserait mettre en doute une vérité aussi évidente? Et ensuite, ne sommes-nous pas tenus de chercher à conserver ce caractère qu’il prescrit? Devons-nous être accusés de présomption si nous le faisons? Était-ce une présomption pour un Israélite de refuser de toucher à «un reptile»? Non, mais c’eût été une audacieuse et dangereuse présomption de le faire. Il se pouvait, il est vrai, qu’il ne pût faire comprendre et apprécier à un étranger incirconcis le motif de sa conduite, mais peu importait. L’Éternel avait dit: «Ne touchez pas»; non parce qu’un Israélite était, par lui-même, plus saint qu’un étranger, mais parce que l’Éternel était saint et qu’Israël lui appartenait. Il fallait l’œil et le cœur d’un disciple circoncis de la loi de Dieu, pour discerner ce qui était net et ce qui ne l’était pas. Un étranger ne voyait là aucune différence. Il en doit toujours être ainsi. Ce ne sont que les enfants de la Sagesse qui peuvent la justifier et approuver ses célestes voies.

Avant de quitter le chapitre onzième du Lévitique, nous pouvons, avec profit pour nos âmes, le comparer avec le chapitre dixième des Actes, vers. 11-16. Comme il dut paraître étrange à Pierre, élevé, dès son enfance, dans les principes du rituel mosaïque, de voir un vase, descendant du ciel, «dans lequel il y avait tous les quadrupèdes et les reptiles de la terre, et les oiseaux du ciel»; et, non seulement de voir ce vase ainsi rempli, mais encore d’entendre une voix, disant: «Lève-toi, Pierre, tue et mange». Merveilleuse chose! Quoi! nul examen des ongles et des instincts! Il n’y en avait pas besoin: le vase et son contenu étaient descendus du ciel. C’était assez. Le Juif pouvait se retrancher derrière les étroites barrières des ordonnances judaïques, et s’écrier: «Non point, Seigneur; car jamais je n’ai rien mangé qui soit impur ou immonde»; mais le flot de la grâce divine s’élevait majestueusement par-dessus ces barrières, afin d’embrasser, dans son vaste contour, toutes sortes d’objets, et de les élever au ciel, dans la puissance et sur l’autorité de ces précieuses paroles «Ce que Dieu a purifié, toi, ne le tiens pas pour impur». Peu importait ce qui était dans le vase, si Dieu l’avait purifié. L’Auteur du livre du Lévitique allait élever les pensées de son serviteur au-dessus des barrières que ce livre avait érigées, jusqu’à toute la magnificence de la grâce céleste. Il voulait lui enseigner que la vraie pureté, — celle que le ciel demandait, ne devait plus consister dans l’acte de ruminer, dans le fait d’avoir l’ongle divisé, ou en telle ou telle autre marque cérémonielle; mais à être lavé dans le sang de l’Agneau, qui purifie de tout péché, et rend le croyant assez net pour fouler le pavé de saphir des célestes parvis.

C’était là une noble leçon à donner à un Juif. C’était une leçon divine, à la lumière de laquelle les ombres de l’ancienne économie devaient s’évanouir. La main de la grâce souveraine a ouvert la porte du royaume, mais non pour y admettre quoi que ce soit d’impur. Rien d’impur ne peut entrer au ciel; or le critère de la pureté ne devait plus être un ongle fendu, mais uniquement ceci: «Ce que Dieu a purifié». Quand Dieu purifie un homme, il doit certes être net. Pierre allait être envoyé pour ouvrir le royaume aux gentils comme il l’avait déjà ouvert aux Juifs, et son cœur juif avait besoin d’être élargi. Il avait besoin de s’élever, au-dessus des ombres d’un temps qui n’était plus, dans la lumière éclatante qui rayonnait d’un ciel ouvert, en vertu d’un sacrifice accompli et parfait. Il avait besoin de sortir du courant étroit des préjugés juifs et d’être porté sur le sein de cet océan de grâce, qui allait se répandre sur tout un monde perdu. Il avait aussi à apprendre que la mesure, qui devait déterminer la vraie pureté, n’était plus charnelle, cérémonielle et terrestre, mais spirituelle, morale et céleste. Nous pouvons donc bien dire que c’étaient de grandes leçons que celles que reçut l’apôtre de la circoncision sur le toit de la maison de Simon le corroyeur. Elles étaient évidemment propres à adoucir, à dilater, à élever un esprit qui avait été formé au milieu des influences rétrécissantes du système juif. Nous bénissons le Seigneur pour ces précieuses leçons. Nous le bénissons pour la belle et riche position, où il nous a placés par le sang de la croix. Nous le bénissons de ce que nous ne sommes plus entravés par des «ne prends pas, ne goûte pas, ne touche pas»; mais de ce que sa Parole nous déclare que «toute créature de Dieu est bonne et il n’y en a aucune qui soit à rejeter, étant prise avec action de grâces, car elle est sanctifiée par la parole de Dieu et par la prière» (1 Tim. 4:4, 5).