Lévitique

Chapitre 3

Plus nous examinons attentivement les offrandes, plus nous nous convainquons qu’aucune d’elles ne présente, à elle seule, un type complet de Christ. Ce n’est qu’en les rassemblant toutes que l’on peut s’en former une idée quelque peu juste. Chaque offrande, comme on pouvait s’y attendre, a des traits qui lui sont particuliers. Le sacrifice de prospérités diffère, à plusieurs égards de l’holocauste; et une compréhension claire et nette des points par lesquels un type diffère des autres aidera beaucoup à en bien saisir la signification spéciale.

Ainsi, en comparant le sacrifice de prospérités avec l’holocauste, nous voyons que le triple acte d’«écorcher» la victime, de «la couper en morceaux» et d’en laver «l’intérieur et les jambes» est entièrement omis dans celui-là, et cela se comprend. Dans l’holocauste, comme nous l’avons vu, nous trouvons Christ s’offrant Lui-même à Dieu et en étant accepté; par conséquent, le type devait figurer le Christ se donnant entièrement à Dieu, de même que Christ se soumettant à être sondé jusqu’au fond de l’âme par le feu de la justice divine. Dans le sacrifice de prospérités, la pensée principale est la communion de l’adorateur. Ce n’est pas Christ, objet exclusif de jouissance pour Dieu, mais Christ devenant objet de jouissance pour l’adorateur, en communion avec Dieu. C’est pour cela que toute l’action est ici moins intense. Aucune âme, quelque grand que soit son amour, ne pourrait s’élever à la hauteur du dévouement complet de Christ à Dieu, ou de l’acceptation de Christ par Dieu. Dieu seul pouvait compter les pulsations du cœur qui battait dans le sein de Jésus, et c’est pourquoi il fallait un type qui représentât ce trait de la mort de Christ, c’est-à-dire son entier et volontaire abandon à Dieu. Ce type, nous le possédons dans l’holocauste, seul sacrifice dans lequel nous voyons la triple action mentionnée plus haut.

Il en est de même quant au caractère du sacrifice. Dans l’holocauste ce devait être «un mâle sans défaut», tandis que, dans le sacrifice de prospérités, ce pouvait être «un mâle ou une femelle», quoique également «sans défaut». La nature de Christ doit toujours être la même, que ce soit Dieu seul, ou l’adorateur en communion avec Dieu, qui en jouisse. Cette nature ne saurait changer. La seule raison pour laquelle on pouvait prendre «une femelle» pour le sacrifice de prospérités, était qu’ici il s’agissait de représenter la capacité de l’adorateur à jouir de cet Être béni qui, en Lui-même, est «le même, hier, et aujourd’hui, et éternellement» (Héb. 13).

De plus, dans l’holocauste, nous lisons: «Le sacrificateur fera fumer le tout», tandis que, dans le sacrifice de prospérités, une partie seulement était brûlée, savoir «la graisse, les rognons et le réseau qui est sur le foie». Voilà qui rend la chose extrêmement simple. La meilleure partie du sacrifice était mise sur l’autel de l’Éternel. L’intérieur — les forces cachées — les tendres sympathies de Jésus, n’étaient que pour Dieu qui seul pouvait parfaitement en jouir. Aaron et ses fils mangeaient «la poitrine tournoyée, et l’épaule élevée (ou prélevée)»1. (Examinez attentivement Lév. 7:28-36). Tous les membres de la famille sacerdotale, en communion avec leur chef, avaient chacun leur portion du sacrifice de prospérités. Et maintenant tous les vrais croyants, constitués, par grâce, sacrificateurs à Dieu, peuvent se nourrir des affections et de la force du véritable sacrifice de prospérités — ils peuvent jouir de l’heureuse assurance qu’ils ont son cœur aimant et sa puissante épaule pour les consoler et les soutenir continuellement2. «C’est là [le droit de l’onction] d’Aaron et [de] l’onction de ses fils, dans les sacrifices de l’Éternel faits par feu, du jour qu’on les aura fait approcher pour exercer la sacrificature devant l’Éternel, ce que l’Éternel a commandé de leur donner de la part des fils d’Israël, du jour qu’il les aura oints, [c’est] un statut perpétuel en leurs générations» (Chap. 7:35, 36).

1 La «poitrine» et l’«épaule» sont les emblèmes de l’amour et de la puissance — de la force et de l’affection.

2 Il y a beaucoup de force et de beauté dans le verset 31: «La poitrine sera pour Aaron et pour ses fils». Tous les vrais croyants ont le privilège de pouvoir se nourrir des affections de Christ — de l’amour immuable de ce cœur qui bat pour eux d’un amour inaltérable et éternel.

Tous ces points constituent une différence importante entre l’holocauste et le sacrifice de prospérités. Mais si on les réunit, ils présentent les deux offrandes avec une grande clarté devant les yeux de l’esprit. Il y a, dans le sacrifice de prospérités, quelque chose de plus que la soumission parfaite de Christ à la volonté de Dieu. L’adorateur est introduit; et cela non seulement pour regarder, mais pour manger. C’est ce qui donne un caractère très marqué à cette offrande. Lorsque je considère le Seigneur Jésus dans l’holocauste, je vois en Lui un Être dont le cœur n’avait en vue que la gloire de Dieu et l’accomplissement de sa volonté. Mais si je le considère dans le sacrifice de prospérités, je trouve un ami, qui a une place, dans son cœur aimant et sur sa puissante épaule, pour un pécheur indigne et misérable. Dans l’holocauste, la poitrine et l’épaule, les jambes et le ventre, la tête et la graisse, tout était brûlé sur l’autel — tout s’élevait en bonne odeur à l’Éternel. Mais dans le sacrifice de prospérités, la portion même qui me convient le mieux m’est laissée. Et ce n’est pas dans la solitude que je dois me nourrir de ce qui répond à mes besoins individuels. Nullement. Je le mange en communion — en communion avec Dieu et en communion avec mes co-sacrificateurs. Je mange, dans la pleine et heureuse connaissance que le même sacrifice, qui nourrit mon âme, a déjà rafraîchi le cœur de Dieu, et que la même portion qui me nourrit, nourrit aussi tous ceux qui adorent comme moi. La communion est représentée ici — la communion avec Dieu — la communion des saints. Il n’y avait pas d’isolement dans le sacrifice de prospérités. Dieu avait sa portion, et la famille sacerdotale avait la sienne.

Il en est encore ainsi quant à l’Antitype du sacrifice de prospérités. Le même Jésus, qui est l’objet des délices du ciel, est une source de joie, de force et de consolation pour tout cœur croyant; et non seulement pour chaque cœur en particulier, mais aussi pour toute l’Église de Dieu en communion. Dieu, dans sa grâce ineffable, a donné à son peuple le même objet qu’Il a lui-même. «Or notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ» (1 Jean 1). Il est vrai que nos pensées sur Jésus ne peuvent jamais s’élever à la hauteur des pensées de Dieu. Notre estimation de sa personne devra toujours rester beaucoup en dessous de la sienne et c’est pourquoi, dans le type, la famille d’Aaron ne pouvait pas manger la graisse. Mais quoique nous ne puissions jamais nous élever à la mesure de la divine appréciation de la Personne et du sacrifice de Christ, nous nous occupons néanmoins du même objet que Dieu et, par conséquent, les fils d’Aaron avaient «la poitrine tournoyée et l’épaule élevée». Tout cela est bien propre à consoler et à réjouir le cœur. Le Seigneur Jésus Christ — Celui «qui a été mort, mais qui est vivant aux siècles des siècles», est maintenant le seul objet devant les yeux et les pensées de Dieu; et, dans sa parfaite grâce, Il nous a donné une part à ce même Sauveur glorieux. Christ est notre objet aussi — l’objet de nos cœurs et le sujet de notre chant. «Ayant fait la paix par le sang de sa croix», il est monté au ciel et a envoyé le Saint Esprit, cet «autre consolateur», par le puissant ministère duquel nous pouvons nous nourrir de la «poitrine et de l’épaule» de notre divin «Sacrifice de prospérités»: Il est, en effet, notre paix, et c’est notre joie de savoir que tel est le bon plaisir que Dieu prend à ce qui fonde notre paix, que la bonne odeur de notre sacrifice de paix réjouit son cœur. C’est ce qui donne à ce type un charme tout particulier. Christ, en tant qu’holocauste, commande l’admiration du cœur; Christ, en tant que sacrifice de prospérités, établit la paix de la conscience et répond aux grands et nombreux besoins de l’âme. Les fils d’Aaron pouvaient se tenir autour de l’autel des holocaustes; ils pouvaient voir la flamme de l’offrande monter vers le Dieu d’Israël; ils pouvaient voir le sacrifice réduit en cendres; à cette vue ils pouvaient incliner leurs têtes et adorer, mais ils n’en emportaient rien pour eux-mêmes. Il n’en était pas ainsi dans le sacrifice de prospérités. Là, ils voyaient une offrande qui était non seulement de bonne odeur à Dieu, mais qui leur procurait encore une portion substantielle, de laquelle ils pouvaient se nourrir dans une heureuse et sainte communion.

Et assurément, c’est une bien vive jouissance pour tout vrai sacrificateur de savoir (pour nous servir du langage de notre type) qu’avant qu’il reçoive la poitrine et l’épaule, Dieu a eu sa portion. Cette pensée donne du ton et de l’énergie, de l’onction et de l’élévation au culte et à la communion. Elle nous dévoile la grâce étonnante de Dieu qui nous a donné le même objet, le même sujet de bonheur, la même joie, qu’il a lui-même. Rien autre, — rien de moins que cela ne pouvait le satisfaire. Le Père veut que le fils prodigue mange le veau gras, en communion avec lui-même. Il ne veut pas qu’il prenne une place ailleurs qu’à sa propre table, ni qu’il ait une portion différente que celle dont il se nourrit lui-même. Le sacrifice de prospérités est la traduction de ces paroles: «Il fallait faire bonne chère et se réjouir». — Telle est la précieuse grâce de Dieu! Sans doute, nous avons lieu d’être joyeux de ce que nous participons à une telle grâce; mais quand nous pouvons entendre Dieu disant: «Mangeons et faisons bonne chère», nos cœurs devraient déborder de louanges et d’actions de grâces. La joie de Dieu dans le salut des pécheurs et sa joie dans la communion des saints sont bien propres à exciter l’admiration des hommes et des anges pendant toute l’éternité.

Ayant ainsi comparé le sacrifice de prospérités avec l’holocauste, considérons-le maintenant dans ses rapports avec l’offrande de gâteau. Ici, la principale différence consiste en ce que, dans le sacrifice de prospérités, il y avait effusion de sang, et qu’il n’y en avait point dans l’offrande de gâteau. Cependant toutes deux étaient des offrandes en bonne odeur et étroitement liées entre elles, ainsi que nous le voyons au verset 12 du chapitre 7. Ces rapports et ces contrastes sont, à la fois, fort instructifs et importants.

Ce n’est que dans la communion avec Dieu que l’âme peut se réjouir en contemplant l’humanité parfaite du Seigneur Jésus Christ. Il faut que le Saint Esprit communique, comme aussi il faut qu’il dirige, par la Parole, notre capacité de regarder «l’homme Christ Jésus». Il aurait pu être révélé «en ressemblance de chair de péché»; il aurait pu vivre et travailler sur cette terre; il aurait pu briller, au milieu des ténèbres de ce monde, de tout l’éclat céleste qui appartenait à sa Personne; il aurait pu passer rapidement comme un brillant météore sur l’horizon de ce monde, et avec tout cela, être au-delà de la portée et de la vue du pécheur.

L’homme ne pouvait pas goûter la joie profonde que donne la communion avec tout cela, simplement parce qu’il n’y avait pas de base sur laquelle cette communion pût reposer. Dans le sacrifice de prospérités, cette base si nécessaire est pleinement et clairement établie. «Il posera sa main sur la tête de son offrande, et il l’égorgera à l’entrée de la tente d’assignation; et les fils d’Aaron, les sacrificateurs, feront aspersion du sang sur l’autel, tout autour» (Chap. 3:2). Nous trouvons ici ce que l’offrande de gâteau ne fournit pas, savoir un fondement solide pour la communion de l’adorateur avec toute la plénitude, la valeur et la beauté de Christ, en tant que cet adorateur est rendu capable, par l’énergie du Saint Esprit, d’entrer dans cette communion. Nous tenant sur le terrain élevé que procure «le précieux sang de Christ», nous pouvons parcourir, avec des cœurs tranquillisés et un esprit d’adoration, les scènes merveilleuses qui se rattachent à l’humanité du Seigneur Jésus Christ. Si nous n’avions que l’aspect de Christ, tel que nous le présente l’offrande du gâteau, il nous manquerait le droit en vertu duquel, et le fondement sur lequel nous pouvons l’y contempler et en jouir. S’il n’y avait pas d’effusion de sang, il n’y aurait ni titre, ni fondement pour le pécheur. Mais Lév. 7:12 lie l’offrande de gâteau au sacrifice de prospérités, et, par là, nous enseigne que, quand nos âmes ont trouvé la prospérité, nous pouvons faire nos délices de Celui qui a «fait la paix» et qui est «notre paix».

Mais que l’on comprenne bien que, tout en ayant, dans le sacrifice de prospérités, l’effusion et l’aspersion du sang, cependant l’acte de porter le péché n’est point ce qu’il exprime. Quand nous considérons Christ dans le sacrifice de prospérités, il ne nous apparaît pas comme celui qui porte nos péchés, comme c’est le cas dans les sacrifices pour le péché et pour le délit; mais (les ayants portés) il nous apparaît comme le fondement de notre heureuse et paisible communion avec Dieu. S’il était question de porter le péché, il ne serait pas dit: «C’est un sacrifice par feu, une odeur agréable à l’Éternel» (Chap. 3:5, comparé avec chap. 4:10-12). Toutefois, quoique le péché porté ne soit point ici la pensée, il y a cependant ample provision pour celui qui se reconnaît pécheur, sans cela il ne pourrait pas en avoir une part quelconque. Pour avoir communion avec Dieu, il faut que nous soyons «dans la lumière»; et comment pouvons-nous y être? Seulement en vertu de cette précieuse vérité: «Le sang de Jésus Christ, son Fils, nous purifie de tout péché» (1 Jean 1). Plus nous demeurerons dans la lumière, mieux nous reconnaîtrons et sentirons tout ce qui est contraire à cette lumière, et mieux aussi nous apprécierons la valeur de ce sang qui nous qualifie pour y être. Plus nous marcherons près de Dieu, plus nous connaîtrons «les richesses insondables de Christ».

Il est des plus nécessaire d’être bien établi dans cette vérité, que nous ne sommes dans la présence de Dieu que comme participants de la vie et de la justice divines. Le Père ne pouvait recevoir le fils prodigue à sa table que revêtu de «la plus belle robe» et dans toute l’intégrité de la relation de fils, dans laquelle il le voyait. Si l’enfant prodigue eût gardé ses haillons ou s’il eût été placé dans la maison comme un «mercenaire», nous n’eussions jamais entendu ces douces paroles: «Mangeons et faisons bonne chère; car mon fils, que voici, était mort, et il est revenu à la vie; il était perdu, et il est retrouvé». Il en est de même de tous les vrais croyants. Leur vieille nature n’est pas reconnue comme existant encore devant Dieu. Il la considère comme étant morte, et eux devraient en faire autant. Elle est morte pour Dieu — morte pour la foi. Il faut la tenir comme telle, là où l’on met les morts. Ce n’est pas en améliorant notre vieille nature que nous parvenons en la présence divine, c’est en tant que possesseurs d’une nouvelle nature. Ce ne fut pas en raccommodant les haillons de sa première condition que le fils prodigue obtint une place à la table de son père, mais en étant revêtu d’une robe qu’il n’avait jamais vue et à laquelle il n’avait jamais pensé auparavant. Il n’apporta pas cette robe du «pays éloigné»; il ne se la procura pas non plus chemin faisant, mais le père l’avait pour lui, dans sa maison. Le fils prodigue ne se la fit pas, ni n’aida à la faire, mais le père la lui fournit et se réjouit de la lui voir. C’est ainsi qu’ils se mirent ensemble à table pour manger «le veau gras» dans une heureuse communion.

J’en viens maintenant à «la loi du sacrifice de prospérités», dans laquelle nous trouverons quelques nouveaux éléments d’un grand intérêt. Je la citerai en entier: «Et c’est ici la loi du sacrifice de prospérités qu’on présentera à l’Éternel: Si quelqu’un le présente comme action de grâces, il présentera avec le sacrifice d’action de grâces, des gâteaux sans levain pétris à l’huile, et des galettes sans levain ointes d’huile, et de la fleur de farine mêlée avec de l’huile, en gâteaux pétris à l’huile. Il présentera pour son offrande, avec les gâteaux, du pain levé avec son sacrifice d’action de grâces de prospérités; et de l’offrande entière, il en présentera un en offrande élevée à l’Éternel: il sera pour le sacrificateur qui aura fait aspersion du sang de sacrifice de prospérités; il lui appartient. Et la chair de son sacrifice d’action de grâces de prospérités sera mangée le jour où elle sera présentée, on n’en laissera rien jusqu’au matin. Et si le sacrifice de son offrande est un vœu ou [une offrande] volontaire, son sacrifice sera mangé le jour où il l’aura présenté; et ce qui en restera sera mangé le lendemain et ce qui restera de la chair du sacrifice sera brûlé au feu le troisième jour. Et si quelqu’un mange de la chair de son sacrifice de prospérités le troisième jour, [le sacrifice] ne sera pas agréé; il ne sera pas imputé à celui qui l’aura présenté: ce sera une chose impure; et l’âme qui en mangera portera son iniquité. Et la chair qui aura touché quelque chose d’impur ne sera point mangée: elle sera brûlée au feu. Quant à la chair, quiconque est pur mangera la chair. Et l’âme qui, ayant sur soi son impureté, mangera de la chair du sacrifice de prospérités qui appartient à l’Éternel, cette âme-là sera retranchée de ses peuples. Et si une âme touche quoi que ce soit d’impur, impureté d’homme, ou bête impure, ou toute [autre] chose abominable et impure, et qu’elle mange de la chair du sacrifice de prospérités qui appartient à l’Éternel, cette âme-là sera retranchée de ses peuples» (Lév. 7:11-21).

Il est de la plus grande importance d’établir une distinction entre le péché dans la chair, et le péché sur la conscience. Si nous confondons ces deux choses, nos âmes en seront nécessairement ébranlées et notre culte affaibli. Un examen attentif de 1 Jean 1:8-10 jettera beaucoup de lumière sur ce sujet, qu’il est si essentiel de bien comprendre pour apprécier à sa juste valeur la doctrine tout entière du sacrifice de prospérité et tout spécialement le sujet particulier auquel nous sommes arrivés. Personne n’aura conscience du péché demeurant en lui, autant que l’homme qui marche dans la lumière. «Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous». Au verset précédent, nous lisons: «Le sang de Jésus Christ son Fils nous purifie de tout péché». Ici, la distinction entre le péché en nous et le péché sur nous est bien marquée et établie. Prétendre qu’il y a encore du péché sur le croyant, en la présence de Dieu, c’est douter de l’efficacité du sang de Jésus et nier la vérité de la parole divine. Si le sang de Jésus Christ peut purifier parfaitement, alors la conscience du croyant est parfaitement purifiée. C’est ainsi que la parole de Dieu présente la question, et nous devons toujours nous souvenir que c’est de Dieu lui-même que nous avons à apprendre quelle est, à ses yeux, la vraie condition du croyant. Nous sommes plus disposés à dire à Dieu ce que nous sommes en nous-mêmes qu’à le laisser nous dire ce que nous sommes en Christ. En d’autres termes, nous sommes plus préoccupés, de nos sentiments sur nous-mêmes que de la révélation que Dieu nous fait de lui-même. Dieu nous parle en vertu de ce qu’Il est en lui-même et de ce qu’Il a accompli en Christ. Telle est la nature de cette révélation que la foi saisit, et qui remplit l’âme d’une parfaite paix. La révélation de Dieu est une chose, mes sentiments sur moi-même sont une tout autre chose.

Mais la même parole qui nous dit que nous n’avons pas le péché sur nous, nous dit, avec tout autant de force et de clarté, que nous avons le péché en nous. «Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous». Tout homme qui a «la vérité» en lui, saura qu’il a aussi «le péché» en lui: car la vérité révèle chaque chose telle qu’elle est. Que devons-nous donc faire? Dans la puissance de la nouvelle nature, nous avons le privilège de pouvoir marcher de telle sorte que «le péché» qui habite en nous ne se manifeste pas sous la forme de «péchés». La position du chrétien est une position de victoire et de liberté. Il est délivré non seulement de la coulpe du péché, mais encore du péché en tant que principe dominant de sa vie. «Sachant ceci, que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché soit annulé, pour que nous ne servions plus le péché. Car celui qui est mort est justifié du péché… Que le péché donc ne règne point dans votre corps mortel pour que vous obéissiez aux convoitises de celui-ci… Car le péché ne dominera pas sur vous, parce que vous n’êtes pas sous [la] loi, mais sous [la] grâce» (Rom. 6:614). Le péché est là dans toute sa laideur native, mais le croyant est «mort au péché». Comment? Il est mort en Christ. Par nature il était mort dans le péché. Par grâce il est mort au péché. Quels droits peut-on avoir sur un homme mort? Aucun. «Christ est mort une fois pour toutes au péché» et le croyant est mort en lui. «Or si nous sommes morts avec Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui, sachant que Christ, ayant été ressuscité d’entre les morts, ne meurt plus; la mort ne domine plus sur lui. Car en ce qu’il est mort, il est mort une fois pour toutes au péché; mais en ce qu’il vit, il vit à Dieu». Que résulte-t-il de cela pour les croyants? «De même vous aussi, tenez-vous vous-mêmes pour morts au péché, mais pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus». Telle est, devant Dieu, la position inaltérable du croyant! de sorte qu’il a le saint privilège de jouir de la délivrance du péché, en tant que dominateur sur lui, quoique le péché habite encore en lui.

Mais, alors, «si quelqu’un a péché», qu’y a-t-il à faire? À cette question, l’apôtre inspiré donne une réponse des plus claires et des plus bénies: «Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité» (1 Jean 1:9). C’est par la confession que la conscience doit être délivrée. L’apôtre ne dit pas: «Si nous demandons pardon, Dieu est assez bon et miséricordieux pour nous pardonner». Sans doute qu’il y a une grande douceur pour un enfant de confier le sentiment de ses besoins à son père, de lui dire sa faiblesse, de lui avouer ses folies, ses manquements et ses fautes. Tout cela est parfaitement vrai, et il est encore également vrai que notre Père est assez tendre et miséricordieux pour répondre à toute la faiblesse et à l’ignorance de ses enfants; mais, quoique tout cela soit vrai, le Saint Esprit déclare, par la bouche de l’apôtre, que «si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner». La confession est donc ce que Dieu demande. Un chrétien, qui aurait péché en pensée, parole ou action, pourrait prier pendant des jours et des mois pour demander le pardon, et cependant ne pas avoir l’assurance, fondée sur 1 Jean 1:9, qu’il est pardonné; tandis que, dès l’instant qu’il confesse sincèrement son péché devant Dieu, ce n’est plus qu’une affaire de foi de savoir qu’il est parfaitement pardonné et parfaitement purifié.

Il y a une immense différence morale entre prier pour demander le pardon et confesser nos péchés, que nous considérions la chose en rapport avec le caractère de Dieu, avec le sacrifice de Christ ou avec l’état de l’âme. Il est fort possible que la prière d’un chrétien puisse contenir, au fond, sinon dans la forme, la confession de son péché, quel qu’il soit, et alors cela revient au même. Cependant, il vaut toujours mieux nous en tenir strictement à l’Écriture dans ce que nous pensons, disons et faisons. Il est évident que lorsque le Saint Esprit parle de confession, il n’entend pas par ce mot la prière. Et il est également évident qu’il sait bien qu’il y a des éléments spirituels dans la confession, et des résultats pratiques de la confession, qui n’appartiennent pas à la prière. De fait, il arrive souvent que l’habitude d’importuner Dieu pour obtenir le pardon des péchés témoigne de l’ignorance où l’on est quant à la manière dont Dieu s’est révélé en la Personne et en l’œuvre de Christ, quant à la relation dans laquelle le sacrifice de Christ a placé le croyant, et quant au divin moyen d’avoir la conscience soulagée du fardeau et purifiée de la souillure du péché.

Dieu a été parfaitement satisfait par la croix de Christ, relativement à tous les péchés du croyant. Sur cette croix, une entière expiation fut offerte pour tout iota et trait de lettre de péché dans la nature du croyant et sur sa conscience. Par conséquent Dieu n’a pas besoin d’une autre propitiation. Il ne lui faut rien de plus pour attirer son cœur vers celui qui croit. Nous n’avons pas à le supplier d’être «fidèle et juste», quand sa fidélité et sa justice ont été si glorieusement démontrées, manifestées et satisfaites dans la mort de Christ. Nos péchés ne peuvent jamais venir en présence de Dieu, puisque Christ qui les a tous portés et ôtés, y est à leur place. Mais, si nous péchons, notre conscience le sentira, elle devra le sentir; oui, le Saint Esprit nous le fera sentir. Il ne saurait laisser même une seule légère pensée passer dans nos cœurs sans être jugée. Quoi donc? Notre péché s’est-il frayé un chemin jusqu’en la présence de Dieu? A-t-il trouvé sa place dans la pure lumière du lieu très saint? À Dieu ne plaise! Notre «Avocat» est là — «Jésus Christ le juste», pour maintenir, dans toute leur intégrité, les relations dans lesquelles nous sommes. Mais, quoique le péché ne puisse pas affecter les pensées de Dieu par rapport à nous, il affecte nos pensées par rapport à Dieu1. Quoiqu’il ne puisse pas arriver jusqu’en sa présence, il peut arriver jusqu’à nous de la manière la plus triste et la plus humiliante. Quoiqu’il ne puisse pas cacher l’Avocat aux yeux de Dieu, il peut le cacher aux nôtres. Il s’amasse, comme un sombre et épais nuage, à notre horizon spirituel, en sorte que nos âmes ne peuvent se réjouir à la clarté bénie de la face de notre Père. Il ne peut altérer nos relations avec Dieu, mais il peut très sérieusement altérer la jouissance que nous en avons. Qu’est-ce que nous avons donc à faire? La Parole répond: «Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité». Par la confession notre conscience est déchargée, le doux sentiment de notre relation rétabli; le sombre nuage, dissipé; l’influence glacée et desséchante, éloignée; nos pensées sur Dieu, rectifiées. Telle est la méthode divine, et nous pouvons dire, en toute vérité, que le cœur qui sait ce que c’est que de s’être placé dans la position de la confession, sentira d’autant mieux la divine puissance des paroles de l’apôtre: «Mes enfants, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez pas» (1 Jean 2:1). De plus, il y a une manière de prier pour demander le pardon, qui fait voir qu’on perd de vue le fondement parfait du pardon qui a été posé par le sacrifice de la croix. Si Dieu pardonne les péchés, il faut qu’il soit «fidèle et juste» en le faisant. Mais il est bien évident que nos prières, quelque sincères et ferventes qu’elles fussent, ne pourraient pas former la base de la fidélité et de la justice de Dieu en nous pardonnant nos péchés. Rien, sauf l’œuvre de la croix, ne saurait le faire. C’est là que la fidélité et la justice de Dieu ont été pleinement établies, et cela en rapport immédiat avec nos péchés positifs, aussi bien que relativement à la racine du péché dans notre nature. Dieu a déjà jugé nos péchés dans la personne de notre substitut, «sur le bois»; et, dans l’acte de la confession, nous nous jugeons nous-mêmes. Elle est essentielle pour jouir du sentiment du pardon divin et de la restauration. Le plus petit péché, demeurant non confessé et non jugé sur la conscience, interrompra complètement notre communion avec Dieu. Le péché en nous n’a pas nécessairement cet effet; mais si nous permettons au péché de rester sur nous, nous ne pouvons avoir communion avec Dieu. Il a ôté nos péchés de telle manière qu’il peut nous avoir en sa présence; et aussi longtemps que nous demeurons en sa présence, le péché ne nous trouble pas. Mais si nous nous éloignons de lui et que nous péchions, même en pensée, notre communion est nécessairement suspendue, jusqu’à ce que, par la confession, nous nous soyons débarrassés de notre péché. Tout cela, j’ai à peine besoin de le dire, est entièrement fondé sur le sacrifice parfait et la juste intercession du Seigneur Jésus Christ.

1 Le lecteur se rappellera que le sujet traité ici laisse entièrement intacte l’importante et pratique vérité, enseignée en Jean 14:21-23, savoir l’amour particulier du Père pour un enfant obéissant, et la communion toute spéciale d’un tel enfant avec le Père et le Fils. Puisse cette vérité être gravée dans tous nos cœurs par le Saint Esprit.

Enfin, quant à la différence qui existe entre la prière et la confession, relativement à l’état du cœur devant Dieu, et au sentiment qu’il a de l’odieux du péché, cette différence ne saurait être trop appréciée. Il est beaucoup plus facile de demander, d’une manière générale, le pardon de nos péchés, que de confesser ces péchés. La confession implique le jugement de soi-même; demander pardon ne le fait pas toujours. Cela seul suffirait pour montrer la différence. Le jugement de soi-même est un des exercices les plus précieux et les plus salutaires de la vie chrétienne, et par conséquent tout ce qui tend à l’amener doit être hautement estimé par tout chrétien sérieux.

La différence qu’il y a entre demander pardon et confesser son péché se manifeste sans cesse dans nos rapports avec les enfants. Si un enfant a fait quelque mal, il aura beaucoup moins de peine à demander à son père de lui pardonner, qu’à confesser son tort franchement et sans réserve. En demandant pardon, l’enfant peut avoir à l’esprit bien des choses qui tendent à diminuer le sentiment de sa faute; il pense peut-être, en secret, qu’après tout il n’est pas tellement à blâmer, quoique pourtant il soit convenable qu’il demande à son père de lui pardonner; tandis qu’en confessant sa faute, il n’y a qu’une chose, savoir le jugement de soi-même. En outre, en demandant pardon, l’enfant peut être surtout influencé par le désir d’échapper aux conséquences du mal qu’il a fait, tandis que des parents judicieux chercheront à produire une juste appréciation de ce mal, laquelle ne peut exister que liée à la pleine confession de la faute — liée à l’examen de soi-même.

Il en est de même, quant aux dispensations de Dieu à l’égard de ses enfants, lorsqu’ils tombent en faute: il veut que tout péché soit mis devant lui et complètement jugé. Il veut que, non seulement nous craignions les conséquences du péché — qui sont immenses — mais que nous haïssions le péché lui-même, parce qu’il est odieux à ses yeux. Si, quand nous commettons le péché, nous pouvions être pardonnés, simplement en demandant pardon, notre sentiment et notre aversion du péché ne seraient pas, à beaucoup près, aussi intenses, et, en retour, notre appréciation de la communion dont nous jouissons ne serait pas aussi haute. L’effet moral de tout cela sur l’état général de notre constitution spirituelle, de même que sur toute notre conduite et notre marche pratique, doit être évident pour tout chrétien expérimenté1.

1 Le cas de Simon le Magicien, Actes 8, peut présenter quelque difficulté au lecteur. Mais il est clair qu’un homme qui était «dans un fiel d’amertume et dans un lien d’iniquité» ne pouvait être offert comme modèle aux enfants de Dieu. Son cas n’a rien à faire avec la doctrine de 1 Jean 1:9. Il n’était pas dans les rapports d’enfant et, par conséquent, il n’était pas un des objets de l’intercession de Christ. J’ajouterai encore que le sujet de la prière du Seigneur n’est nullement impliqué dans ce qui est dit plus haut. Je désire rester dans les limites au passage qui nous occupe. Nous devons éviter de poser des règles de fer. Une âme peut crier à Dieu en tout temps pour demander ce dont elle a besoin. Il est toujours prêt à entendre et à exaucer.

Tout cet enchaînement de pensées est intimement lié et pleinement justifié par les deux grands principes, posés dans «la loi pour le sacrifice de prospérités».

Au verset 13 du chapitre 7 du Lévitique, nous lisons «Il présentera… du pain levé avec son sacrifice» et cependant, au verset 20, il est dit: «Et l’âme qui, ayant sur soi son impureté, mangera de la chair du sacrifice de prospérités qui, appartient à l’Éternel, cette âme-là sera retranchée de ses peuples». Nous avons ici bien clairement les deux choses, savoir, le péché en nous, et le péché sur nous. «Le levain» était permis, parce qu’il y avait du péché dans la nature de l’adorateur. «L’impureté», était interdite, parce qu’il ne devait y avoir aucun péché sur la conscience de l’adorateur. S’il est question de péché, il ne peut plus être question de communion. Dieu a pourvu par le sang de l’expiation à ce qui regarde le péché, qu’il sait être en nous; et c’est pourquoi il est dit du pain levé du sacrifice de prospérités: «et de l’offrande entière, il en présentera un en offrande élevée à l’Éternel: il sera pour le sacrificateur qui aura fait aspersion du sang du sacrifice de prospérités» (vers. 14). En d’autres termes, «le levain», dans la nature de l’adorateur, était parfaitement contrebalancé par «le sang» du sacrifice. Le sacrificateur, à qui appartient le pain levé, doit être celui qui répand le sang. Dieu a mis nos péchés loin de ses yeux pour toujours. Quoique le péché soit en nous, ce n’est pas sur lui que ses yeux reposent. Il ne voit que le sang, et c’est pourquoi il peut continuer avec nous et nous permettre la plus intime communion avec lui. Mais si nous laissons le péché, qui est en nous, se développer sous la forme de «péchés», alors il faut qu’il y ait confession, pardon et purification, avant que nous puissions manger de nouveau de la chair du sacrifice de prospérités. Le retranchement de l’adorateur, à cause de souillures cérémonielles, répond maintenant à l’exclusion du croyant de la communion, à cause de péchés non confessés. Chercher à avoir communion avec Dieu dans nos péchés impliquerait l’idée blasphématoire, qu’il peut marcher en compagnie avec le péché. «Si nous disons que nous avons communion avec lui, et que nous marchions dans les ténèbres, nous mentons et nous ne pratiquons pas la vérité» (1 Jean 1:6).

À la lumière de cette vérité, nous comprendrons aisément dans quelle erreur nous sommes, quand nous nous imaginons que c’est une marque de spiritualité d’être occupés de nos péchés. Le péché ou les péchés pourraient-ils jamais être le fondement ou le sujet de notre communion avec Dieu? Assurément non. Nous venons de voir, au contraire, qu’aussi longtemps que le péché est devant nous, la communion ne peut exister que «dans la lumière», et, certes, il n’y a pas de péché dans la lumière. Là, rien ne se voit, sauf le sang qui a ôté nos péchés et nous a rapprochés, et l’Avocat qui nous garde près de Dieu. Le péché a été effacé pour toujours du lieu élevé où Dieu et l’adorateur se tiennent dans une sainte intimité. Qu’est-ce qui formait le fond de la communion entre le père et l’enfant prodigue? Étaient-ce les haillons de ce dernier? Étaient-ce les gousses du «pays éloigné»? Nullement. Ce n’était rien de ce que le fils prodigue apportait avec lui. C’était la riche provision de l’amour du père — «le veau gras». Il en est de même à l’égard de Dieu et de tout vrai adorateur. Ils se nourrissent ensemble, dans une communion sainte et élevée, de Celui dont le sang précieux les a associés pour toujours, dans cette lumière, de laquelle nul péché ne peut jamais approcher. Ne pensons pas non plus que la vraie humilité se montre ou se développe en considérant et approfondissant nos péchés. Cela produirait un caractère sombre et mélancolique, sans vraie sainteté; or la plus profonde humilité procède d’une tout autre source. Quand est-ce que le fils prodigue était le plus humble? Est-ce quand «il fut revenu à lui-même» dans le pays éloigné, ou quand le père se jeta à son cou, et qu’il entra dans la maison du père? N’est-il pas évident que la grâce, qui nous élève aux plus grandes hauteurs de la communion avec Dieu, est seule capable de nous amener aux plus grandes profondeurs d’une vraie humilité? Sans aucun doute. L’humilité qui découle du pardon de nos péchés, sera toujours plus profonde que celle qui découle de la découverte de ces péchés. La première nous met en rapport avec Dieu; la seconde a affaire avec le moi. Pour être vraiment humble, il faut marcher avec Dieu dans l’intelligence et la puissance de la relation où il nous a placés. Il nous a faits ses enfants; et pourvu que nous marchions comme tels, nous serons humbles.

Avant de quitter cette partie de notre sujet, je désire faire une remarque relativement à la cène du Seigneur, laquelle, étant un acte important de la communion de l’Église, peut aussi être considérée en connexion avec la doctrine du sacrifice de prospérités. La célébration intelligente de la cène dépendra toujours de la connaissance de son caractère purement eucharistique ou d’actions de grâces. C’est tout spécialement une fête d’actions de grâces — d’actions de grâces pour une rédemption accomplie. «La coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas la communion du sang du. Christ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas la communion du corps du Christ?» (1 Cor. 10:16). Aussi, une âme, courbée sous le lourd fardeau du péché, ne peut pas, avec une intelligence spirituelle, prendre la cène du Seigneur, puisque cette fête exprime l’éloignement complet du péché par la mort de Christ: «Vous annoncez la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne» (1 Cor. 11). La mort de Christ est, pour la foi, la fin de tout ce qui appartenait à notre état dans la vieille création; or, puisque la cène «annonce» cette mort, elle doit être considérée comme le monument de ce fait glorieux, que le fardeau du péché du croyant a été porté par Celui qui l’a ôté pour toujours. Elle déclare que la chaîne de nos péchés, qui une fois nous liait, a été éternellement rompue par la mort de Christ, et ne pourra plus jamais nous lier de nouveau. Nous nous réunissons autour de la table du Seigneur dans toute la joie de vainqueurs. Nous regardons en arrière à la croix, où la bataille fut livrée et gagnée; et nous regardons en avant à la gloire, où nous entrerons dans les résultats complets et éternels de la victoire.

Il est vrai que nous avons «du levain» en nous, mais nous n’avons aucune «souillure» sur nous. Nous ne devons pas fixer nos regards sur nos péchés, mais sur Celui qui les a portés à la croix et qui les a ôtés pour toujours. Nous ne devons pas «nous séduire nous-mêmes» par la vaine pensée que «nous n’avons pas de péché en nous»; mais nous ne devons pas non plus nier la vérité de la parole de Dieu et l’efficacité du sang de Christ, en refusant de nous réjouir de la précieuse vérité que nous n’avons pas de péché sur nous, car «le sang de Jésus Christ, son Fils, nous purifie de tout péché». Il est vraiment déplorable de voir quel sombre nuage recouvre la table du Seigneur, dans le jugement de tant de chrétiens de profession. Ce fait, ainsi que beaucoup d’autres, montre à quel degré d’ignorance on peut tomber relativement aux vérités les plus élémentaires de l’Évangile. Nous savons, en effet, que quand la cène est prise pour une raison quelconque, autre que celle de la connaissance du salut — de la jouissance du pardon — du sentiment de la délivrance, — l’âme s’enveloppe de nuages de plus en plus épais. Ce qui n’est qu’un mémorial de Christ est employé à le mettre de côté. Ce qui rappelle une rédemption accomplie est employé comme moyen d’y arriver. C’est ainsi que l’on abuse des ordonnances, et que les âmes sont plongées dans les ténèbres, la confusion et l’erreur.

Combien la belle ordonnance du sacrifice de prospérités est différente de cela! Cette dernière, considérée dans sa signification typique, nous montre que, dès le moment où le sang était répandu, Dieu et l’adorateur pouvaient se nourrir ensemble dans une heureuse et paisible communion. Rien de plus n’était nécessaire pour cela. La paix était établie par le sang, et c’est de cette base que la communion procédait. Un seul doute sur la réalité de la prospérité ou de la paix1 doit être le coup de mort de la communion. Si nous sommes occupés à de vains efforts pour faire la paix avec Dieu, nous sommes totalement étrangers soit à la communion, soit au culte. Si le sang du sacrifice de prospérités n’a pas été répandu, il est impossible que nous puissions nous nourrir de «la poitrine tournoyée» ou de «l’épaule élevée». Mais, d’un autre côté, si le sang a été répandu, alors la paix est déjà faite. Dieu lui-même l’a faite; pour la foi, c’est assez; et par conséquent, par la foi, nous avons communion avec Dieu, dans l’intelligence et la joie d’une rédemption accomplie. Nous goûtons la douceur de la joie même de Dieu en ce qu’il a opéré. Nous nous nourrissons de Christ dans toute la plénitude et toute la félicité de la présence de Dieu.

1 La version anglaise rend par «sacrifice de paix», ce que nos versions françaises appellent «sacrifice de prospérités». (Trad.).

Ce dernier point est lié à une autre vérité importante indiquée dans «la loi pour le sacrifice de prospérités», et il en dépend. «Et la chair de son sacrifice d’action de grâces de prospérités sera mangée le jour où elle sera présentée; on n’en laissera rien jusqu’au matin». C’est-à-dire que la communion de l’adorateur ne doit jamais être séparée du sacrifice sur lequel cette communion est fondée. Aussi longtemps qu’on a assez d’énergie spirituelle pour maintenir cette connexion, le culte et la communion demeurent aussi agréables et acceptables; mais pas plus longtemps. Nous devons nous tenir près du sacrifice, dans l’esprit de nos entendements, les affections de nos cœurs, et l’expérience de nos âmes. C’est ce qui donnera de la puissance et de la durée à notre culte. Il se peut que nous commencions quelque acte du culte avec des cœurs tout occupés de Christ, et avant de terminer, il se peut que nous soyons occupés de ce que nous faisons ou disons, ou des personnes qui nous écoutent; et de cette manière nous tombons dans ce qui peut être appelé «l’iniquité de nos saintes offrandes». C’est très solennel et cela devrait nous rendre très vigilants. Nous pouvons commencer notre culte dans l’Esprit et le terminer dans la chair. Nous devrions toujours prendre garde de continuer un seul instant au-delà de l’énergie de l’Esprit pour le moment actuel; car l’Esprit nous gardera toujours occupés directement de Christ. Si le Saint Esprit produit «cinq paroles» d’adoration ou d’actions de grâces, prononçons ces cinq paroles et taisons-nous. Si nous continuons, nous mangeons la chair de notre sacrifice au-delà du temps fixé, et au lieu d’être «accepté», c’est, en réalité, «une abomination». Souvenons-nous-en, et soyons sur nos gardes. Que cela, pourtant, ne nous alarme pas. Dieu veut que nous soyons conduits par l’Esprit, et ainsi remplis de Christ dans tout notre culte. Il ne peut accepter que ce qui est divin, c’est pourquoi il veut que nous ne lui présentions que ce qui est divin.

«Et si le sacrifice de son offrande est un vœu, ou une offrande volontaire, son sacrifice sera mangé le jour où il l’aura présenté; et ce qui en restera sera mangé le lendemain» (Chap. 7:16). Quand l’âme s’élève à Dieu dans un acte volontaire de culte, un tel culte provient d’une plus abondante mesure d’énergie spirituelle que lorsqu’il s’agit simplement de quelque grâce spéciale reçue au moment même. Si l’on a reçu quelque faveur signalée de la main du Seigneur, à l’instant l’âme s’élèvera en actions de grâces. Dans ce cas, le culte est suscité par cette grâce, et lié à cette grâce, quelle qu’elle puisse être, et il ne va pas plus loin. Mais quand le cœur est porté par le Saint Esprit à quelque expression volontaire ou délibérée de louanges, le culte aura un caractère plus durable; dans tous les cas, le culte spirituel se rattachera toujours au précieux sacrifice de Christ.

«Et ce qui restera de la chair du sacrifice sera brûlé au feu le troisième jour. Et si quelqu’un mange de la chair de son sacrifice de prospérités le troisième jour, [le sacrifice] ne sera pas agréé; il ne sera pas imputé à celui qui l’aura présenté: ce sera une chose impure; et l’âme qui en mangera portera son iniquité». Rien n’a de valeur aux yeux de Dieu que ce qui est intimement lié à Christ. Il peut y avoir beaucoup de ce qui a l’apparence du culte, et qui, après tout, n’est que l’excitation et l’expression de sentiments naturels. Il peut y avoir une grande dévotion apparente, qui n’est au fond qu’un piétisme charnel. La chair peut être excitée, religieusement parlant, par une variété de choses, telles que la pompe et l’éclat des cérémonies, par les chants et les attitudes, les robes et les riches vêtements, par une liturgie éloquente, et tous les divers attraits d’un splendide rituel; et avec tout cela il peut n’y avoir aucun culte spirituel. Il arrive aussi assez souvent que les mêmes goûts, qui sont excités et satisfaits par les formes pompeuses d’un culte soi-disant religieux, trouveraient un aliment plus convenable encore à l’opéra ou au concert.

Ceux qui désirent se souvenir que «Dieu est esprit, et qu’il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité» (Jean 4), doivent se tenir en garde contre tout cela: Ce qu’on appelle la religion se revêt, de nos jours, de ses charmes les plus puissants. Rejetant les grossièretés du moyen âge, elle appelle à son aide toutes les ressources d’un goût épuré, d’un siècle cultivé et éclairé. La sculpture, la musique et la peinture versent leurs riches trésors dans son sein, afin que, par leur moyen, elle puisse préparer un puissant narcotique pour bercer les multitudes ignorantes dans un assoupissement qui ne sera interrompu que par les inexprimables horreurs de la mort, du jugement et de l’étang de feu. Elle, aussi, peut dire: «J’ai chez moi des sacrifices de prospérités, j’ai aujourd’hui payé mes vœux… J’ai étendu sur mon lit des tapis, des couvertures de fil d’Égypte de couleurs variées; j’ai parfumé ma couche de myrrhe, d’aloès et de cinnamome» (Prov. 7). C’est ainsi qu’une religion corruptrice attire, par sa puissante influence, ceux qui ne veulent pas écouter la voix céleste de la Sagesse.

Lecteur, gardez-vous de toutes ces choses. Veillez à ce que votre culte soit inséparablement lié à l’œuvre de la croix. Veillez à ce que Dieu soit le fondement, Christ, le canal, et le Saint Esprit, la puissance de votre culte. Prenez garde que vos actes extérieurs de culte ne s’étendent pas au-delà de cette puissance intérieure. Il faut beaucoup de vigilance pour éviter ce mal. Ses menées secrètes sont des plus difficiles à découvrir et à combattre. Nous pouvons commencer un hymne dans le vrai esprit du culte et, par faiblesse spirituelle, avant d’en être à la fin, nous pouvons tomber dans le mal qui répond à l’acte cérémoniel de manger, le troisième jour, la chair du sacrifice de prospérités. Notre seule sauvegarde, c’est de nous tenir près de Jésus. Si nous élevons nos cœurs en «actions de grâces», pour quelque faveur spéciale, faisons-le dans la puissance du nom et du sacrifice de Christ. Si nos âmes s’épanchent en adoration «volontaire», que ce soit dans l’énergie du Saint Esprit. De cette manière, notre culte aura cette fraîcheur, ce parfum, cette profondeur et cette hauteur morale, qui doivent résulter du fait que l’on a le Père pour objet, le Fils pour base et le Saint Esprit pour puissance du culte.

Puisse-t-il en être ainsi, ô Seigneur! de tous ceux qui t’adorent, jusqu’à ce que nous nous trouvions, corps, âme et esprit, en sûreté dans ton éternelle présence, au-delà de l’atteinte de toute mauvaise influence de faux culte et de religion corrompue, et aussi au-delà de l’atteinte des divers empêchements qui proviennent de ces corps de péché et de mort que nous portons avec nous!

Note. — Il est intéressant de remarquer que, quoique le sacrifice de prospérités soit mis au troisième rang, cependant «la loi» nous en est donnée après toutes les autres. Cette circonstance n’est pas insignifiante. Dans aucune des offrandes, la communion de l’adorateur n’est si pleinement développée que dans le sacrifice de prospérités. Dans l’holocauste, c’est Christ s’offrant lui-même à Dieu. Dans l’offrande du gâteau, nous avons la parfaite humanité de Christ. Puis, passant au sacrifice pour le délit, nous voyons qu’il répond parfaitement au péché, dans sa racine. Dans l’offrande pour le délit, se trouve une réponse pleine et entière pour tous les péchés actuels de la vie. Mais la doctrine de la communion de l’adorateur n’est développée dans aucune de ces offrandes. C’était au «sacrifice de prospérités» à le faire, et c’est ce qui explique, je le crois, la place qu’occupe la loi de ce sacrifice. Elle vient à la fin de toutes les autres, nous enseignant par là que, quand il est question que l’âme se nourrisse de Christ, il faut que ce soit un Christ entier considéré dans toutes les phases possibles de sa vie, de son caractère, de sa personne, de son œuvre, de ses offices. En outre, que quand nous en aurons fini pour toujours avec le péché et les péchés, nous ferons nos délices de Christ et nous nous nourrirons de lui à travers toute l’éternité. Il me semble que notre étude des sacrifices serait incomplète, si nous omettions une circonstance aussi digne de remarque que celle-ci. Si «la loi de prospérités» était donnée dans l’ordre où se présente le sacrifice lui-même, elle viendrait immédiatement après la loi de l’offrande de gâteau; mais au lieu de cela, «la loi du sacrifice pour le péché», et «la loi du sacrifice pour le délit» sont données d’abord, puis «la loi du sacrifice de prospérités» termine le tout.