Antonio, le dessinateur

«Antonio, il y a bientôt un mariage à Ekuku: pourrais-tu me faire un dessin des mariés? Tu dessines si bien!» Antonio ne réfléchit pas longtemps. «Bien sûr que oui! Pas de problème. As-tu du papier?» Du papier, j'en ai, ainsi qu'un crayon, une gomme et un vieux classeur comme sous-main! Antonio se met aussitôt au travail. Alfredo et José-Luis, le frère de Pedro, regardent par-dessus son épaule. José-Maria est aussi là. Il s'est installé confortablement sur une chaise, le nez plongé dans un livre.

Comme bien souvent, ce soir il n'y a pas de courant électrique, mais la lumière de la lampe à pétrole est suffisante pour éclairer le dessin. Il n'est que 19 heures et pourtant il fait déjà nuit. La Guinée Équatoriale se situant tout près de l'équateur, le jour et la nuit y ont la même durée. Le soleil disparaît dans la mer vers 18 heures et une demi-heure plus tard la nuit est là. Les garçons sont chez moi depuis un moment. Ils sont souvent livrés à eux-mêmes et flânent dans les rues sans savoir que faire ou vont regarder un film de violence dans le «vidéoclub» le plus proche. C'est pour cela que je me réjouis lorsqu'ils viennent passer un moment avec moi dans la véranda.

En quelques coups de crayons très précis, Antonio trace la silhouette des mariés. Maintenant, il lui reste encore à colorier l'image. Je regarde pensivement les bras maigres du jeune dessinateur. Antonio est souvent malade. Il est même déjà allé à l'hôpital. Pedro dit qu'il a un problème au foie, mais il ne sait pas exactement quoi. Antonio lui-même ne parle jamais de sa maladie. Il est vaillant et toujours heureux.

Sa dernière hospitalisation me revient à l'esprit. Avec ses amis, nous étions allés lui rendre visite. Dans sa chambre, il y avait dix lits alignés contre les murs. Dans chacun d'eux, un enfant était couché. Il y avait même des nourrissons. Presque tous avaient la visite de leur famille, sauf Antonio qui était seul. Comme il pouvait se lever, nous nous sommes assis dehors, sur les marches de l'entrée. Il a raconté: «Chaque jour, ils me mettent un goutte-à-goutte. L'infirmière m'enfonce une aiguille dans la veine du bras. L'aiguille est reliée à un sachet par un long tuyau. Le liquide dans le sachet contient mon médicament. Lentement, goutte après goutte, le liquide coule par le tuyau dans l'aiguille et dans mon corps. Je dois rester très tranquille dans mon lit, jusqu'à ce que la dernière goutte soit écoulée.» Il n'a pas dit que les heures lui paraissaient très longues, mais nous pouvions bien l'imaginer. Les amis regardaient leur brave camarade avec compassion. Puis nous avons déballé ce que nous avions apporté. Dans cet hôpital, ce sont les familles qui apportent les repas aux malades. La plupart du temps, il s'agit de manioc accompagné d'un peu de poisson ou de viande. Seulement, certains jours ils doivent attendre longtemps avant de recevoir leur nourriture. Les amis d'Antonio lui ont donc apporté deux petits pains. Et il a en plus reçu une papaye de Pedro qui a aussi pensé qu'un peu de lait en poudre pour le déjeuner lui ferait du bien. Quelle bonne idée! Un verre de lait donne de la force et Antonio en avait bien besoin. Mais il a été particulièrement heureux de recevoir des crayons de couleur et du papier! Le petit livre avec l'histoire du Bon Berger lui a plu également. Nous l'avons ouvert et avons lu comment le Bon Berger cherche avec amour sa petite brebis perdue et en danger jusqu'à ce qu'il la trouve.

Le temps a passé beaucoup trop vite. Nous avons dû prendre le chemin du retour car le soleil descendait rapidement. Mais avant de prendre congé, nous avons encore chanté un chant qui parle du Bon Berger qui aime les enfants: «Christ aime les enfants comme moi...»