Première épître aux Corinthiens (suite)

F.B. Hole

Chapitre 10

Les privilèges extérieurs et la pratique d'une religion ne sont nullement une garantie. C'est ce dont témoigne l'histoire d'Israël, résumée dans les premiers versets du chapitre 10. Il y avait pour les Israélites des choses présentant une certaine analogie avec le baptême et la cène du Seigneur, et pourtant ils sont tombés dans le désert et ont été détruits. En cela, ils sont des types pour nous.

Le passage de la mer Rouge est un type du baptême. A ce moment, les Israélites se sont soumis de façon bien définie à l'autorité et à la conduite de Moïse. De même, par le baptême chrétien — administré au nom du Seigneur Jésus — nous sommes placés de façon bien définie sous son autorité et sa conduite. Bien que ni la nuée ni la mer ne les aient touchés, les fils d'Israël ont été sous la première et ont passé à travers la seconde.

Le verset 3 se réfère à la manne; le verset 4 parle du rocher duquel ils ont bu en Exode 17 et en Nombres 20. Mais autant la manne que le rocher étaient «spirituels», étant surnaturels; l'un et l'autre étaient des types de Christ. Pourtant, en dépit de ces privilèges particuliers dont jouissait tout Israël, la grande majorité d'entre eux sont tombés dans le désert. Ce triste fait est rappelé dans Hébreux 3 et 4, où il est précisé que la raison de leur chute est qu'ils n'avaient pas de foi (Hébreux 4: 2). Notre passage nous indique ce qui, par contre, les caractérisait: les convoitises, l'idolâtrie, la fornication et une disposition d'esprit à tenter Dieu et à murmurer. Lorsque la foi apparaît, ces mauvaises choses disparaissent.

L'Esprit de Dieu a enregistré ces choses pour nous servir d'avertissement. Le vrai croyant est caractérisé par la confiance en Dieu, et plus sa confiance est simple et absolue, mieux cela vaut. Parallèlement, il est caractérisé par une absence de confiance en lui-même, et plus il se méfie de lui-même, mieux cela vaut. C'est lorsque nous croyons que nous sommes debout que nous sommes en danger de tomber. C'est une tout autre chose, bien sûr, lorsqu'un croyant est confiant que «le Seigneur est puissant pour le tenir debout» (Romains 14: 4).

Et non seulement Dieu est puissant pour nous soutenir, mais, dans sa fidélité, il garde un œil vigilant sur nous et ne permettra pas que nous soyons tentés au-delà d'une certaine limite. Les tentations auxquelles nous sommes soumis sont des «tentations humaines». Elles ne sont pas d'une nature surhumaine, et il y a avec elles une «issue». Le fait qu'il y ait une issue ne signifie pas que nous devions nous attendre à trouver toujours un chemin qui nous permette d'échapper entièrement à la mise à l'épreuve. Mais cela veut dire que Dieu veille toujours à ce qu'il y ait un chemin par lequel nous puissions finalement en sortir indemnes. La tentation peut ressembler à un long tunnel noir, mais la lumière du jour est toujours visible à son extrémité.

Ayant exprimé cette solennelle mise en garde, l'apôtre lui donne une tournure très personnelle au verset 14. Tout le chapitre 8 avait été consacré au problème des idoles et des viandes qui leur avaient été offertes, et ce verset nous ramène à cet objet. Le chapitre 8 affirmait la liberté du croyant par rapport aux viandes offertes aux idoles. Ce verset contrebalance cet enseignement en soulignant le caractère odieux des idoles elles-mêmes. L'idolâtrie ne doit pas simplement être évitée; il faut la fuir, comme étant une chose absolument horrible.

Gardons-nous des idoles, dans tous les sens du terme.

Jusqu'ici dans cette épître, l'apôtre s'était adressé aux Corinthiens sur le plan de leur responsabilité, en supposant qu'il pouvait y avoir parmi eux des hommes qui n'avaient que l'apparence chrétienne. Au verset 15, il change un peu son point de vue et s'adresse à eux comme à des «personnes intelligentes». Il est à craindre que tout croyant ne puisse être désigné ainsi; et il est certain qu'aucune personne inconvertie ne peut l'être. L'apôtre parle aux membres du corps de Christ, qui possèdent son Esprit, et qui sont donc capables de juger de ce qu'il va maintenant développer devant eux. Les versets 16 à 22 contiennent une argumentation dont la force spirituelle devrait s'imposer à nous.

La signification première de la coupe et du pain auxquels nous participons dans la cène du Seigneur, c'est le sang et le corps de Christ. Cela apparaît de manière très évidente dès l'institution de la cène, ainsi qu'elle nous est rapportée dans trois des Évangiles. Mais il y a une autre signification, sous-jacente à la première, qui n'a pas été mise en lumière avant que soient donnés les versets qui sont devant nous: c'est la pensée de la «communion». La cène n'est pas seulement un acte qui fait appel aux sentiments les plus profonds de la piété personnelle de chaque individu; c'est un acte de communion, exprimant le fait que nous qui participons à un seul et même pain, nous sommes «un» comme le pain auquel nous participons.

Cependant, arrivés à ce point, veillons à distinguer soigneusement les choses qui diffèrent. Le seul pain représente le corps de Christ qui a été livré à la mort pour nous. Le fait que nous, croyants, bien qu'étant plusieurs, nous participions tous à ce même pain signifie que nous sommes un seul corps. Nous sommes un seul corps par un acte divin (cf. 12: 13). Participer tous à un seul pain ne fait pas de nous un seul corps, mais c'est le signe que nous sommes un seul corps. Et Paul fait appel à ce signe pour donner du poids à son argumentation.

Le point qu'il souligne ici, c'est que la cène du Seigneur implique la communion — non seulement la communion les uns avec les autres, mais la communion du sang et du corps de Christ. Il n'y a rien ici pour nourrir la superstition. Ce que nous rompons, c'est du pain. Ce à quoi nous participons, c'est du pain. Mais en buvant et en participant, nous avons communion avec ce que la coupe et le pain représentent; et c'est à l'égard de cela que nous serons tenus pour responsables, comme le verset 27 du chapitre suivant l'affirme expressément. C'est une vérité extrêmement solennelle, sur laquelle on ferme trop souvent les yeux.

Au verset 18, l'apôtre montre qu'il y avait en Israël une préfiguration de cette vérité. En effet, les sacrificateurs pouvaient manger certaines parties de certains sacrifices, et dans le cas du sacrifice de prospérités, même celui qui l'offrait en avait sa part. Les chapitres 6 et 7 du Lévitique nous donnent des détails à ce sujet. Ils nous montrent aussi qu'il y avait des restrictions pour ceux qui mangeaient. Toute souillure devait être éloignée d'eux, car, par leur participation au sacrifice, ils étaient en communion avec l'autel de Dieu, et avec tout ce qu'il représentait. S'ils avaient pris des libertés avec leur nourriture sainte et l'avaient traitée d'une manière indigne, ils en auraient subi des conséquences graves.

Il en était de même en principe quant aux sacrifices idolâtres des gentils. Les idoles que les païens vénéraient représentaient des démons; et ces démons n'étaient rien d'autre que des subordonnés de Satan. En leur offrant des sacrifices, ces gens entraient en communion avec les démons. Et l'enfant de Dieu doit fuir à tout prix une telle communion.

Les versets 16 à 20 placent ainsi devant nous trois communions: celle des chrétiens, celle des Juifs et celle des païens. Elles sont centrées respectivement sur la table du Seigneur, sur l'autel d'Israël et sur les sacrifices idolâtres du paganisme. Elles s'expriment dans tous les cas par le fait de manger. Dans ce passage, l'autel d'Israël n'est pas en question; il est seulement introduit comme illustration, puis laissé de côté. (Il y a aussi une allusion à lui en Hébreux 13: 10.) Le problème, ici, se situe entre la communion de la mort de Christ et la communion des démons. Ces deux choses sont totalement, fondamentalement et continuellement opposées. Il est impossible de participer à l'une et à l'autre. «Vous ne pouvez», dit l'apôtre à deux reprises au verset 21.

En supposant que quelqu'un ignore ce «vous ne pouvez», et soit assez effronté pour participer à la table des démons après avoir participé à la table du Seigneur, qu'en sera-t-il alors? Il provoque le Seigneur à la jalousie, à l'égard de son nom et de sa gloire. Le Seigneur ne donnera pas sa gloire à un autre, et celui qui l'offense ainsi entre en conflit aigu avec le Seigneur lui-même. Il connaîtra l'amertume de ses voies en discipline, qui peuvent aller jusqu'à la mort. Sous la discipline du Seigneur, il découvrira vite qu'il n'est pas plus fort que lui, et il devra parcourir la route pénible de la repentance, qui est le seul moyen qui conduit à la restauration.

Par la grâce de Dieu, nous ne sommes que très peu menacés par la «communion avec les démons». Mais, à cause de cela, n'écartons pas avec légèreté de nos pensées ce qui nous est enseigné ici, car le principe a une portée beaucoup plus large. Si nous participons à la table du Seigneur, nous devons être vigilants pour ne pas participer aussi à des choses qui sont en contradiction avec elle et avec sa sainteté. Si nous avons communion avec le sang et le corps de Christ, nous comprendrons que celle-ci a une valeur telle qu'elle exclut toute communion incompatible. Nous nous tiendrons éloignés de toute communion qui puisse nous lier, et même nous souiller. Nous craignons que les implications de cette vérité soient souvent ignorées. On participe à la coupe et au pain sans se préoccuper beaucoup des obligations solennelles qui y sont rattachées. Or nous ne pouvons avoir aucune communion avec des choses mauvaises.

Ce sérieux problème traité, il reste la question des viandes offertes aux idoles, à laquelle l'apôtre avait déjà fait allusion. Il s'en était écarté au début du chapitre 9 pour ouvrir une digression, et il y revient au verset 23 du chapitre qui nous occupe. Le monde païen était si rempli d'idoles que la plupart des animaux en vente dans les boucheries avaient été tués lors de sacrifices ou de cérémonies idolâtres. Si un chrétien achetait sa viande à la boucherie, ou s'il mangeait chez quelqu'un qui n'était pas croyant et qui était donc indifférent à ces choses, que devait-il faire?

A ce sujet, Paul affirme à deux reprises: «Toutes choses sont permises». Il nous place donc dans une position de liberté. Mais il nous rappelle que toutes choses sont bien loin d'être avantageuses ou édifiantes, et de plus, que nous ne devons pas simplement considérer ce qui est bon pour nous, mais aussi ce qui est bon pour les autres. Le double test qu'il mentionne peut avoir des milliers d'applications. Sans cesse se présentent de nouvelles situations où nous ne devons pas seulement nous demander: est-ce permis? mais aussi: est-ce avantageux? cela tend-il à l'édification? De plus, nous avons à considérer l'avantage et l'édification de tous. Si nous ordonnions nos vies selon ce standard, nous nous passerions de bien des choses dont la nature est douteuse et sans profit.

Nous pouvons bien remercier Dieu pour la liberté donnée dans ce passage. Quel fardeau insupportable pour les premiers chrétiens, s'ils avaient été responsables de rechercher l'historique de chaque morceau de viande acheté dans leurs marchés, ou consommé dans la maison de quelque connaissance! Et pour nous aujourd'hui, qui vivons dans un monde hautement compliqué et artificiel, cela serait encore dix fois pire. La volonté de Dieu pour les siens est évidemment qu'ils acceptent les conditions dans lesquelles ils sont placés, et qu'ils cheminent avec simplicité, sans chercher d'un œil inquisiteur tous les problèmes possibles, qu'il s'agisse de viande ou de n'importe quelle autre chose.

Par contre, si, sans s'être spécialement enquis, quelqu'un est informé d'une souillure — comme dans le cas qui est supposé au verset 28 — alors cette souillure doit être soigneusement évitée. En disant cela, l'apôtre réaffirme ce qu'il avait dit à la fin du chapitre 8.

Cela nous amène à l'enseignement très général du verset 31, à une affirmation qui couvre l'ensemble de nos vies. En toutes choses, nous devons rechercher la gloire de Dieu. Et le verset suivant ajoute que nous devons éviter de devenir une pierre d'achoppement pour un homme quelconque. En considérant ce passage dans son ensemble, nous pouvons y observer cinq points très utiles pour nous aider à discerner si un chemin est, ou n'est pas, selon la volonté de Dieu. Ce qui est selon sa volonté est:

  • permis,
  • avantageux,
  • pour l'édification (de soi-même ou des autres),
  • pour la gloire de Dieu,
  • et ne donne pas d'occasion de chute pour qui que ce soit.

La question est souvent posée: comment puis-je connaître la volonté de Dieu et être dirigé par lui? Eh bien! voilà quelques éléments de direction très sûrs et bien définis. Mais sommes-nous toujours disposés à nous laisser diriger lorsque nous recevons les directions divines?

Le verset 32 partage l'humanité en trois classes. Remarquez comment l'assemblée de Dieu est distinguée des Juifs et des Grecs (les gentils). L'Ancien Testament partageait les hommes en deux catégories: Israël et les nations (les païens). L'Église, un corps tiré à la fois des Juifs et des gentils, n'apparaît que dans le Nouveau Testament. Bien que nous ayons été appelés hors de l'ensemble de l'humanité, nous devons considérer les hommes en cherchant leur plus grand bien, leur salut. C'était la façon de faire de Paul, comme c'était celle de Christ. Et nous devons être imitateurs de Paul. Le verset 1 du chapitre 11 peut être considéré comme étant le dernier verset du chapitre 10.

À suivre