La grâce et la vérité (Jean 1)

P-Er. Fuzier

«Car la loi a été donnée par Moïse; la grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ» (verset 17).

Le contraste entre ce que le peuple d'Israël avait reçu par Moïse — la loi — et ce que Christ est venu apporter au monde — la grâce et la vérité — se retrouve dans tout l'évangile selon Jean.

Le premier chapitre nous présente divers caractères du Fils de Dieu entrant dans le monde. En considérant ce qui nous est dit là de Christ, en relation avec ce qui nous est révélé ailleurs touchant Moïse, et en particulier avec ce qu'il exprime au psaume 90, nous pourrons admirer la grandeur de Celui qui nous a apporté la grâce et la vérité de la part du Père.

La grandeur de la personne de Jésus

Il est «la Parole», celui qui était au commencement auprès de Dieu, le Créateur de toutes choses (versets 1-3). C'est donc de lui que Moïse rend témoignage, lorsqu'il déclare: «Avant que les montagnes fussent nées et que tu eusses formé la terre et le monde, d'éternité en éternité tu es Dieu» (Psaumes 90:2). Devant lui, qu'est-ce que l'homme? Une créature fragile et éphémère, une poussière retournant à la poussière. Pourtant, Dieu veut le bénir, faire briller sur lui sa lumière.

Cette lumière divine manifeste ce qu'est l'homme, son état de péché qui appelle la colère de Dieu. C'est déjà ce que dit Moïse: «Tu as mis devant toi nos iniquités, devant la lumière de ta face nos fautes cachées» (verset 8). Pourtant, cette lumière évoquait aussi autre chose pour Moïse. On le voit dans ces paroles de bénédiction qu'il a enseignées à Israël: «L'Éternel te bénisse, et te garde! L'Éternel fasse lever la lumière de sa face sur toi et use de grâce envers toi! L'Éternel lève sa face sur toi et te donne la paix!» (Nombres 6:24-26). Le Dieu qui est lumière veut bénir; mais comment l'homme pécheur pourra-t-il jouir de cette bénédiction? — Celui qui est la lumière est venu.

«La vraie lumière était celle, qui, venant dans le monde, éclaire tout homme» (verset 9).

Hélas, la méchanceté de l'homme, son opposition fondamentale à Dieu s'est pleinement manifestée contre Jésus: «Il était dans le monde, et le monde fut fait par lui; et le monde ne l'a pas connu. Il vint chez soi; et les siens ne l'ont pas reçu» (versets 10, 11). Va-t-il, selon les paroles du psaume 90, consumer par sa colère ces hommes incrédules? La grâce souveraine de Dieu vient apporter une autre réponse à la méchanceté du cœur de l'homme. Le Fils de Dieu vient accomplir une œuvre nouvelle, plus grande encore que celle de la création: il donne la vie; il donne à tous ceux qui le reçoivent «le droit d'être enfants de Dieu» (verset 12). Ceux-ci sont «nés de Dieu». La loi n'avait pas le pouvoir de faire vivre. Mais dans la Parole «était la vie» (verset 4), et il nous a donné cette vie, la vie éternelle, la vie en abondance.

«La Parole devint chair, et habita au milieu de nous» (verset 14).

Cette personne si grande, si merveilleuse, est venue jusqu'à nous. Le chemin de la foi a pu conduire des hommes à s'abaisser, mais aucun abaissement n'est comparable à celui de Christ. Moïse s'est abaissé pour s'associer au peuple de Dieu. Il a pu renoncer à sa grandeur humaine et accepter l'opprobre. «Moïse, étant devenu grand, refusa d'être appelé fils de la fille du Pharaon, choisissant plutôt d'être dans l'affliction avec le peuple de Dieu, que de jouir pour un temps des délices du péché, estimant l'opprobre du Christ un plus grand trésor que les richesses de l'Égypte» (Hébreux 11:24-26). Par la foi, il a abandonné une position princière pour se joindre à un peuple esclave, en qui son cœur reconnaissait ses frères (Actes des Apôtres 7:23).

Mais le chemin du Fils de Dieu venant à nous est incomparablement plus merveilleux. Celui qui est grand dans sa divinité éternelle s'est anéanti pour être «trouvé en figure comme un homme» (Philippiens 2:8). Il a voilé sa gloire divine pour venir au milieu de nous. Cependant, cette gloire personnelle ne pouvait être détachée de lui. En s'associant à son peuple méprisé, Moïse perdait sa dignité royale, alors que le Fils de Dieu, descendant jusqu'à nous comme l'homme Christ Jésus, demeure toujours «le Fils unique, qui est dans le sein du Père» (verset 18).

«Car de sa plénitude, nous tous nous avons reçu et grâce sur grâce» (verset 16).

Qu'était Moïse lorsqu'il a été envoyé vers le peuple de Dieu? Agé alors de quatre-vingts ans, il était conscient de la vanité de la vie de l'homme (Psaumes 90:10). Lorsqu'il était jeune, il avait été «instruit dans toute la sagesse des Égyptiens»; il était devenu «puissant dans ses paroles et dans ses actions» (Actes des Apôtres 7:22); mais il a dû apprendre, seul dans le désert pendant quarante ans, à être dépouillé de tout cela. C'est un homme vidé de lui-même que l'Éternel envoie vers son peuple. Dieu a pu alors se révéler à son serviteur et lui confier sa mission.

Mais lorsque le Fils vient dans le monde, lorsqu'il vient habiter au milieu de nous, c'est dans la plénitude de sa personne. En lui, et dans son anéantissement même, toute la plénitude s'est plu à habiter (Colossiens 1:19). En lui demeure toute gloire et c'est de cette plénitude, de la gloire de sa personne, que «nous avons reçu, et grâce sur grâce». Moïse, comme tout serviteur, ne pouvait apporter que ce qui lui avait été donné; le Fils nous donne, en abondance, ce qu'il a en lui-même. Il était au milieu de nous la Parole, «pleine de grâce et de vérité», et par lui «la grâce et la vérité» sont venues jusqu'à nous.

«Personne ne vit jamais Dieu; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l'a fait connaître» (verset 18).

Moïse avait entendu la voix de Dieu, il avait été attiré par la «grande vision» du buisson. Il avait eu la révélation du nom de l'Éternel, tel qu'Il pouvait le faire connaître au peuple d'Israël: «Je suis», «l'Éternel, le Dieu de vos pères… c'est là mon nom éternellement, et c'est là mon mémorial de génération en génération» (Exode 3:14, 15). Plus tard, il avait encore désiré voir la gloire de Dieu, et l'Éternel avait dû lui répondre: «Tu ne peux pas voir ma face, car l'homme ne peut me voir et vivre» (33:18-23).

Mais maintenant, «le Fils unique qui est dans le sein du Père» nous a fait connaître Dieu; en lui, nous avons vu le Père (Jean 14:7-10). Ce n'est pas seulement un reflet de la gloire divine qui rayonne sur son visage, comme ce fut le cas pour Moïse (Exode 34:29; 2 Corinthiens 3:7). C'est le Fils unique qui est dans le sein du Père, dans la plus profonde intimité avec lui, une intimité qui ne peut connaître aucune altération. «Nous vîmes sa gloire», rappelle l'apôtre (verset 14). Ainsi que l'évangile en rend de nombreuses fois témoignage, il est celui qui peut dire en vérité: «Je suis» (6:35; 8:12, 58…). Il est lui-même l'Éternel (12:41).

La grandeur de son œuvre — L'Agneau de Dieu

Pour que cette plénitude de bénédiction puisse être versée sur nous, il fallait l'œuvre de la croix. Jésus est l'agneau de Dieu venu pour ôter le péché de devant Dieu.

Le témoignage de Jean le baptiseur, en réponse aux questions des pharisiens, exprime le même sentiment de dépouillement de soi-même que ce que Moïse avait appris. Après que ces hommes incrédules se sont retirés de lui, le lendemain, il voit Jésus venir à lui et lui rend ce double témoignage: «Voilà l'agneau de Dieu qui ôte le péché du monde», et «c'est celui-là qui baptise de l'Esprit Saint» (versets 29, 33).

L'agneau de Dieu était celui que la foi en Israël attendait depuis les jours d'Abraham.

La loi ne pouvait qu'interdire et punir le péché; jamais elle ne pouvait l'ôter. Elle établissait avec Dieu une relation précaire, fondée sur la capacité de l'homme d'obéir aux commandements divins. Mais ces commandements, constamment transgressés, ne faisaient que manifester le péché dans l'homme.

La loi prévoyait une réponse aux péchés commis: des sacrifices étaient prescrits. Ces sacrifices devaient être répétés continuellement. Ils montraient en réalité que la question du péché attendait toujours une réponse définitive; ils n'étaient que «des actes remémoratifs de péché» (Hébreux 10:3). Ils avaient pourtant un aspect encourageant: ils montraient que Dieu voulait que la barrière du péché soit ôtée entre lui et l'homme. Le sang de taureaux et de boucs ne pouvait ôter les péchés (verset 4), mais la foi se nourrissait de l'espérance que Dieu se pourvoirait de l'agneau pour l'holocauste (Genèse 22:8).

Combien grand devait être cet Agneau de Dieu! Moïse (Exode 32:32), David (1 Chroniques 21:17), avaient suggéré de prendre sur eux le jugement; mais un tel sacrifice n'aurait pu répondre aux exigences divines, car eux-mêmes avaient aussi besoin d'un Sauveur.

Jean le baptiseur discerne en Jésus l'Agneau de Dieu. Celui-ci va poser une base nouvelle aux relations de Dieu avec l'homme. Il va régler pour toujours la question du péché à la satisfaction de Dieu. Plus aucun sacrifice ne sera requis. «Ayant offert un seul sacrifice pour les péchés, (il) s'est assis à perpétuité à la droite de Dieu», et, «par une seule offrande, il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés» (Hébreux 10:12, 14).

Jean rend aussi témoignage que Jésus est celui qui baptise de l'Esprit Saint. L'Esprit nous permet de jouir de la relation avec Dieu que le sacrifice de Christ a fondée et de manifester dans ce monde la vie qu'il nous a donnée.

Demeurer avec lui

Lorsque la gloire du Fils de Dieu est ainsi établie, l'évangile nous le montre entrant en relation avec les hommes, les attirant à lui, répondant aux besoins de leur âme. Ce sont d'abord André et son compagnon — Jean probablement, car il ne se nomme pas dans son évangile — qui le suivent et demeurent avec lui. «Ils demeurèrent auprès de lui ce jour-là» (verset 40). Le Fils de Dieu était venu chez lui, et le peuple de Dieu, «les siens», ne l'avaient pas reçu. Maintenant, ce sont ceux qui écoutent sa parole qui vont demeurer auprès de lui et jouir de sa communion.

Selon la mesure de la révélation de l'Ancien Testament, Moïse avait déjà trouvé sa demeure en Celui auquel sa foi s'était attachée: «Seigneur, tu as été notre demeure de génération en génération» (Psaumes 90:1).

Heureuse part! Être avec lui, c'est déjà, sur la terre, réaliser quelque chose de ce que sera la joie du ciel (Jean 14:3; 1 Thessaloniciens 4:17).