Ils portaient sur l'épaule (Nombres 7: 9)

E.E. Hücking

Nous entrons dans une nouvelle année. C'est là chaque fois comme un nouveau départ. Il n'y a peut-être pas beaucoup de changements dans le déroulement de nos journées et dans les devoirs de la vie, mais nous nous posons inévitablement la question: que va nous apporter cette nouvelle période et qu'exigera-t-elle de nous?

Comme enfants de Dieu, nous sommes en marche vers notre patrie céleste; c'est pourquoi la pensée de la prochaine étape sur le chemin qui nous y conduit ne peut pas s'arrêter aux choses terrestres, quelle que soit leur importance. Dans notre vie, nous devons tout mesurer par rapport au but pour lequel Dieu nous a laissés ici-bas. En constatant nos propres défaillances, nous apprenons à connaître la grâce et la fidélité de notre Seigneur; c'est sur cette terre seulement que nous pouvons en faire l'expérience. Mais nous nous souvenons aussi qu'il nous a confié quelque chose de grand. De même qu'Israël avait à porter le sanctuaire de Dieu à travers le désert, nous avons à porter le témoignage qu'il habite au milieu de son peuple sur la terre. Nous avons à rendre ce témoignage dans un monde qui lui est contraire, et qui nous est contraire.

Voyons comment Israël, le peuple terrestre de Dieu, a parcouru son chemin vers Canaan. Combien de départs ils ont vécu lorsque la colonne de nuée se levait pour une nouvelle étape! Nous ne savons pas s'ils se sont toujours réjouis. Mais s'ils étaient restés en arrière alors que la colonne de nuée poursuivait son chemin, ils se seraient trouvés sans leur Dieu. Ainsi donc, les Lévites ont fidèlement transporté le sanctuaire, avec tout ce qui lui appartenait, pour l'amener jusqu'au lieu de campement suivant — et finalement dans le pays promis.

L'activité des Lévites est une image frappante de la diversité du service qui, aujourd'hui, est celui des croyants, le peuple céleste de Dieu. Nous ne trouvons pas une telle diversité dans la sacrificature. Il y avait là le souverain sacrificateur — qui préfigure le Seigneur Jésus — et la famille sacerdotale. Et tous les fils d'Aaron étaient appelés au même service: offrir les sacrifices à Dieu et faire monter vers lui les parfums du sanctuaire. Ce qui était préfiguré de cette manière, nous l'exerçons aujourd'hui «en esprit et en vérité» lorsque, dans la présence de Dieu, nous offrons la bonne odeur de la personne et de l'œuvre de Christ.

Il en était autrement du service des Lévites, service dans lequel il y avait à porter. Là les tâches étaient multiples. Par exemple, les fils de Merari portaient «les ais du tabernacle, et ses traverses, et ses piliers, et ses bases, et les piliers du parvis tout autour, et leurs bases…» (Nombres 4:29-33), autrement dit les charges particulièrement lourdes. Pour un tel service, il leur était accordé un moyen auxiliaire: quatre chariots et huit bœufs pour les tirer (cf. Nombres 7:4-9) — et pourtant il est dit qu'ils «portaient».

De même, les Guershonites portaient «les tapis du tabernacle et la tente d'assignation… et le rideau de l'entrée de la tente d'assignation, et les tentures du parvis, et le rideau de l'entrée de la porte du parvis…» (4:21-28). Il leur était accordé deux chariots et quatre bœufs.

Si nous en venons aux Kéhathites, nous trouvons qu'il ne leur était accordé aucun moyen pour le transport des ustensiles du sanctuaire. Ils avaient à porter «les choses saintes», selon l'expression de Nombres 4:15 et 20: le voile qui séparait le lieu très saint du lieu saint, l'arche du témoignage, la table avec les pains de proposition, le chandelier, l'autel d'or et l'autel d'airain. Tous ces objets avec leurs ustensiles devaient d'abord être préparés et couverts par les sacrificateurs, les fils d'Aaron, au moyen des couvertures prescrites. Ce n'est qu'ensuite que les fils de Kehath pouvaient venir «pour les porter» (4:15), «afin», est-il dit, «qu'ils ne touchent pas les choses saintes, et ne meurent pas».

C'était véritablement un service très élevé que celui qui était attaché aux «choses saintes». Seuls les yeux des sacrificateurs pouvaient les voir et seules leurs mains pouvaient les toucher. Lorsqu'elles étaient portées à travers le désert, elles étaient cachées aux yeux des hommes sous le drap ayant la couleur du ciel et sous la couverture rugueuse de peaux de taissons — et celui qui les portait n'en saisissait que les barres.

Si les fils de Merari avaient quelques moyens à disposition pour le transport des éléments extérieurs du tabernacle, et si les fils de Guershon, qui portaient le tabernacle proprement dit, en avaient aussi, bien qu'en moindre quantité, les Kéhathites en revanche ne pouvaient en avoir. Moïse ne leur «en donna pas… car le service du lieu saint leur appartenait: ils portaient sur l'épaule» (7:9). Dans le service chrétien, on peut avoir recours à bien des moyens auxiliaires recommandables: nous pensons par exemple aux écoles et aux dispensaires dans les champs missionnaires. Mais s'il s'agit de la substance du christianisme, de la valeur infinie de Christ, de la connaissance de la gloire de sa personne et de son œuvre — choses merveilleuses dont nous avons à porter le témoignage à travers le monde — aucun moyen humain ne peut intervenir.

Cela devient particulièrement clair avec l'arche du témoignage, le symbole du trône de Dieu au milieu du peuple. Non seulement elle avait sa place dans le lieu très saint, dans lequel Aaron lui-même n'avait accès qu'une fois l'an; elle était aussi portée au milieu du peuple. Elle en était le guide; c'était par elle que Dieu conduisait le peuple, ainsi que cela ressort des paroles de Moïse en Nombres 10:35, 36. Plus tard, David, animé de bonnes intentions, a voulu la conduire à Jérusalem sur un chariot; mais il a dû apprendre d'une manière douloureuse que l'arche de Dieu ne devait être «portée par personne excepté les Lévites» (1 Chroniques 15:2).

Prenons à cœur ce que représente pour nous aujourd'hui le service des Kéhathites. Nous avons à porter en nous le sentiment profond des gloires du Seigneur Jésus. Et ce que nous contemplons avec adoration dans le lieu saint, nous avons à l'emporter dans nos cœurs et à le faire fructifier dans une vie de service pour le Seigneur. Dans ses gloires cachées à ce monde, il doit être le mobile de toutes nos actions.

Quelle noblesse dans la vie d'un croyant qui est imprégné de la gloire de Christ! S'il en est ainsi pour nous, le poids des «barres» ne paraîtra pas trop lourd à nos épaules. Il est plus facile de laisser le service spirituel à d'autres que d'être toujours disposé à l'assumer soi-même; il est plus facile, dans les manifestations pratiques de la vie spirituelle, de suivre des schémas tout faits que de se confier à la seule direction du Saint Esprit; il est plus facile de se dérober aux responsabilités que de s'engager pour que demeure intact le témoignage des «choses saintes» que nous avons à porter à travers le monde. Que de force, de temps, de zèle et de dévouement sont nécessaires pour cela!

A l'heure d'un nouveau départ, mettons résolument «les barres» sur nos épaules. C'est pour Christ que nous le faisons. Bientôt «nous le verrons comme il est» (1 Jean 3:2). Et selon la scène d'Apocalypse 5, lorsque les êtres célestes entourant le trône et toutes les créatures parleront de «l'Agneau», nous dirons simplement «Tu» (cf. versets 8-13). — Nous le connaissions depuis si longtemps; il était si proche de nous, alors que nous portions «les choses saintes» tout au long du désert!