Des paroles de grâce

M. Seibel

«Et tous lui rendaient témoignage, et s'étonnaient des paroles de grâce qui sortaient de sa bouche, et ils disaient: Celui-ci n'est-il pas le fils de Joseph?» (Luc 4: 22).

Lors de son baptême par Jean, le Seigneur Jésus avait été reconnu publiquement par Dieu lui-même comme étant son «Fils bien-aimé» (Luc 3: 22). Ensuite, dès son entrée en service, l'Esprit l'avait conduit dans le désert pour y subir sa première grande mise à l'épreuve. Dans les conditions extérieures les plus difficiles, il avait été tenté par le diable, mais était sorti vainqueur de toutes les tentations.

La première chose que l'évangile de Luc nous rapporte ensuite, ce sont ses visites dans des synagogues de Galilée, en particulier à Nazareth, où il lit un passage du prophète Ésaïe. Ce prophète, à plusieurs reprises, parle d'une manière très remarquable du Sauveur qui sera donné à Israël. Il en est ainsi au chapitre 61: où il annonce l'onction du Seigneur par le Saint Esprit, en vue de la prédication au peuple du salut et de la délivrance. C'est ce passage que Jésus choisit: «L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a oint pour annoncer de bonnes nouvelles aux pauvres; il m'a envoyé pour publier aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue; pour renvoyer libres ceux qui sont foulés, et pour publier l'an agréable du Seigneur» (Luc 4: 18, 19).

Le peuple méritait-il une telle grâce? N'était-il pas dans l'incrédulité la plus complète? Les Juifs n'avaient-ils pas d'emblée mis de côté leur Sauveur? Il est d'autant plus surprenant que Jésus leur annonce maintenant cette parole de salut, et ne parle pas des jugements sur le peuple, ou de la vengeance sur leurs ennemis, qui constituent la suite immédiate du passage d'Ésaïe, et qui se trouvent aussi en bien d'autres endroits des prophètes. Mais quand Jésus est présenté comme celui que Dieu a oint, il n'est question pour Israël que de grâce et de bénédiction.

Ici c'est la grâce dans la glorieuse personne de Christ, dans celui qui, «plein de l'Esprit Saint», révèle la grâce d'un Dieu fidèle à ses promesses. Il est là pour relever ceux qui sont fatigués et courbés. La bénédiction se déployait devant leurs yeux. Le Sauveur se présentait devant son peuple dans une grâce pure et absolue.

Il n'était pas venu pour condamner, mais pour sauver. Ses paroles étaient propres à conduire les hommes jusqu'au cœur de Dieu. Il était la vraie lumière qui condamne toute injustice; mais, dans son amour, il apportait la grâce de Dieu aux hommes, en parole et en action.

Combien de fois, dans cette synagogue, la loi avait-elle été lue! Mais jamais, jusque-là, les auditeurs n'avaient vu la bonté de Dieu venir au-devant d'eux de cette manière. Et il en était ainsi parce que Dieu lui-même était au milieu d'eux. Dieu seul peut venir avec une telle grâce, une grâce sans limite, et l'offrir à des pécheurs.

En vérité, la grâce de Dieu était répandue sur les lèvres du Seigneur (Psaumes 45: 2); les auditeurs le sentaient. Mais Luc nous dit qu'ils «s'étonnaient des paroles de grâce qui sortaient de sa bouche» (4: 22). Ils se demandaient comment «celui-ci», qui était «le fils de Joseph», pouvait parler ainsi. Il y a peu de choses qui soient davantage un sujet d'irritation pour l'homme naturel que la grâce qui lui est apportée.

La grâce s'abaisse jusqu'au plus bas niveau, à la rencontre des besoins de l'homme. Mais l'homme la méprise, parce qu'elle vient dans l'humilité. Et même s'il aperçoit Dieu derrière elle, il ne peut pas supporter cette humiliation, et il montre la haine de son cœur. La grâce de Dieu est méprisée, et sa souveraineté est haïe. Dieu ne méprisait pas Nazareth, mais l'homme méprisait Jésus parce qu'il venait de Nazareth. Et ce n'est pas sans importance que cette mention unique des «paroles de grâce» prononcées par le Seigneur soit liée à la ville de Nazareth — lieu dont même un Israélite fidèle comme Nathanaël n'attendait rien de bon (cf. Jean 1: 47).

Oh! si seulement nous étions davantage attentifs aux paroles de grâce qui sortent de la bouche de notre Sauveur!