La faucille, l'épée et le sceptre

J.T. Mawson

Le Fils de l'homme

Le Fils de Dieu, le «Fils unique, qui est dans le sein du Père» (Jean 1:18), est devenu le Fils de l'homme, afin de réaliser tous les plans de Dieu en rapport avec l'homme et avec la terre. Selon le psaume 8, «fils de l'homme» est le titre glorieux auquel est associée sa domination universelle: «Qu'est-ce que l'homme, que tu te souviennes de lui, et le fils de l'homme, que tu le visites? Tu l'as fait de peu inférieur aux anges, et tu l'as couronné de gloire et d'honneur; tu l'as fait dominer sur les œuvres de tes mains; tu as mis toutes choses sous ses pieds» (Psaumes 8:4-6).

Cependant, la première mention de ce titre dans le Nouveau Testament, dans la bouche du Seigneur Jésus lui-même, évoque son abaissement: «Les renards ont des tanières, et les oiseaux du ciel ont des demeures; mais le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête» (Matthieu 8:20). Celui qui dominera pour Dieu sur toutes choses, dans un jour prochain, est venu d'abord dans la plus grande pauvreté, afin de glorifier Dieu et d'accomplir l'œuvre du salut de l'homme. Avant de recevoir la puissance et la domination, il a passé par le chemin du service et de la souffrance. Aussi nous l'entendons reprendre, avec beaucoup de douceur, l'orgueil et l'ambition de ses disciples: «Le Fils de l'homme, leur dit-il, n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour plusieurs» (Matthieu 20:28). Cependant, il savait parfaitement quel serait le résultat de son séjour sur la terre. Dans l'une des heures les plus sombres de sa vie, quand il est accusé de blasphème devant le souverain sacrificateur, quand les hommes lui crachent au visage et lui donnent des soufflets, il peut leur dire: «Dorénavant vous verrez le Fils de l'homme assis à la droite de la puissance, et venant sur les nuées du ciel» (Matthieu 26:64).

En tant que Fils de l'homme, il a été «élevé», comme Moïse avait élevé le serpent dans le désert (Jean 3:14). C'était une nécessité, sans laquelle son royaume aurait été désert, sans jamais un homme pour se réjouir dans sa gloire. Il a été élevé sur la croix comme substitut des hommes qu'il venait sauver, pour porter le jugement qu'ils méritaient. Ainsi, il se fait connaître comme le rédempteur avant de monter sur le trône comme juge. Mais aussi certainement qu'il a été élevé sur la croix, aussi sûrement montera-t-il sur le trône, car «le Père… lui a donné autorité de juger aussi, parce qu'il est Fils de l'homme» (Jean 5:27).

«C'est lui qui est établi de Dieu juge des vivants et des morts» (Actes 10:42), proclamait l'apôtre Pierre lors de la première prédication de l'évangile aux Gentils. Le jugement des vivants est particulièrement en rapport avec son titre de Fils de l'homme. Quant au jugement des morts, à la fin des temps, devant le grand trône blanc, le Seigneur l'exercera dans toute sa majesté divine: «Le Père… a donné tout le jugement au Fils; afin que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père» (Jean 5:22, 23). C'est devant Dieu que se tiendront «les morts, les grands et les petits» (Apocalypse 20:12), car le Fils de l'homme est Dieu lui-même.

C'est comme Fils de l'homme qu'il s'occupera des vivants, à sa venue. Alors, il prendra en main la faucille, l'épée et le sceptre.

La faucille

L'apôtre Jean écrit: «Et je vis: et voici une nuée blanche, et sur la nuée quelqu'un assis, semblable au Fils de l'homme, ayant sur sa tête une couronne d'or et dans sa main une faucille tranchante… Et celui qui était assis sur la nuée mit sa faucille sur la terre, et la terre fut moissonnée» (Apocalypse 14:14-16).

Il est venu dans ce monde pour semer la bonne semence du royaume. En effet, «Celui qui sème la bonne semence, c'est le Fils de l'homme» (Matthieu 13:37). Aucune bouche humaine ne saurait exprimer ce que lui ont coûté ces semailles. En vérité, il a réalisé la parole du psalmiste: «Il va en pleurant, portant la semence qu'il répand» (Psaumes 126:6). Et sa part n'a pas été seulement «de grands cris et des larmes»; il a dû donner sa vie, son sang a coulé. «La semence est la parole de Dieu», la pleine révélation de ce que Dieu est. Le Fils de l'homme devait mourir pour semer cette semence. Mais celui qui a semé doit aussi moissonner. Alors la dernière partie de la parole du psalmiste s'accomplira: «Il revient avec chant de joie, portant ses gerbes».

Par l'œuvre de l'ennemi, de l'ivraie a été semée dans le champ de froment (Matthieu 13:25). Cet ennemi, c'est le diable. Or le Fils de l'homme doit séparer l'ivraie du froment, ainsi qu'il est écrit: «Le Fils de l'homme enverra ses anges, et ils cueilleront de son royaume tous les scandales et ceux qui commettent l'iniquité» (verset 41). Il est celui qui manie la faucille pour exécuter ce jugement. Jean le baptiseur utilise une autre image éloquente: «Il a son van dans sa main, et il nettoiera entièrement son aire et assemblera son froment dans le grenier; mais il brûlera la balle au feu inextinguible» (Matthieu 3:12).

Ce passage concerne premièrement Israël, mais le jugement s'étendra aussi aux Gentils, comme l'enseigne Matthieu 25: «Or, quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il s'assiéra sur le trône de sa gloire, et toutes les nations seront assemblées devant lui; et il séparera les uns d'avec les autres, comme un berger sépare les brebis d'avec les chèvres» (versets 31, 32). De ce passage il ressort clairement que les objets du jugement sont les nations qui seront en vie lors de l'apparition du Fils de l'homme en gloire. Ce jugement aura lieu au commencement du règne de mille ans, tandis que le jugement final des morts aura lieu après (cf. Apocalypse 20).

Le Fils de l'homme introduira la gloire et la bénédiction; les anges de Dieu monteront et descendront sur lui (Jean 1:52). Il amènera pour ainsi dire le ciel sur la terre, selon ce que nous lisons: «Il descendra comme la pluie sur un pré fauché» (Psaumes 72:6). Remarquons bien l'expression utilisée dans cette image: c'est sur un pré fauché qu'il descend. La faucille aura déjà accompli son travail. Cependant, la faucille tranchante dans la main du Fils de l'homme couronné d'or ne sera lancée sur la terre que quand l'œuvre du diable sera arrivée à maturité.

Nous ne sommes pas surpris de voir les disciples stupéfiés et remplis de crainte, lorsqu'ils suivaient leur maître montant à Jérusalem. Et leur anxiété a certainement encore grandi quand ils l'ont entendu dire: «Voici, nous montons à Jérusalem; et le Fils de l'homme sera livré aux principaux sacrificateurs et aux scribes; et ils le condamneront à mort, et le livreront aux nations; et ils se moqueront de lui, et le fouetteront, et cracheront contre lui, et le feront mourir» (Marc 10:32-34). Est-il possible que ce soit le même Fils de l'homme que Celui que Jean a vu sur l'île de Patmos, brillant dans toute sa majesté divine? (Apocalypse 1:12-18). Oui, aucun autre ne pourrait s'abaisser si profondément et être exalté si haut. Il est «l'Ancien des jours» de Daniel 7. Les yeux de Jean ne pouvaient supporter la manifestation de la gloire de cette personne, et ses pieds ne pouvaient plus le porter. Il écrit: «Et, lorsque je le vis, je tombai à ses pieds comme mort» (Apocalypse 1:17). Mais le Seigneur, dans sa tendresse bien connue du disciple, pose alors sa main droite sur lui; et sa voix bien-aimée s'adresse à lui en disant: «Ne crains point; moi, je suis le premier et le dernier, et le vivant; et j'ai été mort; et voici, je suis vivant aux siècles des siècles; et je tiens les clefs de la mort et du hadès» (versets 17, 18).

L'épée

Le fait qu'il ait en sa main les clefs de la mort et du hadès montre que lui, le Fils de l'homme, est le maître indiscuté du monde invisible, même si certains hommes vivants mettent en doute son autorité. Cependant, il vient pour juger les vivants, car «une épée aiguë à deux tranchants sort de sa bouche, afin qu'il en frappe les nations» (Apocalypse 19:15; cf. 1:16).

Étant donné ce qu'est l'homme, étant donné ce qu'est le monde, l'épée doit précéder le sceptre. Certains pensent que le monde doit être progressivement converti par l'évangile, ou que le royaume de Dieu pourra se développer à partir du système de ce monde par les efforts de l'homme lui-même. Quelle étrange illusion! Écoutons ce que dit la Parole: «Voici, il vient avec les nuées, et tout œil le verra, et ceux qui l'ont percé; et toutes les tribus de la terre se lamenteront à cause de lui. Oui, amen!» (Apocalypse 1:7). Un monde converti le recevrait avec des acclamations, mais un monde impie hurlera de terreur à sa venue. L'épée vient premièrement, le sceptre ensuite. Cette épée est le symbole d'une inflexible justice: la vengeance de Dieu sur l'homme méchant et sans repentance. Elle forcera tout genou rétif à se plier devant Jésus Christ, et toute lèvre rebelle à confesser qu'il est Seigneur à la gloire de Dieu le Père (Philippiens 2:10, 11). «Ceins ton épée sur ton côté, homme vaillant, dans ta majesté et ta magnificence; et, prospérant dans ta magnificence, mène en avant ton char, à cause de la vérité et de la débonnaireté et de la justice; et ta droite t'enseignera des choses terribles» (Psaumes 45:3, 4).

Il nous paraît presque inimaginable que des hommes puissent s'assembler pour faire la guerre à celui qui est le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs. Et pourtant, il en sera ainsi. La tromperie par laquelle le diable égarera les hommes sera telle qu'ils espéreront réaliser leur but et maintenir pour toujours le Seigneur hors de ce monde. C'est ainsi que nous lisons: «Et je vis la bête, et les rois de la terre, et leurs armées assemblées pour livrer combat à celui qui était assis sur le cheval et à son armée» (Apocalypse 19:19). Selon les expressions de Job, ils étendront leur main contre Dieu et ils s'élèveront contre le Tout-Puissant; dans leur haine aveugle, ils courront contre lui sous les bosses épaisses de leurs boucliers (Job 15:26). Mais la bataille sera rapide et décisive, car l'épée du Fils de l'homme prévaudra. Les chefs blasphémateurs de cette immense armée seront pris par la puissance divine et «jetés vifs dans l'étang de feu embrasé par le soufre». «Et le reste fut tué par l'épée de celui qui était assis sur le cheval, laquelle sortait de sa bouche, et tous les oiseaux furent rassasiés de leur chair» (Apocalypse 19:20, 21).

Le sceptre

Le sceptre du Fils de l'homme sera un sceptre de fer. Il se l'est acquis au prix d'un grand combat. Depuis le commencement, le diable a fait tous ses efforts pour s'opposer à ce que le Seigneur prenne ce sceptre. Il a sans doute compris et pris au sérieux les paroles que Dieu lui a adressées dans le jardin d'Eden concernant la semence de la femme: «Elle te brisera la tête, et toi tu lui briseras le talon» (Genèse 3:15). Dès lors, il n'a cessé de déployer toute sa force et toute sa ruse dans l'espoir d'en empêcher l'accomplissement. Le temps où devait s'accomplir cette prophétie est clairement annoncé dans l'Ancien Testament, et le diable ne l'ignorait pas. La vision d'Apocalypse 12 évoque ce moment. Nous y voyons le dragon se tenant devant une femme enceinte, qui représente Israël. Il «se tenait devant la femme qui allait enfanter, afin que, lorsqu'elle aurait enfanté, il dévorât son enfant. Et elle enfanta un fils mâle qui doit paître toutes les nations avec une verge de fer» (versets 3-5). Mais ce premier assaut échoue. Le diable change alors de tactique; il masque ses armes en déployant le drapeau de la trêve et en proposant des conditions de paix. Nous lisons: «Le diable le transporte encore sur une fort haute montagne, et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire, et lui dit: Je te donnerai toutes ces choses, si, te prosternant, tu me rends hommage» (Matthieu 4:8, 9). Mais le Seigneur, qui connaît parfaitement son adversaire, lui répond: «Va-t'en, Satan, car il est écrit: Tu rendras hommage au Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul» (verset 10).

Le Seigneur Jésus refuse la voie de facilité que Satan lui propose — et à quel prix! — en vue d'accéder rapidement au trône et au sceptre. Il persévère dans son chemin d'obéissance à la volonté de Dieu, volonté qui comportait sa mort sur la croix. Par son entière soumission, il prouve qu'il est digne d'exercer la domination. «Quoiqu'il fût Fils, [il] a appris l'obéissance par les choses qu'il a souffertes» (Hébreux 5:8). Il a «aimé la justice» et a «haï la méchanceté»; le «sceptre de son règne» sera «pour toujours et à perpétuité», et il sera «un sceptre de droiture» (Psaumes 45:6, 7). Il n'acceptera de prendre ce sceptre ni de la main de Satan, ni de celle l'homme, mais seulement de la main de Dieu lui-même. C'est ce que nous apprenons par le livre de Daniel: «Je voyais dans les visions de la nuit, et voici, quelqu'un comme un fils d'homme vint avec les nuées des cieux, et il avança jusqu'à l'Ancien des jours, et on le fit approcher de lui. Et on lui donna la domination, et l'honneur, et la royauté, pour que tous les peuples, les peuplades et les langues, le servissent. Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera pas, et son royaume, un royaume qui ne sera pas détruit» (Daniel 7:13, 14).

Une scène analogue se trouve en Apocalypse 5: «Et je vis au milieu du trône et des quatre animaux, et au milieu des anciens, un agneau qui se tenait là, comme immolé, ayant sept cornes et sept yeux, qui sont les sept Esprits de Dieu, envoyés sur toute la terre. Et il vint et prit le livre de la main droite de celui qui était assis sur le trône» (versets 6, 7). Dans la vision de Jean, c'est en quelque sorte la faucille et l'épée qu'il reçoit de la main de Dieu, tandis que dans la vision de Daniel, c'est le sceptre. L'Éternel lui a dit: «Demande-moi, et je te donnerai les nations pour héritage, et, pour ta possession, les bouts de la terre; tu les briseras avec un sceptre de fer; comme un vase de potier tu les mettras en pièces» (Psaumes 2:8, 9). Il ne prendra rien si ce n'est de la main de Dieu. Contraste frappant avec Adam, qui s'est emparé de quelque chose que Dieu, dans sa sagesse, lui avait interdit — entraînant toute sa race dans la ruine et dans la mort!

Dieu veut que la venue de son royaume de justice soit proclamée, en témoignage à toutes les nations. C'est ce que Paul annonce aux Athéniens, dans l'Aréopage: «Dieu donc, ayant passé par-dessus les temps de l'ignorance, ordonne maintenant aux hommes que tous, en tous lieux, ils se repentent; parce qu'il a établi un jour auquel il doit juger en justice la terre habitée, par l'homme qu'il a destiné à cela, de quoi il a donné une preuve certaine à tous, l'ayant ressuscité d'entre les morts» (Actes des Apôtres 17:30, 31). Il est le roi qui doit régner en justice (Ésaïe 32:1). Et sous sa domination, «l'œuvre de la justice sera la paix, et le travail de la  justice, repos et sécurité à toujours» (verset 17).

Conclusion

Il n'est pas surprenant que la faucille, l'épée et le sceptre doivent être remis aux mains du Fils de l'homme. De tous les hommes qui ont vécu sur la terre, il est le seul à pouvoir les tenir dans une justice et une puissance sans affaiblissement. Tous les autres hommes auxquels le pouvoir et l'autorité ont été confiés ont failli — Adam, Noé, Moïse, David, Salomon, Nebucadnetsar. Aucun n'a résisté à l'épreuve, et tous doivent céder la place au Fils de l'homme. Lui a été fidèle, et il ne faillira jamais. Dans sa dépendance absolue de Dieu, il a été soutenu. Cette parole du psaume 80 a été accomplie et s'accomplira encore: «Que ta main soit sur l'homme de ta droite, sur le fils de l'homme que tu as fortifié pour toi» (verset 17). Le Seigneur Jésus lui-même a dit: «Ne vous étonnez pas de cela; car l'heure vient en laquelle tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix (celle du Fils de l'homme); et ils sortiront, ceux qui auront pratiqué le bien, en résurrection de vie; et ceux qui auront fait le mal, en résurrection de jugement» (Jean 5:28, 29). «Bienheureux et saint celui qui a part à la première résurrection: sur eux la seconde mort n'a point de pouvoir» (Apocalypse 20:6).

Après le règne de mille ans viendra le jugement dernier, que Jean décrit dans les termes les plus solennels. «Et je vis un grand trône blanc, et celui qui était assis dessus, de devant la face duquel la terre s'enfuit et le ciel; et il ne fut pas trouvé de lieu pour eux. Et je vis les morts, les grands et les petits, se tenant devant le trône; et des livres furent ouverts; et un autre livre fut ouvert qui est celui de la vie. Et les morts furent jugés d'après les choses qui étaient écrites dans les livres, selon leurs œuvres… Et si quelqu'un n'était pas trouvé écrit dans le livre de vie, il était jeté dans l'étang de feu» (Apocalypse 20:11-15).

Le Fils de l'homme laissera de côté la faucille lorsqu'elle aura achevé son travail; il laissera de côté l'épée lorsqu'elle aura fait son œuvre, et il rendra à Dieu le sceptre quand il aura glorifié Dieu dans son royaume. L'apôtre écrit: «…ensuite la fin, quand il aura remis le royaume à Dieu le Père, quand il aura aboli toute principauté, et toute autorité, et toute puissance. Car il faut qu'il règne jusqu'à ce qu'il ait mis tous les ennemis sous ses pieds: le dernier ennemi qui sera aboli, c'est la mort… Mais quand toutes choses lui auront été assujetties, alors le Fils aussi lui-même sera assujetti à celui qui lui a assujetti toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous» (1 Corinthiens 15:24-28).