Béthanie, le village de Marie et de Marthe

E. Argaud

Dès son entrée dans le monde, Jésus a été rejeté des hommes. «Il vint chez soi; et les siens ne l'ont pas reçu… et le monde ne l'a pas connu» (Jean 1:10, 11). Il a parcouru son chemin «méprisé et délaissé des hommes… comme quelqu'un de qui on cache sa face» (Ésaïe 53:3). Il pouvait dire: «Les renards ont des tanières, et les oiseaux du ciel ont des demeures; mais le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête» (Matthieu 8:20). Pourtant, Dieu a permis qu'il trouve sur son chemin une maison hospitalière. C'était à Béthanie, petit village près de Jérusalem. Nous ne trouvons pas son nom dans l'Ancien Testament, mais il occupe une place privilégiée dans le Nouveau.

Là, «une femme nommée Marthe le reçut dans sa maison» (Luc 10:38). Peut-être voit-elle la fatigue du Maître et veut-elle lui donner les soins les plus attentionnés. Marie, sa sœur, discerne la grandeur de Jésus et désire recevoir de lui. Elle s'assied humblement à ses pieds et écoute ses paroles. Elle a choisi la bonne part. Heureuse maison, où l'on écoute la Parole et où on sert le Seigneur!

En Jean 11 nous retrouvons le Seigneur à Béthanie. Lazare, le frère de Marthe et de Marie, est bien malade. Pourquoi Dieu envoie-t-il l'épreuve dans cette maison qui recevait son Bien-aimé? La réponse ne nous est-elle pas donnée dans cette expression: «Jésus aimait Marthe, et sa sœur, et Lazare» (verset 6)?

C'est le secret des voies de Dieu qui, même si nous ne les comprenons pas, sont toujours des voies d'amour. Les sœurs ne s'y trompent pas: puisque Jésus les aimait, il suffisait de lui faire savoir leur peine. Il avait guéri tant de malades, il guérirait bien Lazare. Elles lui envoient donc ce message: «Seigneur, voici, celui que tu aimes est malade» (verset 3). Elles n'ont pas besoin de lui en dire davantage: il viendra aussitôt… Et il ne vient pas. «Il demeura encore deux jours au lieu où il était» (verset 6). Homme dépendant, il attend que Dieu son Père lui ouvre le chemin vers Béthanie. Il aurait pu guérir Lazare à distance, comme il avait fait pour le fils du seigneur de la cour (Jean 4:50-53) ou pour le serviteur du centurion (Matthieu 8:7-13). Mais il avait devant lui quelque chose de plus grand que la guérison d'un malade.

Lorsqu'il approche de Béthanie, les deux sœurs le reçoivent avec un léger reproche: «Seigneur, si tu eusses été ici, mon frère ne serait pas mort» (versets 21 et 32). Jésus est là: sa puissance égale son amour, les deux n'ont pas de limites. Le corps de Lazare sent déjà la corruption, mais qu'importe? «Lazare, sors dehors! Et le mort sortit» (verset 44). Le jour viendra où la même voix dira: Levez-vous, mes rachetés! Les morts en Christ, ceux même dont les corps sont corrompus depuis les temps les plus lointains, ressusciteront premièrement et nous, les croyants vivants, nous serons changés. Répondant tous à son appel, nous partirons à sa rencontre en l'air.

Un peu plus tard, à Béthanie, dans la maison de Simon le lépreux, «on lui fit donc là un souper» (Jean 12:2). C'était le premier jour de la semaine. Jésus était là avec ses disciples et on avait invité Marthe, Marie et Lazare. On ne parlait guère, mais chacun était à sa place. Marthe, comme à son habitude, servait — mais cette fois sans se plaindre que sa sœur ne lui aide pas. Lazare était un témoin de la puissance et de l'amour divins. Marie a apporté un vase d'albâtre, plein d'un parfum précieux (Marc 14:3). Elle s'approche de Jésus et répand le parfum sur la tête et les pieds de son Seigneur. Elle brise le vase, qui ne peut contenir un autre parfum pour qui que ce soit. Tout est pour lui — et le vase et le parfum. «Et la maison fut remplie de l'odeur du parfum.» Lorsque nous sommes rassemblés le premier jour de la semaine autour du Seigneur, qui ne voudrait être comme Marie, dont le cœur bouillonne de louange et d'adoration? Incompris peut-être de beaucoup, qui ne voudrait entendre cette parole du Maître: ce qui était en son pouvoir, il l'a fait? Marie savait que Jésus allait à la croix pour mourir, mais elle savait aussi que son corps n'avait pas besoin d'être embaumé. Car Dieu avait annoncé par la voix de David: «Tu ne permettras pas que ton saint voie la corruption» (Psaumes 16:10). Bienheureuse Marie, elle n'ira pas au sépulcre avec les autres femmes; elle sait qu'il doit être vide, puisque Jésus lui-même avait fait sortir Lazare de la mort. Elle a fait ce qu'il fallait faire, et au temps voulu. Inoubliable et touchante image de la louange que le Seigneur est en droit d'attendre de cœurs remplis de lui!

Le Seigneur a parcouru tout son chemin. Il a achevé l'œuvre que le Père lui avait donnée à faire et que personne d'autre n'aurait pu accomplir. «Il mena ses disciples dehors jusqu'à Béthanie, et, levant ses mains en haut, il les bénit. Et il arriva qu'en les bénissant, il fut séparé d'eux, et fut élevé dans le ciel» (Luc 24:50, 51). Quel glorieux départ! Les disciples regardent fixement vers le ciel. C'est au ciel qu'il s'en va, c'est de là qu'il reviendra pour chercher ses bien-aimés, selon la promesse qu'il leur a faite (Jean 14:3). Il les rassemblera sur la nuée et les introduira dans la maison du Père. Et ils seront pour toujours avec lui.

Ensuite, il reviendra avec eux pour établir son règne sur la terre par des jugements terribles. Règne de mille ans, temps de justice et de paix. Alors, il posera ses pieds sur la montagne des Oliviers, tout près de Béthanie. «Ses pieds se tiendront en ce jour-là sur la montagne des Oliviers», qui se fendra par le milieu, ouvrant une fort grande vallée. «Mon Dieu viendra — dit le prophète Zacharie — et tous les saints avec toi» (14:4, 5).

Belle histoire que celle de ce petit village de Béthanie! Là, le Maître a bu du torrent dans le chemin (Psaumes 110:7), dans la maison de Marthe; là, il a consolé des cœurs affligés, pleuré avec eux et manifesté sa gloire et celle de son Dieu; là, il a reçu l'hommage d'un cœur dévoué; là, il a quitté les siens en les bénissant; là, il reviendra avec ses rachetés pour établir son règne. Revenons souvent, nous aussi, vers le Maître, comme à Béthanie, pour l'écouter, pour le servir, pour le prier, pour l'adorer en attendant son retour.