Le nom au-dessus de tout nom (suite)

E. Dennett

4. «Ton nom est un parfum répandu»

«Tes parfums sont d'agréable odeur, ton nom est un parfum répandu» (Cantiques des cantiques 1:3).

Nous trouvons dans ce passage la valeur de Christ considéré dans la relation du fiancé avec sa fiancée. Quand le cœur est mis au large par la puissance du Saint Esprit, on apprend le caractère merveilleux de l'amour de Christ «qui surpasse toute connaissance». Plus on goûte cet amour, plus avidement on désire en savourer une grande mesure.

C'est par le cœur que l'on reçoit toute connaissance de Dieu. Ici, dès que la fiancée a exprimé combien elle jouit de l'amour du fiancé, elle en vient à déclarer son excellence et sa perfection. Son cœur perçoit, au travers de la jouissance de cet amour, les «parfums d'agréable odeur» qu'exhale sa personne.

Remarquons encore qu'aussi forte que puisse être l'affection de la bien-aimée du Cantique des Cantiques, figure du résidu d'Israël, elle n'est pas fondée sur la même base que l'affection des chrétiens. Elle n'a pas le calme et la douceur d'une relation déjà établie, reconnue et pleinement appréciée. L'attente ardente de celle qui aime et qui désire les affections de celui qui est aimé diffère de l'affection douce, entière et mûrie, d'une épouse avec laquelle le mariage a créé un lien indissoluble. Dans le premier cas, la relation n'est qu'un désir, conséquence de l'état du cœur. Dans le second, l'état du cœur est la conséquence de la relation.

Cela dit, il demeure vrai que l'amour est le moyen par lequel Dieu se fait connaître, et cela tant dans le cœur de la bien-aimée que dans celui du chrétien. Celui qui aime le plus connaît le mieux (cf. 1 Corinthiens 8:13; Éphésiens 1:18). Marie de Magdala en est un exemple frappant. Pierre et Jean en savaient plus qu'elle, car ils avaient vu le sépulcre vidé et ils avaient cru (Jean en tout cas), alors que Marie était dans l'obscurité totale quant à la résurrection. Et pourtant, c'est à Marie que le Seigneur se révèle d'abord. Ayant constaté que le sépulcre était vide, les deux disciples rentrent chez eux. Marie, elle, se tient près du sépulcre et pleure. Profondément occupée de l'objet de son affection, elle reste sur place. Si elle a perdu Christ, elle a tout perdu. L'état de son cœur est bon, même si son entendement spirituel n'est pas encore éclairé. Alors le Seigneur peut venir et se révéler. Il fait d'elle la bienheureuse messagère de la merveilleuse nouvelle que, désormais, il associe ses frères à lui-même devant son Père et son Dieu, dans sa propre position et sa propre relation.

«Tes parfums sont d'agréable odeur», dit la bien-aimée, «ton nom est un parfum répandu.» Ces parfums sont pour nous les perfections que nous voyons dans la vie de Christ. C'est l'excellence de ses actes de bonté et de grâce, comme celle de ses paroles et de sa marche à travers ce monde, dans une dépendance et une soumission totales à Dieu. Nous pourrons les percevoir et en jouir dans l'intimité de sa présence, connaissant pour nous-mêmes ce qu'il est pour notre âme, dans ses voies et dans ses soins. La bien-aimée ne pouvait en effet connaître ses parfums d'aucune autre manière. Plus nous sommes près de Christ, plus nous avons part à ce qu'éprouvait le disciple que Jésus aimait, quand il était admis dans son intimité et qu'il reposait près de lui. Plus aussi est limpide notre perception de sa beauté et de sa grâce. On peut être impressionné par des compte rendus ou des témoignages — même à grande distance, comme la reine de Shéba. Mais c'est seulement quand, comme elle, nous voyons de nos propres yeux et entendons de nos propres oreilles, que nous sommes absorbés par sa grâce et ses beautés, et que nous sommes amenés, comme les deux disciples mentionnés en Jean 2:40, à demeurer auprès de lui. Là, dans sa communion, le parfum de son excellence est un rassasiement de joie.

Le parfum de la vie de Christ, comme on peut le voir en type dans l'offrande de gâteau (Lévitique 2), est tout premièrement pour Dieu. Les sacrificateurs pouvaient manger de la fine fleur de farine et de l'huile qui étaient offertes, mais tout l'encens devait être consumé sur l'autel, avec de la farine et de l'huile. Et ainsi c'était un sacrifice par feu d'odeur agréable à l'Éternel! La vie de Christ n'a eu aucun attrait pour les hommes, mais elle a glorifié Dieu et a rempli son cœur d'une joie infinie. Le regard de Dieu était constamment posé sur lui avec un plaisir inexprimable, contemplant avec joie la perfection de chacune de ses pensées, de ses actions, de ses paroles: «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai trouvé mon plaisir» (Matthieu 3:17; 17:5). Plus Christ a été mis à l'épreuve — et il a été éprouvé en toutes choses, y compris par la croix — plus le parfum de sa personne et de son œuvre est monté vers son Dieu. S'il nous est accordé de trouver de la joie dans le parfum de sa vie, c'est parce que Dieu en a premièrement eu sa part et qu'il nous appelle à partager son propre délice dans la marche et dans la personne de son Fils bien-aimé.

Remarquons que c'est par ces «parfums d'agréable odeur» que son nom — la révélation de tout ce qu'il est — se répand. Son nom est un parfum répandu.

Les évangiles nous en donnent de nombreuses illustrations. «Et Jésus parcourait toute la Galilée, enseignant dans leurs synagogues, et prêchant l'évangile du royaume, et guérissant toute sorte de maladies et toute sorte de langueurs parmi le peuple. Et sa renommée se répandit dans toute la Syrie» (Matthieu 4:24). Autre part, nous lisons: «Et se levant, il s'en alla de là vers les frontières de Tyr et de Sidon; et étant entré dans une maison, il ne voulait pas que personne le sût: et il ne put être caché» (Marc 7:24). Oui Seigneur, ton nom est devenu comme un parfum répandu pour tous ceux qui étaient ployés sous un joug de détresse, pour les âmes lassées et les pauvres parmi ton peuple!

Il ne s'agit là que d'une facette de la vérité, car ce passage du Cantique évoque plutôt la joie de l'âme qui savoure la valeur de Christ et l'excellence de sa personne et de ses actes. Pourtant, c'est toujours d'abord à cause de nos besoins que nous nous tournons vers Christ et que nous apprenons à le connaître dans son amour et sa grâce. Ensuite, quand nos besoins sont comblés, nous sommes à l'aise, libérés de nous-mêmes, et libres de le contempler. Le parfum agréable de sa personne ne pourrait rafraîchir notre âme avant que toute question qui nous affecte, ou qui affecte notre relation avec Dieu, ne soit résolue. Il arrive rarement que Christ lui-même soit bien connu dès le début de la vie chrétienne; de manière générale, il faut que la conscience chargée soit apaisée par l'efficacité du sang de Christ avant que le cœur soit apte à s'enquérir des perfections du Sauveur. Mais peu à peu ces perfections feront les délices de notre âme, Christ remplira notre cœur du parfum et de la douceur de son être, et nous amènera à l'adoration à ses pieds.

Mais, ne l'oublions pas, le parfum de Christ peut être répandu par ses rachetés, pour autant qu'ils suivent ses traces. Chaque trait, chaque perfection de la marche de Christ au travers de ce monde devrait être retrouvée dans les siens. Regardons, par exemple, les exhortations des épîtres. Chacune d'elles est calquée sur l'exemple de Christ, qui est lui-même la Parole vivante; et ainsi ce ne sont pas des obligations sèches et légales. Christ en nous, Christ notre vie, voilà ce que nous voyons dans l'épître aux Colossiens. Plus nous serons avec lui et occupés de lui, plus nous serons transformés à son image et plus le parfum de Christ se répandra autour de nous. L'apôtre Paul utilise ces mêmes termes en parlant de sa prédication: «Nous sommes la bonne odeur de Christ pour Dieu» (2 Corinthiens 2:15). Et un peu plus loin, il montre que notre témoignage résulte aussi bien de notre vie pratique que de nos paroles (4:7-11).

Et n'oublions pas non plus qu'un cœur rempli de Christ est armé contre les séductions du monde. Ceux qui l'aiment sont en mesure de discerner et d'apprécier sa beauté. Ils sentent sa présence, le parfum de ses paroles et de ses actes, là où d'autres ne voient rien. Ils vivent dans sa présence, ils sont tout entiers pour lui, et lui prend plaisir à se révéler à eux de manière que leur affection pour lui ne puisse qu'augmenter.

Il résulte de tout ceci que l'état de notre âme peut être jaugé par l'effet que le nom de Jésus exerce sur nous. Si la mention d'un être aimé sur la terre nous émeut, combien plus le nom de Christ, l'objet du cœur de Dieu, devrait-il éveiller en nous des sentiments qui s'expriment par la louange et l'adoration!

À suivre