Le nom au-dessus de tout nom

E. Dennett

1.  Les différents noms de Dieu

La simple lecture des Écritures montre qu'il a plu à Dieu de se révéler de façon graduelle et progressive. Il fut un temps où «des nuées et l'obscurité» étaient autour de lui (Psaumes 97:2). Mais Christ ayant accompli l'œuvre de l'expiation et glorifié Dieu dans tout ce qu'il est, le voile derrière lequel celui-ci demeurait a été déchiré du haut en bas. Alors, Dieu a pu en toute justice manifester la plénitude de ce qu'il est. C'est ainsi qu'il s'est révélé en Christ, sur la base de la rédemption.

Le fait que Dieu soit le même, dans sa nature et ses attributs, à quelque moment qu'il se soit révélé, en d'autres termes, le fait qu'il soit immuable, est une nécessité même de la perfection de son être. Cela dit, il est certain que les aspects sous lesquels il s'est présenté varient selon les époques. Ce sont ces différents aspects qui s'expriment dans les différents noms de Dieu.

«Sachez que je suis Dieu»

Le mot hébreu ÉLOHIM est le nom désignant ordinairement Dieu, l'Être divin auquel les hommes ont affaire et auquel ils ont des comptes à rendre. C'est un pluriel. Le singulier, ÉLOAH, se rencontre quelquefois, particulièrement dans le livre de Job. Ce mot est parfois utilisé pour désigner les dieux des païens, et c'est sans doute pour cette raison que la question du psaume 18 est posée: «Car qui est Dieu (Éloah), hormis l'Éternel (Jéhovah), et qui est un rocher, si ce n'est notre Dieu (Élohim)?» (verset 31). C'est que le véritable Éloah est l'Éternel et que le seul rocher est Élohim.

La raison du pluriel Élohim a été expliquée de différentes façons. Certains prétendent qu'il s'agit tout simplement, selon la coutume hébraïque, d'un pluriel d'excellence qui implique la grandeur et la perfection de celui dont on parle. D'autres affirment qu'il faut voir là l'intention divine de présenter la Trinité, l'unité des trois personnes: le Père, le Fils, et le Saint Esprit. A l'appui de cette affirmation, soulignons ce qui est dit en Genèse 1:26: «Et Dieu dit: Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance». En effet, le mot devant exprimer tout ce que Dieu est, toutes les personnes de la Trinité doivent y être représentées.

Il est vrai que cela ne pouvait pas être compris à l'époque. Ce n'est qu'au baptême du Seigneur Jésus que cette vérité de la Trinité a été pleinement révélée. Dieu parle alors du haut du ciel. Son Fils bien-aimé est sur la terre et l'Esprit Saint descend et demeure sur le Fils. Maintenant que Dieu est pleinement révélé et que le Saint Esprit a été envoyé — lui qui sonde les choses profondes de Dieu — nous pouvons regarder en arrière, et, enseignés de lui, découvrir beaucoup de choses qui n'avaient pu être comprises auparavant. C'est un danger, à l'heure actuelle, de ne voir les Écritures de l'Ancien Testament que selon la lumière restreinte que l'on en possédait au moment où elles ont été données. En réalité, leur signification profonde ne peut être saisie qu'en les considérant à la lumière du Nouveau Testament. Il n'est donc nullement déplacé d'affirmer que Dieu a choisi spécialement le mot Élohim pour exprimer la vérité de la Trinité. Par exemple, nous lisons dans la Genèse que Dieu a créé les cieux et la terre, et dans l'évangile selon Jean, il est dit de la Parole, qui plus tard est devenue chair: «Toutes choses furent faites par elle, et sans elle pas une seule chose ne fut faite de ce qui a été fait» (Jean 1:3). Par conséquent, nous savons que le Fils éternel est compris dans le mot Dieu de Genèse 1:1, et en méditant cela, nous percevons un peu plus la gloire personnelle de notre Rédempteur.

«Je suis le Dieu Tout-Puissant»

Aux patriarches, Dieu s'est fait connaître sous le nom de *Dieu Tout-Puissant, en hébreu: ELSHADDAI. On trouve la première mention de ce nom en Genèse 17:1: «Et l'Éternel apparut à Abram, et lui dit: Je suis le *Dieu Tout-Puissant, marche devant ma face et sois parfait» (voir aussi Genèse 28:3; 35:11; etc.). El signifie «le Fort», et est généralement traduit par *Dieu. Shaddaï, dont le sens est très voisin, évoque les attributs — exclusivement divins — de celui dont la puissance est sans limite, et qui se suffit à lui-même. On trouve une déclaration importante en Exode 6: «Et Dieu parla à Moïse, et lui dit: Je suis l'Éternel (Jéhovah1 ). Je suis apparu à Abraham, à Isaac, et à Jacob, comme le *Dieu Tout-Puissant; mais je n'ai pas été connu d'eux par mon nom d'Éternel (Jéhovah)» (versets 2, 3). Le nom de «Tout-Puissant» (Shaddaï) peut aussi se trouver seul. En 2 Corinthiens 6:17, 18, il est associé à celui de «*Seigneur» — forme répondant dans le Nouveau Testament à «l'Éternel» dans l'Ancien: «Je vous recevrai; et je vous serai pour Père, et vous, vous me serez pour fils et pour filles, dit le *Seigneur, le Tout-Puissant». Le Dieu qu'Abraham connaissait comme Shaddaï et qu'Israël connaissait comme Jéhovah prend à notre égard le nom de Père, dans cette relation intime dans laquelle il fait entrer par grâce ceux qui sont associés à Christ.

1 On s'accorde aujourd'hui à transcrire plutôt sous la forme YAHVEH, les quatre consonnes hébraïques: YHVH.

«Je suis l'Éternel»

Comme le montre le passage d'Exode 6, JÉHOVAH est le nom que Dieu prend spécialement dans sa relation d'alliance avec Israël. Il est traduit en français par «l'Éternel». Cela ne signifie pas que ce nom n'ait pas été utilisé avant que Dieu le communique à Moïse, mais depuis ce moment il est d'abord et surtout employé dans les relations de Dieu avec son peuple élu. Ce mot désigne celui qui existe par lui-même, «celui qui est, et qui était, et qui vient» (Apocalypse 1:4). Dérivé du verbe exister, ce terme exprime l'éternité, et par conséquent, l'immutabilité de Dieu. Il place devant notre âme celui qui est éternellement, celui qui existait avant les temps, celui qui demeure à travers les âges, celui qui restera après tous les temps. Il est «l'alpha et l'oméga, le commencement et la fin, le premier et le dernier»; et l'utilisation de ces expressions en Apocalypse 22:13 nous montre — sans contradiction possible — que le Jésus du Nouveau Testament est bien l'Éternel de l'Ancien.

«Béni soit le Dieu Très-Haut»

Le nom EL, qui se trouve parfois seul, et que nous avons déjà vu en relation avec Shaddaï, est aussi utilisé avec ÉLION, qui est traduit par le «Très-Haut» (Genèse 14:18-20). L'examen des différents passages où l'on trouve ce nom montre qu'il s'agit du nom de Dieu en rapport avec le règne millénaire. C'est celui qui est au-dessus de tous les faux dieux, de tous les démons et de toute puissance. Dans ce caractère, Dieu est présenté comme le «possesseur des cieux et de la terre» (Genèse 14:19). Nebucadnetsar a dû subir le jugement de Dieu afin d'apprendre que «le Très-Haut domine sur le royaume des hommes, et qu'il le donne à qui il veut». Nous voyons que ce grand roi en est venu à comprendre cette leçon puisque après avoir recouvré son esprit, il raconte lui-même: «Je bénis le Très-Haut, et je louai et magnifiai celui qui vit éternellement, duquel la domination est une domination éternelle, et dont le royaume est de génération en génération» (Daniel 4:25, 34).

De la même manière, Balaam utilise ce nom quand il est sur le point de parler de la gloire et de la suprématie futures d'Israël parmi les nations. Au psaume 91, Élion est associé à Shaddaï (le Tout-Puissant). «Celui qui habite dans la demeure secrète du Très-Haut logera à l'ombre du Tout-Puissant» (verset 1). Et au psaume 47, Élion se trouve avec Jéhovah. De plus, il est ajouté qu'il est «un grand roi sur toute la terre» (verset 2). Ces exemples sont intéressants en ce qu'ils nous montrent que c'est Dieu, un seul et même Dieu, qui se révèle lui-même aux hommes sous ces différents noms dans différentes relations.

«Tu es le Seigneur»

Les lecteurs des Écritures sont familiers avec le nom «Seigneur», qui traduit le mot hébreu ADONAÏ. Ce mot, dont la racine signifie Maître, n'est utilisé que pour Dieu, un Dieu qui a toute autorité sur ceux qui invoquent son nom. Il s'applique donc tout spécialement à Christ dans son élévation à la droite de Dieu. C'est ce qu'on peut voir au psaume 110: «L'Éternel a dit à mon Seigneur (Adonaï): Assieds-toi à ma droite, jusqu'à ce que je mette tes ennemis pour le marchepied de tes pieds» (verset 1). Lors d'un entretien où il confond ses adversaires, Jésus cite ce psaume et applique expressément le nom Adonaï à lui-même, comme étant le Christ, le Messie (Matthieu 22:42-44)2. Il montre que le Fils de David est également le Seigneur de David. Comme il le dit ailleurs, il est «la racine» aussi bien que «la postérité de David» (Apocalypse 22:16).

2 La version des LXX (traduction grecque de l'Ancien Testament, en usage au temps du Seigneur et des apôtres) rend par Kyrios, qui signifie Seigneur, aussi bien Jéhovah (l'Éternel) que Adonaï (le Seigneur). C'est la raison pour laquelle les citations de l'Ancien Testament dans le Nouveau comportent généralement «le Seigneur» à la place de «l'Éternel». Suivant l'exemple des LXX, bien des traductions récentes n'ont pas distingué les noms Jéhovah et Adonaï, et les ont rendus par «le Seigneur» — en anglais: the Lord, en allemand: der Herr, en italien: il Signore. (Réd.)

En Genèse 15:2, Abraham s'adresse à Dieu en disant «Seigneur Éternel» (Adonaï Jéhovah), exemple qui montre une fois de plus que tous ces noms divins sont utilisés pour un seul et même Dieu, même celui d'Adonaï, qui est spécialement donné à Christ dans son élévation au ciel. Le plein caractère d'Adonaï est manifesté en Philippiens 2:9-11.

Autres noms

Il y a encore d'autres titres divins. On trouve souvent «JAH» dans les livres poétiques. Ce mot est inclus dans l'expression «Alléluia», qui veut dire: «Louez Jah». Il est communément admis que Jah est une forme abrégée ou poétique de Jéhovah.

Il y a aussi l'expression que Dieu utilise quand il envoie Moïse pour délivrer son peuple: «JE SUIS CELUI QUI SUIS» et «JE SUIS». Ce sont deux formes dérivant d'un même mot qui signifie exister. La pensée qui en ressort est semblable à celle qu'évoque le nom de Jéhovah (qui provient du même verbe): c'est celle d'un être, d'une existence invariable.

Mentionnons enfin l'expression «LE MÊME», assez souvent attribuée à Dieu pour qu'on puisse la considérer comme un véritable nom de Dieu. «Je suis le Même» (Deutéronome 32:39; Ésaïe 41:4;…). «Tu es le Même» (Néhémie 9:6; Psaumes 102:27; Hébreux 1:12). Ce terme exprime le caractère immuable de Celui qui existe éternellement, sans jamais changer.

«La vraie lumière luit déjà»

Voilà donc différentes façons selon lesquelles Dieu s'est plu à se révéler. C'est une grâce ineffable de sa part d'avoir manifesté à son peuple ce qu'il est en lui-même. Il aurait pu rester caché à jamais dans la solitude de sa propre toute suffisance. Mais avant la fondation du monde, dans le lointain de l'éternité passée, il nous a élus en Christ «pour que nous soyons saints et irréprochables devant lui en amour» (Éphésiens 1:4). Toutefois, il n'a pas communiqué d'emblée ses conseils éternels. Le premier homme, Adam, est apparu sur la scène, comme homme responsable; et ce fut la chute. Puis, Dieu a entouré l'homme de ses soins durant des millénaires pour voir s'il pouvait porter du fruit à sa gloire. Il a été mis à l'épreuve jusqu'au moment de la croix. C'est alors que Dieu, après avoir démontré que l'homme avait tout perdu sur le terrain de sa responsabilité, a révélé la merveilleuse grâce qui était dans son cœur. Il a fait proclamer «l'évangile de Dieu… touchant son Fils (né de la semence de David, selon la chair, déterminé Fils de Dieu, en puissance, selon l'Esprit de sainteté, par la résurrection des morts), Jésus Christ, notre Seigneur» (Romains 1:1-4). En lui, Dieu a été pleinement révélé. Il est l'homme des conseils de Dieu. En lui, toutes les pensées du cœur de Dieu vont être accomplies. Les révélations partielles de l'Ancien Testament ont été dépassées devant celui qui est glorifié à la droite de Dieu, ou plutôt elles se sont fondues en lui. C'est là le message de l'évangile de la gloire du Christ, qui est l'image de Dieu.

Nom merveilleux qui rend visible,

Sur la terre où règne la nuit,

Dans sa splendeur inaccessible,

Le Dieu que jamais œil ne vit!

À suivre