Les prières du prophète Élie

J. Jeannin

Le temps est bien sombre en Israël lorsqu'Élie paraît sur la scène, pour l'éclairer de la lumière de Dieu. L'idolâtrie de Jéroboam est surpassée en ce temps-là par l'abomination des Sidoniens, et Baal triomphe. Dans le pays, peu nombreux sont ceux qui refusent de fléchir les genoux devant ce dieu étranger, et l'Éternel n'a plus de témoin pour proclamer sa gloire.

C'est alors que Dieu forme son serviteur, dans le secret des monts de Galaad, loin des festivités de Samarie et des autels idolâtres, pour être son témoin au jour fixé par lui. Élie sera cet homme-là parce qu'il possède les caractères requis pour une telle mission: communion avec Dieu, obéissance à la parole de Dieu, persévérance dans la prière: c'est ce dernier point que nous aurons plus particulièrement devant nous.

Élie est un homme qui se tient devant son Dieu; il réalise pleinement qu'il est dans sa lumière; aucune ombre venant du monde ou de lui-même ne l'obscurcit. Il vit dans la séparation du mal et peut, de ce fait, recevoir les communications des pensées de l'Éternel au sujet de son peuple.

La première prière d'Élie (Jacques 5:17)

L'apostasie de la nation avait, sans nul doute, conduit ce fidèle serviteur à supplier son Dieu dans la douleur et l'amertume de son âme. Mais que faire lorsque «la fervente supplication du juste» n'obtient pas de réponse? Persévérer. Alors l'Éternel lui fait discerner ce qu'il doit demander désormais: le jugement de ce peuple en discipline pour qu'il retourne à son Dieu. Il faut parvenir à la lecture de l'épître de Jacques pour y voir rapportée cette surprenante révélation.

Le ciel fermé au-dessus du pays, pas de pluie, pas de bénédiction! Ce châtiment était inscrit depuis longtemps dans le livre de Dieu, en conséquence de l'infidélité du peuple (Deutéronome 11:17; 28:23); mais la délivrance était promise aussi, par la confession et la prière (1 Rois 8:35). L'Éternel dévoile donc à son prophète qu'il doit en arriver à cette extrémité, devant la persistance et l'aggravation du péché d'Israël. Élie, nous pouvons bien le penser, ne devait éprouver aucun plaisir à voir le bon pays de la promesse transformé en terre de désolation et ses habitants consumés par la famine. Mais telle était la pensée de Dieu en vue de sa gloire et pour la délivrance de son peuple de l'idolâtrie. Élie priera donc avec instance pour que le ciel ne donne pas de pluie aussi longtemps que Dieu le jugera bon.

Nous sommes aussi appelés à prier pour le peuple de Dieu actuel. Nous avons bien conscience que nous ne savons pas toujours demander ce qu'il faut comme il convient. Cependant l'Esprit Saint nous vient en aide, dans la mesure où nous marchons dans un chemin droit avec une bonne conscience. Sachons aussi être «persévérants dans la prière» (Romains 12:13), comme Élie le fut. Dieu répond toujours à la prière de la foi, mais en son temps et selon ce qui sied à sa gloire.

La deuxième prière d'Élie (1 Rois 17:20, 21)

Élie est envoyé par l'Éternel dans la contrée de Sidon afin d'être nourri par une pauvre veuve sans ressource. Jésus lui-même y fera allusion (Luc 4:25), mais pour montrer comment le prophète est venu apporter la bénédiction dans cette terre étrangère. C'est aussi ce que Dieu a fait pour nous pendant qu'Israël se trouve sous la sentence de jugement.

La grâce de Dieu a pourvu au maintien de la vie dans cette maison de Sarepta, en réponse à la confiance de cette veuve. Celle-ci profite sans doute avec reconnaissance de la nourriture que Dieu renouvelle chaque jour de l'année. Mais cela ne suffit pas; il faudra que sa conscience soit placée dans la lumière de Dieu par une terrible épreuve: la mort de son fils unique. Quel travail divin dans l'âme labourée de cette pauvre femme! La mort est là, qui remet en mémoire son péché; mais elle va connaître le Dieu qui délivre de la mort par la résurrection.

Élie s'adresse alors à l'Éternel son Dieu. Son cri est d'abord un écho du pouvoir oppressant de la mort sur l'esprit de l'homme. Jésus lui-même n'a-t-il pas frémi dans son esprit en présence de ce redoutable ennemi, salaire du péché! Cependant si la mort est entrée dans cette maison, ce n'est pas pour son mal, mais pour son bien. Élie en prend conscience; il s'identifie avec l'enfant, dans son impuissance en face de la mort, mais il ouvre ainsi la voie à la toute-puissance de Dieu.

Le prophète reprend sa prière; mais quelle prière! Jamais homme, sans doute, n'a présenté une requête aussi grande, dans un langage d'une telle simplicité et d'une telle brièveté. Élie n'avait jamais eu l'exemple d'un mort rendu à la vie auparavant; c'est pourtant ce qu'il a demandé, et Dieu a répondu.

Nous n'aurons jamais à prier pour obtenir un tel miracle, mais sachons que la même puissance divine est à notre disposition, dans les épreuves les plus extrêmes. Les réponses de notre Père céleste seront toujours à la hauteur de notre foi et de notre confiance en lui.

La troisième prière d'Élie (1 Rois 18:36, 37)

Élie retourne maintenant en Israël. Il domine la scène dans ce chapitre et conduit toutes choses pour la gloire de Dieu. Le peuple est rassemblé à la montagne de Carmel pour être témoin de cette gloire; les prophètes de Baal sont tous là aussi, pour que leur impuissance soit démontrée et leur destruction assurée.

Élie répare l'autel de l'Éternel et le réédifie avec les douze pierres qui symbolisent l'unité du peuple de Dieu, malgré les apparences. Puis il prie en invoquant le Dieu des patriarches qui demeure le Dieu d'Israël, fidèle à ses promesses. Il faut que le cœur du peuple revienne à ce seul Dieu. Lui n'abandonne pas cette nation coupable et passible du feu de son jugement. Cependant le feu ne tombera pas sur elle, mais sur l'holocauste, selon la prière du prophète. Belle image de Celui qui viendra un jour se placer en sacrifice sous le jugement divin à la place d'Israël!

Dieu veut aussi aujourd'hui ramener nos cœurs à lui. Soyons des intercesseurs, comme Élie; peut-être sera-t-il en peine de notre misère et nous répondra-t-il, en vertu du sacrifice placé un jour pour nous sous le feu de son jugement.

La quatrième prière d'Élie (1 Rois 18:42; Jacques 5:18)

Sur la montagne, Élie a prié l'Éternel devant tout son peuple; le feu est descendu du ciel et les assistants sont tombés sur leurs faces. Après l'exécution du jugement sur les prophètes idolâtres, Élie remonte en ce même lieu. Là, seul à seul avec son Dieu, il va se courber en terre devant lui et mettre sa face entre ses genoux. Méditons sur ces attitudes du prophète. Quelle noblesse dans son maintien et dans son invocation en face de la foule! Quelle humilité profonde dans son attitude maintenant, dans la conscience de sa petitesse en face de la grandeur du Dieu des cieux! Prenons exemple sur cet éminent serviteur de Dieu.

Il sait que Dieu va répondre (verset 1); il le prédit au roi Achab (verset 41), mais sa supplication n'en est pas moins ardente et persévérante. Il sait que Dieu compte sur la patience de sa foi avant de répondre. Son jeune homme a le temps de monter sept fois au sommet de la colline et de constater que le ciel reste bleu; cependant Élie continue à prier, prosterné en terre. Il reçoit enfin le signe: derrière ce nuage qui monte, petit comme la main d'un homme, sa foi discerne la main de Dieu. Il sait qu'il est exaucé.

Comme Élie, reconnaissons que devant Dieu nous ne sommes que «poussière et cendre»; mais ne doutons pas de son écoute. Il peut nous faire attendre à sa porte le temps qu'il juge nécessaire, mais il répond toujours.

Ainsi, Élie nous a appris cette grande leçon: la dépendance de Dieu marquée par la prière est la véritable source de la puissance. Élie a demandé à Dieu quatre choses impossibles: que le ciel se ferme, puis que le ciel s'ouvre à la demande d'un homme; qu'un mort revienne à la vie; et que le feu descende du ciel! Telle est la grandeur de la foi, non pas seulement celle d'un homme de Dieu exceptionnel, mais celle «d'un homme ayant les mêmes passions que nous», la même nature et les mêmes faiblesses. Dieu n'est pas limité dans sa puissance en notre faveur. S'il a accompli ces miracles en réponse à cet homme fidèle, il peut le faire encore. C'est une question de foi, et de fidélité.