De vrais adorateurs

E. Coulon

Quelques remarques au sujet de l'entretien du Seigneur avec la Samaritaine (Jean 4:19-24)

Le lieu où il faut adorer

«La femme lui dit: Nos pères ont adoré sur cette montagne-ci, et vous, vous dites qu'à Jérusalem est le lieu où il faut adorer. Jésus lui dit: Femme, crois-moi: l'heure vient que vous n'adorerez le Père, ni sur cette montagne, ni à Jérusalem».

Il n'y a plus de lieu déterminé, d'endroit géographique, pour l'adoration. À Jérusalem se trouvait la maison de Dieu. Mais en Matthieu 23:38, on la voit perdre ce caractère. Le Seigneur la désigne aux Juifs comme étant «votre maison», qui est «laissée déserte». «Cette montagne» est la montagne de Garizim, sur laquelle un temple, détruit environ un siècle avant Jésus Christ, était resté un lieu sacré pour les Samaritains.

Le Seigneur révèle que, désormais, ni cette montagne, symbolisant les lieux consacrés par la religion humaine, ni Jérusalem, le lieu choisi par Dieu pour son peuple terrestre, ne sont les lieux d'adoration désignés de Dieu pour les chrétiens.

Où est l'habitation de Dieu dans le temps de la grâce? Nous trouvons la réponse en Éphésiens 2:19-22: «Vous êtes concitoyens des saints et gens de la maison de Dieu, ayant été édifiés sur le fondement des apôtres et prophètes, Jésus Christ lui-même étant la maîtresse pierre du coin,… en qui, vous aussi, vous êtes édifiés ensemble, pour être une habitation de Dieu par l'Esprit». Il s'agit de l'Église, une «maison spirituelle» constituée de «pierres vivantes» (1 Pierre 2:5).

L'objet de l'adoration

Le Seigneur dit: «Les vrais adorateurs adoreront le Père…» et «Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l'adorent…». Il mentionne l'adoration du Père et celle de Dieu.

Lorsque nous adorons, nous pouvons nous oublier nous-mêmes, oublier jusqu'à nos bénédictions, pour être occupés de ce que Dieu est en lui-même, tel qu'il s'est révélé en Christ. «Personne ne vit jamais Dieu; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l'a fait connaître» (Jean 1:18). Jésus dit: «Celui qui m'a vu, a vu le Père» (Jean 14:7).

Dieu s'était fait connaître autrefois comme le Dieu créateur, le Dieu tout-puissant, le Dieu saint, et même le Dieu de grâce et de bonté, mais il a fallu qu'il soit manifesté en chair, pour pouvoir être pleinement révélé. Il a fallu le Fils pour révéler le Père, et pour nous introduire, après sa résurrection, dans la relation dans laquelle lui-même se trouve avec son Dieu et Père (cf. Jean 20:17).

Les caractères de l'adoration

«Les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité.» «Il faut que ceux qui l'adorent, l'adorent en esprit et en vérité.»

Chacun de ces deux caractères — «en esprit» et «en vérité» — a un côté relatif à Dieu et un côté relatif à l'adorateur.

En esprit

Adorer en esprit, c'est adorer selon la vraie nature de Dieu. «Dieu est esprit» et l'adoration qui lui est rendue doit correspondre à sa nature, c'est-à-dire être spirituelle. Ceci implique la mise de côté des formes, des cérémonies et de toute la religiosité dont la chair est capable.

De plus, cette adoration ne peut être produite que dans la puissance du Saint Esprit, personne divine habitant dans le croyant et dans l'Assemblée. Il est la puissance agissant en nous pour produire l'adoration. En effet, rien de la chair ne peut plaire à Dieu, dans quelque service que ce soit, et tout particulièrement dans l'adoration.

En vérité

Adorer en vérité, c'est adorer Dieu pour ce qu'il est vraiment, selon la révélation qu'il nous a donnée de lui-même. Dieu n'est plus un Dieu caché, comme pour Israël autrefois, mais il s'est maintenant révélé dans la pleine lumière de ce qu'il est. Il est aussi le Père qui s'est révélé dans sa grâce. Quel privilège pour nous qui connaissons Jésus, de connaître celui que Jésus nous a révélé!

En ce qui nous concerne, adorer en vérité, c'est adorer non avec des formules toutes faites, même justes, mais c'est exprimer ce que nous avons réellement dans le cœur. C'est dire simplement ce que l'Esprit Saint met en nous, ce qui fait notre bonheur et notre joie; c'est parler de celui qui remplit notre cœur. Dieu veut des sentiments vrais provenant de cœurs dans sa lumière. Combien cela devrait nous éloigner de redites et d'une liturgie préparée d'avance!

En assemblée, celui qui loue n'est que la bouche de l'ensemble. Il exprime ce qui est vraiment le mouvement des cœurs de ceux qui sont là. Ceci implique une vraie dépendance du Saint Esprit; lui seul peut conduire tous les cœurs dans un même élan et dans une même pensée. L'harmonie qui en résulte est divine, à la gloire de Dieu.

La nouveauté de l'adoration en esprit et en vérité

Les Samaritains n'adoraient ni en esprit ni en vérité. Les Juifs adoraient Dieu en vérité, quoique la révélation ait été incomplète, mais ils ne l'adoraient pas en esprit. Leur adoration impliquait un culte fait de sacrifices matériels, selon des rites donnés de Dieu.

Toutefois, le Seigneur précise que «le salut vient des Juifs» (verset 22). Ce qui avait précédé la venue du Christ annonçait ce qu'il serait. En particulier, les quatre sacrifices lévitiques nous parlent de lui, sous une forme symbolique, sous des angles différents:

  • l'holocauste (litt.: brûlé tout entier — Lévitique 1) nous parle de son sacrifice en parfum de bonne odeur pour Dieu (voir Éphésiens 5:2),
  • l'offrande de gâteau (Lévitique 2) évoque sa vie de souffrance et de dévouement,
  • le sacrifice de prospérités (Lévitique 3) est une figure de Christ comme source de nos bénédictions et fondement de notre culte,
  • le sacrifice pour le péché (Lévitique 4) annonce Christ en tant que victime pour nos péchés.

Ces figures de l'Ancien Testament nous aident à discerner les différents aspects de l'œuvre de Christ et la gloire de sa personne. Nous n'offrons plus à Dieu des sacrifices matériels, mais nous lui présentons Celui qui est l'accomplissement parfait de tout ce qu'ils figuraient.

Nous pouvons alors adorer Dieu selon la véritable révélation qu'il a faite de lui-même en Christ («en vérité»), et selon sa nature même («en esprit»).

Qui sont les adorateurs?

«L'heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père».

La relation entre Dieu et l'adorateur est désormais une relation père-enfant. Les vrais adorateurs sont ceux qui peuvent appeler Dieu leur Père. Ils sont enfants de Dieu. «À tous ceux qui l'ont reçu, il leur a donné le droit d'être enfants de Dieu, savoir à ceux qui croient en son nom» (Jean 1:12). «Car tous ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. Car vous n'avez pas reçu un esprit de servitude pour être derechef dans la crainte, mais vous avez reçu l'Esprit d'adoption, par lequel nous crions: Abba, Père!» (Romains 8:14).

Les cultes humains présentés par un mélange de croyants et d'incrédules sont un non-sens.

Autrefois en Israël, la relation entre l'adorateur et Dieu impliquait la responsabilité de l'homme: «Si vous écoutez attentivement ma voix et si vous gardez mon alliance, vous m'appartiendrez en propre d'entre tous les peuples; car toute la terre est à moi; et vous me serez un royaume de sacrificateurs, et une nation sainte» (Exode 19:5, 6). Dans le christianisme, la relation entre l'adorateur et Dieu est basée uniquement sur la grâce de Dieu. Bien sûr, ce n'est que dans la mesure où cette relation, profonde et intime, est vécue individuellement, où nous sommes réellement en communion avec notre Père, que l'adoration peut remplir nos cœurs et s'exprimer dans un culte collectif.

Puissions-nous répondre à ce désir de notre Père, lui qui a tout fait pour que nous soyons, déjà sur la terre, ces vrais adorateurs qu'il recherche, en attendant le jour où nous le serons en perfection dans sa maison!