Cette nuit-là

Lucien Jouve (1997)

Plusieurs passages des Écritures nous parlent de nuits mémorables, de nuits où Dieu a travaillé. Elles concernent avant tout la rédemption et la résurrection.

La nuit de la Pâque

Elle est sans égale dans toute l'histoire du peuple juif, cette nuit où Dieu prend en main la délivrance de son peuple. Une délivrance que personne ne pouvait opérer à sa place. C'est d'abord une nuit de jugement, une nuit d'épouvante pour le roi qui a endurci son cœur et que Dieu endurcit maintenant. «Je passerai par le pays d'Égypte cette nuit-là, et je frapperai tout premier-né» (Exode 12:12). «Et le Pharaon se leva de nuit, et tous ses serviteurs, et toute l'Égypte» (verset 30).

Mais comment échapper à cette nuit de jugement?

«Vous prendrez chacun un agneau» (verset 3). «Et toute la congrégation… l'égorgera entre les deux soirs. Et ils prendront de son sang, et en mettront sur les deux poteaux et sur le linteau de la porte… et ils en mangeront la chair cette nuit-là» (versets 6-8).

Dieu donne et ordonne. Il donne le moyen et ordonne la manière de s'en servir. L'agneau est égorgé; Dieu peut épargner son peuple. «Cette nuit-là», le peuple est délivré du jugement et de l'Égypte. Dieu fait tout et il fait des merveilles (Psaumes 78:12).

Est-il étonnant que «cette nuit-là» soit «à garder pour l'Éternel par tous les fils d'Israël, en leurs générations»? (verset 42).

Mais l'ombre nous conduit à la réalité, c'est-à-dire à une rédemption plus grande encore, celle que nous avons dans le Christ Jésus: «une rédemption éternelle». Considérons donc:

La nuit où il fut livré

Les hommes n'ont eu aucun repos qu'ils n'aient livré le Fils de Dieu. C'était «leur heure et le pouvoir des ténèbres» (Luc 22:53). Mais dans cette nuit mémorable, il est «livré par le conseil défini et par la préconnaissance de Dieu». Les hommes accomplissent sans le savoir toutes les choses que la main de Dieu et son conseil «avaient à l'avance déterminé devoir être faites» (Actes des Apôtres 2:23; 4:28).

Terrible nuit pour le Sauveur! Il doit d'abord subir un premier interrogatoire chez Anne. Il doit supporter aussi le reniement de Pierre. Il est traduit ensuite devant Caïphe et le sanhédrin. Au matin, il comparaît devant Pilate, qui l'envoie à Hérode. Celui-ci le renvoie à Pilate après l'avoir méprisé. Puis, unanime, la foule s'écrie: «Crucifie-le».

À cette nuit dans laquelle il fut livré va succéder une autre nuit, plus extraordinaire encore dans le monde physique:

La nuit de l'expiation

«Depuis la sixième heure, il y eut des ténèbres sur tout le pays, jusqu'à la neuvième heure» (Matthieu 27:45).

Dans cette nuit-là, une nuit au milieu du jour, les hommes, qu'ils soient remplis de haine, d'indifférence ou de sentiments mélangés pour Jésus, sont entièrement mis de côté. «Le grand luminaire» lui-même est obscurci, les ténèbres entourent le Calvaire, alors que les clameurs homicides se sont tues. Dans cette nuit extraordinaire, on entend un cri de détresse: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?» (verset 46).

Dans cette nuit-là, Dieu prend en main la rédemption de tous ses élus, frappe son Fils pour les épargner. De son côté, ce Fils pose le fondement de l'accomplissement de tous les conseils de Dieu, de toutes ses promesses, de tout son plaisir, et cela en expiant le péché, en subissant lui-même le jugement dû au péché, en assumant lui-même la responsabilité du péché devant Dieu.

Alors il a dû dire: «Mon Dieu! je crie… de nuit, et il n'y a point de repos pour moi» (Psaumes 22:2). Mais cette nuit-là, unique dans l'histoire de la terre, a une fin, elle aussi. Une fin marquée par un cri de victoire: «C'est accompli».

Mais, pour nous, le Sauveur doit connaître encore une autre nuit; c'est:

La nuit du tombeau ou de la mort

 «Père! entre tes mains je remets mon esprit. Et ayant dit cela, il expira» (Luc 23:46). Des mains pieuses descendirent le corps de Jésus de la croix, l'enveloppèrent d'un linceul et le mirent dans un sépulcre taillé dans le roc.

Oh! «le corps de Jésus», le corps du Fils de Dieu, couché dans la mort!

Jésus doit connaître la mort, jugement de Dieu, salaire du péché; quel spectacle! La Parole l'évoque avec des expressions poignantes, avec des types saisissants:

«Tu m'as mis dans la poussière de la mort» (Psaumes 22:15).

«Les filets de la mort m'ont surpris» (Psaumes 18:5).

«Les cordeaux de la mort m'avaient environné, et les détresses du shéol m'avaient atteint» (Psaumes 116:3).

C'est «le Jourdain qui regorge par-dessus tous ses bords» (Josué 3:15).

C'est la verge d'Aaron, bâton sec d'amandier.

C'est Jonas dans le ventre du cétacé.

Le temple de son corps est détruit (Jean 2:19).

Le grain de blé est tombé en terre (Jean 12:24)

Dans cette nuit sépulcrale où le prince des ténèbres semblait remporter la victoire, la gloire de Dieu veillait au tombeau, comme l'indique le bâton d'amandier d'Aaron. (L'amandier: l'arbre qui veille — Jérémie 1:11).

Aux horreurs d'une nuit profonde succède le jour le plus beau. Les dernières ombres de cette terrible nuit doivent céder devant l'astre du jour. «Le matin… comme il faisait encore nuit» (Jean 20:1), «de fort grand matin… comme le soleil se levait» (Marc 16:2), Jésus est ressuscité.

«Voici, il se fit un grand tremblement de terre; car un ange du Seigneur, descendant du ciel, vint et roula la pierre, et s'assit sur elle. Et son aspect était comme un éclair, et son vêtement blanc comme la neige» (Matthieu 28:2, 3).

Dieu montre «l'excellente grandeur de sa puissance». C'est «l'opération de la puissance de sa force, qu'il a opérée dans le Christ, en le ressuscitant d'entre les morts» (Éphésiens 1:19, 20).

Dans le livre des Actes, les apôtres proclament d'une même voix: «Dieu l'a ressuscité».

«L'Éternel commanda au poisson, et il vomit Jonas sur la terre» (Jonas 2:11).

La puissance du Jourdain — fleuve de la mort — démontre la puissance supérieure de l'arche qui le fend.

C'est Samson se levant au milieu de la nuit et arrachant les portes de la ville qui le gardait prisonnier (Juges 16:3).

C'est le bâton d'amandier, qui le lendemain matin avait fleuri (Nombres 17:8).

C'est celui qui avait dit de sa vie, «j'ai le pouvoir de la reprendre» (Jean 10:18).

C'est le grain de blé qui germe et va porter du fruit (Jean 12:24).

Ce sont «les liens», «les cordeaux», «le filet» de la mort qui se rompent.

«Étant ressuscité le matin,… il apparut premièrement à Marie de Magdala… Elle, s'en allant, l'annonça à ceux qui avaient été avec lui, qui étaient dans le deuil et pleuraient» (Marc 16:9, 10). «Les disciples se réjouirent donc quand ils virent le Seigneur» (Jean 20:20).

«Le soir, les pleurs viennent loger avec nous, et le matin il y a un chant de joie» (Psaumes 30:5).

Quelques autres nuits qui illustrent certaines des nôtres

Des nuits de délivrance

Comme Ézéchias, on éprouve que c'est «un jour de détresse et de châtiment et d'opprobre» (2 Rois 19:3). On déplore la situation devant Dieu, on le prie, s'adjoignant un co-intercesseur sympathisant, «on crie au ciel» (2 Chroniques 32:20). Dieu travaille pour nous «cette nuit-là», et «au matin» il y a délivrance (2 Rois 19:35).

Des nuits de communion dans la souffrance

«Je me souviens de toi sur mon lit, je médite de toi durant les veilles de la nuit» (Psaumes 63:6).

Certes, il y a:

Des nuits de découragement

«Au jour de ma détresse j'ai cherché le Seigneur; ma main était étendue durant la nuit et ne se lassait point; mon âme refusait d'être consolée… Tu tiens ouvertes mes paupières, je suis inquiet, et je ne parle pas» (Psaumes 77:2, 4).

Mais aussi:

Des nuits où Dieu nous parle, nous instruit de ses voies, nous encourage

«Et Samuel était couché dans le temple de l'Éternel… et l'Éternel appela Samuel… Et l'Éternel dit à Samuel…» (1 Samuel 3:3, 10).

«Je bénirai l'Éternel qui me donne conseil; durant les nuits même mes reins m'enseignent» (Psaumes 16:7).

«Et la nuit suivante, le Seigneur se tint près de lui et dit: Aie bon courage; car comme tu as rendu témoignage des choses qui me regardent, à Jérusalem, ainsi il faut que tu rendes témoignage aussi à Rome» (Actes des Apôtres 23:11; voir aussi Actes 27:23, 24).

Et puis, il est en vue, ce lieu béni où «il n'y aura plus de nuit». «La gloire de Dieu l'a illuminé, et l'Agneau est sa lampe» (Apocalypse 21:23-25).