Par ceci nous avons connu l'amour (1 Jean 3:16-24)

F.B. Hole

«Par ceci nous avons connu l'amour, c'est que Lui a laissé sa vie pour nous; et nous, nous devons laisser nos vies pour les frères» (1 Jean 3:16).

Si nous voulons avoir une vue juste de ce qu'est l'amour, nous devons arrêter nos pensées sur l'excellence et la gloire qui sont cachées dans ce «Lui», en contraste avec le péché, la dépravation et la misère qui caractérisaient le «nous». Il est très important que nous le fassions, car c'est seulement ainsi que nous pouvons être rendus capables de faire face à l'obligation qui a été mise sur nous en conséquence de cette inexprimable faveur. Christ a manifesté l'amour en laissant sa vie pour nous. Le résultat en est que nous vivons de sa vie, qui est une vie d'amour. Une chaîne admirable est placée ainsi devant nous: Il aimait; il a donné sa vie pour nous; nous vivons de sa vie; nous aimons.

Et maintenant, voyons l'obligation. «Nous devons laisser nos vies pour les frères.» L'amour, en nous, doit aller aussi loin que cela. C'est ce qu'ont fait Prisca et Aquilas envers Paul puisqu'ils ont, pour sa vie, «exposé leur propre cou» (Romains 16:4). L'auraient-ils fait pour quelque croyant humble et sans distinction particulière, nous demandons-nous. Il est probable que oui, car ils sont placés en tête de la longue liste des croyants honorés qui sont salués en Romains 16. Quoi qu'il en soit, voilà jusqu'où va l'amour qui est de qualité divine.

Si l'amour est appelé à aller aussi loin que cela, à plus forte raison ira-t-il jusqu'à tout autre point situé en deçà de celui-là. Il y a beaucoup de manières de laisser sa vie pour ses frères sans que cela implique la mort, ou un réel danger de mort. Ceux de la maison de Stéphanas, par exemple, s'étaient «voués au service des saints» (1 Corinthiens 16:15). Ils n'avaient pas abandonné leur vie pour les frères, mais ils leur avaient consacré leur vie. Ils servaient Christ en servant ses membres sur la terre; ils manifestaient l'amour d'une manière pratique.

L'amour de Dieu demeurait en eux, et il doit demeurer en nous, ainsi que le montre le verset 17. S'il y demeure, il doit nécessairement jaillir au-dehors, envers ceux qui sont enfants de Dieu. Dieu n'a aucun besoin auquel nous aurions à pourvoir. Le bétail sur mille montagnes serait à sa disposition, s'il en avait besoin. Ce sont les enfants de Dieu qui ont des afflictions et des besoins dans ce monde. La manière pratique de montrer notre amour pour Dieu est de prendre soin de ses enfants, lorsque nous les voyons dans le besoin. Si nous possédons en suffisance les biens de ce monde et que nous refusons d'avoir compassion de notre frère qui en manque, — si nous préférons nous rassasier tout seuls, il est certain que l'amour de Dieu ne demeure pas en nous.

Soulignons ici un mot très caractéristique de l'épître, le verbe demeurer. Bien qu'utilisé dans des sens et des contextes assez différents, ce mot répété nous aide à garder en mémoire la continuité de la pensée de l'apôtre. Comme il s'occupe de ce qui est fondamental et essentiel dans la vie et la nature divines, il a nécessairement à parler de choses qui demeurent.

Le verset 18 n'est pas adressé à des petits enfants mais à tous les enfants de Dieu, indépendamment de leur croissance spirituelle. Nous devons tous nous souvenir que l'amour n'est pas un simple sentiment, une affaire de mots affectueux sortant de notre bouche. C'est une affaire d'action et de réalité. Selon le verset 16, l'amour que nous avons connu ne consistait pas simplement en des mots, mais il s'est manifesté par un acte de dévouement suprême. L'amour de Dieu demeurait en Christ et il a laissé sa vie pour nous. Si l'amour de Dieu demeure en nous, nous exprimerons notre amour envers nos frères par des actes, et non par des paroles seulement.

Si nous aimons ainsi en vérité, il sera manifeste que nous sommes de la vérité (verset 19). Nous sommes pour ainsi dire engendrés de la vérité, et par conséquent elle se manifeste elle-même au travers de nos actions. Ainsi, non seulement ceux qui nous entourent sont assurés que nous sommes de la vérité, mais nous acquérons de l'assurance pour nos propres cœurs devant Dieu. Un homme peut acheter un pommier dont on lui a affirmé qu'il est d'une certaine variété; pour l'en convaincre, on peut lui remettre un certificat signé par l'horticulteur qui a élevé cet arbre. C'est bien, mais une erreur est toujours possible. C'est seulement si, à la saison des fruits, il recueille sur cet arbre des pommes de la bonne variété, qu'il possédera à ce sujet une assurance aussi parfaite que possible. Quand l'amour et la vérité de Dieu portent leurs fruits dans la vie, et cela par des actions, nos cœurs peuvent bien être assurés.

Hélas! cette conviction peut manquer. En effet, beaucoup pourraient objecter que de tels fruits désirables leur font souvent défaut. Et c'est justement ce que l'apôtre anticipe dans le verset suivant (verset 20). En considérant ces choses, nos cœurs nous condamnent.

Combien solennel, alors, est le fait que Dieu est plus grand que notre cœur et qu'il sait toutes choses! Solennel et cependant bienheureux! Voyons comment cette certitude a opéré dans le cœur de Simon Pierre, dans le récit de Jean 21.

Pierre, qui s'était vanté de son amour pour le Seigneur avec tant d'assurance, a remarquablement échoué lorsqu'il s'est agi de le mettre en pratique. En effet, il a renié trois fois Jésus, et cela avec serments et imprécations. Alors, le Seigneur l'interroge à trois reprises sur le même sujet, en sondant ainsi sa conscience. Au lieu d'avoir de l'assurance, Pierre était condamné par son propre cœur, bien que dans le fond, il savait qu'il aimait vraiment le Seigneur. Si Pierre avait une certaine conscience de son manquement, il n'en voyait pas toute la profondeur; mais le Seigneur qui savait toutes choses, lui, la voyait. Et encore pour la même raison, il savait également qu'en dépit de ce manquement, un authentique amour était dans ce cœur. Ainsi Pierre dit: «Seigneur, tu connais toutes choses, tu sais que je t'aime». Il était heureux de se rejeter sur le fait que Dieu est plus grand que notre cœur et qu'il sait toutes choses. Puissions-nous faire comme lui lorsque nous sommes dans une situation semblable!

Par contre, il arrive — Dieu en soit remercié! — que nos cœurs ne nous condamnent pas (verset 21), que la vie, l'amour et la vérité de Dieu soient actifs dans nos âmes, s'exprimant de manière pratique. C'est alors que nous avons confiance et hardiesse devant Dieu. Nous avons liberté en sa présence. Nous pouvons lui exposer nos requêtes avec l'assurance qu'il y sera répondu et que nous recevrons au temps convenable ce que nous avons désiré.

Au verset 22, l'expression «quoi que» nous offre un chèque en blanc, nous laissant le soin de le remplir. Mais le «nous» qui l'accompagne est limité par ce qui suit aussi bien que par ce qui précède. Il s'agit de ceux que leur propre cœur ne condamne pas, de ceux qui gardent les commandements du Seigneur et qui pratiquent les choses qui sont agréables devant lui. C'est à eux que peut être confié le chèque en blanc. Les croyants qui aiment en action, et non pas simplement en paroles, sont marqués par cette obéissance qui plaît tant à Dieu. Celui qui est caractérisé par l'amour et l'obéissance aura ses pensées et ses désirs en harmonie avec ceux de Dieu. Ainsi, ce qu'il demandera sera selon Sa volonté, et par conséquent, il recevra les choses qu'il désire.

Nous gardons Ses commandements. Mais il y a un commandement qui ressort de manière particulière, il a pour objet deux choses: la foi et l'amour (verset 23). Nous devons croire au nom de Jésus Christ, le Fils de Dieu, puis nous aimer l'un l'autre ainsi qu'il l'a commandé à ses disciples, notamment en Jean 13:34, 35. Nous reconnaissons ici deux choses qui sont très souvent mentionnées ensemble dans les épîtres. Paul n'était pas allé à Colosses, mais il rendait grâce à Dieu à leur sujet. «Ayant ouï parler de votre foi dans le Christ Jésus — dit-il — et de l'amour que vous avez pour tous les saints» (Colossiens 1:4). Ces deux choses bien connues sont la preuve d'une conversion réelle, l'évidence d'un authentique travail de Dieu.

Ce qui nous est peut-être moins familier, c'est que l'un et l'autre soient considérés comme des commandements. Il vaut la peine de noter soigneusement que, de tous les apôtres, Jean est celui qui met le plus d'emphase sur les commandements qui sont donnés aux chrétiens. Il a écrit alors que les autres apôtres s'en étaient allés, et que la tendance à transformer la grâce en permissivité s'accentuait; de là, nous le croyons, cette insistance particulière. Il n'y a aucun commandement de loi à pratiquer pour établir notre justice devant Dieu; mais il y a des commandements malgré tout. Le but de ce que Jean nous déclare dans son épître est que nous puissions être introduits dans la communion avec Dieu. Si nous entrons dans cette communion, nous découvrirons bientôt les commandements et il n'y a rien d'incompatible entre les deux. Ils sont entièrement en accord, car ce n'est que par l'obéissance aux commandements que la communion peut être goûtée et maintenue.

Ceci est mis en relief au verset 24, où nous trouvons que c'est le croyant marchant dans l'obéissance qui demeure en Christ. À la fin du chapitre précédent, les enfants — toute la famille de Dieu — sont exhortés à demeurer en lui; c'est là ce qui conduit à une vie chrétienne vraie et fructueuse. Ici nous voyons que le fait de demeurer dépend de l'obéissance. Les deux choses vont ensemble, agissant et réagissant l'une sur l'autre. Celui qui demeure obéit, mais il est également vrai que celui qui obéit demeure.

Mais l'obéissance mène à ce que lui demeure en nous, et non seulement à ce que nous demeurions en lui. Si nous demeurons en lui, nous tirons nécessairement de lui toutes les sources de notre vie spirituelle, et comme notre vie pratique procède ainsi de lui, c'est sa vie qui vient se manifester en nous, et il est vu comme demeurant en nous. Ici, nous croyons que Jean pose comme principe ce que Paul déclare être sa propre expérience en Galates 2:20. C'était parce qu'il vivait «dans la foi au Fils de Dieu» qu'il pouvait dire: «Christ vit en moi».

Par l'Esprit qui nous a été donné, nous savons que Christ demeure en nous (verset 24). L'Esprit est l'énergie de la vie nouvelle que nous avons en Christ, et d'autres passages le désignent expressément comme l'Esprit de Christ. Ceux qui nous entourent peuvent savoir que Christ demeure en nous en observant quelques traits de son caractère manifesté à travers nous. Quant à nous, nous le savons par son Esprit qui nous a été donné.

Au chapitre 2, il est parlé du Saint Esprit comme étant l'onction, donnant même aux petits enfants une capacité qui leur permet de connaître la vérité; mais ici il est présenté comme l'agent par lequel Christ demeure en nous, afin que nous puissions le manifester ici-bas. L'Esprit était aussi là afin de donner expression à la parole de Dieu. C'est ce qu'il a fait au commencement par le moyen des apôtres et des prophètes qu'il a inspirés. Il est la puissance par laquelle la parole de Dieu est donnée, aussi bien que la puissance par laquelle elle est reçue.