Des chemins de bénédiction (fin)

Pierre-Éric Fuzier

Pensées sur le deuxième livre des Psaumes

4. Le chemin de la communion et de la louange dans le désert — Psaumes 61 à 67

(Lire d'abord: Psaumes 61: 1-4; 62: 1-3, 9-12; 63: 1-3; 64: 1; 65: 1, 2; 66: 1-4; 67: 1-2.)

Dans les psaumes 52 à 59, les croyants, confrontés à la puissance de l'ennemi et à l'oppression du monde, exprimaient leur profond désir d'une intervention du Seigneur.

Dans le psaume 60, les épreuves dures et amères sont ressenties comme une discipline du Seigneur.

Dans les psaumes 61 à 67, l'épreuve présente un autre caractère: traversée avec Dieu, elle conduit l'âme à la communion dans le désert et à l'anticipation de la louange dans sa maison. La prière caractérise les quatre premiers psaumes de cette série, la louange les trois autres.

L'ennemi est là, mais Dieu est le salut et le refuge des siens. On est frappé de toutes les expressions qui évoquent le secours et la protection de Dieu: le rocher, le refuge, une forte tour et une haute retraite. C'est en lui que l'âme trouve son abri, c'est avec lui qu'elle jouit d'une communion paisible dans le désert.

Le psaume 61 exprime la joie de ce que Dieu est et fait pour les siens, pour ceux qui crient vers lui dans l'accablement de leur cœur. Ils trouvent, en réponse à leur prière, la protection (verset 3) et la communion de leur Dieu, et se réjouissent dans l'héritage qui leur est assuré (verset 5) et plus encore en pensant au roi, Christ, en qui repose toute bénédiction.

Au psaume 62, nous trouvons le repos de l'âme, paisible repos en Dieu qui la rend inébranlable (versets 2, 6), malgré les assauts de l'ennemi (verset 3). Que sont les hommes? Vanité et mensonge, alors qu'en Dieu est la force et la bonté (versets 9-12). Quant à nous, à qui cette force et cette bonté ont été révélées de façon encore plus merveilleuse, encourageons-nous l'un l'autre à nous confier en lui en tout temps (verset 8).

Le psaume 63 exprime la joie profonde que l'âme, au milieu d'un monde qui ne lui offre aucun rafraîchissement, peut trouver en Dieu lui-même. Il est son Dieu, un Dieu connu personnellement, dans la communion du sanctuaire (verset 2), dans les méditations du cœur (verset 6) et dans les leçons de l'épreuve (verset 7).

Au psaume 64, le fidèle est encore confronté au méchant, et s'en remet «à celui qui juge justement» (1 Pierre 2: 23).

Les épreuves traversées avec le Seigneur, la communion goûtée dans le désert «à l'ombre de ses ailes», la certitude d'une délivrance au moment même où l'ennemi, ayant fini ses machinations, croit triompher, tout cela conduit le croyant à anticiper dans ses cantiques la pleine délivrance. La pensée de la bénédiction du peuple en Sion (65: 1), de sa joie dans la maison de Dieu, dans son saint temple (65: 4; 66: 13), et non plus dans sa tente, refuge au milieu des peines de ce monde (61: 4), le conduisent progressivement à élargir sa louange à la bénédiction de toutes les nations (65: 5, 8; 66: 1, 4; 67: 2-5), et de la création elle-même (65: 9-13; 67: 6).

Le cantique du psaume 65 s'adresse au Dieu qui écoute la prière (verset 2; cf. 61: 1); il interviendra en pardon, en grâce, en justice. La certitude du pardon ouvre le cœur du psalmiste (verset 3), même s'il ne peut pas dire comme nous: «tu as pardonné». La grâce qui choisit souverainement et fait approcher les saints (verset 4) est un sujet de louange que nous pouvons partager. Il en est de même de la justice qui se manifeste non pas contre eux, mais pour leur délivrance (verset 5). Sans doute, pour nous, la bénédiction est plus riche; nous allons au-delà du parvis, jusque dans les lieux saints (Hébreux 9: 8; 10: 19).

Le psaume 66 rappelle les œuvres de Dieu, la rédemption opérée autrefois, mais surtout sa fidélité envers les siens au moment même où il les éprouvait; l'épreuve close, la détresse laisse place à la louange (versets 13-15) et au témoignage de ce que Dieu a fait (versets 16-20).

Enfin le psaume 67, évoquant la bénédiction autrefois prononcée sur le peuple consacré à l'Éternel dans le désert (verset l; cf. Nombres 6: 22, 23), anticipe la louange de toute la terre, de tous les peuples, quand Dieu bénira l'univers tout entier.

5. Le chemin du Seigneur devant son peuple — Psaume 68

(Lire d'abord: Psaumes 68: 1-9, 24, 32-35.)

Le psaume 68 anticipe et célèbre la délivrance finale d'Israël, tout en la liant à la rédemption du peuple autrefois, lorsqu'il sortit d'Égypte. Le temps de l'épreuve prend fin; Dieu se lève pour les siens. La question insolente, «où est ton Dieu» (Psaumes 42: 3, 10) trouve sa réponse; l'orgueil des méchants et les prétentions de l'homme sont dissipés. Après le chemin de souffrance où les siens ont crié à lui et l'ont attendu, c'est le chemin de Dieu devant son peuple, et pour son peuple, qui est célébré.

Il connaît ses affligés et, de sa demeure sainte, il prend soin d'eux (cf. Ésaïe 57: 15). Il vient à eux dans les lieux arides où ils ont été dispersés, pour les délivrer et les bénir (versets 4-6). Puis il marche devant eux dans le désert, comme au jour de la délivrance de l'Égypte, pour les conduire et les établir dans les bénédictions de l'héritage (versets 7-14).

Telle est la grâce qui brille au terme de sa discipline. C'est pour entrer en jugement avec ce peuple rebelle qu'il l'avait amené «dans le désert des peuples» (Ezéchiel 20: 32-38). Mais c'était aussi pour lui parler au cœur, lui donner ses vignes et une porte d'espérance (Osée 2: 14-17), pour retrouver en lui l'amour et la grâce des commencements (Jérémie 2: 2, 3). Maintenant, ce travail est accompli, il peut sortir devant eux dans le désert, manifester qu'il est leur Dieu là où il les a éprouvés. Il les comble de ses dons (verset 19). Christ ressuscité, dont la délivrance établit la certitude de la délivrance des siens, reçoit lui-même ces dons afin de les répandre sur eux (verset 18; cf. Éphésiens 4: 8).

Ce psaume trouvera son accomplissement futur pour Israël, mais n'est-ce pas un profond encouragement pour nous de méditer les voies de celui qui ne change pas et qui veut nous enseigner nous aussi dans le «désert» où il nous discipline?

Après sa marche dans le désert (versets 4, 7) vient sa marche «dans le lieu saint», tandis qu'il habite au milieu de la louange de son peuple (versets 24-27) et reçoit l'hommage des nations (versets 28-31). Enfin nous trouvons sa marche «comme à cheval sur les cieux» (verset 33). Il est celui qui accomplit toutes ses pensées. De même que nous apprenons à connaître ses voies dans le désert, nous pouvons apprendre à connaître ses conseils merveilleux, ses pensées de gloire et de bénédiction, dans sa présence, dans ses sanctuaires (versets 33-35).

On aurait pu penser que ce cantique triomphant devait clore le deuxième livre des Psaumes. En effet, ce livre s'ouvre sur la peine des croyants humiliés et dispersés, en nous montrant comment le Seigneur lui-même les conduit jusque dans leur héritage, afin de demeurer au milieu d'eux. Mais le livre ne se termine pas ici; un chemin plus merveilleux que tout autre reste encore à considérer.

6. Des souffrances à la gloire — Psaumes 69 à 72

(Lire d'abord: Psaumes 69: 1-13, 29-36; 70: 1-5; 71: 1-5, 17-20; 72: 1-4, 20.)

Ces psaumes nous font voir quelque chose du chemin de Christ, depuis les souffrances qui furent sa part jusqu'aux gloires du royaume à venir.

Le psaume 69, comme le psaume 45, est «sur Shoshannim» — les lis. Il nous parle de Christ et de ce que les siens ont pu apprendre de lui dans leurs propres épreuves. Nous le contemplons ici, ainsi qu'on l'a dit, comme «devançant Israël dans les eaux de la souffrance et du jugement». Ce n'est pas l'expiation, comme dans le psaume 22, mais s'il entre dans la détresse au point de prendre sur lui-même et de confesser comme siennes la folie et les fautes de son peuple (verset 5), c'est comme le Messie, s'identifiant à lui et ressentant au plus profond de son âme sainte ce que sont les justes conséquences de ces péchés.

C'est au début du psaume, comme souvent, que nous trouvons ce qui est le thème et l'aboutissement de ce qui est développé ensuite. Quel chemin de souffrance que celui du Seigneur! C'est l'opprobre, le mépris qu'on a eu pour lui à cause de son dévouement pour son Dieu, qui nous frappe ici:

  • l'opprobre qu'il a porté, de la part même de ceux qui lui étaient les plus proches, à cause de son Dieu (versets 7-9);
  • l'opprobre quand il pleurait sur les peines et les misères des hommes endurcis dans leurs péchés, et qui le méprisaient (versets 10-12);
  • l'opprobre quand, entouré de ses ennemis, il attendait la délivrance, mais qu'il devait d'abord entrer dans les eaux terribles du jugement et rester, sur la croix, exposé aux regards de ceux qui le haïssaient (versets 13-19);
  • l'opprobre qui lui a brisé le cœur lorsque les siens, ceux qu'il avait appelés à «veiller une heure avec lui» l'avaient abandonné (verset 20).

Mais le premier verset du psaume est aussi une prière. C'est là sa ressource quand tout a fait défaut.

«Mais pour moi…», dit-il à deux reprises (versets 13, 29); il présente sa prière et sa douleur au Dieu de son salut. Plus encore que le salut, que la délivrance, il attend son Dieu (verset 3). En même temps — c'est la merveilleuse grâce de Christ — il intercède pour les siens afin que leur foi soit soutenue, que ses souffrances ne soient pas pour eux une occasion de chute, «Que ceux qui s'attendent à toi ne soient pas rendus honteux à cause de moi, Seigneur, Éternel des armées! Que ceux qui te cherchent ne soient pas rendus confus à cause de moi, ô Dieu d'Israël!» (verset 6; cf. Matthieu 2: 31, 32; Luc 22: 32).

Pour ceux qui l'ont méprisé — car, comme nous l'avons dit, nous n'avons pas ici l'expiation — les conséquences de ses souffrances sont le jugement (versets 22 et suivants). Il y aura un jour où Dieu demandera compte aux hommes de ce qu'ils ont fait à Christ, mais ce jour est encore futur. Aujourd'hui, c'est le jour de la grâce et non du jugement.

Pour les croyants, tout est grâce. La première pensée de Christ, lorsqu'il anticipe avec une pleine certitude sa délivrance, est pour son Dieu (versets 30, 31). Puis sa pensée se tourne vers les siens, les débonnaires, les pauvres, ceux qui ont persévéré avec lui dans ses tentations (verset 32; cf. Luc 22: 28). Leur joie est la réponse à son intercession pour eux, réponse de la grâce qui a surmonté leur défaillance (verset 20). Enfin, c'est la louange de toute la création, et la bénédiction de Sion, qui terminent ce psaume.

Le psaume 70 poursuit les appels au jugement du psaume précédent, et prolonge la prière qui y était exprimée en faveur des fidèles. La délivrance du Seigneur en résurrection sera la joie de ceux qui cherchent Dieu (verset 4), alors que ceux qui ont haï Jésus connaîtront la honte et la confusion (versets 2, 3). La délivrance de Jésus manifeste la satisfaction que Dieu a trouvée en lui, dans le moment où il traversait l'opprobre et la plus profonde souffrance. Aujourd'hui encore, il est possible à tout homme d'abandonner le camp de ceux qui ont rejeté Christ, se sont moqués de lui et l'ont mis à mort, pour se ranger du côté de Dieu qui l'a ressuscité et lui a donné la gloire. La mort et la résurrection de Christ sont le salut de quiconque croit en lui.

Au psaume 71, le croyant exprime une prière qui est comme l'écho de celle de Christ au psaume 69, (verset 6): «que je ne sois jamais confus!». Il appelle pour lui la délivrance et le salut de l'Éternel. Christ a été humilié; il a goûté l'opprobre et la souffrance, et il a été délivré. C'est le fondement de la confiance des siens, la certitude de leur propre délivrance.

Cette confiance se fonde sur la justice de Dieu. Eprouvé, arrivé à la fin de l'histoire du peuple, «au temps de sa vieillesse», lorsque sa force et sa volonté sont brisées (verset 9; cf. Daniel 12: 7), le résidu fidèle ne peut se confier que dans la puissance (versets 16, 18) et dans la justice (versets 2, 15, 16, 19, 24) de l'Éternel. C'est en justice sans doute qu'il leur a fait voir «de nombreuses et amères détresses» (verset 20; cf. 60: 3), c'est en puissance et en justice aussi qu'il leur donnera vie, gloire et consolation (versets 20, 21).

Les épreuves que nous traversons et les délivrances que nous attendons ne sont pas celles du résidu d'Israël, cependant le fondement de notre confiance n'est-il pas en Christ ressuscité et glorifié, en Christ qui a souffert pour nous?

Le psaume 72 enfin, «au sujet de Salomon», nous conduit à la gloire de Christ qui fait suite à ses souffrances. C'est la gloire du royaume millénaire à venir, pour la bénédiction de la terre. Les affligés sont l'objet particulier de ses soins, en droiture et en justice (versets 2, 4), mais aussi en compassion et en salut (versets 12-14). Lui-même n'a-t-il pas été le pauvre, l'affligé qui a crié à Dieu?

Toutes les nations, qui si souvent avaient opprimé son peuple, lui seront alors soumises. Sa domination s'étendra sur toute la terre où les siens dispersés furent comme lui étrangers. La bénédiction et l'abondance remplaceront l'aridité du désert qu'ils avaient traversé.

Ceux qui autrefois avaient dit au fidèle «Où est ton Dieu?» (Psaumes 42: 3), ceux qui l'avaient outragé et avaient parlé contre lui (Psaumes 69: 11, 12), lui apporteront alors leur hommage (versets 9, 10), leur prière (verset 15), leur bénédiction (versets 15, 17).

Toute la terre sera pleine de sa gloire: c'est la fin des prières de David, les souffrances auront fait place au règne de gloire et de bénédiction.

Ainsi, le travail patient que Dieu opère en nous, en sondant nos cœurs, en nous séparant du monde, en nous instruisant par sa discipline, a un but merveilleux: c'est que nous trouvions en Christ le centre de nos affections et de notre rassemblement, celui qui nous accompagne et nous conduit dans le désert de ce monde, celui dont les souffrances et la gloire peuvent dès à présent remplir nos cœurs.