Les souffrances de l'âme du Sauveur

John Nelson Darby

Psaume 88

Ce psaume nous rend attentifs aux souffrances de Christ. En général, c'est dans les Psaumes que nous en trouvons l'expression. Dans les évangiles, nous voyons la perfection de Jésus dans ses souffrances et malgré elles, tout se passant entre Dieu et lui. Quand il se présentait aux hommes, le Seigneur le faisait toujours dans le résultat de sa communion intime avec le Père. Quant à nous, nous sommes souvent faibles et impatients dans l'épreuve, parce que nous ne présentons pas à Dieu tout ce qui exerce notre âme, et que nos cœurs n'étant pas vidés du moi, la chair peut s'en emparer.

Nous trouvons dans les Psaumes ce qui se passait dans le cœur de Christ, en communion avec Dieu au milieu de ses angoisses. Le jardin de Gethsémané nous en offre aussi un aperçu dans les évangiles. On y voit, sans souffrances extérieures, l'angoisse de son âme en face de la mort.

Si nous cherchons la force, l'espérance et la joie pour marcher en avant, il nous faut contempler la gloire de Jésus; mais rien ne nous rend plus honteux du péché que de voir ses souffrances, et c'est un puissant moyen que Dieu emploie pour chasser le mal, s'il est dans nos cœurs. Il faut pour cela considérer ses souffrances intérieures. On peut assez facilement surmonter des difficultés qui n'ont pas trait à l'âme, mais Jésus a parfaitement senti ce que c'est que d'être accablé, ce que sont ces eaux qui entrent jusque dans l'âme. On peut concevoir une force morale supportant les souffrances extérieures, et même l'homme naturel peut compatir quand il envisage Jésus de ce côté-là, comme les femmes de Jérusalem qui, sans être converties, pleuraient en le voyant conduit à la mort. Mais il y a souvent chez nous une légèreté de cœur et une indélicatesse de conscience qui proviennent de ce que nous ne sommes pas attentifs aux souffrances de l'âme du Sauveur.

Jésus éprouvait l'inimitié de tous contre lui. Son cœur voulait le bien et parlait de paix, mais il n'a pas rencontré la moindre sympathie et il avait le sentiment de toute la puissance de l'ennemi contre lui. Les puissants taureaux de Basan, le lion déchirant et rugissant, l'environnaient. Sa vigueur était desséchée.

Jésus a éprouvé aussi l'abandon de Dieu et de ses amis. Eux n'avaient aucun sentiment, aucune sympathie de l'Esprit au milieu de ses souffrances. Satan excite ses ennemis; le Sauveur savait que Dieu l'abandonnerait à cause de nos péchés. (cf. M.E. 1900, pages 334 et 380). Jésus en a porté la responsabilité pour nous et la colère de Dieu est tombée sur lui. Il était responsable aussi de la gloire de Dieu: les outrages de ceux qui l'outrageaient sont tombés sur lui. Il a eu à soutenir la colère de Dieu et la puissance de Satan, sans avoir recours contre elles à la force de l'homme.

Le psaume 88 nous présente la colère de Dieu tombant sur Jésus selon la loi, quand il est fait malédiction pour nous. Il nous faut savoir tout ce que notre salut lui a coûté. Pour lui, la mort était, dans toute sa force, le salaire du péché et le juste jugement de Dieu qui l'écrasait à cause du péché. Il a éprouvé jusqu'au fond la terrible colère du Dieu dont il avait connu l'amour, dont l'amour est la vie. Parfaitement saint, il a pu sonder ce que c'est que la colère, parfaitement amour, il a pu faire la même expérience: Christ est devenu malédiction pour nous (Galates 3:13). Nous voyons dans le psaume cette malédiction tombant sur lui.

«Que ma prière vienne devant toi, incline ton oreille à mon cri» (verset 2). Ce cri n'a pas été exaucé jusqu'à la résurrection. Jésus était retranché par la main de Dieu qui l'avait livré entre les mains de ses ennemis, et Dieu n'y prenait plus garde (verset 5). «Tu m'as mis dans une fosse profonde» (verset 6). Cela était terrible, parce que, pour lui, l'amour de Dieu était la vie. Il était accablé de toutes les vagues de la fureur de Dieu (verset 7), et béni soit Dieu qu'il en soit ainsi, car il ne reste aucune de ces vagues pour nous accabler! Il a senti la puissance de la mort, comme ne pouvant s'y soustraire (verset 11), et néanmoins, comme Fils de Dieu, il ne pouvait être retenu par elle. «Pourquoi… me caches-tu ta face?» (verset 14).

La fin du verset 15 porte nos pensées sur Jean 12:27, 28, mais on y voit en même temps la perfection de son obéissance. «Dès ma jeunesse»: il est vrai que Jésus n'a été abandonné de Dieu que sur la croix; sa vie n'était pas une expiation, mais la manifestation de la justice. Néanmoins il savait d'avance pourquoi il était venu. Il voyait le péché dans le monde, l'inimitié du cœur de l'homme, le droit de Satan de faire mourir le pécheur et celui qui a été fait péché pour nous. Il a toujours senti cela, mais il a agi et vécu en justice, tout en manifestant la grâce parfaite de Dieu.

Il était là en faiblesse, mais en communion parfaite avec son Père. Il demande que la coupe passe loin de lui, mais il se soumet, parce que cette communion surpassait toute sa douleur. Sur la croix il en fut autrement, parce qu'il buvait la coupe. Pendant sa vie, il sentait tous les droits que la colère et la justice de Dieu donnaient à Satan, sans lui laisser de relâche.

Quel amour que le sien! Jamais son pied n'a chancelé, même un moment, dans ce chemin terrible! Au contraire, il a rendu sa face comme un caillou et il est monté à Jérusalem, parce qu'il nous a aimés.

Voilà ce qui fait du péché une chose abominable et honteuse. Est-il possible que nos cœurs restent insouciants et légers en présence des souffrances de l'âme du Sauveur et retournent, après cette contemplation, légèrement et comme sans y penser, aux choses les plus futiles, après avoir joui de la communion avec Dieu au sujet de son Fils?

Gardons-nous des péchés, des souillures, des mauvaises convoitises, pour lesquels Jésus a dû affronter la mort. Que Dieu nous fasse penser à ses souffrances et à leur réalité pour son âme!