L'Éternel encourage son peuple (Esaie 44)

Remmers A.

Les promesses de Dieu (versets 1-8)

Les premiers versets de ce chapitre se relient directement à la fin du chapitre précédent et en constituent la conclusion. Mais le contraste entre le jugement prononcé là et les promesses que l'on trouve ici est immense.

L'Éternel appelle son peuple à l'écouter, ce peuple qu'il a choisi comme son serviteur. Il lui rappelle qu'il l'a formé « dès la matrice » et qu'il l'aide. Il l'encourage en lui disant : « Ne crains pas, mon serviteur Jacob, et toi, Jeshurun, que j'ai choisi » (verset 2 ; cf. 41: 8-10). Le nom honorifique de Jeshurun (qui signifie : « celui qui est droit, juste », et qu'on trouve aussi en Deutéronome 32 : 15; 33: 5, 26) se réfère prophétiquement à l'état spirituel futur du peuple. Quelle grâce se révèle dans ces paroles du Dieu d'Israël ! Quels encouragements contiennent ces deux versets pour le peuple qui a été si profondément humilié à cause de son infidélité et de son égarement ! Dieu rétablira ses relations avec son peuple terrestre sur un fondement entièrement nouveau — ces relations qui avaient été fondées autrefois sur l'alliance de Sinaï, puis interrompues par la désobéissance du peuple et son rejet de Christ.

Dieu étanchera la soif des hommes au moyen de l'eau de la vie et mettra fin à la sécheresse spirituelle (verset 3). Il versera son Esprit et sa bénédiction sur le peuple, plus précisément sur sa « semence » et sur « ceux qui sortent de lui », c'est-à-dire dans un avenir qui était encore lointain à l'époque d'Ésaïe (cf. 12: 3; 41: 18; Ezéchiel 36: 25; Jean 3: 5; 4: 10-14). D'autres passages de la Parole montrent que cette prophétie ne saurait en aucun cas se rapporter au retour des Juifs de Babylone (Ésaïe 32: 15; Ezéchiel 36: 26; Joël 3: 1-5). Elle n'aura son accomplissement qu'au début du Millénium et la condition préalable en est la conversion d'Israël à Jésus Christ, son Messie. Il y en a eu toutefois un accomplissement partiel au début du christianisme, à la Pentecôte, lorsque le Saint Esprit a été répandu sur ceux qui croyaient au Seigneur Jésus (Actes des Apôtres 2: 16-21).

Quelle sera pour le peuple la conséquence de cette bénédiction ? « Ils germeront parmi l'herbe, comme les saules auprès des courants d'eau » (verset 4). Il n'y aura pas seulement un accroissement rapide et important de la population du pays, initialement petite et composée uniquement de ceux qui font partie du résidu croyant, mais surtout une prospérité spirituelle du peuple (cf. Psaumes 1: 3; Jérémie 17: 8).

Lorsque l'Éternel reconnaîtra de nouveau Israël comme étant son peuple, tous — Israélites ou nations — ressentiront comme le plus grand honneur d'être mis en relation avec Lui et avec son peuple. L'un dira qu'il est à l'Éternel, un autre s'unira au nom de Jacob, tandis qu'un troisième écrira de sa propre main qu'il appartient à l'Éternel et considérera le nom d'Israël comme un titre honorifique (verset 5).

Les titres sous lesquels Dieu se présente ensuite font ressortir d'une façon particulière sa relation avec Israël. Il est « l'Éternel, le roi d'Israël, et son rédempteur, l'Éternel des armées » (verset 6). Les deux titres intermédiaires portent nos pensées sur le Seigneur Jésus, de même que les paroles qui suivent : « Je suis le premier, et je suis le dernier », que nous trouvons aussi dans le livre de l'Apocalypse (Apocalypse 1: 8, 17; 2: 8; cf. Ésaïe 41: 4). Toutes ces expressions témoignent de l'existence éternelle et de la souveraineté absolue de Dieu. A part lui, le « seul vrai Dieu », aucun être ne peut être désigné ainsi à juste titre (verset 6). Un dieu quelconque a-t-il prédit comme lui l'avenir du « peuple ancien » ? Si oui, qu'il le déclare, ainsi que toutes les autres choses qui arriveront (verset 7; cf. 43: 9-12) ! Hors lui, personne n'est capable de cela.

Le peuple qui le connaît comme son Dieu est alors encouragé à ne pas avoir peur et à ne pas craindre (verset 8; cf. 41: 10). Il lui a fait annoncer ses plans par les prophètes et il les réalisera. Il est le seul Dieu, le rocher éternel, en qui l'homme peut sans réserve mettre sa confiance. C'est le peuple d'Israël qui est le mieux à même d'en témoigner (cf. 43: 10).

Dieu se moque de l'idolâtrie (verset 9-20).

Au verset 9, l'Éternel revient au sujet des idoles que son peuple adorait avant la captivité babylonienne (cf. 40: 18-20; 42: 17; 45: 16, 20; 46: 5-7). Dans un langage particulièrement incisif, il montre combien il est insensé de faire et d'adorer des images taillées. Celui qui forme ou se fait construire une idole s'attend bien sûr à ce qu'elle lui soit vraiment utile (verset 10). Mais aussi bien les adorateurs que les constructeurs de telles images seront honteux (verset 11). Car comment ce que l'homme fait, même s'il est habile et expérimenté, pourrait-il être plus fort et meilleur que l'homme lui-même ? Et déjà lorsqu'il forme l'image, il a faim, il a soif et il est fatigué (verset 12).

Le processus de fabrication d'une image taillée suffit à montrer tout le ridicule qui caractérise cet objet. Un sculpteur sur bois travaille selon toutes les règles de son art et réalise une image aussi belle que possible. Pour cela, il a besoin de bois et choisit un arbre approprié. Le fait que celui-ci a cru grâce à la « pluie du ciel », qui ne peut être donnée que par le seul vrai Dieu, le Créateur et le Conservateur du monde, ne fait que souligner le ridicule de tout le processus (versets 13, 14; cf. Psaumes 147: 8).

Et l'ironie s'accroît encore dans les versets 15 à 17. Une moitié du bois est utilisée pour se chauffer, pour rôtir de la viande ou pour cuire du pain, alors que le reste sert à faire une image taillée devant laquelle l'homme qui l'a faite va se prosterner. Aussi le prophète ne peut-il qu'exprimer la sentence, pleine de douleur et de tristesse : «Ils n'ont pas de connaissance et ne comprennent pas; car Il a couvert d'un enduit leurs yeux, en sorte qu'ils ne voient pas, et leurs cœurs, en sorte qu'ils ne comprennent pas» (verset 18; cf. 6: 10). C'est à cause de cela qu'on ne discerne pas que c'est une folie d'adorer le matériel qu'on utilise tout à la fois pour faire une « abomination » et pour le réduire en « cendres ». Quel terrible égarement ! Au lieu de la délivrance il ne conduit qu'à la condamnation éternelle ! Tout cela ne s'applique-t-il pas, à bien des égards, à l'homme moderne et à ses idoles : l'argent, le pouvoir, la culture et la science ? — sans parler de l'idolâtrie dans sa forme grossière et de l'occultisme, de plus en plus répandus.

Rédemption (versets 21-28).

« Souviens-toi de ces choses…» (verset 21). Par ces mots, Dieu invite son peuple à prendre à cœur ce qui vient d'être dit au sujet des idoles et de leur fabrication, comme aussi de l'idolâtrie (cf. 46: 8). Israël est le serviteur de l'Éternel, et ne doit pas se trouver sous la domination des démons ! En contraste avec les idoles, qui doivent d'abord être fabriquées par les hommes, Dieu est celui qui a formé toutes choses. Il a formé aussi son peuple Israël, et il ne l'a pas oublié, bien que celui-ci se soit détourné longtemps de lui.

Dans son amour et sa miséricorde, et en vertu de l'œuvre de son Fils à la croix, il a effacé tous les péchés et les transgressions de son peuple aussi entièrement que les nuages s'effacent devant le soleil. Grâce à cette œuvre de rédemption accomplie, il peut lui dire : « Reviens à moi, car je t'ai racheté » (verset 22; cf. 41: 14; 43: 1). Lorsque le peuple sera revenu à son Dieu, le verset 23 s'accomplira : « Exultez, cieux, car l'Éternel l'a fait ; jetez des cris, vous, profondeurs de la terre ; éclatez en chants de triomphe, montagnes, forêts, et tous les arbres qui y sont ! Car l'Éternel a racheté Jacob, et s'est glorifié en Israël». Dans le Millénium, non seulement le peuple d'Israël racheté louera son Dieu et le glorifiera, mais «la création elle-même aussi sera affranchie de la servitude de la corruption », sous laquelle elle a longtemps soupiré (Romains 8: 21).

Les mots « Ainsi dit l'Éternel », au verset 24, introduisent une nouvelle déclaration prophétique. La rédemption étant maintenant au premier plan, Dieu se présente d'abord comme le « rédempteur » d'Israël, ensuite comme celui qui l'a « formé dès la matrice ». Il est le Tout-Puissant qui a fait toutes choses, le Créateur des cieux et de la terre (cf. 41: 14; 44: 2). Mais il est aussi, et lui seul, Celui qui connaît la fin dès le commencement. C'est donc lui qui peut prédire, comme cela se voit d'une manière si saisissante dans tout ce livre. Lui seul connaît toutes choses, et il manifeste le mensonge de tous les signes et de toutes les divinations des hommes, comme aussi la folie de toute la sagesse humaine et de toute la vaine connaissance des hommes (verset 25; cf. 8: 19; 1 Corinthiens 1; 2). En revanche, il confirme la parole de son serviteur et accomplit le conseil de ses messagers (verset 26). Il est difficile de dire si le « serviteur » de l'Éternel, dans ce passage, est le peuple d'Israël (cf. 42: 19) ou le prophète lui-même (cf. 20: 3). Les « messagers » sont certainement les prophètes que Dieu a envoyés. Les messages qu'il leur a confiés par son Esprit auront tous leur accomplissement. Qu'il s'agisse de l'effondrement des puissants empires assyrien et babylonien, qu'il s'agisse du retour des Juifs de la captivité babylonienne, qu'il s'agisse de la reconstruction du temple et des villes de Juda, tout cela Dieu l'a fait prédire et tout s'est accompli. Il en est de même des prophéties concernant la venue du Sauveur, son rejet et l'endurcissement d'Israël qui en est résulté. Et les prophéties non encore accomplies concernant la conversion future du peuple, l'apparition de Christ, l'anéantissement de tous ses ennemis et le Millénium… se réaliseront tout aussi certainement !

C'est Dieu qui a mis la mer à sec lorsque Israël est sorti d'Égypte, qui a fait s'épuiser de grandes puissances comme les fleuves tarissent par la sécheresse, et qui a permis aux Perses de conquérir la ville de Babylone par le détournement du cours de l'Euphrate. C'est le même Dieu qui a appelé le roi Cyrus pour faire retourner son peuple dans le pays promis et pour faire reconstruire Jérusalem et le temple (versets 27, 28). Dieu s'est servi de cet homme pour réaliser ses plans et pour accomplir tout son bon plaisir. Le retour du résidu de Babylone, prédit ici, est un type de la conversion future d'Israël. Parallèlement, nous pouvons voir en Cyrus une « ombre » du Messie. Dieu le désigne ici comme son berger, c'est-à-dire comme celui qui régnera sur son peuple, et comme celui qui accomplira tout son bon plaisir. Il est cependant bien loin derrière le « bon Berger », qui a laissé sa vie pour les brebis et en qui le Père a trouvé son plaisir. En tant que souverain du deuxième des quatre grands empires prophétiques, il accomplira certes tout le bon plaisir de Dieu, mais il n'est pas lui-même, comme Christ, l'objet du plaisir de Dieu (42: 1; 53: 10).

Pour les critiques, la mention du nom de Cyrus, ici et au premier verset du chapitre 45, est une raison déterminante pour attribuer toute la seconde partie du livre d'Ésaïe à plusieurs écrivains postérieurs à l'exil. Pour eux il est impensable que le nom d'un homme soit mentionné par un prophète plus de 150 ans avant sa naissance. Pourtant il ne s'agit nullement là d'un cas unique. En 1 Rois 13: 2, l'homme de Dieu venant de Juda énonce le nom du roi Josias 300 ans à l'avance. La différence entre les idoles et le seul vrai Dieu se manifeste aussi en cela. Dieu a répondu par avance à la critique incrédule en dénonçant à plusieurs reprises, précisément dans cette partie du livre, le néant des idoles et des devins, et en se présentant lui-même comme le Créateur du monde, le Dieu de son peuple Israël, le Dieu qui seul prédit les événements futurs et les fait se réaliser.