Seconde épître aux Corinthiens (suite)
Chapitre 8
Paul avait ouvert son cœur aux Corinthiens. Il leur avait parlé de ses propres expériences, comme aussi de la nécessité de se séparer du monde des incroyants. Il leur avait exprimé sa joie de les voir obéir à la parole de Dieu et la confiance que cela lui donnait à leur égard. Dès lors, l'apôtre se sentait à l'aise pour leur écrire avec plus de détails au sujet de la collecte qui se faisait parmi les assemblées des nations en faveur des croyants pauvres de Jérusalem. Il y avait fait brièvement allusion dans le dernier chapitre de la première épître, et il y consacre maintenant l'ensemble des chapitres 8 et 9. En encourageant les Corinthiens à pratiquer la libéralité, il place devant nous des instructions très importantes.
Une manifestation remarquable de la grâce de Dieu avait eu lieu dans les assemblées de Macédoine. Elle a été consignée pour toujours dans les Écritures afin que non seulement les Corinthiens, mais nous aussi, nous soyons stimulés par elle. D'aucuns pourraient se demander si le récit du dévouement de certaines personnes, dans le but de secouer des croyants assoupis, n'est pas un appel à des motifs plutôt bas et un procédé peu recommandable. Pourtant, nous voyons ici que l'Esprit conduit l'apôtre à agir précisément de cette manière. Nous n'avons donc jamais à craindre de faire savoir comment la grâce de Dieu a opéré chez d'autres personnes. De tels récits nous révèlent la grâce de Dieu comme quelque chose de réel et pratique, et ils nous amènent à réaliser notre propre insuffisance — deux résultats bien désirables.
La manière dont les croyants Macédoniens avaient donné était remarquable. Paul lui-même pouvait rendre témoignage qu'ils avaient donné «selon leur pouvoir». C'était en soi une chose importante. Cela signifiait qu'après avoir correctement réglé toutes les dépenses de leur vie courante, ils avaient donné jusqu'aux limites de leurs possibilités. Cependant, ils avaient fait encore plus: ils avaient donné «au-delà de leur pouvoir». Ils s'étaient privés de ce que l'on pourrait considérer comme les dépenses normales de la vie, afin de pouvoir donner au Seigneur et aux siens. Et cela, ils l'avaient fait d'une façon totalement spontanée, demandant à Paul d'accepter l'argent et de prendre la responsabilité de sa distribution aux croyants. Ils avaient montré le même état d'esprit que les fils d'Israël lors de la construction du tabernacle, lorsqu'on avait rapporté à Moïse: «Le peuple apporte beaucoup plus qu'il ne faut pour le service de l'œuvre que l'Éternel a commandé de faire» (Exode 36: 5).
Cependant ils avaient dépassé l'attente de Paul sur un autre plan. Ils avaient commencé leurs dons de la bonne manière: ils s'étaient «donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur». En se livrant ainsi eux-mêmes au Seigneur, ils lui livraient nécessairement tout ce qu'ils avaient. Ainsi, ils considéraient leurs biens comme étant ceux du Seigneur, pour être utilisés selon que lui le trouverait bon. Par conséquent, ils accomplissaient la volonté de Dieu en se mettant eux-mêmes, ainsi que leurs biens, entre les mains de Paul.
C'est, sans conteste, la seule vraie façon de donner. Dieu ne nous demande pas seulement notre superflu, mais tout ce que nous avons, car c'est nous-mêmes qu'il veut. En réfléchissant à cela, nous découvrons combien notre conception de la libéralité est pauvre en comparaison de celle des Macédoniens. La libéralité qui les caractérisait était rehaussée par leur profonde pauvreté, et par le fait qu'ils vivaient un temps de grande tribulation. Ce qui les poussait à la libéralité était l'abondance de leur joie dans le Seigneur. Par la foi, ils saisissaient les choses d'en haut avec une telle réalité et une telle joie, qu'ils pouvaient être généreux avec les choses de la terre.
La libéralité est-elle une des caractéristiques de la vie chrétienne actuelle? Il est à craindre que l'on doive répondre négativement. A quels artifices n'a-t-on pas recours, parfois, lorsqu'il s'agit de récolter des fonds! Que d'appels et de publicité! Et on assiste à bien des événements lamentables résultant du manque de fonds. Il est vrai que beaucoup de problèmes de ce genre peuvent provenir de personnes qui se lancent dans des entreprises auxquelles elles n'ont pas vraiment été appelées par Dieu. On peut craindre que bien des croyants retiennent pour eux-mêmes plus que nécessaire, ce qui mène à la pauvreté spirituelle — et pour eux-mêmes et pour d'autres. Il y a heureusement des exceptions. Il y a ceux qui reconnaissent qu'ils ne sont que des administrateurs et qui donnent largement selon leurs moyens. Et il y a ceux qui — Dieu en soit béni — donnent avec une libéralité étonnante.
Nous ressemblons plus aux Corinthiens qu'aux Macédoniens et nous avons besoin, nous aussi, d'être secoués par ce brillant exemple. Paul avait exhorté Tite à veiller à l'achèvement de cette affaire lors de sa visite. Remarquons que la libéralité est appelée une «grâce», et il en est bien ainsi, lorsqu'elle est considérée dans son vrai caractère et exécutée correctement. Elle est un moyen puissant pour exprimer l'œuvre de grâce de Dieu en bénédiction. Si nos cœurs sont remplis à déborder de la bénédiction qui vient de Dieu, nous ne pouvons que déborder nous-mêmes en donnant aux autres.
Le verset 7 est un reproche doux et plein de tact. Il n'est sans doute pas seulement pour les Corinthiens, mais pour nous aussi. Qu'il puisse être dit de nous que nous abondons «en foi» et «en toute diligence», ce n'est pas sûr; nous abondons plutôt «en parole» et «en connaissance». Nous sommes exposés au danger de connaître intellectuellement et de savoir formuler de nos lèvres beaucoup plus que ce que nous exprimons par une vraie libéralité de cœur.
L'apôtre souhaitait ne pas être compris comme donnant un commandement à ce sujet (verset 8). Si nous donnons seulement parce que nous avons reçu de Dieu le commandement de le faire, cela ne peut plus être appelé une grâce; c'est la contrainte d'une loi. L'engagement et le zèle des Macédoniens devaient être un stimulant pour les Corinthiens. La libéralité que l'apôtre souhaitait de leur part devait être l'expression de la sincérité et de l'authenticité de leur amour. L'amour se réjouit toujours quand il peut donner.
L'opération de la grâce de Dieu chez d'autres croyants peut être un stimulant pour nous. Cependant, il ne faut rien de moins que l'opération suprême de la grâce de Dieu en Christ pour produire en nous l'énergie et la motivation nécessaires, afin que nous soyons caractérisés par la grâce d'une vraie générosité. C'est ce que nous présente le verset 9.
Combien de trésors de la parole de Dieu ne sont-ils pas enchassés, tels des joyaux étincelants, dans des sujets qui semblent tout ordinaires! Ce verset 9 en est un exemple. Les Corinthiens s'étaient montrés bien disposés concernant cette collecte. Ils s'étaient volontiers ralliés à cette idée, plus d'une année auparavant, mais jusqu'à présent, ils n'avaient pas encore réussi à la mettre à exécution et à donner effectivement l'argent. Qu'est-ce qui pouvait les y amener? Rien, sinon un sentiment renouvelé de la grâce du Seigneur Jésus?
Ce merveilleux verset 9 est un condensé du Nouveau Testament. «Comment, étant riche…» nous reporte aux profondeurs de la gloire divine de Jésus avant son incarnation, cette gloire qui est révélée dans les premiers versets de l'évangile de Jean et ailleurs. «Il a vécu dans la pauvreté pour vous…» nous place devant les merveilleux récits de sa vie, de ses souffrances et de sa mort, tels qu'ils sont enregistrés dans les quatre évangiles. «Afin que par sa pauvreté vous fussiez enrichis» nous rappelle la plénitude de bénédiction et de gloire dans laquelle nous avons été introduits par lui et en lui, ainsi que nous le dévoilent les épîtres et l'Apocalypse. Toute sa vie est l'expression suprême de la grâce. C'est l'amour divin s'abaissant pour répondre aux besoins des hommes, et le faisant non seulement selon la mesure des besoins rencontrés, mais selon la mesure de l'amour qui les rencontre.
Après avoir présenté cette grâce comme un puissant levier pour toucher et élever les cœurs des Corinthiens, l'apôtre énonce quelques principes importants qui devraient conduire le croyant lorsqu'il fait part de ses biens. D'abord, il faut que nous donnions en prenant sur ce que nous avons, non selon ce que nous avions précédemment, ou ce que nous espérons avoir plus tard. Il faut que nous vivions et agissions au présent, en nous confiant en Dieu pour ce qui concerne l'avenir.
Ensuite, l'apôtre ne voyait pas les Corinthiens comme étant toujours, et en toute chose, ceux qui donnent. Le temps viendrait où ils seraient ceux qui reçoivent, et où le flot des dons irait dans leur direction plutôt qu'en sens inverse. En Romains 15: 25-27, on voit que Corinthe avait déjà beaucoup profité des biens spirituels qui étaient venus de Jérusalem. Maintenant, il fallait que Jérusalem profite de biens matériels venant de Corinthe. Selon la pensée de Dieu, il ne devrait jamais y avoir de vide parmi les siens, mais un flot de ressources se déplaçant selon les besoins.
Le verset 15 cite Exode 16: 18 pour l'appuyer. En lisant l'Exode, on pourrait penser que ce verset signifie simplement que chacun de ceux qui recueillaient la manne savait bien estimer son appétit et recueillir en conséquence. La manière dont il est cité ici montre cependant qu'il va plus loin, puisqu'il est utilisé pour appuyer le principe du partage avec d'autres de ce que Dieu peut nous avoir confié.
Les versets 16 à 24 traitent de détails concernant l'administration des fonds récoltés, tâche que devaient assumer Tite et deux autres frères. Bien que les circonstances d'aujourd'hui ne soient pas celles d'alors, ne manquons pas de remarquer plusieurs points dont l'intérêt est de tous les temps. Paul avait exhorté Tite à accepter ce service, et celui-ci l'avait fait spontanément et avec promptitude. Il ne considérait pas un tel service comme trop bas pour lui. Il en était de même du frère non nommé du verset 18 — un évangéliste doué, semble-t-il — et de celui du verset 22, dont le zèle avait été plusieurs fois mis à l'épreuve — même s'il n'avait peut-être pas reçu un don particulier dans l'évangile ni, comme Tite, une délégation apostolique. Manifestement, ces trois frères reconnaissaient qu'acheminer et administrer des fonds qui avaient été donnés comme expression de l'amour divin opérant dans les cœurs des saints n'était pas un service banal.
Le verset 19 montre de façon claire que les assemblées qui donnaient l'argent avaient choisi le frère qui aurait à administrer les fonds de leur part. C'est en accord avec ce que nous avons en Actes 6, où sept hommes ayant un bon témoignage sont choisis pour «servir aux tables». Ceux qui fournissent les moyens ont aussi compétence pour choisir ceux qui vont administrer leurs dons. En contraste avec cela, nous ne voyons pas dans l'Écriture que les croyants aient à choisir ceux qui accompliront la fonction d'ancien ou de surveillant. Ceux-ci sont appelés à remplir leurs tâches spirituelles de la part de Dieu, non de la part des hommes, et ainsi, c'est Dieu et non l'homme qui doit les choisir. Il nous est parlé de ceux que l'Esprit Saint a établis pour être surveillants (Actes des Apôtres 20: 28). Tout ce que l'homme peut faire, c'est de reconnaître ceux que l'Esprit Saint a établis.
De plus, tout devait être fait honnêtement devant Dieu et devant les hommes. Il n'est pas suffisant qu'une affaire soit traitée correctement devant le Dieu qui connaît toutes choses. Elle doit aussi être manifestement droite aux yeux d'hommes qui ne voient qu'une petite partie des choses, mais qui se montrent souvent très critiques à l'égard de ce qu'ils voient. C'est ce que nous montrent les versets 20 et 21. Ainsi, les hommes qui avaient été choisis étaient caractérisés par le soin que tout soit administré pour la gloire du Seigneur. Ils devaient aussi se souvenir qu'ils étaient les envoyés des assemblées, «la gloire de Christ».
Rappelons-nous que c'est le caractère propre de chaque vraie assemblée. Si nous nous en souvenons vraiment, nous ne serons pas légers à cet égard.
À suivre