Les voies de Dieu envers son peuple terrestre

A. Remmers

Ésaïe 30: 1-26

Au chapitre 5, Ésaïe avait dû prononcer un sextuple «malheur!» sur la corruption et l'iniquité des conducteurs d'Israël. Dans les chapitres 28 à 35, on trouve de nouveau six «malheur!» — cinq sur Israël et un sur l'Assyrie1. Par les jugements qui y sont annoncés et la destruction de tous les ennemis, Dieu atteindra le but glorieux qu'il s'est proposé: le rétablissement de ses relations avec Israël, son peuple terrestre.

1 Cf. Ésaïe 28: 1; 29: 1; 29: 15; 30: 1; 31: 1; 33: 1.

Malheur sur l'alliance avec l'Égypte! (versets 1-18)

Le quatrième malheur est prononcé contre les hommes de Juda qui, peut-être pendant le règne d'Ézéchias, aspiraient à une alliance avec l'Égypte pour se protéger de la menace de l'Assyrien (cf. chapitres 20 et 31: 1-3).

Des fils rebelles (versets 1-5)

L'Éternel considère son peuple terrestre, auquel ce «malheur!» s'adresse, comme des fils rebelles qui refusent toute instruction et qui n'ont aucune intelligence

de ce qui leur est bon et utile. Sans l'interroger et sans attendre ses directives, ils projettent en secret de conclure une alliance avec l'Égypte, par laquelle ils espèrent se protéger contre la puissance dominante de l'Assyrien (29: 15). Ils cherchent du secours dans le monde pour trouver un abri contre le monde! Ils ont complètement oublié que Dieu les avait séparés de tous les peuples et avait fait d'eux sa possession — oublié qu'ils ne devaient ni retourner en Égypte, ni conclure une alliance avec les nations païennes qui les entouraient (Exode 23: 32; Lévitique 20: 26; Deutéronome 17: 16). L'Éternel n'avait-il pas fait alliance avec eux, ne leur avait-il pas promis et souvent témoigné bénédiction et secours, n'avait-il pas usé de beaucoup de grâce à leur égard? Mais ils veulent «descendre» en Égypte pour y trouver refuge et protection, au lieu de les trouver auprès de leur Dieu (cf. Genèse 12: 10; Psaumes 57: 1). En opposition avec sa volonté, ils accumulent par là péché sur péché, car ils n'interrogent pas sa bouche. C'est un sérieux avertissement pour nous aujourd'hui; comme eux, nous sommes en danger de faire nos propres plans sans Dieu et de chercher aide et soutien auprès du monde.

L'Égypte, politiquement affaiblie, ne pouvait offrir la protection souhaitée. L'opération se terminera pour Juda dans la honte et l'opprobre. Il est vrai que ses princes et ses messagers arriveront à Tsoan et à Hanès dans la Basse-Égypte (cf. 19: 11), mais toutes leurs négociations seront vaines: l'Égypte ne leur sera «ni à aide, ni à utilité, mais à honte et aussi à opprobre».

La sentence de Dieu (versets 6, 7)

Pour souligner la sentence accablante de Dieu sur les plans de son peuple rebelle, le prophète prononce ensuite «l'oracle2 touchant les bêtes du midi». Celui-ci se réfère à l'Égypte, située au sud d'Israël. Comme les messagers de Juda ne veulent pas venir les mains vides devant les Égyptiens, ils se mettent en marche avec une caravane richement chargée. Mais ils doivent suivre un chemin pénible et dangereux. Ils traversent le désert où les lions et les serpents les guettent. En fait, ils se donnent du mal pour «un peuple qui ne leur sera d'aucun profit». L'aide des Égyptiens est vaine et inutile. Dieu ne peut désigner ce peuple que par le nom d'»Arrogance» (hébr. Rahab). Véritablement, il ne peut rien faire.

2 ou: «la charge», «le fardeau»; hébr. massa comme 13: 1.

La volonté propre et ses conséquences (versets 8-14)

Ésaïe doit écrire cette prophétie aussi bien sur une table que dans un livre, d'une part pour la placer clairement devant les yeux de ses contemporains, et d'autre part afin qu'elle demeure «pour le jour à venir, en témoignage à toujours». Les versets suivants nous indiquent pour quelle raison.

Dieu répète ce qu'il a contre le peuple de Juda, qu'il appelle «un peuple rebelle, des fils menteurs, des fils qui ne veulent pas entendre la loi de l'Éternel». Ils ne veulent rien savoir des prophéties et des visions des messagers de Dieu, mais leur demandent de leur dire des choses douces et même des tromperies! Nous avons un exemple de cette attitude dans les prophètes du temps des rois Josaphat et Achab: tous, excepté Michée, annonçaient une issue positive à l'expédition militaire contre les Syriens, qui devait cependant conduire à la mort d'Achab (1 Rois 22: 5-28). Et que dit le Nouveau Testament? — «Car il y aura un temps où ils ne supporteront pas le sain enseignement; mais,

ayant des oreilles qui leur démangent, ils s'amasseront des docteurs selon leurs propres convoitises, et ils détourneront leurs oreilles de la vérité et se tourneront vers les fables» (2 Timothée 4: 3, 4). N'en est-il pas ainsi de nos jours, où des chrétiens, même de vrais enfants de Dieu, n'aiment pas être placés devant tout le sérieux de la parole de Dieu?

Déjà au temps d'Ésaïe, le peuple voulait s'écarter du chemin que Dieu lui montrait par sa Parole et par les prophètes. Il ne voulait même plus que «le Saint d'Israël» soit placé devant ses yeux (cf. 1: 4). Il en était arrivé à un point tel que Dieu n'était plus pour lui qu'un élément gênant.

Cependant, quand le peuple rebelle ne veut plus rien savoir du «Saint d'Israël», Dieu se présente à lui précisément sous ce nom (versets 12, 15). L'homme peut changer, Dieu demeure fidèle à lui-même dans sa sainteté inaltérable. Si les hommes de Juda rejettent ses avertissements quant à une alliance avec l'Égypte, et s'ils persévèrent dans leur propre volonté et dans leurs plans tortueux, ils devront porter les conséquences de leur péché. Leur confiance dans la protection de la grande puissance dont ils cherchent l'alliance sera comme «une brèche qui s'écroule, un renflement dans un mur élevé, dont la rupture arrive subitement, tout à coup». Un plus puissant entrera en scène et tous leurs plans seront entièrement anéantis. Ce sera comme quand on brise un vase de potier, et qu'il ne reste pas même un tesson assez grand pour prendre un charbon ardent ou pour puiser une gorgée d'eau. C'est ce qui est arrivé lors de la destruction de Jérusalem par Nebucadnetsar en l'an 586 avant J.C. et par Titus en l'an 70 après J.C. (cf. Jérémie 19: 11; 2 Chroniques 36: 19; Matthieu 24: 2). Cette sentence trouvera son plein accomplissement lors de la première attaque de l'Assyrien, au temps de la fin (cf. Ésaïe 22: 1-14; 28: 18-22; Joël 2; Zacharie 14: 1, 2).

Un sérieux avertissement (versets 15-18)

Encore une fois l'Éternel, le Saint d'Israël, s'adresse à son peuple rebelle qui l'a maintes et maintes fois repoussé. Il leur rappelle comment ils pourraient être sauvés: «en revenant» et en se «tenant en repos», c'est-à-dire en se repentant et en renonçant à leurs propres efforts. Ceci conduirait aussi à «la tranquillité» et à «la confiance», à une attente humble et à une foi simple en l'intervention puissante de Dieu. L'Éternel n'avait-il pas montré bien des fois sa puissance en faveur de son peuple depuis l'anéantissement des Égyptiens à la mer Rouge (cf. Exode 14: 14; Ésaïe 7: 4)? Toutefois ce peuple persiste à ne pas vouloir écouter la voix de son Dieu.

Au lieu de se confier dans le Puissant de Jacob, il met sa confiance dans des chevaux de combat (cf. 31: 1). Mais lorsqu'ils disent: «Nous nous enfuirons sur des chevaux», alors sa réponse retentit: «C'est pourquoi vous vous enfuirez». Et s'ils veulent monter sur des chevaux rapides, ils doivent apprendre que ceux qui les poursuivent seront encore plus rapides. L'habileté qu'ils croient avoir ne leur sera d'aucune utilité (cf. 2 Rois 25: 4, 5). Josué avait pu dire au peuple d'Israël: «Un seul homme d'entre vous en poursuit mille; car l'Éternel, votre Dieu, est celui qui combat pour vous, comme il vous l'a dit» (Josué 23: 10). Mais à ce peuple désobéissant, Dieu prédit maintenant le contraire: «Un millier fuira à la menace d'un seul; à la menace de cinq, vous fuirez». Il ne restera de lui qu'un petit résidu, solitaire comme une perche oubliée au sommet d'une montagne (peut-être une hampe de drapeau), ou comme un étendard abandonné sur une colline. Si saisissante que soit cette image dans sa désolation, nous pouvons cependant déjà y voir une lueur d'espérance, une mention voilée du résidu futur vers lequel Dieu se tournera de nouveau en grâce (cf. Zacharie 14: 2)

Cette grâce insondable brille d'un vif éclat au verset 18 et clôt ainsi la prophétie adressée à un peuple qui se refuse à écouter son Dieu. Le refus n'entraîne pas seulement le jugement, mais il diffère aussi la manifestation de la grâce. Dieu permet la discipline de son peuple jusqu'à ce qu'elle soit amère, afin que sa grâce puisse triompher à la fin. Mais la condition pour qu'il en soit ainsi est que l'on s'attende à lui avec patience et foi. Soixante-dix ans ont dû s'écouler après la prise de Jérusalem par les Babyloniens; et depuis le rejet du Seigneur Jésus par son peuple terrestre, Dieu «attend» encore pour user de grâce envers son peuple. Et pourtant il aura de nouveau compassion de lui aux derniers temps. Quel bonheur ce sera pour le résidu croyant, quand Dieu se tournera de nouveau en grâce vers lui après l'achèvement de tous les jugements!

La miséricorde envers Sion (versets 19-26)

Sans transition aucune vient alors la description d'un état entièrement nouveau. D'autres villes, telles que Babylone et Ninive, ont été détruites et ne seront plus jamais habitées (cf. 13: 19-21). Mais Sion, le lieu de la royauté de David et de la grâce de Dieu, sera encore «le lieu où est le nom de l'Éternel des armées», le lieu que le Dieu d'Israël a choisi pour son habitation (Ésaïe 18: 7; 24: 23; Psaumes 87: 1-3; 132: 13, 14). Cette ville sera le centre pour le peuple de Dieu restauré. Les deux noms de Sion et de Jérusalem désignent une seule et même ville. C'est là qu'habitera de nouveau le peuple d'Israël. Après presque deux millénaires de domination étrangère, la ville est depuis quelques années la capitale d'un état juif. Mais combien ce peuple est encore éloigné de la paix qui lui est promise par la parole de Dieu!

La déclaration: «Tu ne pleureras plus» est encore bien loin de son accomplissement (cf. 25: 8; 61: 3). Combien de larmes ont été versées dans cette ville au cours des millénaires, et combien peuvent encore y être versées actuellement (cf. Lamentations de Jérémie 1: 2)! Mais les plus grandes afflictions sont encore à venir. Il y aura les gémissements du résidu croyant pendant la dernière tribulation et ses lamentations à l'apparition du Christ comme Messie — Celui que le peuple juif a percé (Zacharie 12: 10-14; Matthieu 24: 30; Apocalypse 1: 7). Cependant Dieu leur promet déjà maintenant qu'il répondra immédiatement à leurs supplications mêlées de larmes et qu'il usera richement de grâce envers eux (cf. Ésaïe 65: 24). Alors une joie éternelle remplira leurs cœurs (cf. verset 19).

La même grâce divine est offerte aussi aujourd'hui à chaque homme de ce monde qui, comme la grande pécheresse de Luc 7, vient au Sauveur en sentant le fardeau de ses péchés. Elle est aussi pour chaque enfant de Dieu qui abandonne un mauvais chemin et revient au Seigneur: «La tristesse qui est selon Dieu opère une repentance à salut dont on n'a pas de regret» (2 Corinthiens 2: 7; 7: 10).

Pour le peuple terrestre de Dieu, le chemin jusque-là passera par de douloureuses épreuves. Cependant Dieu leur témoignera sa miséricorde durant ce temps difficile, comme il l'a toujours fait et le fera, «car ce n'est pas volontiers qu'il afflige et contriste les fils des hommes» (Lamentations de Jérémie 3: 33). Ainsi il les ramènera pas à pas sur le droit chemin. L'aveuglement gouvernemental qu'il avait lui-même infligé à son peuple aura pris fin (cf. 6: 10; 29: 10). Ceux qui les enseigneront ne se cacheront plus parce qu'on n'accepte ni eux ni leur message (cf. versets 10, 11); mais, visibles pour tous, ils montreront le droit chemin. Finalement, le Seigneur Jésus sera lui-même leur Maître parfait, car «qui enseigne comme lui?» (Job 36: 22). Dieu dit au psaume 32: «Je t'instruirai, et je t'enseignerai le chemin où tu dois marcher; je te conseillerai, ayant mon œil sur toi» (verset 8). Son conseil, donc, ne peut être discerné que si nos yeux sont aussi dirigés sur lui. Et dès que l'on quitte le droit chemin, la voix du Maître, telle celle d'un bon berger, résonne aux oreilles de ceux qui se sont écartés à droite ou à gauche, en disant: «C'est ici le chemin, marchez-y» (verset 21).

Dans ce processus de guérison spirituelle, ils se sépareront avec détermination de tout ce qui est en contradiction avec la sainteté de Dieu. Les idoles, bien qu'abominables et souillées en elles-mêmes, sont saintes aux yeux de ceux qui les servent. Quand elles seront profanées et détruites, elles seront déclarées «souillées» (cf. 2 Rois 23: 8, 10). Quelle que soit la valeur qu'elles puissent paraître avoir, elles seront jetées dehors comme un linge impur. S'il est vrai que les Juifs, après le retour de la captivité babylonienne, ne sont jamais retombés dans les anciennes formes de l'idolâtrie qui avait amené le jugement de Dieu sur eux, néanmoins, durant le règne de l'Antichrist, l'idolâtrie prendra une dimension telle qu'elle n'a encore jamais existé, dans l'adoration de ce faux Messie et de l'image de la bête romaine (Daniel 9: 27; 2 Thessaloniciens 2: 4; Apocalypse 13: 14, 15). Le résidu sera totalement exempt de cela.

Dans les versets 23 à 26, Ésaïe montre ce qu'il adviendra du résidu — qui est appelé «tout Israël» dans d'autres passages (cf. Romains 9: 27; 11: 26) — quand il sera revenu à Dieu. L'expression «en ce jour-là», que nous rencontrons si souvent dans ce livre, indique ici le commencement du règne millénaire (cf. Ésaïe 2: 11). En premier lieu sont décrites quelques bénédictions terrestres du peuple, qui jouira alors de l'abondante fertilité du pays. Cette bénédiction fait le plus grand contraste avec la détresse et la misère du temps de la grande tribulation qui précède. En même temps, elle est l'accomplissement des promesses de Dieu à son peuple (cf. Deutéronome 11: 11-15; Joël 2: 22-27). Les hommes auront une nourriture abondante et savoureuse, et les animaux recevront le meilleur fourrage. La pluie nécessaire pour faire croître la semence tombera au moment opportun, et l'eau jaillira de la terre en ruisseaux et en courants d'eau. Beaucoup de passages des livres prophétiques de l'Ancien Testament parlent de ces bénédictions terrestres. Toutefois, il y aura aussi dans le règne millénaire des bénédictions spirituelles pour Israël et pour les nations (cf. Ésaïe 32: 15-17).

L'expression «au jour du grand carnage, quand les tours s'écrouleront» (verset 25), peut surprendre à première vue; elle ne fait cependant que confirmer que le plan de Dieu pour le temps à venir comporte aussi bien sa riche bénédiction pour ceux qui se sont repentis que son terrible jugement sur ses ennemis.

Jusqu'ici, les descriptions doivent être comprises dans un sens littéral et concret, mais au milieu de la phrase, le prophète passe à un langage figuré. Les tours qui s'écroulent (cf. 2: 15) évoquent le brisement de l'orgueil et de la puissance militaire, sans doute spécialement de l'Assyrien (et peut-être de l'empire romain).

Mais en même temps, «l'Éternel bandera la brisure de son peuple et guérira la blessure de ses plaies» (cf. Ezéchiel 34: 16; Osée 6: 1). Ces paroles sont aussi à comprendre dans un sens figuré. En raison de sa sainteté, Dieu châtiera son peuple; mais, dans son amour, il le bandera et le guérira. En ce jour-là, la lumière de la lune sera comme celle du soleil, «et la lumière du soleil sera septuple, comme la lumière de sept jours». Les luminaires établis par Dieu au commencement pour dominer sur le jour et sur la nuit luiront certainement avec une clarté toute nouvelle sur une création qui est actuellement en travail et soupire sous la servitude de la corruption, et qui, comme nous, attend la révélation des fils de Dieu (Romains 8: 19-23). Toutefois, le sens figuré de cette parole est rendu clair par un passage du chapitre 60 (versets 19, 20). Il y est écrit que, dans le règne de paix, ce ne sera ni le soleil ni la lune qui apporteront la lumière, mais l'Éternel lui-même; il sera la lumière de son peuple à toujours, et sa gloire. Au sujet de la lumière et de la guérison, le prophète Malachie écrit aussi: «Et pour vous qui craignez mon nom, se lèvera le soleil de justice; et la guérison sera dans ses ailes» (4: 2).

C'est le Seigneur Jésus lui-même. Il a séjourné autrefois dans l'abaissement au milieu de son peuple, et son visage — comme une anticipation de la gloire à venir — a déjà resplendi comme le soleil, alors qu'il était sur la sainte montagne avec quelques-uns de ses disciples (Matthieu 17: 2; 2 Pierre 1: 16-19). Il est le vrai Soleil, le Soleil de justice, sous les ailes protectrices duquel son peuple terrestre, si sévèrement châtié, trouvera un jour la guérison!