Osée

Chapitre 4

Deuxième partie: Chapitres 4 à 10 — Le Débat de l’Éternel avec Israël.

Chapitre 4 — Plus d’espoir pour Éphraïm; il reste un faible espoir pour Juda.

Les v. 1 à 5 de ce chapitre décrivent l’état moral d’Israël et les v. 6 à 15 son état religieux. L’état moral d’Éphraïm, le prophète Osée l’avait sous les yeux: Partout «exécration, et mensonge, et meurtre, et vol, et adultère; la violence déborde et le sang touche le sang». Zacharie, dernier rejeton du meurtrier Jéhu, est lui-même mis à mort par Shallum, qui est frappé par Menahem; Menahem sème partout le meurtre et la violence; il en est de même de Pakakhia, de Pékakh, ses successeurs, qui meurent de mort violente. Le deuil couvre le pays; le jugement de Dieu, obligé d’assister à ces abominations, s’étend des hommes à toute la création animale sur la terre d’Israël. Plus rien ne correspond aux pensées de Dieu; c’est le contre-pied absolu de la restauration décrite au chap. 2. Lorsque le cœur abandonne Dieu, l’amour et la vérité, traits du caractère divin, disparaissent immédiatement pour être remplacés par les fruits du cœur naturel de l’homme, la violence, la corruption et le mensonge. C’étaient les traits de la famille de Caïn qui avaient nécessité le jugement de Dieu par le déluge sur le monde d’alors, comme ils nécessitent ici la sentence de mort prononcée sur le pays et sur tous les êtres vivants qui l’habitent (v. 3).

«Toutefois, que nul ne conteste, que nul ne reprenne; or ton peuple est comme ceux qui contestent avec le sacrificateur. Et tu broncheras de jour, et le prophète aussi avec toi bronchera de nuit: et je détruirai ta mère» (v. 4, 5). C’est maintenant un appel à ne plus reprendre ce peuple ni contester avec lui. Il est trop tard: son sort est arrêté, car il n’y a plus aucun espoir de le voir revenir. «Ton peuple», dit l’Éternel au prophète, «est comme ceux qui contestent avec le sacrificateur». À quoi bon contester avec Israël et le reprendre, quand lui-même conteste avec le seul qui puisse offrir pour lui la victime expiatoire? Il n’est plus temps: tout secours divin va être ôté aux restes de ce peuple; la nation elle-même, leur mère, sera détruite (cf. 2:2). Telle est la sentence de l’Éternel.

Mais avec quelle douleur Dieu s’exprime maintenant par la bouche du prophète! «Mon peuple... mon peuple», s’écrie-t-il aux v. 6 et 12 à la veille de dire Lo-Ammi! Quelle est leur condition dans ses rapports avec Dieu? Leur défection est générale; l’idolâtrie a tout envahi; Juda est aussi coupable qu’Éphraïm. Même les détails donnés au v. 13: les sacrifices sur les hauts lieux et sous tout arbre vert, caractérisent Juda plus encore que les dix tribus. Cependant le prophète fait quelque différence entre les deux royaumes: «Si tu te prostitues, ô Israël, que Juda ne se rende pas coupable!» En des temps de réveil, sous Ézéchias dont Osée vit le règne à son début, et plus tard sous Josias, les abominations de Juda furent détruites et ses hauts lieux renversés.

Quoi qu’il en soit, Dieu dit: «Mon peuple est détruit faute de connaissance... et je te rejetterai afin que tu n’exerces plus la sacrificature devant moi. Car tu as oublié la loi de Dieu, et moi j’oublierai tes fils» (v. 6). Au désert de Sinaï, l’Éternel avait déclaré à Israël que, s’il gardait l’alliance de la loi, il Lui serait un royaume de sacrificateurs (Ex. 19:5, 6). Israël ne l’ayant pas gardée, la sacrificature royale lui était ôtée. Comment aurait-il pu servir et adorer, être maintenu dans des fonctions sacerdotales vis-à-vis d’un Dieu qu’il ne connaissait point? «Tu as rejeté la connaissance», lui dit l’Éternel; et c’est «faute de cette connaissance» que la destruction l’atteint. Bien plus encore, il avait «oublié la loi de son Dieu». L’oublier, comme si elle n’avait jamais existé, après l’avoir connue, cette loi juste et sainte, n’était-ce pas bien pire que de ne l’avoir jamais connue? Aussi Dieu dit: «Moi, j’oublierai tes fils» (v. 6). Dans quelle misère la désobéissance et le péché plongent l’homme! Quel sort, d’être oublié de Dieu, quand il aurait pu entrer devant l’Éternel qui déclarait ne vouloir oublier qu’une chose, les péchés et les iniquités de son peuple!

Osée, avec l’incohérence voulue qui caractérise sa prophétie, passe de la sacrificature du peuple aux sacrificateurs établis sur lui (v. 8 et 9). «Ils mangent le péché de mon peuple, et leur âme désire son iniquité. Et comme le peuple, ainsi sera le sacrificateur». Je pense que «le péché» signifie ici, comme plus d’une fois dans l’Écriture, le sacrifice pour le péché. Les sacrificateurs désirent que les iniquités du peuple se multiplient afin de pouvoir d’autant plus largement se nourrir de leurs sacrifices. Voilà jusqu’où étaient tombées les fonctions sacerdotales; elles n’étaient plus qu’une affaire de profits matériels, un gagne-pain! Aussi Dieu «visite sur eux leurs voies» (v. 9). Quant à l’ivresse, conduisant à la fornication, et si commune en Éphraïm, elle leur ôtait le sens et ils avaient cessé de prendre garde à l’Éternel (v. 11). Les pratiques superstitieuses les plus insensées avaient remplacé en Israël le culte du vrai Dieu. Le peuple «interrogeait son bois, et son bâton était son oracle» (v. 12). Ces superstitions sont de tous les temps, à mesure que décroît la religion du vrai Dieu. Il faut à l’homme, tel qu’il est constitué, un objet, et si Dieu n’est pas pour lui cet objet, il se dégrade moralement et cherche des conseils auprès de sa table et de son bâton. Et c’est le jugement de Dieu sur l’impiété de l’homme: Il «le livre à un esprit réprouvé».

Désormais Dieu n’arrêtera plus le jugement. Trois paroles solennelles montrent que Dieu a pris à l’égard d’Éphraïm une décision irrévocable: «Que nul ne conteste, que nul ne reprenne!» «Je ne punirai pas vos filles». «Éphraïm s’est attaché aux idoles: laisse-le faire» (v. 4, 14, 17). Ces paroles sont semblables à celles de l’Apocalypse: «Que celui qui est souillé se souille encore!» (Apoc. 22:11).

Mais, comme nous l’avons dit, cet arrêt définitif ne s’adresse pas à Juda. «Que Juda ne se rende pas coupable!» dit l’Éternel (v. 15). Combien cette parole est importante, pour ce qui reste encore du peuple de Dieu, dans le jour actuel. Déjà le mal qui a envahi la masse du peuple sévit au milieu de ceux que Dieu conserve encore comme un témoignage au milieu de l’infidélité générale. Bientôt ce qui reste aujourd’hui debout subira le même sort que l’ensemble de la nation. Comment se préserver de la contagion? Comment demeurer sur le terrain de la bénédiction? Dieu demande-t-il de grandes choses à Juda, déjà entamé de toutes parts par l’apostasie finale? Non, quand il y a si peu de force, il ne demande qu’un témoignage négatif pour ainsi dire, comme il dit à Philadelphie: «Tu n’as pas renié mon nom» (Apoc. 3:8). Abstiens-toi, tel est le mot d’ordre. Reste éloigné de ce qui, sous des dehors respectables, ou sous des noms augustes et sacrés, ne couvre plus que l’iniquité et l’abandon de Dieu. «N’allez pas à Guilgal, et ne montez pas à Beth-Aven, et ne jurez pas: «L’Éternel est vivant!» (v. 15). Ces lieux si connus dans l’histoire du peuple de Dieu avaient passé, par voie de conquête, après la division du royaume, des mains de Benjamin à celles d’Éphraïm, et se trouvaient par leur position à la portée immédiate de Juda, comme un piège sur son chemin. Guilgal, mémorial de la victoire remportée sur la mort par l’Arche placée au milieu du Jourdain; monument durable de l’entrée des douze tribus en Canaan; Guilgal, lieu de la circoncision, du retranchement de la chair, du jugement prononcé sur elle et sans lequel on ne pouvait prendre possession du pays de la promesse; Guilgal, lieu où Israël revenait toujours pour y trouver le secret de la victoire, lieu de rassemblement du peuple fidèle, était devenu un lieu d’autels et de sacrifices profanes pour Éphraïm, un lieu où la transgression s’était multipliée (Osée 9:15; 12:12; Amos 4:4; 5:5). Béthel, «maison de Dieu», lieu des promesses faites à Jacob, lieu où il avait reçu son nom d’Israël, et où le Tout-puissant s’était comme tout de nouveau fait connaître à lui, — Béthel était devenu la maison des veaux d’or, de leur autel et de la fausse sacrificature instituée par Jéroboam (1 Rois 12; Amos 3:14). Comme il méritait bien le nom de Beth-Aven, «maison d’iniquité», nom dont Osée le flétrit trois fois! (4:15; 5:8; 10:5). Dans ces lieux où jadis Samuel, le prophète de l’Éternel, se rendait d’année en année, on ne trouvait plus qu’idolâtrie et faux prophètes. Tel était le culte d’Éphraïm. Juda devait s’en abstenir. N’avait-il pas le lieu où l’Éternel faisait habiter son nom, à Jérusalem? Et si ce lieu même était déshonoré, était-ce une raison pour retourner à l’idolâtrie qui avait l’impudence de se parer du saint nom de l’Éternel?

Cet appel si pressant à ne pas se rendre coupable a-t-il atteint le cœur de Juda? Le chapitre suivant va nous répondre. Et que feront aujourd’hui ceux qui, dans la chrétienté, reçoivent le même appel? N’allez pas à Guilgal et ne montez pas à Beth-Aven!