Nombres

Chapitre 5

«Et l’Éternel parla à Moïse, disant: Commande aux fils d’Israël qu’ils mettent hors du camp tout lépreux et quiconque a un flux, et quiconque est impur pour un mort. Tant homme que femme, vous les mettrez dehors; vous les mettrez hors du camp, afin qu’ils ne rendent pas impurs leurs camps, au milieu desquels j’habite. Et les fils d’Israël firent ainsi, et les mirent hors du camp; comme l’Éternel avait dit à Moïse, ainsi firent les fils d’Israël» (versets 1-4).

Nous avons ici, déployé devant nous, le grand principe fondamental sur lequel est établie la discipline de l’assemblée; principe, nous pouvons le dire, de la dernière importance, quoiqu’il soit, hélas! si peu compris et si peu observé. C’était la présence de Dieu au milieu de son peuple d’Israël qui réclamait de leur part la sainteté. «Afin qu’ils ne rendent pas impurs leurs camps, au milieu desquels j’habite!» Le lieu où le Saint habite doit être saint. C’est une vérité aussi simple qu’elle est urgente.

Nous avons déjà fait observer que la rédemption était la base de l’habitation de Dieu au milieu de son peuple; mais nous devons nous souvenir que la discipline était essentielle à son séjour au milieu d’eux. Dieu ne pouvait pas habiter là où le mal était sanctionné ouvertement et de propos délibéré. Béni soit son nom, Il peut supporter et Il supporte la faiblesse et l’ignorance; mais ses yeux sont trop purs pour voir le mal et regarder l’iniquité. Le mal ne peut jamais habiter avec Dieu, et Dieu ne peut avoir de communion avec le mal. Ce serait comme une dénégation de sa propre nature; or Il ne peut se renier lui-même.

On peut cependant faire cette objection: «Le Saint Esprit n’habite-t-il pas dans le croyant individuellement, et cependant il se trouve beaucoup de mal en lui?». En effet, le Saint Esprit habite dans le croyant, sur le principe d’une rédemption accomplie. Il est là, non point comme le sceau de ce qui est de la nature, mais comme le sceau de ce qui est de Christ; et nous jouissons de sa présence et de sa communion exactement selon la mesure dont le mal en nous est habituellement jugé. Quelqu’un soutiendra-t-il que nous puissions réaliser la présence de l’Esprit au-dedans de nous, et nous en réjouir, tout en tolérant notre dépravation naturelle et en satisfaisant les convoitises de la chair et de nos pensées? Loin de nous cette idée impie! Non, il faut que nous nous jugions nous-mêmes et que nous rejetions tout ce qui est incompatible avec la sainteté de Celui qui demeure en nous. Notre «vieil homme» n’est pas reconnu du tout. Il n’existe pas devant Dieu. Il a été condamné entièrement en la croix de Christ. Nous sentons son influence, hélas! et nous avons à en mener deuil et à nous en juger nous-mêmes; mais Dieu nous voit en Christ dans l’Esprit, dans la nouvelle création. Et d’ailleurs le Saint Esprit habite dans le croyant sur le fondement du sang de Christ, et cette habitation exige le jugement du mal sous toutes ses formes.

Il en est de même relativement à l’assemblée; sans doute il y a du mal en elle, du mal dans chacun de ceux qui en font partie et par conséquent du mal dans le corps collectif. Mais il faut que ce mal soit jugé; et s’il est jugé, il ne lui est pas permis d’agir, il est annulé. Mais dire qu’une assemblée n’a pas à juger le mal, c’est tout simplement établir l’antinomianisme; que dirions-nous à un chrétien qui soutiendrait qu’il n’est pas solennellement responsable de juger le mal en lui-même et dans sa conduite? Nous pourrions, sans aucune hésitation, le déclarer antinomien. Et s’il est mauvais pour un seul individu de suivre un tel principe, ne doit-il pas l’être tout autant pour une assemblée? Nous ne comprenons pas que cela puisse être mis en question.

Quelle aurait été la conséquence du refus d’Israël, d’obéir au commandement péremptoire donné au commencement du chapitre que nous examinons? Supposons qu’ils eussent dit: «Nous ne sommes pas responsables de juger le mal, et nous ne pensons pas qu’il convienne à des mortels comme nous, pauvres, faibles et faillibles, de juger qui que ce soit. Ces individus lépreux, souillés et autres, sont tout autant Israélites que nous, et ont droit tout aussi bien que nous à toutes les bénédictions et à tous les privilèges du camp; nous ne voyons donc point qu’il nous convienne de les mettre dehors.»

Or, nous le demandons, qu’est-ce que Dieu aurait répliqué à de pareilles objections? Si le lecteur veut se reporter un instant au chapitre 7 de Josué, il trouvera une réponse aussi solennelle qu’elle peut l’être. Qu’il s’approche et qu’il examine avec soin ce «grand monceau de pierres» dans la vallée d’Acor. Qu’il y lise l’inscription qu’il porte; quelle est-elle? «Dieu est extrêmement redoutable dans l’assemblée des saints, et terrible au milieu de tous ceux qui l’entourent» (Ps. 89:8). «Notre Dieu est un feu consumant» (Héb. 12:29). Quel est le sens de tout cela? Écoutons-le et le considérons. La convoitise, ayant conçu dans le cœur d’un membre de la congrégation, avait enfanté le péché. Mais quoi! cela embrassait-il la congrégation tout entière? Oui, sans doute, telle est la solennelle vérité. «Israël (non pas seulement Acan) a péché, et même ils ont transgressé mon alliance que je leur avais commandée, et même ils ont pris de l’anathème, et même ils ont volé, et même ils ont menti, et ils l’ont aussi mis dans leur bagage. Et les fils d’Israël ne pourront subsister devant leurs ennemis, ils tourneront le dos devant leurs ennemis car ils sont devenus anathème. Je ne serai plus avec vous si vous ne détruisez pas l’anathème du milieu de vous» (Josué 7:11-12).

Ce passage est des plus sérieux et des plus pénétrants. Il fait assurément entendre une éclatante voix à nos oreilles, et donne à notre cœur une sainte leçon. Il y avait, autant que le récit nous l’apprend, plusieurs centaines de mille individus dans tout le camp d’Israël, aussi ignorants du péché d’Acan que Josué lui-même semble l’avoir été, et cependant il fut dit Israël a péché, transgressé, pris de l’anathème, volé et menti. Comment pouvait-il en être ainsi? L’assemblée était une. La présence de Dieu au milieu de la congrégation en constituait l’unité unité telle que le péché de chacun devenait celui de tous. «Un peu de levain fait lever toute la pâte.» La raison humaine peut hésiter là-dessus comme, de fait, elle hésitera toujours sur tout ce qui est au-dessus de son étroite portée. Mais Dieu le dit et cela suffit à l’esprit du croyant. Il ne nous convient pas de dire «Mais? comment? ou pourquoi?» Le témoignage de Dieu établit tout, et nous n’avons qu’à croire et à obéir. C’est assez pour nous de savoir que le fait de la présence de Dieu exige la sainteté, la pureté et le jugement du mal. Rappelons-nous que ceci n’est pas exigé d’après ce principe si justement repoussé par tout esprit humble «Tiens-toi loin, ne me touche pas, car je suis saint vis-à-vis de toi» (Ésa. 65:5). Non, non; c’est entièrement sur le principe de ce que Dieu est «Soyez saint, car je suis saint». Dieu ne peut pas donner l’approbation de sa présence à un mal qui n’est pas jugé. Quoi! donner la victoire à son peuple devant Aï, lorsque. Acan est dans le camp? Impossible! Une victoire, dans de telles circonstances, eût été un déshonneur pour Dieu, et la chose la plus funeste qui pût arriver à Israël. Cela ne se pouvait. Israël devait être châtié. Ils devaient être humiliés et brisés. Ils devaient descendre dans la vallée d’Acor, le lieu du trouble, parce que là seulement pouvait leur être ouverte «une porte d’espérance» quand le mal s’était introduit. (Cf. Osée 2:15.)

Que le lecteur ne se méprenne pas sur ce grand principe pratique. Il a été extrêmement mal compris par plusieurs enfants de Dieu, nous le craignons. Il y en a beaucoup qui semblent croire qu’il ne peut jamais être convenable à ceux qui sont sauvés par grâce, et qui sont eux-mêmes des monuments signalés de miséricorde, d’exercer la discipline sous quelque forme ou en vertu de quelque principe que ce soit. Au jugement de telles personnes, Matthieu 7:1, semble condamner tout à fait notre hardiesse à juger. Notre Seigneur, disent-elles, ne nous exhorte-t-il pas expressément à ne pas juger? Ne sont-ce pas ici ses propres paroles: «Ne jugez pas, afin que vous ne soyez pas jugés?» Sans doute. Mais que signifient ces paroles? Veulent-elles dire que nous ne devions pas juger la doctrine et la manière de vivre de ceux qui se présentent pour demander la communion chrétienne? Prêtent-elles quelque appui à l’idée que nous devons recevoir tout de même un homme, quels que soient sa croyance, son enseignement, ou ses actions? Cela peut-il être la force et la signification des paroles de notre Seigneur? Qui pourrait admettre un seul instant une chose aussi absurde? Notre Seigneur ne nous dit-il pas, dans ce même chapitre, d’«être en garde contre les faux prophètes?» Or, comment pouvons-nous être en garde de qui que ce soit si nous ne devons pas juger? Si le jugement ne doit s’exercer dans aucun cas, pourquoi nous dire de prendre garde?

Lecteur chrétien, la vérité est aussi simple que possible. L’assemblée de Dieu est responsable de juger la doctrine et les mœurs de tous ceux qui demandent à en faire partie. Nous ne devons pas juger les motifs, mais les actes. L’apôtre inspiré nous enseigne positivement, dans le chapitre 5 de la première épître aux Corinthiens, que nous sommes tenus de juger tous ceux qui prennent place dans l’Assemblée. «Car qu’ai-je affaire de juger ceux de dehors aussi? Vous, ne jugez-vous pas ceux qui sont de dedans? Mais ceux de dehors, Dieu les juge. Ôtez le méchant du milieu de vous-mêmes» (vers. 12, 13).

Voilà qui est très clair; nous n’avons pas à juger ceux de «dehors», mais ceux du «dedans». C’est-à-dire ceux qui sont venus comme étant chrétiens, comme étant membres de l’assemblée de Dieu. Tous ceux-là sont placés sous la portée du jugement. Dès le moment qu’un homme est admis dans l’assemblée, il prend sa place dans cette sphère où la discipline s’exerce sur tout ce qui est contraire à la sainteté de Celui qui y habite.

Que le lecteur ne suppose pas un instant que l’unité du corps soit atteinte, quand la discipline de la maison est maintenue. Ce serait, certes là, une très grave erreur; et cependant elle est malheureusement fort commune. Nous entendons fréquemment dire de ceux qui cherchent droitement à maintenir la discipline de la maison de Dieu, qu’ils déchirent le corps du Christ. Il ne pourrait guère y avoir d’erreur plus grande. Le fait est que le maintien de la discipline est notre strict devoir, et que le déchirement du corps est une complète impossibilité. Il faut que la discipline de la maison de Dieu s’exerce; mais l’unité du corps du Christ ne saurait jamais être détruite.

Nous entendons quelquefois aussi des personnes parler de retrancher des membres du corps de Christ. C’est encore là une erreur. Aucun membre de ce corps ne peut être enlevé. Chacun a été mis à sa place dans le corps par le Saint Esprit, en vertu du conseil éternel de Dieu et sur le principe de la parfaite expiation de Christ; aucun pouvoir, ni de l’homme, ni des démons, ne pourra jamais séparer un seul membre du corps. Tous sont indissolublement joints ensemble dans une parfaite unité, et y sont maintenus par une puissance divine. L’unité de l’Église de Dieu peut être comparée à une chaîne tendue sur une rivière; vous la voyez de chaque côté, mais elle plonge au milieu, et si vous deviez juger d’après la vue seulement, vous pourriez supposer que la chaîne a cédé au centre. Il en est ainsi de l’Église de Dieu; elle apparaît comme étant une au commencement; elle sera vue une dans peu de temps; et elle est maintenant une aux yeux de Dieu, quoique son unité ne soit pas visible aux yeux de la chair.

Il est de la dernière importance que le lecteur chrétien soit parfaitement au clair sur cette grande question de l’Église. L’ennemi a cherché par tous les moyens en son pouvoir à aveugler le peuple de Dieu, afin qu’il ne pût pas voir la vérité sur ce sujet. Nous avons, d’un côté, l’unité vantée du Catholicisme romain, et, de l’autre, les déplorables divisions du Protestantisme. Rome montre d’un air triomphant les nombreuses sectes des Protestants et, ceux-ci, de même, font remarquer les erreurs, les corruptions et les abus nombreux du Romanisme. Ainsi celui qui cherche sérieusement la vérité sait à peine de quel côté se tourner, ou ce qu’il doit croire; tandis que, d’autre part, l’insouciant, l’indiffèrent, celui qui tient à ses aises et le mondain ne sont que trop portés à s’appuyer sur tout ce qu’ils voient autour d’eux, pour repousser toute pensée sérieuse sur les choses de Dieu et pour ne pas s’en soucier; et même si, comme Pilate, ils posent parfois légèrement cette question «Qu’est-ce que la vérité?» comme lui, ils se détournent sans attendre la réponse.

Or, nous sommes fermement persuadé que le vrai secret de tout le sujet, la grande solution de la difficulté, — le réel secours pour les cœurs des bien-aimés saints de Dieu se trouveront dans la vérité de l’indivisible unité de l’Église de Dieu, du corps de Christ sur la terre. La vérité ne doit pas être regardée seulement comme une doctrine pour nous, mais elle doit être confessée, maintenue et réalisée à tout prix. Cette grande vérité forme un puissant lien pour l’âme, et contient, en elle-même, la seule réponse à l’unité vantée de Rome, d’autre part, et aux divisions du Protestantisme, de l’autre. Elle nous rendra capables de témoigner au Protestantisme que nous avons trouvé l’unité, et au Catholicisme romain que nous avons trouvé l’unité de l’Esprit.

Cependant, on pourrait répondre que c’est une très grande utopie que de vouloir réaliser une pareille idée dans l’état actuel des choses. Tout est dans une telle ruine et dans une telle confusion, que nous sommes justement comme des enfants qui se sont égarés dans un bois, et qui s’efforcent de s’acheminer de leur mieux vers leur demeure; les uns en grande masse, les autres en groupes de deux ou trois, et quelques-uns tout seuls.

Or ces diverses marches peuvent paraître très plausibles, et nous ne doutons pas le moins du monde que l’une ou l’autre n’ait une immense importance sur un grand nombre de serviteurs du Seigneur actuellement. Mais au jugement de la foi, une telle manière de présenter la chose n’a aucune valeur quelconque, pour cette simple raison que la seule question importante est celle-ci, savoir: «L’unité de l’Église est-elle une théorie humaine, ou une réalité divine?» Une réalité divine très certainement, comme il est écrit: «Il y a un seul corps et un seul Esprit» (Éph. 4:4). Si nous nions qu’il y ait «un seul corps», nous pouvons tout aussi bien nier qu’il y ait «un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous», attendu que tout cela se suit sur la page inspirée, et que si nous ôtons un seul anneau à cette chaîne, nous perdons la chaîne tout entière.

Puis nous ne sommes pas bornés à un passage solitaire de l’Écriture sur ce sujet quoique, si nous n’en avions qu’un seul, il serait amplement suffisant. Mais nous en avons plus d’un. Écoutez le suivant: «la coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas la communion du sang du Christ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas la, communion du corps du Christ? Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain» (1 Cor. 10:16, 17). Lisez aussi 1 Cor. 12:12-27, où ce sujet est entièrement développé et trouve son application.

En un mot, la parole de Dieu, établit, de la manière la plus claire et la plus positive, la vérité de l’unité indissoluble du corps de Christ; et de plus elle établit, tout aussi clairement et tout aussi pleinement, la vérité de la discipline de la maison de Dieu. Mais, qu’on y fasse attention, l’accomplissement convenable de la dernière de ces vérités ne portera jamais atteinte à la première. Les deux choses s’accordent parfaitement. Devons-nous supposer que l’apôtre portait atteinte à l’unité du corps, lorsqu’il commandait à l’assemblée de Corinthe d’ôter du milieu d’elle le méchant? Assurément non. Et cependant cet homme n’était-il pas un membre du corps de Christ? Oui, vraiment, car nous le voyons réintégré dans la seconde épître. La discipline de la maison de Dieu avait fait son œuvre sur un membre du corps de Christ, et celui qui était égaré dans le mal avait été ramené. Tel était le but de l’action de l’assemblée.

Tout ceci peut aider à éclairer l’esprit du lecteur sur le sujet profondément intéressant de la réception à la table du Seigneur et de son exclusion. Il paraît qu’il y a sur ces choses une très grande confusion dans l’esprit de plusieurs chrétiens. Il en est quelques-uns qui semblent croire que, pourvu qu’une personne soit chrétienne, on ne peut, pour aucun motif, lui refuser une place à la table du Seigneur. Le cas de 1 Cor. 5 est parfaitement suffisant à décider de la question. Évidemment cet homme n’était pas retranché parce qu’il n’était pas chrétien. Il était, nous le savons, un enfant de Dieu, malgré sa chute et son péché, et cependant il était ordonné à l’assemblée Corinthe de l’exclure. Et si les Corinthiens ne l’avaient pas fait, ils auraient amené le jugement de Dieu sur l’assemblée entière. La présence de Dieu est dans l’assemblée, par conséquent le mal doit être jugé.

Ainsi, si nous examinons, soit le chapitre 5 des Nombres, soit le chapitre 5 de la première épître aux Corinthiens, nous apprenons la même vérité solennelle, savoir que «la sainteté sied à ta maison, ô Éternel pour de longs jours» (Ps. 93:5). De plus, nous apprenons que c’est pour le peuple de Dieu que la discipline doit être maintenue, et non pour ceux du dehors; car que lisons-nous dans les premières lignes du chapitre 5 des Nombres? Était-il commandé aux fils d’Israël de mettre hors du camp tous ceux qui n’étaient pas Israélites, tous ceux qui n’étaient pas circoncis, ou qui ne pouvaient pas établir leur généalogie suivant une ligne continue jusqu’à Abraham? Étaient-ce là les motifs d’exclusion du camp? Pas du tout. Qui donc étaient ceux qui devaient être mis dehors? «Tout lépreux», c’est-à-dire tout individu dans lequel le péché est reconnu comme opérant; «quiconque a un flux», c’est-à-dire celui dont émanait une influence corruptrice; et «quiconque est impur pour un mort». Telles étaient les personnes qui devaient être séparées du camp dans le désert et leurs antitypes doivent être séparés de l’assemblée de nos jours.

Et pourquoi cette séparation était-elle exigée? Était-ce pour élever la réputation ou le caractère honorable du peuple? Nullement. Pourquoi donc? «Afin qu’ils ne rendent pas impurs leurs camps, au milieu desquels j’habite.» Il en est ainsi maintenant. Nous ne jugeons pas et nous ne rejetons pas une mauvaise doctrine, dans le but de soutenir notre orthodoxie; comme nous ne jugeons pas non plus et nous ne retranchons pas le mal moral, dans le but de maintenir notre réputation ou notre honorabilité. Le seul principe de jugement et de retranchement est celui-ci «La sainteté sied à ta maison, ô Éternel! pour de longs jours» (Ps. 93:5). Dieu habite au milieu de son peuple. «Où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux» (Matt. 18:20). «Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous?» (1 Cor. 3:16). Et encore «Ainsi donc vous n’êtes plus étrangers ni forains, mais vous êtes concitoyens des saints et gens de la maison de Dieu, ayant été édifiés sur le fondement des apôtres et prophètes, Jésus Christ lui-même étant la maîtresse pierre du coin, en qui tout l’édifice, bien ajusté ensemble, croît pour être un temple saint dans le Seigneur; en qui, vous aussi, vous êtes édifiés ensemble, pour être une habitation de Dieu par l’Esprit.» (Éph. 2:19-22).

Mais il se peut que le lecteur se sente disposé à soulever des questions telles que les suivantes «Comment est-ce possible de trouver une église pure et parfaite? N’y a-t-il pas, n’y aura-t-il pas, ne faut-il pas qu’il y ait quelque mal dans chaque assemblée, en dépit de la vigilance pastorale la plus active et de la fidélité collective? Comment alors la règle suprême de la pureté peut-elle être conservée?» Sans doute il y a du mal dans l’assemblée; attendu qu’il y a le péché habitant dans chacun de ses membres. Mais il ne doit pas être permis et sanctionné; il doit être jugé et maîtrisé. Ce n’est pas la présence d’un mal jugé qui souille, mais c’est le support et la sanction du mal. Il en est de l’Église dans son caractère collectif comme de chaque membre dans son caractère individuel. «Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés» (1 Cor. 11:31). C’est pourquoi, quelque grand que soit le mal dans l’Église de Dieu, on ne doit pas pour cela se séparer de l’Église; mais si une assemblée renie sa solennelle responsabilité de juger le mal, soit dans la doctrine, soit dans les mœurs, elle n’est plus du tout sur le terrain de l’Église de Dieu, et c’est alors un devoir impérieux pour nous de nous en séparer. Tant qu’une assemblée est sur le terrain de l’Église de Dieu, quelque faible et quelque peu nombreuse qu’elle soit, s’en séparer est un schisme. Mais si elle n’est pas sur ce terrain, — et très certainement elle n’y est pas, quand elle renie son devoir de juger le mal, — alors c’est un schisme de continuer à avoir des rapports avec elle.

Mais ceci ne tendra-t-il pas à multiplier et à perpétuer les divisions? Très assurément non. Il peut en résulter la rupture avec des associations purement humaines; ce n’est pas là un schisme, mais tout l’opposé, vu que de pareilles associations, quelque grandes, puissantes et utiles qu’elles paraissent, sont positivement contraires à l’unité du corps de Christ, de l’Église de Dieu.

Le lecteur attentif ne peut manquer d’être frappé du fait que l’Esprit de Dieu réveille, de toutes parts, l’attention sur la grande question de l’Église. Les hommes commencent à voir qu’il y a sur ce sujet tout autre chose que la simple opinion particulière d’un esprit, ou le dogme d’un parti. La question: «Qu’est-ce que l’Église?» s’impose forcément à beaucoup de cœurs et demande une réponse. Et quelle grâce d’avoir une réponse à donner! une réponse aussi claire, aussi distincte, aussi pleine d’autorité, que la voix de Dieu, la voix de la Sainte Écriture. N’est-ce pas un privilège ineffable, quand assailli de tous côtés par les prétentions des églises: «Église de l’État», «Église nationale», «Église libre», etc., on peut se replier sur la seule véritable Église du Dieu vivant, le corps de Christ? Nous l’estimons assurément ainsi, et nous sommes fermement persuadé que c’est là seulement que gît la divine solution des difficultés de milliers d’enfants de Dieu.

Mais, où se trouve donc cette Église? N’est-ce pas une vaine entreprise que de vouloir la chercher au milieu de la ruine et de la confusion qui nous entourent? Non, béni soit Dieu! Car, bien que nous ne puissions pas voir tous les membres de l’Église réunis ensemble, c’est notre privilège et notre saint devoir de connaître et d’occuper le terrain de l’Église de Dieu, et pas un autre. Et comment peut-on discerner ce terrain? Nous croyons que le premier pas à faire pour cela, c’est de se tenir éloigné de tout ce qui y est contraire. Il ne faut pas que nous nous attendions à découvrir ce qui est vrai, tant que notre entendement est obscurci par ce qui est faux; l’ordre divin est: «Cessez de mal faire; apprenez à bien faire». Dieu ne donne pas de lumière pour deux pas à la fois. Dès le moment donc que nous découvrons que nous sommes sur un mauvais terrain, c’est notre devoir de l’abandonner, et de nous attendre à Dieu pour une nouvelle lumière qu’il nous donnera très sûrement.

Mais revenons à l’examen de notre chapitre.

«Et l’Éternel parla à Moïse, disant Parle aux fils d’Israël: Si un homme ou une femme a commis quelqu’un de tous les péchés de l’homme, en commettant une infidélité envers l’Éternel, et que cette âme-là se soit rendue coupable, ils confesseront leur péché qu’ils ont commis; et le coupable restituera en principal ce en quoi il s’est rendu coupable, et il y ajoutera un cinquième, et le donnera à celui envers qui il s’est rendu coupable. Et si l’homme n’a pas de proche parent à qui restituer la chose due, alors la chose due, restituée à l’Éternel, sera au sacrificateur, outre le bélier de propitiation avec lequel on fera propitiation pour lui» (vers. 5-8).

La doctrine de l’offrande pour le délit a été examinée dans nos «Notes sur le Lévitique» au chapitre 5, et nous devons y renvoyer le lecteur, car nous n’entendons pas employer son temps et le nôtre à revenir sur des points qui ont déjà été traités. Nous ferons seulement observer ici la question très importante de la confession et de la restitution. Non seulement il est vrai que soit Dieu, soit l’homme profitent de la grande offrande pour le péché, présentée sur la croix au Calvaire; mais nous apprenons aussi par la citation précédente que Dieu recherchait la confession et la restitution, lorsqu’un délit quelconque avait été commis. La sincérité de la confession aurait été démontrée par la restitution. Il ne suffisait pas à un Juif, qui avait commis un délit contre son frère, d’aller dire «J’en suis fâché». Il devait restituer la chose qu’il avait prise et y ajouter un cinquième. Or, quoique nous ne soyons pas sous la loi, nous pouvons cependant recueillir beaucoup d’instructions de ses institutions; quoique nous ne soyons pas sous le pédagogue, nous pouvons apprendre de lui quelques bonnes leçons. Si donc nous avons fait quelque tort à quelqu’un, ce n’est pas assez de confesser notre péché à Dieu et à notre frère, nous devons encore faire restitution; nous sommes appelés à donner une preuve pratique du fait, que nous nous sommes jugés nous-mêmes quant à la chose dans laquelle nous avons fait tort.

Nous doutons un peu que ce devoir soit compris comme il devrait l’être. Nous craignons qu’il n’y ait un mode d’agir facile, léger et inconsidéré relativement au péché et à la chute, qui doit vraiment contrister l’Esprit de Dieu. Nous nous contentons d’une simple confession des lèvres, sans avoir le cœur rempli du sentiment profond du mal du péché aux yeux de Dieu. L’acte lui-même n’est pas jugé dans ses racines morales; et comme conséquence de cette façon de traiter légèrement le péché, le cœur s’endurcit et la conscience perd sa délicatesse. Cela est très sérieux. Nous ne connaissons presque rien d’aussi précieux qu’une conscience délicate. Nous ne voulons pas dire une conscience scrupuleuse, qui se laisse dominer par ses propres lubies; ni une conscience maladive, qui est influencée par ses propres craintes. Ces deux genres de conscience sont les hôtes les plus importuns à entretenir. Mais nous voulons parler d’une conscience délicate, qui est gouvernée en tout par la Parole de Dieu et qui s’en rapporte toujours à son autorité. Nous considérons cet état sain de la conscience comme un trésor inestimable. Elle règle tout, prend connaissance des moindres choses qui sont en rapport avec notre marche et nos habitudes journalières — notre toilette, nos maisons, notre ameublement, notre table, notre conduite entière, notre esprit, notre ton, notre mode d’agir dans nos affaires; ou bien, si c’est notre lot de servir les autres, la manière dont nous nous acquittons de notre service, quel qu’il soit. En un mot tout est soumis à l’influence morale et saine d’une conscience délicate. «À cause de cela, dit l’apôtre, moi aussi je m’exerce à avoir toujours une conscience sans reproche devant Dieu et devant les hommes» (Actes 24:16).

C’est ce que nous pouvons bien désirer avec ardeur. Il y a quelque chose de moralement beau et d’attrayant dans cet exercice du plus grand et du plus doué serviteur du Christ. Malgré tous ses dons remarquables, tous ses pouvoirs merveilleux, toute sa profonde connaissance des voies et des conseils de Dieu, tout ce dont il avait à parler et à se glorifier, toutes les révélations étonnantes qui lui avaient été faites dans le troisième ciel; en un mot, lui le plus honoré des apôtres, et le plus privilégié des saints, il apportait une saine diligence à conserver toujours une conscience sans reproche devant Dieu et devant les hommes; et si, dans un moment d’oubli, il prononce une parole téméraire, comme il fit à Ananias, le souverain sacrificateur, il est prêt, immédiatement après, à confesser et à faire restitution; de sorte que cette réponse vive «Dieu te frappera, paroi blanchie» fut rétractée et remplacée pas cette parole de Dieu: «Tu ne diras pas du mal du chef de ton peuple».

Or, nous ne pensons pas que Paul eût pu s’aller reposer cette nuit, avec une conscience sans reproche, s’il n’avait pas rétracté ses paroles. Il doit y avoir confession, lorsque nous faisons ou disons ce qui est mal; et s’il n’y a pas confession, notre communion en sera assurément interrompue. La communion devient une impossibilité morale, si le péché reste sur la conscience sans avoir été confessé. Nous pouvons en parler, mais ce n’est qu’une illusion. Nous devons conserver une conscience pure, si nous voulons marcher avec Dieu. Il n’y a rien qui soit plus à craindre qu’une insensibilité morale, une conscience impure, un sens moral émoussé, qui peuvent se permettre toute sorte de choses qui passent sans être jugées avec cela on peut commettre le péché, passer par-dessus et dire froidement: «Quel mal ai-je fait?»

Lecteur, veillons à tout cela avec une sainte vigilance. Cherchons à cultiver une conscience délicate. Cela exigera de nous ce qui avait été exigé de Paul, savoir «l’exercice». Mais c’est un exercice béni, et qui produira les fruits les plus précieux. Ne croyez pas qu’il y ait dans cet exercice rien qui ait les saveurs de la loi; non, il est des plus entièrement chrétiens. En effet, nous considérons ces nobles paroles de Paul comme la personnification même, sous une forme condensée, de toute la pratique du chrétien. «Avoir toujours une conscience sans reproche devant Dieu et devant les hommes» comprend tout.

Mais hélas! combien peu nous tenons habituellement compte des droits de Dieu, ou de ceux de notre prochain! Que notre conscience est loin de ce qu’elle devrait être! Nous négligeons des devoirs de tout genre, sans même nous en apercevoir. Il n’y a pas pour cela de brisement du cœur et de contrition devant le Seigneur. Nous commettons des délits dans une foule de choses, et pourtant il n’y a pas de confession ni de restitution. On laisse passer les choses qui devraient être jugées, confessées et rejetées. Il y a du péché dans nos actes saints; il y a de la légèreté et de l’indifférence d’esprit dans l’assemblée et à la table du Seigneur; nous frustrons Dieu de différentes manières; nous pensons nos propres pensées, nous parlons nos propres paroles, nous accomplissons nos propres désirs; et qu’est-ce que tout cela sinon frustrer Dieu, vu que nous ne sommes pas à nous-mêmes, mais que nous avons été achetés à prix.

Or une telle marche ne peut que fatalement entraver nos progrès spirituels. Elle contriste l’Esprit de Dieu et fait obstacle au ministère de la grâce de Christ pour nos, âmes, par lequel seul nous croissons en Lui. Nous savons, par diverses portions de la Parole de Dieu, combien il apprécie un esprit délicat et un cœur humble. «Mais c’est à celui-ci que je regarderai: à l’affligé et à celui qui a l’esprit contrit, et qui tremble à ma parole.» Dieu peut habiter avec un tel homme, mais il ne peut avoir aucune communion avec l’endurcissement et l’insensibilité, avec la froideur et l’indifférence. Exerçons-nous donc à avoir toujours une conscience irréprochable et pure soit devant Dieu, soit devant nos semblables.

Enfin, la troisième et dernière partie de notre chapitre, que nous n’avons pas besoin de citer, nous enseigne une leçon profondément sérieuse, que nous la considérions soit au point de vue des dispensations, soit au point de vue moral. Elle contient le texte de la grande ordonnance, établie pour l’épreuve de la jalousie. La place qu’elle occupe ici est remarquable. Dans la première partie, nous avons le jugement collectif du mal; dans la seconde, le jugement individuel de soi-même, la confession et la restitution; et dans la troisième, nous apprenons que Dieu ne peut pas même supporter la simple suspicion du mal.

Or, nous croyons tout à fait que cette ordonnance très frappante a une portée dispensationnelle sur les rapports de l'Éternel avec Israël. Les prophètes insistent fréquemment sur la conduite d’Israël comme épouse, et sur la jalousie de l'Éternel, à cet égard. Nous n’avons pas l’intention de citer ces passages, mais le lecteur les trouvera dans nombre de textes de Jérémie et d’Ézéchiel. Israël n’a pas pu résister à l’épreuve scrutatrice des eaux amères; son infidélité a été rendue manifeste. La nation a enfreint ses vœux. Elle s’est détournée de son Mari, le Saint d’Israël, dont la brûlante jalousie a été répandue sur le peuple infidèle. Dieu est un Dieu jaloux, et il ne peut supporter la pensée que le cœur qu’Il réclame comme sa propriété soit donné à un autre.

Ainsi, nous voyons que cette ordonnance pour l’épreuve de jalousie porte en elle l’empreinte d’un caractère divin, qui rentre pleinement dans les pensées et les sentiments d’un époux outragé, ou même de celui qui soupçonne une infidélité. La simple suspicion est intolérable, et quand elle prend possession du cœur, la question doit être scrupuleusement examinée jusqu’au fond. La personne soupçonnée doit subir un procédé dont la nature rigoureuse est telle que la seule innocence peut la supporter. S’il y avait une trace de culpabilité, les eaux amères iraient la chercher dans les profondeurs mêmes de l’âme et la mettraient tout entière au jour. Il n’y avait aucun moyen d’échapper pour le coupable, et nous pouvons dire que ce fait même rendait d’autant plus triomphante la justification de l’innocent. Le même procédé qui dévoilait la culpabilité du transgresseur, rendait manifeste l’innocence du fidèle. Pour celui qui a la parfaite conscience de son intégrité, plus la recherche est rigoureuse, plus elle est accueillie avec plaisir. S’il eût été possible qu’un coupable échappât, par quelque défaut dans le mode d’éprouver, cela n’aurait servi que contre l’innocent. Mais le procédé était divin, et par conséquent parfait. Aussi, quand la femme soupçonnée en était sortie saine et sauve, sa fidélité était visiblement démontrée, et une entière confiance lui était rendue.

Quelle grâce donc d’avoir eu un mode aussi parfait de résoudre tous les cas douteux! Le soupçon est le coup de mort de toute affectueuse intimité, et Dieu ne voulait pas qu’il existât au milieu de sa congrégation. Il ne voulait pas seulement que son peuple jugeât le mal collectivement, et qu’ils se jugeassent eux-mêmes, individuellement; mais là où il y avait même le soupçon du mal, sans que l’évidence apparût, il donnait Lui-même une méthode d’épreuve qui mettait la vérité parfaitement en lumière. Le coupable devait boire la mort, et après l’avoir bue il y trouvait le jugement1. Le fidèle buvait la mort et y trouvait la victoire.

1 La poussière prise du sol du tabernacle peut être envisagée comme une figure de la mort. Tu m’as mis dans la poussière de la mort (Ps. 22:16). L’eau symbolise la parole qui, étant apportée pour agir sur la conscience par la puissance du Saint Esprit, manifeste tout. S’il y a quelque infidélité envers Christ, le véritable Époux de son peuple, elle doit être entièrement jugée. Ceci est applicable au peuple d’Israël, à l’Église de Dieu et au croyant individuellement. Si le cœur n’est pas fidèle à Christ, il ne sera pas en état de soutenir le pouvoir scrutateur de la Parole. Mais s’il y a de la vérité dans les parties intimes de l’âme, plus cette âme est sondée et éprouvée, et mieux cela est pour elle. Quelle bénédiction, lorsque nous pouvons, vraiment dire: «Sonde-moi, ô Dieu! et connais mon cœur; éprouve-moi, et connais mes pensées. Et regarde s’il y a en moi quelque voie de chagrin, et conduis-moi dans la voie éternelle» (Ps. 139:23-24).