Matthieu

Chapitre 19

Question touchant le mariage

(v. 1-12). — Jésus continue son œuvre d’amour en guérissant les foules qui le suivaient de Galilée en Judée. Au lieu d’être touchés par les œuvres qu’il accomplissait, les pharisiens viennent à lui pour chercher, par des questions, à le mettre en opposition avec les enseignements de Moïse, donnés pour le régime de la loi. Ils demandent si un homme a le droit de renvoyer sa femme, chose autorisée par la loi de Moïse, à cause de la dureté de cœur des Juifs. Le Seigneur leur dit qu’au commencement il n’en était pas ainsi. Dieu a créé l’homme et la femme pour qu’ils soient unis à toujours sur la terre. L’homme ne doit jamais déroger à l’ordre divinement établi; l’homme ne doit pas être séparé de sa femme, cela d’autant moins sous le régime de la grâce où la dureté du cœur ne saurait trouver de place dans nos rapports; au contraire, nous avons à nous aimer tous, à nous supporter, à nous pardonner les uns aux autres, surtout entre mari et femme, et dans la même famille.

Nous voyons, par l’enseignement du Seigneur, que, pour connaître la vérité sur une question, il faut toujours revenir aux origines, considérer ce que Dieu a fait et comment il l’a fait. L’homme altère tout, modifie tout; il veut tout arranger selon ses goûts et ses convenances, et dénature ce que Dieu a établi. Il oublie la responsabilité qui lui incombe de se conformer à la pensée de Dieu à tous égards, car c’est d’après cette mesure que le jugement sera prononcé à la fin. De là l’importance qu’il y a de rechercher en toute circonstance la pensée de Dieu; nous la trouvons toujours dans sa Parole.

 

Encore les petits

(v. 13, 14). — La débonnaireté et la grâce que manifestait le Sauveur et ses pensées à l’égard des petits enfants engageaient leurs parents à les lui apporter, afin qu’il leur impose les mains et qu’il prie. C’était là une chose agréable à son cœur, il aimait trouver ces petits êtres qui venaient à lui sans crainte, en pleine confiance, attirés par la grâce que l’homme orgueilleux, l’homme fait, endurci par le péché, repoussait avec mépris.

Ce qui étonne, c’est d’entendre les reproches de ses disciples, malgré tout ce qu’ils avaient vu précédemment (chap. 18). Le cœur naturel, étranger aux pensées de grâce qui doivent caractériser les disciples de Jésus dans le royaume des cieux, croit que ce que l’homme estime doit convenir à Dieu. Le Seigneur profite de cette circonstance pour rappeler encore une fois que c’est à de tels qu’est le royaume des cieux. Sans ce caractère-là, inutile d’avoir une prétention quelconque à y entrer et à le posséder. Or puisque le royaume des cieux appartient à ceux qui ressemblent aux petits enfants, il faut bien se garder d’empêcher ceux-ci d’aller à Jésus. Dans leur simplicité enfantine, comme leur nature pécheresse ne s’est pas encore développée au contact du monde et des enseignements des hommes, ils vont tout naturellement à Jésus. Aussi doit-on veiller à ne rien faire, soit en paroles soit en actions, qui puisse détourner un enfant de la simplicité de la foi au Seigneur Jésus.

Quelle triste preuve nous avons de l’état du cœur de l’homme, dans le fait que le développement de l’intelligence humaine contribue à l’éloigner de Dieu, à s’opposer à lui, tandis que, dans l’état d’innocence, c’était par l’intelligence qui le distinguait de la bête qu’il pouvait avoir des rapports avec Dieu et être heureux dans sa présence! Le péché a fait éclore la conscience, cette faculté de connaître le bien et le mal. Alors l’homme a fui ce Dieu, la source de tout bien pour lui; et dans cet éloignement de lui, sans désir d’un rapprochement, le péché que le cœur aime se pratique librement et entretient la peur de Dieu. Chez le petit enfant, plus ou moins inconscient du péché, toutefois sans être innocent, il n’y a pas cette frayeur et cette haine à l’égard de celui que nous avons offensé; il est dans l’état le plus proche de celui où Dieu avait placé l’homme. C’est pourquoi il ne fuit pas et, s’il ne va pas à Jésus, c’est parce qu’on l’en empêche de diverses manières. Puissent tous ceux qui ont une responsabilité quelconque vis-à-vis des enfants y penser sérieusement!

 

Le jeune homme riche

(v. 16-26). — Le Seigneur continue à faire ressortir que les pensées des hommes, quant au bien et quant à la grandeur, sont opposées à celles de Dieu, même celles qui pouvaient provenir de l’enseignement légal qui s’appliquait à l’homme naturel.

Un homme bien disposé s’approche de Jésus, lui disant: «Maître, quel bien ferai-je pour avoir la vie éternelle?» Il vient avec la pensée qu’il y a quelque chose de bon en lui qui le rendra capable de mériter la vie éternelle par le bien qu’il pourrait accomplir. C’est pourquoi le Seigneur répond premièrement: «Pourquoi m’interroges-tu touchant ce qui est bon? Un seul est bon». Nous savons que ce seul est Dieu.

La loi promettait la vie ici-bas à celui qui l’aurait observée; le Seigneur cite cette partie des commandements qu’un homme pouvait encore accomplir. Le jeune homme lui répond: «J’ai gardé toutes ces choses; que me manque-t-il encore?» Il voulait avoir non seulement les bénédictions que la loi offrait sur la terre, mais encore la vie éternelle. Or, bien qu’il n’ait pas tué, ni commis adultère, ni volé, ni dit de faux témoignages, rien de cela ne pouvait lui donner des bénédictions éternelles. Un seul moyen existait: Jésus était venu dans ce monde pour en ouvrir le chemin. Il fallait le suivre avec un cœur détaché des choses terrestres. C’est pourquoi le Seigneur lui répond: «Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu as, et donne aux pauvres; et tu auras un trésor dans le ciel; et viens, suis-moi. Et le jeune homme, ayant entendu cette parole, s’en alla tout triste, car il avait de grands biens». Combien de personnes lui ressemblent! Elles savent qu’il leur manque quelque chose pour être heureuses en pensant à l’avenir; mais elles veulent garder la jouissance des biens de ce monde, ne rien abandonner, surtout ne pas suivre Christ. Sa personne n’a aucun attrait pour leur cœur, les jouissances de ce monde en ont infiniment plus et elles sacrifient l’avenir au présent; aussi leur part est-elle misérable et elles ont leurs biens actuels avec la tristesse de ne pouvoir mêler le ciel avec la terre et elles n’ont aucune certitude pour l’avenir. Si elles persistent dans cette voie jusqu’à la fin, elles auront en partage un éternel malheur. En utilisant les biens de cette vie pour d’autres, à cause du Seigneur, on ne les perd pas; au contraire, ils se transforment en bénédictions célestes et éternelles, comme le Seigneur l’enseigne ailleurs aussi; puis, en suivant Jésus, on arrive où son chemin a abouti, dans la gloire éternelle, car lui est «le chemin, la vérité et la vie».

Voyant l’effet de ses paroles sur ce jeune homme, Jésus dit à ses disciples: «En vérité, je vous dis qu’un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux; et je vous le dis encore: Il est plus facile qu’un chameau entre par un trou d’aiguille, qu’un riche n’entre dans le royaume de Dieu». Ici encore, les disciples n’entrent pas dans la pensée de Jésus. Ils s’étonnent et disent: «Qui donc peut être sauvé?» Sous le gouvernement de Dieu, les richesses terrestres appartenaient à ceux qui faisaient le bien; Dieu les bénissait de cette manière; mais ils ne comprenaient pas que ces biens terrestres n’avaient rien à faire avec la vie éternelle, puisqu’on ne pouvait en jouir qu’ici-bas. Ils pensaient que les riches, apparemment les objets de la faveur de Dieu, entreraient plus facilement dans le royaume des cieux, cela toujours parce qu’ils considéraient les choses au point de vue des mérites de l’homme et non à celui de la grâce. Ces biens, au contraire, retenant le cœur et l’attachant à la terre, constituaient un grand obstacle lorsqu’il s’agissait de tout abandonner pour un trésor qui, bien que réel, céleste et éternel, était, pour le moment, invisible, et pour suivre un Christ méprisé qui n’avait pas un lieu où reposer sa tête, dans un monde où l’homme perdu possède de «grands biens». Les pauvres, ayant moins de jouissances ici-bas, moins à laisser, moins considérés par les hommes, acceptent plus facilement la grâce, venue à eux dans la personne de Jésus. Le Seigneur répond aux disciples de Jean le Baptiseur: «L’Évangile est annoncé aux pauvres» (chap. 11:5).

À la question des disciples: «Qui donc peut être sauvé?» Jésus répond: «Pour les hommes, cela est impossible; mais pour Dieu, toutes choses sont possibles». Que des hommes trouvent moins d’obstacles sur leur chemin que d’autres pour venir à Jésus, il est également impossible, aux uns comme aux autres, d’être sauvés. Mais, grâce à Dieu, Lui peut tout, et il a fait tout le nécessaire pour que de pauvres coupables, perdus et ruinés, incapables de quoi que ce soit, puissent trouver un salut parfait qu’il offre gratuitement à quiconque l’accepte par la foi au Seigneur Jésus.

 

Récompense des douze

(v. 27-30). — Pierre ayant entendu ce que le Seigneur avait dit au jeune homme riche, comprend que le renoncement aux avantages présents pour suivre le Seigneur aura une récompense. Il pense aussitôt aux disciples qui avaient tout quitté pour suivre Jésus, et lui dit: «Voici, nous avons tout quitté et nous t’avons suivi; que nous adviendra-t-il donc?» Cette question nous montre que les disciples avaient répondu à l’appel du Seigneur et s’étaient attachés à sa personne sans songer à une récompense. Le Seigneur, qui le reconnaît et l’apprécie, leur répond: «En vérité, je vous dis que vous qui m’avez suivi, — dans la régénération, quand le Fils de l’homme se sera assis sur le trône de sa gloire, vous aussi, vous serez assis sur douze trônes, jugeant les douze tribus d’Israël». La «régénération» désigne ici le millénium; car, pour le règne de Christ, tout sera régénéré, renouvelé. Au lieu de pouvoir accomplir cette régénération lors de sa venue, le Messie avait été rejeté. Néanmoins il régnera en son temps, et les disciples, qui l’avaient suivi dans sa rejection, qui avaient tout quitté pour partager son humiliation, auraient, dans le règne, une position glorieuse en rapport avec le renoncement qu’ils avaient accepté en suivant Jésus ici-bas. S’ils ont enduré avec Christ le mépris, s’ils ont partagé le caractère de celui qui n’insistait pas sur ses droits, lorsqu’il les fera valoir, ils partageront avec lui l’exercice de la justice, jugeant tout particulièrement les tribus d’Israël au milieu desquelles ils auront été non comme des juges, mais comme des agneaux au milieu des loups.

Les douze ne recevront pas seuls une récompense en rapport avec ce qui aura été fait ici-bas. Jésus ajoute: «Et quiconque aura quitté maisons, ou frères, ou sœurs, ou père, ou mère, ou femme, ou enfants, ou champs, pour l’amour de mon nom, en recevra cent fois autant, et héritera de la vie éternelle». On voit qu’il ne s’agit pas de tout quitter en vue d’une récompense, mais bien pour l’amour du Seigneur. Il faut avoir vu, en sa personne, la grâce, l’amour qui attirent le cœur; comment ne le suivrait-on pas, lorsqu’on le voit quitter lui-même la gloire du ciel pour venir dans ce monde souillé, sous la forme d’un homme, afin de mourir pour des pécheurs sur cette croix infâme où il a souffert pour nos péchés, le juste pour les injustes? Y a-t-il besoin d’une autre considération pour suivre le Seigneur et pour renoncer à tout ce qui pourrait nous empêcher de le servir fidèlement, serait-ce bien père, mère, femme ou enfant? Lui-même, son nom glorieux, expression d’une telle grâce, suffit pour attirer à lui. Mais, dans sa bonté infinie, après nous avoir fourni de tels motifs pour le suivre et le servir, il veut récompenser ce que nous aurons fait pour l’amour de son nom. La récompense sert donc d’encouragement et jamais de motif d’action. Comme pour les disciples, la récompense se rapportera aux circonstances dans lesquelles nous aurons suivi le Seigneur. Aucun de nous ne pourra siéger sur un trône pour juger les douze tribus d’Israël, parce que ce n’est pas au milieu d’Israël que nous nous trouvons pour suivre le Seigneur et lui rendre témoignage. Chaque temps a son caractère propre, et le Seigneur seul est juge de ce qu’il accordera à chacun. Incapables de juger selon Dieu, nous n’avons pas à apprécier cela aujourd’hui. C’est pourquoi le Seigneur ajoute: «Mais plusieurs qui sont les premiers seront les derniers, et des derniers seront les premiers». Plusieurs qui, aux yeux des autres, paraissent les premiers aujourd’hui, seront les derniers au jour où Dieu montrera ce qu’il aura apprécié dans leur conduite. Et de ceux qui paraissent les derniers, qui, par leur caractère d’humilité, auront su s’effacer, occuperont une place que le Seigneur donne à ceux qu’il estime les premiers. «À toi, Seigneur, est la bonté; car toi tu rends à chacun selon son œuvre» (Psaume 62:13).