Matthieu

Chapitre 18

Ceux qui entrent et ceux qui sont grands dans le royaume

(v. 1-5). — Au commencement de ce chapitre, nous trouvons les disciples préoccupés de la grandeur de ceux qui seront dans le royaume des cieux; ils ne doutent nullement qu’ils en feront partie, d’autant plus que le Seigneur venait de montrer à Pierre dans quelle haute position il le plaçait avec lui.

Les disciples, comme tous les Juifs, n’avaient à l’égard du royaume que des pensées de gloire et de grandeur charnelles, malgré l’abaissement dans lequel le roi, le Messie, était venu. Aussi le Seigneur leur enseigne ce qui doit caractériser ceux qui lui appartiendront, avant son établissement en gloire.

En réponse à la question des disciples: «Qui donc est le plus grand dans le royaume des cieux?» Jésus appelle auprès de lui un petit enfant, le place au milieu d’eux et dit: «En vérité, je vous dis: si vous ne vous convertissez et ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux». Aux yeux des disciples, la qualité de Juif, de descendant d’Abraham, paraissait suffisante pour un sujet du royaume; elle ne l’était pas aux yeux de Dieu. Tout Juif était pécheur et, quoique le peuple ait possédé des promesses, il fallait non seulement descendre d’Abraham, mais, avant tout, naître de nouveau, se convertir; c’est-à-dire subir un changement complet, produit par la réception d’une nouvelle nature, grâce à la foi au Seigneur Jésus mort sur la croix. Le caractère de ceux qui sont convertis et qui, par conséquent, font partie du royaume des cieux, est celui d’un petit enfant: il faut devenir comme «les petits enfants».

Combien les pensées de Dieu sont opposées à celles des hommes! Pour entrer dans la société et être quelque chose ici-bas, il faut en avoir fini avec le caractère des petits enfants. Tous les enfants souhaitent le moment où l’on ne les traitera plus comme des enfants, et surtout comme de «petits enfants», estimant que les adultes jouissent de nombreux d’avantages dont ils sont privés. Ces pensées-là sont en rapport avec les choses de la terre, avec la gloire du monde qui n’est que vanité. Quant aux choses de Dieu, pour le royaume, pour l’éternité de gloire, il en est tout autrement; car Dieu ne peut tolérer l’élévation et la grandeur de l’homme pécheur, au milieu d’un monde ruiné. «Je hais l’orgueil et la hauteur», dit la sagesse (Proverbes 8:13; Ésaïe 2:11-17). Ainsi pour entrer dans le royaume des cieux, et jouir des bénédictions présentes et éternelles, il faut la conversion, car Dieu ne peut recevoir un homme dans son état naturel. Il faut devenir comme les petits enfants, c’est-à-dire renoncer à toute prétention, croire ce que Dieu dit, avoir plus de confiance en ce qu’il dit que dans son propre jugement. Au lieu de chercher à devenir grand selon le monde, il faut au contraire devenir humble. N’est-ce pas ce que le Seigneur a fait? Lui qui était de toute éternité dans la gloire, lui qui a créé toutes choses, qui est et était Dieu, il s’est anéanti en devenant un homme, prenant la forme d’esclave, et il a été obéissant jusqu’à la mort, la mort de la croix (Philippiens 2:5-11), tout cela pour nous introduire dans son royaume, dans le ciel même. Le caractère de ceux qui sont au Seigneur doit donc être celui de leur Sauveur et Seigneur, pendant le temps de son rejet, où le monde méconnaît ceux qui croient en lui. La gloire viendra ensuite. Après avoir montré aux disciples à quelles conditions et sous quel caractère ils pouvaient entrer dans le royaume, Jésus répond proprement à leur question: «Qui... est le plus grand dans le royaume?» en disant: «Quiconque... s’abaissera comme ce petit enfant, celui-là est le plus grand dans le royaume des cieux». Pour entrer, il faut se convertir et devenir comme les petits enfants. Une fois introduit, pour y être grand, il faut encore s’abaisser comme un petit enfant. Dans un monde caractérisé par l’orgueil de l’homme et ses prétentions, l’humilité, l’abaissement, constituent le chemin de la gloire selon Dieu. C’est ce que nous voyons pour le Seigneur, dans les versets de Philippiens 2 cités plus haut. Christ s’est abaissé lui-même, au plus bas, jusque dans la mort: «C’est pourquoi... Dieu l’a haut élevé et lui a donné un nom au-dessus de tout nom». Tous ceux qui veulent être élevés dans la gloire future doivent suivre Christ, le parfait modèle, ici-bas, dans l’abaissement, l’humilité, la douceur, acceptant de n’être rien et d’être tenus pour tels, ne voulant pas autre chose que la position qu’il a eue dans ce monde. Ces caractères des siens, le Seigneur se plaît à les trouver dans le petit enfant; ils ont beaucoup de prix pour son cœur, ainsi que tous ceux qui les portent. Ils ont beau n’avoir pas de valeur pour les hommes; si l’on reçoit un seul de ces petits au nom du Seigneur, on le reçoit lui-même. Quelle gloire d’avoir, ici-bas, l’occasion de recevoir le Seigneur! Les résultats en seront glorieux et éternels, au jour où tout ce que Dieu apprécie sera manifesté (voyez Matthieu 10:40-42; 25:31-40).

 

Les occasions de chute

(v. 6-10). — Les enfants qui croient au Seigneur ont une telle valeur pour son cœur, qu’il prononce le jugement le plus sévère sur quiconque leur est une occasion de chute ou de scandale: «Il serait avantageux pour lui qu’on lui ait pendu au cou une meule d’âne1 et qu’il ait été noyé dans les profondeurs de la mer». Depuis que Jésus a prononcé ces paroles, jamais autant qu’aujourd’hui, on n’a autant cherché à scandaliser les petits qui croient au Seigneur, et en général tous les croyants, en essayant de prouver, par d’habiles raisonnements humains, que la Bible n’est pas la parole de Dieu ou qu’elle ne l’est pas entièrement; que Jésus n’était pas le Fils de Dieu ou qu’il n’a pas existé; qu’il ne faut croire que ce que l’on comprend, etc. On cherche à user de l’influence que peuvent avoir sur les croyants, petits et grands, la science et la raison humaine pour les détourner de la foi. Scandaliser, dans le Nouveau Testament, n’a pas le sens de choquer qu’il a pris en français, mais signifie faire faire un faux pas, donc faire tomber, en détournant de Dieu, en donnant à croire que ce que Dieu dit est faux, par d’autres moyens encore. Gardons-nous tous de prêter l’oreille à de tels raisonnements! Il ne s’agit pas de comprendre premièrement, mais de croire ce que Dieu dit: cela suffit; en le croyant, nous possédons le pardon de nos péchés, la paix avec Dieu, la jouissance de son amour, et, pour l’éternité, une place dans la gloire, lorsque toute la grandeur de ce monde sera anéantie. Quant à ceux qui n’auront pas cru Dieu, qui auront causé la chute d’un petit qui a mis sa confiance dans le Seigneur, qui auront préféré leurs connaissances et leurs croyances à la parole de Dieu, qui auront donné gloire à l’homme plutôt qu’à Dieu, les méchants en un mot, ils seront éternellement en dehors de la vie, du bonheur et de la gloire que la parole de Dieu donne et promet à ceux qui croient. Ils auront pour leur part les tourments éternels: «la fumée de leur tourment monte aux siècles des siècles» (Apocalypse 14:11).

1 En Orient, on moud le blé entre deux meules de pierre qui tournent horizontalement l’une sur l’autre; celle de dessous est fixe, et celle de dessus est mobile. Les plus petites sont mises en mouvement par les servantes (Matthieu 24:41), les plus grandes par un âne.

Le Seigneur met aussi en garde contre les choses qui peuvent être une occasion de chute, contre tout ce qui fait pécher et prive de la vie éternelle. La main peut occasionner le péché en accomplissant des choses mauvaises; le pied peut conduire dans des lieux où l’on est détourné de la vérité et où l’on peut commettre le mal; l’œil est l’organe par lequel les convoitises de tous genres sont introduites et entretenues dans le cœur. Si ces membres, ou l’un ou l’autre, induisent au péché, si on ne sait comment cesser de les employer pour faire le mal — ce qui peut priver du salut — mieux vaut les couper, c’est-à-dire renoncer absolument à tout ce qu’ils nous procurent. «Jette-les loin de toi», dit le Seigneur — au figuré — à une grande distance, afin de ne pas les avoir sous la main lorsque le cœur les désire, et de ne pas s’exposer au péché qui privera de la vie éternelle, car «les gages du péché, c’est la mort» (Rom. 6:23), et, après la mort, le jugement. C’est tout jeune qu’il faut pratiquer ces opérations-là, en ne cultivant pas des penchants naturels qui peuvent dégénérer en passions; on risque d’en devenir les esclaves et d’être entraîné par ces affreux tyrans dans le feu éternel.

Que le Seigneur donne à chacun d’examiner contre quoi il a à lutter, la jeunesse tout particulièrement, qui est responsable d’écouter les enseignements de parents pieux et de tous ceux qui s’intéressent à elle, selon Dieu.

 

La valeur d’un seul petit enfant

(v. 10-14). — Les petits enfants ont un tel prix pour le Seigneur qu’il dit: «Prenez garde de ne pas mépriser un de ces petits». Il faut avoir pour eux les pensées du Père à leur égard et non celles des hommes, qui font plus de cas d’un grand du monde que d’un petit enfant. Ici, il ne s’agit pas de ceux qui croient seulement, mais de tous les petits enfants, quels qu’ils soient. Comment estimer le prix qu’un petit enfant a pour Dieu? Le verset 11 le dit: «Car le Fils de l’homme est venu pour sauver ce qui était perdu». Un objet a toujours une valeur égale au prix payé pour l’acquérir. Le prix donné pour le salut d’un seul petit enfant n’est rien de moins que le Fils de l’homme, venu ici-bas pour les sauver. Ce cher Sauveur donne à l’égard d’un petit enfant, dont l’existence n’a duré peut-être que quelques instants, le même exemple de dévouement que dans celui que montre la parabole du bon Berger (Luc 15). Le berger abandonne tout le troupeau pour venir sauver un de ces petits; il a de la joie de l’avoir sauvé. «Car... ce n’est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux, qu’un seul de ces petits périsse». En général lorsqu’on apprend la mort d’un petit enfant, on se sent moins ému que s’il s’agit de celle d’un grand homme, surtout si cet enfant appartient à une famille pauvre; on ne lui prépare pas de pompeuses funérailles. Et pourtant, ce grand homme peut être un incrédule, mort dans ses péchés, parce qu’il a méprisé la grâce; il n’y a eu pour lui aucune joie dans le ciel, tandis que ce petit enfant est un éternel sujet de bonheur pour celui qui vint ici-bas pour le sauver. Nos pensées doivent être à cet égard, comme en tout, celles du Seigneur. Ne méprisons pas le petit enfant, car nous savons que tous ceux qui meurent en bas âge sont auprès du Seigneur. Il s’est donné pour eux, accomplissant la volonté de son Père qui ne veut pas qu’un seul de ces petits périsse. Au ciel, ils sont dans sa présence. «Leurs anges», dit le Seigneur, «voient continuellement la face de mon Père qui est dans les cieux». On a dit à ce propos: «Si les petits enfants ne savent pas s’ouvrir leur chemin dans ce monde, ils sont néanmoins l’objet de la faveur spéciale du Père, comme ceux qui, dans les cours terrestres, avaient le privilège particulier de voir la face du roi».

D’après les enseignements du Seigneur dans tout ce qui précède, la petitesse, l’humilité doivent caractériser ceux qui appartiennent au royaume, ainsi que la grâce manifestée dans la personne de Jésus.

 

Comment régler les torts entre frères

(v. 15-17). — Les caractères de grâce et d’humilité doivent aussi régler notre conduite vis-à-vis de celui qui peut avoir fait tort à son frère. Au lieu de nous justifier et de divulguer le mal qu’il peut avoir fait, nous devons avoir en vue son bien, garder la chose entre nous et lui et aller, dans l’amour, chercher à le gagner, en ayant surtout à cœur de lui montrer combien il s’est fait tort à lui-même en péchant, plutôt que de lui faire comprendre combien il nous a fait tort, ce que l’on peut exagérer facilement. Si cette démarche fraternelle n’aboutit pas, il faut, sans ébruiter la chose, retourner vers lui avec une ou deux personnes, afin que tout se passe en présence de témoins et que les faits ne soient pas dénaturés. S’il ne veut pas écouter les témoins, il faut le dire à l’Assemblée, et s’il ne veut pas écouter l’Assemblée, c’est inutile d’aller plus loin; le frère qui a péché peut être considéré comme un homme des nations, avec lequel on n’a rien à faire. Mais si l’on agit dans le premier cas selon l’enseignement donné, il est bien rare que l’on ait besoin du second moyen et encore moins du troisième.

Souvenons-nous tous de l’esprit qu’il faut apporter envers ceux qui ont manqué à notre égard. Soyons pénétrés du caractère de grâce de notre Père; cherchons en premier lieu le bien du coupable; n’ayons aucun désir de lui faire subir un châtiment et n’agissons pas en vue de nous faire rendre justice; c’est Dieu qui justifie. De cette manière, la grâce touchera le cœur et le bien en résultera pour les deux parties. Il est bon de pratiquer cela dès le jeune âge, car, si l’on s’habitue à pardonner, on le fait plus facilement dans toute sa carrière. «Élève le jeune garçon selon la règle de sa voie; même lorsqu’il vieillira, il ne s’en détournera point (Proverbes 22:6).

 

Je suis là au milieu d’eux

(v. 18-20). — Le Seigneur enseigne que, si le frère en faute ne veut pas écouter l’Assemblée, il n’y a plus de démarches à faire. On peut se demander pourquoi on ne peut pas recourir à d’autres moyens qui seraient plus efficaces.` C’est parce qu’il n’en existe pas, si les choses se sont passées dans l’ordre enseigné de Dieu.

L’Assemblée se compose des croyants réunis au nom du Seigneur, car il dit: «Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom (ou à mon nom), je suis là au milieu d’eux». Jusqu’à la mort du Seigneur, l’Assemblée était le peuple d’Israël, qui avait pour centre, dans son état normal, le temple de Jérusalem dont l’Éternel avait fait sa demeure. Depuis que le peuple a rejeté l’Éternel, dans la personne de Christ et que, comme peuple, il a été rejeté lui-même, c’est Jésus qui est le centre de rassemblement de tous ceux qui l’ont reçu. Ainsi l’Assemblée chrétienne, groupée autour de Jésus, a remplacé l’Assemblée d’Israël qui avait pour centre le temple de l’Éternel. C’est pourquoi le Seigneur, en parlant de l’ordre de choses introduit par son rejet, mentionne l’Assemblée chrétienne comme le lieu où il se trouve lui-même, cette Assemblée ne serait-elle composée que de deux ou trois personnes. Il n’y a donc rien de plus grand sur la terre, parce que Sa présence est là et non ailleurs, et si l’on n’écoute pas cette Assemblée, où se trouve le Seigneur, on ne peut aller ailleurs pour avoir sa présence. Puisque Lui, qui est dans le ciel, se trouve au milieu des deux ou trois rassemblés en son nom, il dit: «En vérité, je vous dis: Tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel». L’autorité du Seigneur se trouve là, c’est la seule autorité ecclésiastique que Dieu reconnaisse sur la terre et que le croyant ait à reconnaître. Pour que la présence du Seigneur caractérise une Assemblée de croyants, il faut naturellement qu’elle lui soit soumise à tous égards.

Là encore, dans ce rassemblement des deux ou trois, d’accord, selon la pensée de Jésus, pour prier, nous recevons l’assurance que: «Quelle que soit la chose qu’ils demanderont, elle sera faite pour eux par mon Père qui est dans les cieux».

Quel privilège béni que de pouvoir être autour du Seigneur sur cette terre, en attendant d’être autour de lui dans la gloire! Rien n’est plus grand aux yeux de Dieu ici-bas. Pour les hommes, c’est peu de chose que ce rassemblement de quelques croyants autour du Seigneur, sans organisation humaine, sans ressource apparente. Mais pour le Seigneur, rien n’a autant de valeur. Il le montre en faisant réaliser sa présence et en pourvoyant à tout.

Qu’aucun de ceux qui ont eu peut-être le privilège d’être conduits dès leur tendre enfance dans ce rassemblement, ne songe un instant à le quitter, car il déshonorerait le Seigneur en s’exposant aux tristes conséquences de ce mépris. L’apôtre dit: «Mais pour nous, nous ne sommes pas de ceux qui se retirent pour la perdition, mais de ceux qui croient pour la conservation de l’âme» (Hébreux 10:39). Et déjà dans les Psaumes, il est dit: «C’est là que l’Éternel a commandé la bénédiction, la vie pour l’éternité» (Psaume 133:3).

 

Comment pardonner

(v. 21-35). — Répondant à la question de Pierre qui demande: «Seigneur, combien de fois mon frère péchera-t-il contre moi, et lui pardonnerai-je? Sera-ce jusqu’à sept fois?» le Seigneur montre qu’il faut toujours pardonner en disant: Je ne te dis pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois. Sept est le nombre parfait qui, décuplé et multiplié par lui-même, donne le nombre de fois que nous devons pardonner, c’est-à-dire autant de fois que le cas se présente. Jésus illustre ensuite son enseignement par une parabole et montre que nous devons agir les uns envers les autres, comme Dieu agit envers nous, parce que tous, nous sommes des objets de grâce.

Le roi est ici Dieu qui premièrement veut compter avec ses esclaves, selon sa justice; mais l’un d’eux, figure de nous tous, lui devait dix mille talents, somme fabuleuse, surtout s’il s’agit d’un homme qui ne possédait rien, ces dix mille talents représentant la valeur d’environ 500 tonnes d’or ou d’argent. Voilà à quoi nous pouvons comparer la grandeur de la dette de nos péchés, nous, pauvres débiteurs insolvables. La justice du roi exigeait le paiement de la somme, mais, touché de compassion envers son esclave, il lui remit la dette. Après avoir agi de la sorte, le roi s’attendait à ce que cet esclave se comporte de même envers ses propres débiteurs. Mais à peine eut-il obtenu cette faveur, qu’il rencontra un de ses compagnons qui lui devait cent deniers — somme dérisoire comparée à celle qui venait de lui être acquittée, car le denier vaut moins d’un franc — et il l’étranglait en lui disant: «Paie, si tu dois quelque chose». Insensible à ses supplications, il le jeta en prison jusqu’à ce qu’il ait tout payé. Illustration fidèle de notre manière d’agir envers ceux qui nous ont fait tort. Oubliant l’énormité de la dette de péché qui nous a été acquittée, nous ne pouvons pardonner les torts relativement insignifiants que nous ont faits nos frères, et si même nous disons que nous avons pardonné, nous l’oublions avec peine, tandis que Dieu dit: «Je ne me souviendrai plus jamais de leurs péchés ni de leurs iniquités» (Hébreux 10:17). Dans nos rapports avec nos frères, nous devons toujours nous rappeler comment Dieu a agi envers nous et sentir notre absolue culpabilité devant lui.

Dans son royaume, Dieu agit aussi selon son gouvernement, d’après la manière dont nous aurons traité nos frères, car toutes choses portent leurs conséquences. Les autres serviteurs, voyant ce que fit cet homme, indignés, le rapportèrent au roi qui livra ce méchant esclave aux bourreaux, jusqu’à ce qu’il ait tout payé. Le Seigneur ajoute: «Ainsi aussi mon Père céleste vous fera, si vous ne pardonnez pas de tout votre cœur, chacun à son frère».

Cette parabole peut s’appliquer à Israël comme peuple; il avait une dette énorme envers Dieu, consommée par le rejet de son Fils. En vertu de l’intercession de Christ sur la croix: «Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font», Dieu avait, pour ainsi dire, remis la dette à son peuple, c’est-à-dire que ses jugements ne l’avaient pas frappé tout de suite après la croix; l’Évangile, présenté aux Juifs, les invitait à se repentir. Mais tout en profitant de la miséricorde de Dieu, ils s’opposèrent à ce que cette grâce dont ils étaient eux-mêmes les objets soit annoncée aux Gentils, représentés par celui qui devait cent deniers. Paul dit d’eux: «Nous empêchant de parler aux nations afin qu’elles soient sauvées, pour combler toujours la mesure de leurs péchés; mais la colère est venue sur eux au dernier terme» (1 Thessaloniciens 2:16). C’est ce qui arriva selon le juste gouvernement de Dieu: le peuple fut livré aux bourreaux, emmené par les Romains, chassé parmi les Gentils, jusqu’à ce que, selon Ésaïe, il ait reçu le double pour tous ses péchés (Ésaïe 40:2).