Michée

Henri Rossier

Introduction

La prophétie, comme du reste toutes les Écritures, ne s’ouvre pour le chrétien que si le Saint Esprit lui en a fourni la clef. Sans cette dernière, l’homme le plus savant n’entrera jamais dans les pensées de Dieu et ne fera preuve que d’ignorance en cherchant à les expliquer. La clef, c’est Christ. Si l’on ne rattache toute prophétie à Sa personne, à ses souffrances et à ses gloires, à Sa puissance et à Sa venue, comme Fils de l’homme, dans son royaume (1 Pierre 1:11; 2 Pierre 1:16; Matt. 16:28; Marc 9:1), elle restera un livre aussi scellé pour le savant que pour l’illettré (Ésaïe 29:11, 12), et c’est ainsi que s’expliquent tant de désaccords, même entre chrétiens, sur l’interprétation du saint Livre.

Donc la prophétie nous parle de Christ. Les premiers prophètes, au nombre desquels nous rangeons Osée, Ésaïe et Michée, nous présentent sa personne d’une manière beaucoup plus frappante et circonstanciée que les prophètes subséquents, tels que Jérémie, Ézéchiel et même Daniel. Seuls les derniers des prophètes, Zacharie et Malachie, à mesure qu’ils se rapprochent du moment où le Christ sera révélé, le voient surgir devant leurs yeux dans toute la puissante réalité, non pas tant, comme en Ésaïe et Michée, de son abaissement et de ses douleurs, que de sa venue en puissance. Enfin la pleine lumière éclate, lorsque le dernier et le plus grand des prophètes, Jean le Baptiseur, voit Jésus venir à lui comme Agneau de Dieu, Fils de Dieu et Roi d’Israël1.

1 Il y a loin de là à l’idée de la théologie moderne que la «notion messianique» s’est développée graduellement chez les prophètes à la suite «d’une ébauche primitive vague et indéterminée». Cette idée est le digne pendant de celle qui voit dans «le don prophétique, une faculté innée de l’humanité».

Cependant, si le point central de la prophétie est «la Révélation de Jésus Christ», elle nous présente encore d’autres sujets dont le plus important est le gouvernement de Dieu dans ce monde. Sans les écrits prophétiques de l’Ancien Testament, dont les livres historiques ne doivent pas être séparés, nous serions très incomplètement renseignés sur ce point. Tous nous révèlent ce que sont les voies de Dieu en gouvernement dans le passé et le présent, à l’égard de son peuple terrestre et des nations. Dieu fait entendre à chaque occasion qu’il est un Dieu saint qui ne peut supporter l’iniquité: il doit la juger, mais il appelle les hommes à la repentance. La prophétie d’Amos présente cette vérité d’une manière remarquable, quoique, du reste, elle se retrouve dans tous les prophètes. Mais la prophétie ne s’en tient pas au passé et au présent; elle dévoile l’avenir, car il est de toute importance de montrer aux hommes que les voies de Dieu restent immuables et que son gouvernement ne change jamais de caractère. À mesure que le mal va grandissant dans le monde, les jugements de Dieu s’accentuent toujours plus et atteindront enfin leur apogée dans le jugement de l’Antichrist (le faux Messie), dans le jugement de son peuple (les juifs apostats), et de toutes les nations, coalisées contre le vrai Israël et son vrai Roi.

Toutefois le gouvernement de Dieu ne se borne pas à détruire les obstacles que Satan lui suscite dans le monde. L’Éternel discipline, reprend, châtie son peuple, car Il ne poursuit pas seulement le jugement du mal, mais le triomphe du bien dans le cœur de ceux qui le connaissent et se soumettent à Lui. Aussi tous les prophètes nous enseignent que la discipline, reçue et acceptée, produira au temps de la fin une vraie Restauration qui rangera le Résidu futur d’Israël et les fidèles d’entre les nations sous le sceptre glorieux de Christ, quand il prendra possession de son héritage terrestre.

 

À un point de vue général, nous rencontrons deux catégories de prophètes. Les uns sont suscités quand les relations de l’Éternel avec son peuple subsistent encore, les autres, quand elles sont définitivement rompues et que la sentence de Lo-Ammi (pas mon peuple), prédite par Osée, est passée à l’état de fait.

Dans la première catégorie, l’Éternel dit encore «mon peuple», comme en Osée, Ésaïe, Michée et d’autres. Cependant, lorsque ces relations n’étant pas encore rompues, il est dit: «Tu as abandonné ton peuple» (voyez, par exemple, Ésaïe 2:6), il ne faut pas en conclure que le Lo-Ammi est prononcé, quoiqu’il soit alors bien près de s’accomplir à l’égard des dix tribus. Cet abandon est pareil à celui dont Gédéon parle à l’Ange de l’Éternel: «L’Éternel nous a abandonnés» (Juges 6:13). Cela devait avoir lieu chaque fois qu’Israël, placé par la loi sous une alliance bilatérale avec Dieu, avait abandonné l’Éternel, mais cela n’impliquait pas encore la rupture définitive des relations entre Dieu et son peuple. Tout le livre des Juges, toute l’histoire des Rois, Ésaïe, Michée, même Jérémie qui prophétisait à la veille de la captivité, le prouvent. Le gouvernement n’avait pas encore été transféré aux Gentils; il ne le fut que sous Nebucadnetsar, la «tête d’or» des quatre empires universels. Même la déportation des dix tribus ne mit pas fin à l’existence du peuple de Dieu, représenté à ses yeux par la royauté de Juda et le temple de Jérusalem, et encore reconnu de Lui.

Avec la captivité de Juda commence la seconde catégorie de prophètes. Le «Lo-Ammi» est prononcé. Cela ne signifie point que Dieu ne veuille reprendre plus tard ses relations avec Israël sur le pied d’une nouvelle alliance, unilatérale cette fois; seulement, quand Lo-Ammi est définitivement prononcé, l’Éternel ne dit plus «mon peuple». Il ne prononcera de nouveau ces mots que lorsqu’il mentionnera la reprise de ses relations futures avec Israël, relations que la foi des fidèles, basée sur les promesses de Dieu, réalisera en vue de l’avenir. C’est ce que l’on trouve en Ézéchiel, Daniel, et d’autres prophètes de la captivité (Ézéch. 36:28; 37:23, 27; 38:14, 16; 39:7; 46:18; Dan. 9:15, 16; Zach. 8:8; 13:9).

 

Une autre remarque importante se rattache à l’existence ou à la rupture des relations de Dieu avec son peuple. Aussi longtemps que ces relations existent, même au plus faible degré, et que l’Éternel peut dire: «mon peuple», l’Assyrien historique est le grand ennemi d’Israël (voyez 2 Rois, Ésaïe, Michée). Du reste, cet Assyrien historique, que ce soit Pul, Tiglath-Piléser, Shalmanéser, Sankhérib ou Assurbanipal, est toujours présenté par le prophète, comme un type de l’Assyrien futur, ou prophétique de la fin. Ce dernier n’est pour ainsi dire que la continuation du premier, car la prophétie, qu’il s’agisse de personnages ou d’événements historiques, nous reporte invariablement à la fin des temps. Les événements présents ont donc toujours une similitude frappante avec les événements à venir. Cela n’atténue en rien leur immense importance comme jugements présents, car ils servent d’avertissement à la conscience du peuple et l’engagent à retourner à l’Éternel pendant qu’il en est temps encore1.

1 Les termes que nous employons: l’Assyrien historique et l’Assyrien prophétique ne signifient pas que ce soient deux puissances différentes. L’Assyrien prophétique est la même puissance que l’autre, seulement avec des limites territoriales qui, dans le cours des siècles, se sont considérablement étendues et constituent aujourd’hui l’immense domaine de la puissance russe avec ce qu’il pourrait encore s’annexer de la Turquie.

Il peut être utile de répéter ici ce que nous avons dit autre part sur l’Assyrien prophétique, sujet souvent peu familier à ceux qui étudient la prophétie.

Les trois grands ennemis de la fin sont:

L’empire romain, ou quatrième empire universel, quatrième Bête de Daniel (7:7), première Bête de l’Apocalypse dont la plaie mortelle a été guérie (13:1-4). Cet empire ressuscitera sous la forme d’une confédération latine de dix rois avec son Chef, un empereur dont Rome sera la capitale. Ce personnage possédera toute la puissance, accordée jadis par Dieu à Nebucadnetsar, roi de Babylone, et aux empires qui lui ont succédé, mais sera suscité à la fin des temps par Satan comme antagoniste de Christ et de son règne. Il est important de remarquer que Babylone, qui ne sera jamais relevée comme empire, est considérée dans l’Apocalypse, non pas comme exemple d’une résurrection nationale semblable à celle de l’empire romain, mais comme l’apostasie finale de la Chrétienté, sous sa forme religieuse, politique et commerciale, en rapport avec l’empire romain (Apoc. 17, 18).

L’Antichrist. Celui-ci se met à la tête de l’ancien peuple de Dieu, devenu apostat du Judaïsme comme la Chrétienté le sera du Christianisme, et il s’élève comme faux Roi et faux Messie jusqu’au trône de Dieu, après s’être emparé, pour le livrer à Satan, de «l’héritage de l’Éternel». Quelque petit que soit le territoire de la Palestine, il a plus d’importance aux yeux de Dieu que tous les pays des nations, car c’est de lui que l’Éternel a jadis fait choix, ainsi que de Jérusalem dont il veut faire la capitale glorieuse de son royaume terrestre. C’est là qu’il établira son trône; de là partiront tous les décrets du seul royaume universel infaillible, appelé «le royaume éternel du Fils de Dieu». La prétention d’usurper cette puissance attirera sur la tête de l’Antichrist les coups terribles de la colère de Dieu; ce faux Christ sera détruit impitoyablement avec tous ses adhérents quand le vrai Messie apparaîtra.

L’Assyrien. Son rôle est capital, mais non exclusif, chez les prophètes Ésaïe et Michée. Bien qu’aux jours des prophètes subséquents la domination de l’Assyrien historique eût pris fin, son rôle prophétique était encore intact et tout entier à venir. L’Assyrien avait paru avant que le peuple fût décidément Lo-Ammi; il reparaîtra au moment où les relations de l’Éternel avec Israël se seront renouées par la formation d’un Résidu croyant, et où Dieu dira de nouveau «mon peuple»1. C’est à l’apparition de l’Assyrien que se rattachera le grand conflit de la fin qui mettra aux prises autour de Jérusalem le quatrième empire universel ou empire romain, réédifié par Satan, et l’Assyrien, vaincu autrefois par Babylone, mais qui surgira de nouveau, pour disputer la suprématie mondiale à Rome. Cet Assyrien prophétique reparaît sous une forme différente de celle d’autrefois, mais, à l’encontre de la puissance babylonienne qui a été définitivement anéantie, il est encore représenté aujourd’hui par la Russie avec sa formidable puissance asiatique. Seulement dans les temps prophétiques, le caractère politique de cet empire aura subi des changements importants. Il ne sera plus question du roi d’Assyrie, mais de Gog, prince de Rosh, de Méshec et de Tubal, qui domine sur le pays de Magog, c’est-à-dire d’une confédération assyrienne qui cherche à faire contrepoids à la confédération latine. Le roi du Nord est, semble-t-il, le chef des armées assyriennes. Ce roi occupe l’Asie mineure, territoire jadis conquis par le roi d’Assyrie et qui devint, après la chute de l’empire d’Alexandre, le royaume des Séleucides et des Antiochus. L’Asie mineure est toujours appelée le Nord en rapport avec la Palestine (voyez Dan. 11). La confédération assyrienne, représentée par le roi du Nord, se pose donc en adversaire de la Bête romaine, de l’Antichrist en Palestine, mais aussi du roi du Midi en Égypte. La question d’Orient renaît alors dans toute son acuité. Le choc ne peut avoir lieu qu’en Palestine et ce pays est le dernier enjeu par lequel Satan espère gagner la partie. Il a été vaincu une première fois à la croix et cette victoire a introduit le royaume céleste de l’Agneau. Il sera vaincu une seconde fois lorsque l’Assemblée, l’Épouse céleste, ayant été ravie vers son Époux, lui, le diable, sera précipité sur la terre avec ses anges. S’il est vaincu une troisième fois, c’en est fait de son domaine. Il faut, pour qu’il subsiste, que Jérusalem, siège du pouvoir terrestre, enlevée au vrai Roi, reste à l’Antichrist et à la Bête romaine, son alliée, avec lesquels le diable a formé une alliance meurtrière. L’Assyrien, poussé par son orgueil, son ambition et sa cupidité, traversera tout ce plan de Satan, car il voudra agir indépendamment de lui. Son action aura pour résultat la coalition judéo-latine contre l’Assyrien et ses armées.

1 Lors donc que vous trouvez dans les prophètes: «Mon peuple», ou bien l’Assyrien historique existe encore, ou bien l’Assyrien prophétique est entré en scène, comme Dieu vient de reprendre ses relations avec le vrai Israël, c’est-à-dire le Résidu.

D’autre part, et cela ressortira en partie pour nous de l’étude du prophète Michée, l’Assyrien est la dernière verge levée par l’Éternel contre le peuple juif devenu apostat et sujet de l’Antichrist. La cause de ce châtiment doit être cherchée dans son rejet du Messie. Dieu se sert en outre de cette attaque de l’Assyrien pour compléter la restauration du Résidu de Juda par la repentance (voyez Joël 2). Sous Ézéchias, l’Assyrien historique n’avait pu conquérir Jérusalem, tout en étendant ses déprédations à tout le territoire de Juda. Mais la rétribution finale n’était pas encore venue, et quoique Dieu ait livré Jérusalem aux nations pour être foulée aux pieds jusqu’à aujourd’hui, il n’a pas permis à l’Assyrien d’y toucher d’une manière permanente. Le moment arrive néanmoins où Dieu lève une dernière fois la verge de sa colère contre le peuple incrédule, contre cette Jérusalem dans laquelle sera trouvé le sang de tous les prophètes, et avant tout celui du «Juge d’Israël». Cet envahissement futur de la Palestine et de la Judée par le roi du Nord sera général. Jérusalem sera assiégée et conquise par les peuples alliés de l’Assyrien; la moitié de sa population sera emmenée en captivité. L’Assyrien se jettera ensuite sur l’Égypte, mais, à son retour, assiégeant de nouveau Jérusalem, après que la Bête et l’Antichrist ont été anéantis avec leurs armées par l’apparition de Jésus, sortant du ciel avec tous ses saints, l’Assyrien sera lui-même détruit sur les montagnes d’Israël et jeté dans le feu éternel avec ses multitudes. Voyez pour les détails de sa destruction «à la fin des jours» les chapitres 38 et 39 d’Ézéchiel au sujet de Gog, car Gog est l’Assyrien dont Dieu avait «parlé dans les jours d’autrefois par ses serviteurs les prophètes d’Israël» (Ézéch. 38:17).

 

Si Ésaïe et Michée, qui nous occupent ici nous parlent principalement de l’Assyrien historique et prophétique, cela ne veut pas dire que ces prophètes ne mentionnent pas les empires des nations dont le premier est Babylone; mais ces empires n’y occupent pas l’avant-scène (voyez Ésaïe 13:1; 39:6; Michée 4:10). Lorsque, en revanche, toute relation de l’Éternel avec Israël est définitivement rompue par le péché du peuple, ces mêmes empires, Babylone, les Mèdes et les Perses, Alexandre, l’Empire romain, passent au premier plan. Voyez, par exemple, Ézéchiel, Daniel, Zacharie. Jérémie ne mentionne pas même l’Assyrien, parce que ce prophète a pour sujet l’empire confié aux nations, dans leur Tête, Babylone, après que la domination a été retirée au peuple d’Israël. Jérémie nous parle du jugement de Babylone et il semble, dans ce prophète, que tout soit terminé avec sa chute. C’est que, pour Jérémie, tous les empires universels qui ont succédé à Babylone tombent virtuellement avec elle. Daniel nous fournit le détail de leur destruction. Dans tous les prophètes susnommés, l’Assyrien historique a complètement disparu (son rôle étant proprement terminé par la ruine de Ninive et l’avènement de Babylone) pour faire place à l’Assyrien prophétique, dernier ennemi qui sera anéanti par la présence personnelle du Seigneur ici-bas. Jérémie seul ne parle, comme nous l’avons dit, ni de l’un, ni de l’autre.

Comme l’Assyrien historique était entré en scène avant que les relations de l’Éternel avec son peuple fussent rompues, il reparaît au moment même où ces relations sont renouées. Le Résidu, le vrai Israël, est venu à la repentance et la gloire de Christ est près d’apparaître, quand l’Assyrien s’élève contre Son peuple après avoir servi au jugement d’Israël apostat, peuple de l’Antichrist. Nous disons que l’Assyrien est le dernier ennemi des temps de la fin. Les chapitres 38 et 39 d’Ézéchiel le prouvent. Ils terminent de fait la prophétie d’Ézéchiel, tous les derniers chapitres (40-48) étant consacrés à la restauration du temple et au partage du pays. Or, de quoi ces deux chapitres nous parlent-ils? De l’Assyrien prophétique, dernier ennemi qui sera anéanti. Même remarque pour le livre de Daniel: L’Assyrien prophétique y est aussi le dernier ennemi qui envahit le pays de l’Éternel, pour être détruit, quand déjà la montagne de sainte beauté est établie au milieu d’Israël (Dan. 11:45). De même en Joël, prophétie sans date, mais traitant tout entière des derniers jours, il n’est question que de l’Assyrien prophétique et du rassemblement de toutes les nations en Palestine pour être jugées, après que la repentance est entrée dans le cœur du Résidu, et que le Seigneur s’est manifesté à lui. Alors l’Éternel peut dire de nouveau: «Mon peuple» (Joël 2:26, 27).

Quelque terrible que soit l’Assyrien, il n’est pas, historiquement, l’instrument de la dispersion finale du peuple. Au contraire, comme nous l’avons vu, il est, dans le passé, la verge contre le peuple encore reconnu de Dieu, et dans l’avenir la verge pour détruire le peuple apostat, mais sa présence provoque la repentance du Résidu. Ce n’est pas à l’Assyrien que la domination universelle fut jamais confiée. Elle aurait pu être la part d’Israël fidèle; elle lui a été enlevée, à cause de sa désobéissance, pour être mise aux mains de Babylone et des empires universels qui lui ont succédé. Elle sera rendue au vrai Israël, au peuple de Dieu restauré, sous le sceptre du Messie. Nonobstant une durée de règne de près de neuf siècles (tandis que l’empire de Babylone n’a pas duré plus de 80 ans) jamais l’empire universel n’a été confié à l’Assyrie. Avec la prise de Ninive, l’Assyrien disparaît comme verge actuelle de Dieu contre Israël et les nations, mais sa première apparition, soit par ses principes, soit par son orgueil, soit par la terreur qu’il inspire n’est que le prélude de son apparition à la fin des temps. Quand il reparaîtra, ce sera pour être livré, lui et ses armées, à une destruction complète, après avoir suscité contre lui-même la confédération de l’empire romain et de ses dix rois et avoir servi de verge contre le peuple de l’Antichrist1. Pour comprendre son rôle dans la prophétie, il faut se souvenir de cette réapparition. L’Assyrien historique n’est qu’une faible image de ce que sera l’Assyrien prophétique, mais ils ont tous deux le même caractère. Leurs principes ne leur sont du reste pas exclusifs. Dans le conflit actuel des nations, certains peuples présentent les mêmes traits caractéristiques: l’orgueil et l’ambition sans limite, la haine, la barbarie, le règne de la terreur, les exécutions sommaires, les cruautés, la déportation en masse de populations inoffensives. Seulement, n’oublions pas que ce qui anime l’Assyrien historique aussi bien que prophétique, c’est la haine contre l’ancien peuple de Dieu. Il en est ainsi, déjà aujourd’hui, quant à la manière dont la Russie, noyau de la future confédération assyrienne, traite les Juifs dispersés au milieu d’elle. À l’égard des chrétiens, il en est de même de la Turquie qui possède une grande partie du territoire de l’ancienne Assyrie. Les épouvantables massacres des Arméniens ne le proclament que trop.

1 Comme royaume soumis à la domination du Christ, l’Assyrie sera restaurée (Ésaïe 19:23-25).

Il nous reste encore à dire quelques mots du Résidu, l’un des sujets qui remplissent le livre de Michée et sans l’intelligence duquel les événements prophétiques resteraient une énigme indéchiffrable. Il est impossible d’exagérer le rôle immense du Résidu dans l’avenir prophétique. Le lecteur nous dispensera de le lui prouver par des citations, car tous les prophètes, tous les Psaumes et une bonne partie des entretiens du Seigneur avec ses disciples (parmi lesquels le sermon sur la montagne et la prophétie de Matt. 24), en font foi.

C’est du Résidu que se compose en entier le futur Israël dont il est dit: «Tout Israël sera sauvé» (Rom. 11:26).

Le Résidu sera formé des croyants de Juda et de ceux des dix tribus.

Le Résidu de Juda est tout particulièrement en vue dans les prophètes et dans les Psaumes, car cette partie du peuple d’Israël a été seule coupable du meurtre de son Messie, et devra porter, dans la grande tribulation le poids de la colère de Dieu dans le gouvernement de son ancien peuple. La détresse que ces croyants devront traverser produira chez eux une repentance complète, et ils regarderont, pour être délivrés, vers «Celui qu’ils ont percé» (Zach. 12:10).

Le Résidu de Juda commencera à se former lors de la rentrée en Palestine du peuple juif incrédule, et refusera de se soumettre à l’Antichrist que ce peuple acclamera comme son Roi. Son activité commencera à Jérusalem. Il sera composé d’abord des «sages du peuple qui enseigneront la multitude» (Dan. 11:33, 35; 12:3, 10). Ces sages auront le même caractère que les disciples qui, avant l’ère de l’Église, entouraient Jésus ici-bas. Ils seront intègres et justes selon la loi (voyez Ps. 119), mais reconnaîtront en même temps leur Messie en Jésus autrefois crucifié, le péché de leur peuple contre lui, leur culpabilité à eux, comme faisant partie de ce peuple, enfin la justice des voies de Dieu à leur égard, dans la «détresse» qu’ils auront à traverser. Ils regarderont à l’Éternel seul, s’en remettant à Lui pour l’heure de la délivrance.

Ce réveil de conscience est accompagné de la prédication de l’Évangile du royaume dans toutes les villes d’Israël, par les fidèles du Résidu. Ils continuent ainsi la mission des soixante-dix (Luc 10:1); et cette prédication ne prendra fin que lors de l’apparition du Fils de l’homme (Matt. 10:23).

L’Antichrist, que leur témoignage gêne et irrite au suprême degré, les persécutera au moment où il remplacera le culte de l’Éternel, d’abord octroyé au peuple, par l’idolâtrie établie dans le temple de Jérusalem. Ils s’enfuiront selon l’ordre du Sauveur (Matt. 24:16-21), et seront mis providentiellement à l’abri parmi les nations qui leur viendront en aide (Apoc. 12:15, 16). Ils seront parmi elles, comme ils l’ont été pour les villes d’Israël, les évangélistes du Royaume et les instruments de la conversion d’une immense multitude. Plusieurs d’entre eux, restés à Jérusalem, y subiront le martyre.

Le Résidu fugitif rentrera en Palestine pour assister à la défaite de ses ennemis, pour voir l’apparition glorieuse de son Roi et de son Sauveur, et prendre part à son triomphe. Il sera le témoin de la destruction de la Bête romaine, de l’Antichrist, de l’Assyrien et d’Édom, enfin de l’anéantissement du peuple apostat, de «la vengeance» dont il est parlé dans les prophètes.

Les fidèles formeront avec le Résidu croyant des dix tribus, rentré après eux en Palestine, le peuple d’Israël dans le royaume millénaire. La nouvelle alliance sera conclue avec eux, la loi sera écrite dans leurs cœurs; ils observeront les cérémonies et les fêtes, liées au nouveau temple de l’Éternel; un prince de la maison de David, vice-roi du Messie glorieux, sera établi sur eux. Toutes les nations seront groupées autour de Jésus, Éternel et Roi, et de son peuple, centre visible des bénédictions de cet âge futur.

Ce court exposé, bien incomplet pour un sujet aussi vaste, suffira, nous l’espérons, pour faire comprendre la place immense du Résidu dans les événements de la fin, dans la reconstitution d’Israël, et dans l’établissement du royaume universel de Christ.

 

En terminant nous désirons expliquer pourquoi nous avons adopté, dans cette étude, le procédé de la paraphrase, forme souvent monotone pour le lecteur, et à laquelle, pour d’autres motifs, l’étude du prophète Osée nous avait contraints. La grande variété des interlocuteurs nous imposait cette forme. Tantôt, et souvent dans le même verset, nous entendons parler l’Éternel, seul ou par la bouche de son prophète; tantôt le prophète parle pour lui-même. Constamment le Résidu prend la parole et répond à l’Éternel ou à son prophète; parfois nous entendons parler l’ensemble du peuple, parfois encore les prophètes infidèles. Si l’on ne distingue pas ces divers interlocuteurs, le texte, d’ordinaire clair et limpide, paraît souvent obscur dans les passages les plus importants. Nous noterons ces alternances à mesure qu’elles se présenteront; il suffirait, pour en démontrer l’importance, de citer tout le commencement du chapitre 5.