Jacques

Chapitre 5

V. 1-6 et Ps. 73

Dans les derniers versets du ch. 4, Jacques s’adressait à ceux de son peuple qui faisaient partie de la classe des commerçants prospères, et qui professaient recevoir Jésus comme leur Seigneur. Au début du ch. 5, ses pensées se tournent vers les Juifs riches, visant surtout ceux qui appartenaient à la majorité incrédule. Dans les six premiers versets, il a des paroles sévères, et même décapantes à leur dire à leur sujet.

Il dresse une triple accusation contre eux. D’abord il les accuse de fraude, et de fraudes du genre le plus méprisable. Ils tiraient profit des gens les plus humbles, les moins capables de se défendre. Ensuite ils avaient l’habitude de ne rien se refuser, ne pensant guère qu’à leurs voluptés. Enfin ils persécutaient, et même tuaient leurs frères qui avaient embrassé la foi en Christ, et qui sont désignés ici par le terme «le juste».

En conséquence ils poursuivaient leur propre enrichissement, et ils y réussissaient. Ils «avaient amassé un trésor». Pendant ce temps, les ouvriers qui ne pouvaient pas se défendre eux-mêmes faisaient entendre leur cri à cause de leur pauvreté, et les chrétiens qui auraient très bien pu se défendre eux-mêmes, suivaient les pas de leur Maître, et ne leur résistaient pas. Les riches avaient des succès éclatants, et il semblait que tout leur réussissait.

Mais les apparences sont trompeuses. Ils n’étaient en réalité que comme des bêtes brutes engraissées pour l’abattage. «Vous avez rassasié vos cœurs comme en un jour de sacrifice», comme Jacques l’exprime. Si on lit le Ps. 73, on découvre que cela n’a rien de nouveau. Asaph avait été grandement troublé en observant la prospérité des méchants, tandis que le peuple de Dieu était sous le châtiment et les douleurs; il ne trouva aucune solution satisfaisante à ce problème jusqu’il fût entré dans les sanctuaires de Dieu.

À la lumière du sanctuaire tout lui devint clair. Il vit que le chemin tant des riches impies que des saints harcelés et foulés aux pieds, ne pouvait être correctement apprécié qu’en en voyant l’issue. Peu avant il avait été près de tomber parce qu’il avait été consumé d’envie en voyant la prospérité des méchants: maintenant il s’exclame: «comme ils sont détruits en un moment!» Asaph était lui-même un de ces hommes pieux, battu tout le jour, et dont le «châtiment revenait chaque matin». Cependant dans le sanctuaire, il lève ses yeux vers Dieu avec joie, et il confesse «Tu me conduiras par ton conseil, et après la gloire tu me recevras». La fin de l’un est la destruction; la fin de l’autre, c’est d’être reçu dans la gloire. Le contraste est complet.

 

V. 7-8

Ce contraste est aussi très apparent dans notre chapitre. Les richesses accumulées par les riches étaient pourries et rongées par les vers. Une misère complète allait venir sur eux. Quant aux saints éprouvés, ils n’avaient qu’à attendre avec patience la venue du Seigneur; alors leur heureuse moisson de bénédiction serait récoltée, comme les v. 7 et 8 le font voir.

Les menaces inspirées annonçant le jugement ont trouvé leur accomplissement presque immédiat dans la destruction de Jérusalem sous Titus. L’histoire nous informe que la majorité des chrétiens reçurent l’avertissement et quittèrent la cité avant qu’elle soit entourée des armées romaines, tandis que la masse incrédule fut prise dans le piège et que les misères leur arrivèrent sans qu’aucun pleur ou hurlement ne put les détourner. Pourtant, si c’était un accomplissement de ces paroles, ce n’en était pas l’accomplissement: «vous avez amassé un trésor pour1 les derniers jours» dit-il, ce qui ne veut pas dire simplement les quelque dernières années de ce triste chapitre de l’histoire de Jérusalem, mais les jours situés juste avant la venue du Seigneur.

1 J.N. Darby traduit «dans les derniers jours»

Vous noterez que Jacques corrobore les autres apôtres Paul, Pierre et Jean. Tous les quatre présentent la venue du Seigneur comme imminente, comme l’espérance immédiate du croyant. On trouve des expressions comme «la nuit est fort avancée, et le jour s’est approché», «la fin de toutes choses est proche», «petits enfants, c’est la dernière heure», «la venue du Seigneur est proche». Pourtant près de 2000 ans se sont écoulés depuis que ces paroles ont été écrites. Se sont-ils trompés? aucunement. Cependant il n’est pas facile de saisir leur point de vue exact, et ainsi de comprendre leurs paroles.

Une illustration peut aider. Un drame est joué sur une scène, et le rideau du dernier acte vient de se lever. C’est la première fois qu’il est produit en public, et quelqu’un qui l’a vu jouer en privé chuchote à un ami: «maintenant c’est la fin! c’est le dernier acte». Pourtant on dirait que rien n’arrive. Les minutes passent, les acteurs paraissent complètement immobiles. Pourtant quelque chose se fait sentir. Des mouvements lents, furtifs commencent; quelque chose se glisse sur la scène; il faut de bonnes jumelles d’opéra et de bons yeux derrière pour s’en rendre compte! La foule devient ouvertement impatiente. L’homme qui disait «maintenant c’est la fin» a l’air d’un insensé; pourtant il avait parfaitement raison.

Dans les jours des apôtres, la terre était entrée au dernier acte dans le grand drame de ce que Dieu fait. Or Dieu est plein de patience, «ne voulant pas qu’aucun périsse mais que tous viennent à la repentance» (2 Pierre 3:9). Il a ralenti [retenu] l’opération du mystère d’iniquité. C’est un temps très long qui est en train d’aboutir — à notre façon de compter le temps. Quand les apôtres ont écrit que le prochain mouvement décisif dans le drame, c’était l’intervention publique de Dieu, avec la venue du Seigneur, c’était parfaitement vrai — même si nous attendons encore cette venue. Mais nous ne l’attendons pas en vain!

Sa venue est notre espérance, et ces paroles d’exhortation doivent nous arriver aujourd’hui avec une force décuplée. Sommes-nous éprouvés, nos cœurs sont-ils oppressés du fardeau de tous les maux injustes? «Usez donc de patience» est la parole qui s’adresse à nous. Nous sentons-nous troublés, alors que tout au dedans et au dehors parait incertain et ébranlé? Il nous vient ce message: «affermissez vos cœurs». Nous semble-t-il que nos semailles sont perpétuellement inefficaces? Labourons-nous et attendons-nous, re-labourons-nous et ré-attendons-nous, jusqu’à être tenté de penser que nous ne faisons pas mieux que de labourer du sable? «Usez de patience» est la parole qui s’adresse à nous, «jusqu’à la venue du Seigneur». Alors nous jouirons de la grandiose «fête de la moisson».

 

V. 9

Rappelons-nous que la venue du Seigneur ne signifie pas seulement le jugement des impies et l’élévation des saints, mais elle s’accompagnera aussi du grand redressement de tous les torts dans les relations des croyants entre eux. C’est ce dont parle le v. 9. Quoi de plus commun que les rancunes et les plaintes des croyants les uns contre les autres, et quoi de plus désastreux dans ses effets sur le bien-être spirituel de tout le corps des saints? Sommes-nous en train de suggérer qu’il n’y a aucune raison de se plaindre, rien susceptible de nourrir des rancunes? Il y en a probablement plus que nous ne l’imaginons, mais ne les laissons pas se transformer en rancunes. Celui qui s’assied pour le jugement va tout peser, même entre les croyants, selon une parfaite justice, et c’est Lui qui se tient debout à la porte du tribunal, la main sur la poignée, prêt à entrer; celui qui est le plus prêt à entretenir et à nourrir une rancune sera probablement le premier à être condamné.

 

V. 10-11

Dans tout ceci, nous devons être encouragés par l’exemple des prophètes d’autrefois, et spécialement par le cas de Job. Nous les voyons souffrir l’affliction, endurer avec patience, et dans bien des cas mourir à cause du témoignage rendu. Le cas de Job était spécial. Il n’était pas permis à Satan de lui ôter la vie, et donc de l’enlever à notre observation. Il fallait qu’il vive jusqu’à voir «la fin du Seigneur» appliquée à son cas. Quelle merveilleuse fin il a eu! Nous pouvons voir la pitié et la tendre miséricorde de Dieu briller à travers tous ses désastres — ce qui nous les fait voir, c’est la lumière jetée par l’aboutissement de son histoire.

Le cas de Job est juste un exemple. Ce que Dieu a opéré pour lui, Il l’opère pour nous tous, car il ne fait pas d’acception de personnes. Nous ne pouvons pas voir l’aboutissement de notre propre cas; mais à la lumière du cas de Job, Dieu nous invite à Lui faire confiance, et si nous le faisons, nous n’aurons pas plus de rancune contre nos compagnons que Job n’en a eu contre ses trois amis, quand Dieu a eu fini de l’éprouver. Pourquoi trouve-t-on Job priant avec ferveur pour ses amis, au lieu de protester contre eux?! Faisons confiance à Dieu et acceptons ce qu’Il fait, étant assurés que Sa fin selon Sa tendre miséricorde nous atteindra à la venue de Jésus, et que nous verrons alors cette fin.

 

V. 12

Combien il est important que la venue du Seigneur soit réellement notre ESPÉRANCE. Si la foi a de la vigueur, l’espérance continuera à luire et à briller devant nos cœurs, et alors nous endurerons avec patience, et nous nous élèverons au-dessus des rancunes et des plaintes, et nous serons marqués par la modération de langage à laquelle le v. 12 nous exhorte. Celui qui vit dans une atmosphère de vérité, n’a pas besoin de renforcer ses paroles par des serments ou des jurements. L’habitude de jurer a l’effet contraire à celui recherché. Même les gens du monde doutent bientôt de la véracité des propos d’un homme qui ne sait pas se contenter de oui ou de non clairs. C’est à quoi semble faire référence les derniers mots de ce v. 12.

 

V. 13

Pendant que nous attendons la venue du Seigneur, nos vies sont faites d’expériences nombreuses et variées. Traverser un monde hostile est sources d’afflictions fréquentes, suivies à leur tour de temps de bonheur particuliers. Pourtant il revient des périodes de maladie, et quelquefois elles sont le résultat direct d’avoir commis le péché. C’est ce dont il est traité depuis le v. 13 jusqu’à la fin.

La ressource du saint affligé est la prière. Nous ne le réalisons pas toujours. Trop souvent nous allons simplement chez de bons amis pour leur faire le récit de nos peines, ou chez des amis riches et influents qui pourraient peut-être nous venir en aide dans nos peines, et la prière arrive en dernier lieu, alors que nous devrions penser à elle en premier. C’est l’affliction qui ajoute de l’intensité à nos prières. Vous participez à une réunion qu’on pourrait qualifier de «notre réunion de prière ordinaire»; c’est une occasion profitable, nous avons confiance à cet égard; mais même si c’est bien, quelle différence quand un certain nombre se réunissent ensemble pour prier pour un sujet qui pèse sur leurs cœurs jusqu’à devenir positivement de l’affliction! Dans de telles réunions, le ciel semble se baisser jusqu’à toucher la terre.

Mais voici par ailleurs des croyants joyeux, le cœur tout heureux. C’est une joie spirituelle, au moins au commencement. Le danger est pourtant que cela dégénère en simple partie de plaisir charnelle. Si l’on veut que la joie spirituelle perdure, il lui faut un exutoire d’ordre spirituel — lequel consiste à chanter des psaumes (on entend par là n’importe quelle composition poétique ou métrique à caractère spirituel et pouvant être mise en musique). Le cœur heureux chante, et le chrétien heureux n’y fait pas exception.

Pensez un peu au grand nombre de chants figurant dans notre répertoire! Les grands chanteurs ont tout un répertoire de chants dont ils ont l’habitude. Les cantiques de Salomon étaient au nombre de 1005, et nous, combien en avons-nous? Les hauteurs et les profondeurs de l’amour divin n’étaient pas connues de son temps comme du nôtre. Comme sujets de cantiques, nous avons la largeur et la longueur et la hauteur et la profondeur de révélation divine, et la connaissance de l’amour de Christ qui surpasse toute connaissance. Il y a des moments où, grâce à Dieu, nous éclatons vraiment selon les paroles du cantique:

Chantons, chantons sans cesse,
La bonté du Seigneur.

Veillons seulement à ce que le caractère de notre chant soit tel qu’il continue à nous élever, et non pas à nous faire descendre.

 

V. 14-16

Vis-à-vis de la maladie, les instructions de l’apôtre sont également claires. La maladie est vue comme la main de Dieu en châtiment sur le saint, et il est même tout à fait possible que ce soit sous forme de rétribution directe à cause de ses péchés. L’assemblée serait alors concernée, et les anciens de l’assemblée devraient être appelés. Il est laissé à leur discrétion de prier à son sujet, de l’oindre d’huile au nom du Seigneur, et alors il est guéri, ses péchés étant pardonnés au point de vue gouvernemental. Il ressort d’autres passages comme 1 Jean 5:16 que le discernement spirituel des anciens doit être en exercice pour savoir si c’est, ou non, la volonté de Dieu qu’il y ait guérison. S’ils discernent que c’est Sa volonté, ils peuvent alors être remplis de foi et de confiance pour prier en toute liberté, le rétablissement ne manquant pas alors d’intervenir à titre de réponse.

Ceci est-il valable aujourd’hui? Nous le croyons. Pourquoi est-ce si peu pratiqué? Il y a au moins deux raisons à cela. La première est qu’il n’est pas facile de trouver les anciens de L’assemblée — même s’il est assez facile de trouver les anciens de certains corps religieux. L’assemblée de Dieu a été ruinée quant à sa manifestation et son unité extérieures, et nous avons à en subir la peine. La seconde raison — admettant qu’on ait trouvé des anciens de l’assemblée et qu’ils soient venus en réponse à l’appel — est qu’il est très rare qu’ils aient le discernement et la foi requis pour faire monter une prière de foi telle qu’envisagée dans ce passage.

Remarquons que la foi doit se trouver chez ceux qui prient, c’est-à-dire les anciens. Il n’est rien dit de la foi du malade, bien qu’on puisse conclure qu’il ait quelque foi dans l’affaire, au moins assez pour faire appeler les anciens selon ce passage de l’Écriture. On peut aussi conclure de ce qui figure immédiatement après au v. 16, qu’il confesserait ses péchés s’il en a commis. Nous soulignons ces points car on s’est servi de ce passage pour supporter des pratiques qui ne sont justifiées ni par ce passage ni par d’autres.

La confession dont parle le v. 16 n’est cependant pas exactement la confession aux anciens. C’est plutôt «l’un à l’autre». Ce verset n’a pas de caractère officiel comme l’ont les v. 14 et 15. Il n’y a aucune raison pour que quelqu’un d’entre nous ne puisse pas pratiquer une prière de guérison de ce genre.

Le cas dont il s’agit est celui de deux croyants dont l’un a offensé l’autre, sans pour autant qu’aucun des deux ne soit entièrement exempt de blâme, les deux étant par conséquent atteints dans leur santé. Celui qui a commis l’offense à titre principal vient avec une confession, ressentie dans le cœur, du tort qu’il a commis. L’autre est poussé par là à confesser des torts qu’il peut y avoir de son côté, et les deux étant ainsi fondus devant Dieu, ils se mettent à prier l’un pour l’autre. S’ils ont réellement cessé leur mauvaise manière d’agir et qu’ils s’engagent dans la voie de la justice, ils peuvent s’attendre à ce que Dieu les entende et les guérisse.

 

V. 17-18

En liaison avec ce sujet, le cas d’Élie est rappelé. Le v. 17 est particulièrement intéressant dans la mesure où l’Ancien Testament ne fait aucune allusion au fait qu’Élie ait prié pour qu’il ne plût pas, alors qu’il nous est donné bien des détails sur sa prière pour qu’il pleuve à la fin des trois années et demie en 1 Rois 18. Le premier verset de 1 Rois 17 introduit Élie de façon abrupte en déclarant à Achab qu’il ne pleuvrait pas, en sorte que ce verset de Jacques nous fait entrevoir des scènes antérieures à son apparition publique, des scènes de relations personnelles et privées avec Dieu. Bien qu’ayant les mêmes passions que nous, il était juste et brûlait d’une passion fervente pour la gloire de Dieu. C’est pourquoi il était écouté par Dieu, et il le savait avec une certitude telle qu’il était capable d’affirmer avec confiance à Achab ce que Dieu allait faire. Puissions-nous lui ressembler, ne serait-ce qu’à un faible degré!

Nous apprenons de tout ceci les conditions d’une prière efficace: confession du péché, non seulement à Dieu, mais aussi l’un à l’autre; justice pratique dans toutes nos voies; ferveur d’esprit et dans les requêtes. Une prière fervente ne consiste pas à déclamer avec une puissante voix de stentor, mais c’est ce qui sort de cœurs chauds et ardents.

 

V. 19-20

Les derniers versets reviennent à la pensée de notre prière l’un pour l’autre pour la guérison et la restauration. Le v. 19 fait allusion à la conversion ou à la restauration d’un frère qui s’est égaré, et de là, on passe presque insensiblement à la conversion d’un pécheur au v. 20. Celui dont Dieu se sert dans cette œuvre bénie est un instrument pour sauver des âmes de la mort et pour couvrir une multitude de péchés. Réalisons-nous l’honneur que cela représente? Certains sont toujours enclins à dévoiler les péchés tant des croyants que du monde. Couvrir les péchés d’une manière juste, c’est ce que Dieu aime. Puissions-nous nous y engager de tout notre cœur.