Ézéchiel

Chapitre 4

À la suite de l’appel à la fin du chapitre précédent (3:22-27), le prophète doit maintenant mettre le siège devant Jérusalem, figure de celui des Chaldéens: «Et toi, fils d’homme, prends une tuile et mets-la devant toi, et fais dessus le portrait de la ville, Jérusalem. Et mets le siège contre elle, et bâtis contre elle des tours, et élève contre elle une terrasse, et pose des camps contre elle, et place contre elle des béliers tout autour. Et en plus, prends-toi une plaque de fer, et mets-la comme un mur de fer entre toi et la ville; et dresse ta face contre elle, et elle sera assiégée, et tu l’assiégeras: ce sera un signe pour la maison d’Israël» (4:1-3).

Un commandement encore plus remarquable est donné ensuite: «Et toi, couche-toi sur ton côté gauche, et mets sur lui l’iniquité de la maison d’Israël: le nombre des jours que tu coucheras sur ce côté, tu porteras leur iniquité. Car j’ai mis sur toi les années de leur iniquité selon le nombre des jours, trois cent quatre-vingt-dix jours, et tu porteras l’iniquité de la maison d’Israël. Et quand tu auras accompli ceux-là, tu te coucheras une seconde fois sur ton côté droit, et tu porteras l’iniquité de la maison de Juda, quarante jours; je t’ai assigné un jour pour chaque année. Et tu dresseras ta face vers le siège de Jérusalem; et ton bras sera découvert, et tu prophétiseras contre elle. Et voici, j’ai mis sur toi des cordes, et tu ne te tourneras point de l’un de tes côtés sur l’autre, jusqu’à ce que tu aies accompli les jours de ton siège» (4:8-12).

Il est bien connu que cela a donné lieu à beaucoup de débats et de différences de jugement. D’abord la lecture de la plupart des manuscrits des Septante a induit en erreur les premiers pères qui lisaient la version grecque la plus commune, comme on le voit par exemple avec Theodoret. La même erreur apparaît dans la Vulgate, bien que Jérôme savait bien qu’il n’y avait pas de doute sur le texte hébreu; Aquila, Symmachus et Theodotion l’ont suivi. Jérôme fait le calcul à partir de la ruine de la maison d’Israël révoltée lors du règne de Pekakh, quand le roi d’Assyrie a transporté les dix tribus à l’orient (2 Rois 15:29). Mais je ne doute pas qu’il est plus juste de calculer les 390 ans d’Israël (4:5) à partir de Jéroboam, auquel Akhija le prophète annonça que Dieu lui faisait don des dix tribus arrachées de la main de Salomon, et que les quarante ans de Juda (4:6) se rapportent au règne de Salomon lui-même, qui détermina en réalité la ruine de cette portion la plus favorisée du peuple, même si les résultats de l’idolâtrie ne se voyaient pas beaucoup devant l’immensité de la richesse et la sagesse du roi. «Ils m’ont abandonné» fut le message de Dieu au prophète en ce jour-là (1 Rois 11:33) «et ont adoré Ashtoreth, la divinité des Sidoniens, Kemosh, le dieu de Moab, et Milcom, le dieu des fils d’Ammon, et n’ont pas marché dans mes voies pour pratiquer ce qui est droit à mes yeux, et mes statuts et mes ordonnances, comme David, son père». C’est pour cela que la semence de David devait être affligée, et elle l’a été, mais pas pour toujours. Si des jours plus brillant les attendent, il leur faut traverser d’abord une longue nuit de ténèbres, dont l’heure la plus pénible sera celle qui précèdera immédiatement l’aurore, car ils ont ajouté à leur idolâtrie la méchanceté encore plus grande de rejeter leur Messie et de s’opposer à l’Évangile prêché aux nations, de sorte que la colère est venue sur eux à son comble (1 Thess. 2:16). Il ne semble pas y avoir de difficulté à ce que j’avance dans le fait que la maison d’Israël, comme désignant les dix tribus, a été emmenée en captivité bien avant la fin de la période [de 390 ans], car c’est dans la manière d’Ézéchiel d’embrasser toute la nation sous ce titre, quoiqu’ailleurs, comme ici, il fasse la distinction entre les deux parties. Juda n’employa pas pour la gloire de Dieu le règne long, paisible et prospère de celui [Salomon] qui au milieu de bénédictions sans exemple, tourna son cœur vers d’autres dieux, et la sentence de Lo-Ammi ne fut exécutée sur eux que lorsque la portion du peuple élu restée attachée à la maison de David, et le dernier roi de cette famille, eurent justifié par leur trahison envers l’Éternel les tribus retombées loin de Dieu et balayées depuis longtemps de leur pays.

Combien est solennel le témoignage que Dieu rend au sujet de l’homme envisagé dans la responsabilité qu’il a de marcher selon la lumière qui lui a été donnée! Non seulement il s’éloigne de plus en plus de Dieu, mais il tombe dès le début; tous les appels qui lui sont adressés ne servent qu’à prouver son éloignement de cœur et de volonté. Ainsi aucune chair ne peut se glorifier en Sa présence. Puissions-nous nous glorifier dans le Seigneur! Ce n’est pas le premier homme, mais le second qui a glorifié Dieu; c’est justement pourquoi Dieu a glorifié le Fils de l’homme en Lui-même et cela immédiatement après la croix (Jean 13:31).

Voici maintenant une autre question. Le prophète doit manifester dans sa personne la dégradation aussi bien que l’imminence du jugement à cause de l’iniquité du peuple. C’est pourquoi un autre signe suit. «Et toi, prends du froment, et de l’orge, et des fèves, et des lentilles, et du millet, et de l’épeautre; et tu les mettras dans un même vase, et tu t’en feras du pain selon le nombre des jours que tu te coucheras sur ton côté: tu en mangeras trois cent quatre-vingt-dix jours. Et ton manger que tu mangeras sera au poids, vingt sicles par jour; tu le mangeras de temps en temps. Et l’eau tu la boiras à la mesure, un sixième de hin; tu la boiras de temps en temps. Et tu mangeras cela préparé comme un gâteau d’orge, et tu le cuiras sous leurs yeux avec des excréments sortis de l’homme. Et l’Éternel dit: Les fils d’Israël mangeront ainsi leur pain impur parmi les nations où je les chasserai. Et je dis: Ah, Seigneur Éternel! voici, mon âme ne s’est pas rendue impure, et, depuis ma jeunesse jusqu’à maintenant, je n’ai mangé de rien de ce qui est mort de soi-même, ou qui a été déchiré, et aucune chair impure n’est entrée dans ma bouche. Et il me dit: Regarde, je t’ai donné la fiente du bétail au lieu des excréments de l’homme, et tu cuiras ton pain sur elle. Et il me dit: Fils d’homme, voici, je brise le bâton du pain dans Jérusalem; et ils mangeront le pain au poids et avec inquiétude, et ils boiront l’eau à la mesure et avec stupeur, parce que le pain et l’eau manqueront; et ils seront dans la stupeur, les uns et les autres, et ils se consumeront dans leur iniquité» (4:9-17). Ézéchiel doit faire, dans sa mesure, l’expérience de la condition d’Israël sous le juste jugement de Dieu, non qu’il soit alors personnellement hors de la faveur divine, mais au contraire parce qu’il était assez près de Dieu pour pouvoir entrer dans la réalité de leur misère — quoique le Fils de l’homme fût le seul qui pût descendre en grâce dans ses profondeurs, la prendre sur lui d’une manière parfaite et souffrir complètement, bien au-delà de ce qui a pu être ou sera jamais leur part. Jésus dans Son zèle pour Dieu et Son amour pour Son peuple, pouvait seul porter le fardeau, que ce fût en gouvernement ou en expiation. Mais la gloire de Sa personne Le rendait propre à porter ce fardeau dans ces deux cas, sans rien laisser de côté de ce qui était dû à Dieu, et avec les immenses résultats de bénédiction, tant pour nous maintenant que pour les Juifs pieux des derniers jours. Jamais Il ne chercha, comme Ézéchiel ici, à se mettre à l’abri de goûter les conséquences de l’état de ruine d’Israël; jamais il n’a demandé que rien lui fût épargné, excepté s’il était possible, cette coupe de malédiction indicible, que Lui seul devait boire, et qu’Il but jusqu’à la lie, afin que la grâce pût régner par la justice pour la vie éternelle par Jésus Christ notre Seigneur (Rom. 5:21).