Deutéronome

Chapitre 6

«Et ce sont ici les commandements, les statuts, et les ordonnances que l’Éternel, votre Dieu, a commandé de vous enseigner, afin que vous les pratiquiez dans le pays dans lequel vous passez pour le posséder; afin que tu craignes l’Éternel, ton Dieu, pour garder, tous les jours de ta vie, toi, et ton fils, et le fils de ton fils, tous ses statuts et ses commandements que je te commande, et afin que tes jours soient prolongés. Et tu écouteras, Israël! et tu prendras garde à les pratiquer, afin que tu prospères, et que vous multipliiez beaucoup dans un pays ruisselant de lait et de miel, comme l’Éternel, le Dieu de tes pères, te l’a dit. Écoute, Israël: L’Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel» (Chap. 6:1-4).

Ici nous est présentée cette grande vérité cardinale, que la nation d’Israël était spécialement responsable de retenir et de confesser, savoir l’unité de la divinité, vérité formant la base même de l’économie judaïque, le centre autour duquel le peuple devait se rallier. Aussi longtemps qu’ils la maintenaient, il y avait pour Israël, bonheur, prospérité et fertilité; mais cette vérité une fois abandonnée, tout disparaissait. C’était, pour ainsi dire, le grand rempart national qui les séparait de tous les autres peuples de la terre; ils étaient appelés à confesser cette glorieuse vérité à la face d’un monde idolâtre, et de ses «plusieurs dieux et plusieurs seigneurs» (voyez 1 Cor. 8:5).

Leur père Abraham avait été appelé hors du centre de l’idolâtrie païenne, pour devenir le témoin du seul Dieu vivant et vrai, se confier en Lui, marcher avec Lui, s’appuyer sur Lui, et Lui obéir.

Le lecteur trouvera dans le dernier chapitre de Josué, une expression très frappante de l’importance que l’Éternel attache à ce fait, lorsqu’il s’adresse pour la dernière fois au peuple: «Josué assembla toutes les tribus d’Israël à Sichem, et il appela les anciens d’Israël, et ses chefs, et ses juges, et ses magistrats; et ils se tinrent devant Dieu. Et Josué dit à tout le peuple: Ainsi dit l’Éternel, le Dieu d’Israël: Vos pères, Térakh, père d’Abraham et père de Nakhor, ont habité anciennement au-delà du fleuve, et ils ont servi d’autres dieux; et je pris votre père Abraham d’au-delà du fleuve, et je le fis aller par tout le pays de Canaan, et je multipliai sa semence je lui donnai Isaac» (Josué 24:1-3).

Ici Josué rappelle au peuple que leurs pères ont servi d’autres dieux — fait très solennel et dont le souvenir leur aurait rappelé le profond besoin qu’ils avaient de veiller sur eux-mêmes, de peur d’être entraînés de nouveau dans l’idolâtrie, hors de laquelle Dieu, dans sa grâce souveraine, avait élu et appelé leur père Abraham. C’eût été sagesse de leur part de considérer que, même ce mal dans lequel leurs pères avaient vécu autrefois, était justement celui dont ils se rendraient coupables eux-mêmes.

Après avoir présenté ce fait au peuple, Josué retrace avec une force remarquable tous les principaux événements de leur histoire, depuis la naissance de leur père Isaac, jusqu’au moment où il s’adresse à eux, puis il résume son discours par l’appel suivant: «Et maintenant, craignez l’Éternel, et servez-le en intégrité et en vérité; et ôtez les dieux que vos pères ont servis de l’autre côté du fleuve, et en Égypte, et servez l’Éternel. Et s’il est mauvais à vos yeux de servir l’Éternel, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir, soit les dieux que vos pères qui étaient de l’autre côté du fleuve ont servis, soit les dieux de l’Amoréen, dans le pays duquel vous habitez. Mais moi et ma maison, nous servirons l’Éternel» (Josué 24:14, 15).

Remarquez cette allusion répétée au fait que leurs pères avaient adoré des faux dieux; et, en outre, que le pays dans lequel l’Éternel les avait amenés avait été souillé, d’une extrémité à l’autre, par les abominations de l’idolâtrie païenne.

Ainsi, ce fidèle serviteur de l’Éternel, évidemment inspiré par le Saint Esprit, cherche à représenter au peuple le danger qu’il court d’abandonner la grande vérité fondamentale d’un seul Dieu vivant et vrai, pour retourner au culte des idoles. Il insiste sur la nécessité urgente pour eux d’une décision absolue. «Choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir». Rien n’égale une décision du cœur franche et complète pour Dieu; c’est ce que nous lui devons en tout temps. Quant à Israël, Dieu lui avait donné des preuves évidentes que Lui-même était pour eux, en les rachetant de la servitude d’Égypte et en les conduisant à travers le désert pour les établir au pays de Canaan; pour cette raison, une consécration complète à l’Éternel n’était de leur part qu’un service raisonnable.

Les paroles de Josué prouvent combien il en sentait profondément l’importance pour ce qui le concernait: «Mais moi et ma maison, nous servirons l’Éternel». Précieuse décision, qui nous montre que, quelle que soit la déchéance de la religion nationale, celle de la famille, et l’âme individuellement peuvent, par la grâce de Dieu, être maintenues en tout temps et en tous lieux.

Puissions-nous ne pas l’oublier! «Moi et ma maison» est la réponse claire et précieuse de la foi à ces paroles de Dieu: «Toi et ta maison». Quelle que puisse être, en un temps donné, la condition du peuple de Dieu ostensible et professant, tout homme de Dieu sincère et fidèle possède le privilège de pouvoir adopter ce principe: «Mais moi et ma maison, nous servirons l’Éternel», et d’y conformer tous ses actes.

Il est vrai que cette sainte résolution ne peut être mise en pratique que par le secours incessant de la grâce de Dieu; mais nous pouvons être assurés que, si notre cœur est déterminé à suivre entièrement le Seigneur, toute grâce nécessaire nous sera fournie jour après jour, car ces paroles seront toujours vraies «Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans l’infirmité» (2 Cor. 12:9).

Considérons maintenant l’effet apparent produit par l’émouvant appel de Josué à la congrégation ne semble-t-il pas devoir être considérable?

«Et le peuple répondit, et dit: Loin de nous que nous abandonnions l’Éternel pour servir d’autres dieux! Car l’Éternel, notre Dieu, c’est lui qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d’Égypte, de la maison de servitude, et qui a fait devant nos yeux ces grands signes, et qui nous a gardés dans tout le chemin par lequel nous avons marché, et parmi tous les peuples, au milieu desquels nous avons passé. Et l’Éternel a chassé de devant nous tous les peuples, et l’Amoréen qui habitait dans le pays. Aussi nous, nous servirons l’Éternel, car c’est lui qui est notre Dieu» (Jos. 24:16-18).

Tout ceci sonnait très bien et donnait grand espoir, car le peuple paraissait avoir une claire intelligence du fondement moral des droits de l’Éternel à une obéissance implicite de leur part. Ils étaient en état de faire un récit exact de toutes ses œuvres de puissance à leur égard, de protester sérieusement, en toute sincérité, contre l’idolâtrie et avec tout cela de promettre l’obéissance à l’Éternel, leur Dieu.

Cependant, il est évident que Josué n’avait pas une confiance particulière en cette profession, puisqu’il dit au peuple: «Vous ne pourrez pas servir l’Éternel; car il est un Dieu saint, il est un Dieu jaloux: il ne pardonnera pas votre transgression et vos péchés. Si vous abandonnez l’Éternel, et si vous servez des dieux étrangers, alors il se retournera et vous fera du mal et vous consumera après vous avoir fait du bien. Et le peuple dit à Josué: Non, car nous servirons l’Éternel. Et Josué dit au peuple: Vous êtes témoins contre vous-mêmes que c’est vous qui vous êtes choisi l’Éternel pour le servir. Et ils dirent: Nous en sommes témoins. Et maintenant, ôtez les dieux étrangers qui sont au milieu de vous, et inclinez votre cœur vers l’Éternel, le Dieu d’Israël. Et le peuple dit à Josué: Nous servirons l’Éternel, notre Dieu, et nous écouterons sa voix» (Josué 24:19-24).

Arrêtons-nous ici pour méditer sur l’aspect sous lequel Josué présente Dieu à la congrégation d’Israël, puisque notre but en nous occupant de ce passage est de montrer la place éminente assignée dans le discours de Josué, à la vérité de l’unité de la divinité; vérité à laquelle, comme nous l’avons vu, Israël était appelé à rendre témoignage devant toutes les nations de la terre, et dans laquelle se trouvait leur sauvegarde morale contre les influences séductrices de l’idolâtrie.

Or cette vérité même fut celle qu’ils abandonnèrent la première, de la manière la plus signalée. Les promesses, les vœux et les résolutions prises sous l’influence des paroles de Josué, se trouvèrent être semblables à une rosée du matin qui s’en va (Osée 6:4). «Et le peuple servit l’Éternel tous les jours de Josué, et tous les jours des anciens dont les jours se prolongèrent après Josué, et qui avaient vu toute la grande œuvre de l’Éternel, qu’il avait faite pour Israël. Et Josué, fils de Nun, serviteur de l’Éternel, mourut, âgé de cent dix ans… Et toute cette génération fut aussi recueillie vers ses pères; et après eux, se leva une autre génération qui ne connaissait pas l’Éternel, ni l’œuvre qu’il avait faite pour Israël. Et les fils d’Israël firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, et servirent les Baals. Et ils abandonnèrent l’Éternel, le Dieu de leurs pères, qui les avait fait sortir du pays d’Égypte; et ils marchèrent après d’autres dieux, d’entre les dieux des peuples qui étaient autour d’eux, et se prosternèrent devant eux; et ils provoquèrent à colère l’Éternel, et abandonnèrent l’Éternel, et servirent Baal et Ashtaroth» (Juges 2:7-13).

Quel avertissement solennel pour nous tous! Une vérité si grande, d’une telle importance, sitôt abandonnée! Se départir du seul Dieu vivant et vrai, pour suivre Baal et Astarté! Tant que Josué et les anciens vivaient, leur présence et leur influence avaient gardé Israël d’une apostasie ouverte, mais à peine ces digues morales sont-elles ôtées, que le sombre courant de l’idolâtrie les envahit et emporte le fondement même de la foi nationale. L’Éternel, le Dieu d’Israël, était remplacé par les divinités mâles et femelles. L’influence humaine est un pauvre appui, une faible barrière; il nous faut être soutenus par la puissance de Dieu, autrement, tôt ou tard, nous succomberons. La foi, maintenue simplement par la sagesse des hommes et non par la puissance de Dieu, sera sûrement démontrée faible et sans valeur; elle ne résistera pas au jour de l’épreuve, ne supportera pas la fournaise, et défaillira inévitablement.

En second lieu, la foi ne suffit pas, il doit y avoir un lien vivant entre l’âme et Dieu. Nous devons avoir affaire avec Dieu pour nous-même, individuellement, autrement lorsque le temps de l’épreuve surviendra nous succomberons. L’exemple et l’influence de l’homme sont bons à leur place; il était bon de considérer comment Josué et les anciens suivaient le Seigneur; cette parole est vraie: «Le fer s’aiguise par le fer, et un homme ranime le visage de son ami» (Prov. 27:17). Il est très encourageant d’être entouré de cœurs réellement dévoués; très doux d’être soutenu par le courant d’une fidélité collective à Christ, à sa personne et à sa cause. Mais si c’est tout, si la source profonde d’une foi et d’une connaissance personnelles n’existe pas; s’il n’y a pas le lien formé et maintenu en Dieu dans une communion individuelle avec Lui, lorsque le courant de l’influence humaine décline, que les appuis humains manquent, lorsqu’en un mot, la décadence générale commence, alors, en principe, nous serons semblables à Israël qui suivait l’Éternel, tous les jours de Josué et des anciens, et qui finit par abandonner la confession de son Nom, pour retourner aux folies et aux vanités de ce présent siècle — choses nullement meilleures, en réalité, que Baal et Ashtaroth.

Mais, d’un autre côté, quand le cœur est fermement établi dans la vérité et la grâce de Dieu quand nous pouvons dire — et c’est le privilège de tout vrai croyant — «Je sais qui j’ai cru, et je suis persuadé qu’il a la puissance de garder ce que je lui ai confié, jusqu’à ce jour-là» (2 Tim. 1:12), alors même que tous se détourneraient de la confession publique de Christ, que tout secours humain viendrait à manquer, «le fondement de Dieu» demeurerait aussi solide que jamais pour nous, et le sentier de l’obéissance aussi distinct devant nous que si des milliers d’âmes le foulaient avec décision et une sainte énergie.

Nous ne devons pas perdre de vue le fait que, selon les décrets divins, l’Église professante de Dieu doit retirer de profondes et saintes leçons de l’histoire d’Israël, «car toutes les choses qui ont été écrites auparavant, ont été écrites pour notre instruction, afin que, par la patience et par la consolation des Écritures, nous ayons espérance» (Rom. 15:4).

Cependant il n’est nullement nécessaire, pour retirer cette instruction des écrits de l’Ancien Testament, que nous nous occupions à rechercher des analogies fantastiques, des théories extraordinaires ou des illustrations hasardées. Combien d’âmes, hélas! en faisant ainsi, ont été entraînées à de folles et vides conceptions, sinon à de mortelles erreurs, au lieu de trouver «la consolation des Écritures».

C’est avec les faits réels rapportés par les pages de l’histoire inspirée, que nous avons affaire; il faut les étudier avec soin, puisque de grandes leçons pratiques peuvent en être retirées. Ce fait, par exemple, que nous venons de faire ressortir dans l’histoire d’Israël, savoir l’abandon de la vérité même qu’ils avaient été spécialement appelés à maintenir et à confesser, au sujet de l’unité de la divinité, ce fait, dis-je, est pour nous un avertissement de la plus grande importance. L’existence même d’Israël, comme nation, dépendait de cette vérité glorieuse, et ils l’abandonnèrent. L’eussent-ils retenue fermement, ils auraient été invincibles, mais en l’abandonnant, ils perdaient tout et devenaient pires que les nations qui les environnaient, en tant qu’ils péchaient contre la lumière et la connaissance, ayant les yeux ouverts, en dépit des plus solennelles exhortations, et ajoutons encore, malgré leurs protestations et leurs promesses d’obéissance souvent répétées.

Oui, lecteur, Israël abandonna le culte du seul Dieu vivant et vrai, l’Éternel Élohim, le Dieu de leur alliance; non seulement leur Créateur, mais leur Rédempteur; Celui qui les avait retirés d’Égypte, conduits à travers la mer Rouge, le désert et le Jourdain, pour les établir triomphalement sur l’héritage qu’il avait promis à Abraham, leur père: «Pays ruisselant de lait et de miel, qui est un ornement entre tous les pays» (Éz. 20:6). Ils se détournèrent de Lui et s’adonnèrent au culte des faux dieux. «Ils le provoquèrent à colère par leurs hauts lieux, et l’émurent à jalousie par leurs images taillées» (Ps. 78:58). Combien cela paraît étonnant, qu’un peuple qui avait autant vu et connu de la bonté et de la grâce de Dieu, qui avait été témoin de ses actes de puissance, de sa fidélité, de sa majesté, de sa gloire, ait pu en venir à se prosterner devant une bûche de bois! Leur histoire entière, depuis les jours du veau d’or, au pied du mont Sinaï, jusqu’au temps où Nebucadnetsar réduisit Jérusalem en ruines, toute cette histoire est marquée par un esprit d’invincible idolâtrie. Ce fut en vain que l’Éternel, dans sa patiente miséricorde, leur suscita des libérateurs pour les soustraire aux terribles conséquences de leur péché et de leur folie. Plusieurs fois, dans sa bonté inépuisable, il les délivra de la main de leurs ennemis, leur suscitant un Othniel, un Éhud, un Barak, un Gédéon, un Jephthé, un Samson, tous ces instruments de sa puissance et de sa miséricorde, témoins de son tendre amour et de ses compassions envers son peuple rebelle. À peine chacun de ces juges avait-il disparu de la scène, que la nation se plongeait de nouveau dans l’idolâtrie.

Au temps des rois, nous voyous la même affligeante histoire. Nous découvrons, il est vrai, quelques points brillants, quelques étoiles lumineuses à travers les tristes ténèbres de l’histoire d’Israël nous avons un David, un Asa, un Josaphat, un Ézéchias, un Josias, — autant d’exceptions bénies et rafraîchissantes à la funeste règle. Mais ces hommes même ne purent extirper du cœur de la nation, cette racine d’idolâtrie. Au milieu des splendeurs sans pareilles du règne de Salomon, cette racine produisit des rejetons sous forme de hauts lieux, élevés à Ashtaroth, déesse des Sidoniens, à Milcom, l’abomination des Ammonites; et à Kemosh, l’abomination de Moab.

Arrêtez-vous un instant, lecteur, et représentez-vous l’écrivain de l’Ecclésiaste et des Proverbes, se prosternant dans le temple de Moloch! Est-il possible de se représenter le plus sage et le plus glorieux des monarques d’Israël, brûlant de l’encens, et offrant des sacrifices sur l’autel de Kemosh? N’y a-t-il pas là, pour nous, quelque instruction à retirer? Le règne de Salomon fournit une des preuves les plus frappantes du fait qui nous occupe maintenant, savoir l’apostasie complète d’Israël quant à l’unité de la divinité — leur esprit invincible d’idolâtrie. La vérité qu’ils auraient dû maintenir avant tout, fut abandonnée la première.

Nous ne voulons pas rechercher d’autres preuves, ni nous arrêter à l’épouvantable description du jugement de la nation, conséquence de son idolâtrie. La condition actuelle de ce peuple est celle dont parle le prophète Osée: «Car les fils d’Israël resteront beaucoup de jours sans roi, et sans prince, et sans sacrifice, et sans statue, et sans éphod ni théraphim» (Osée 3:4). «L’esprit immonde d’idolâtrie est sorti d’eux» pendant ces «beaucoup de jours», pour retourner bientôt avec «sept autres esprits plus méchants que lui-même» (Luc 11:24-26) — la perfection même de la méchanceté spirituelle. Et alors surviendront des jours de tribulation incomparable pour ce peuple si longtemps égaré et révolté, «le temps de la détresse pour Jacob» (Jér. 30:7).

Mais, Dieu soit béni, la délivrance viendra. Des jours de bonheur sont réservés à la nation restaurée, — «jours du ciel sur la terre», — comme nous dit aussi le prophète Osée: «Ensuite, les fils d’Israël retourneront, et rechercheront l’Éternel, leur Dieu, et David, leur roi, et se tourneront avec crainte vers l’Éternel et vers sa bonté, à la fin des jours» (Osée 3:5). Toutes les promesses de Dieu à Abraham, Isaac, Jacob et David, s’accompliront; toutes les brillantes prédictions des prophètes, d’Ésaïe à Malachie, auront un glorieux accomplissement, car «l’Écriture ne peut être anéantie» (Jean 10:35). À la longue nuit, succédera le plus glorieux jour qui ait jamais brillé sur la terre; la fille de Sion se réchauffera aux rayons du «soleil de justice»; et «la terre sera pleine de la connaissance de la gloire de l’Éternel, comme les eaux couvrent le fond de la mer» (Hab. 2:14).

Il serait fort intéressant de reproduire ici les beaux passages des prophètes, concernant l’avenir d’Israël; mais notre désir était seulement d’attirer l’attention sur l’application pratique du fait solennel de l’abandon si prompt et si complet que fit Israël de cette vérité «Écoute, Israël: L’Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel».

On demandera peut-être: «En quoi ce fait peut-il intéresser l’Église de Dieu?» Notre conviction est qu’il a pour elle une portée des plus solennelles; et nous croirions manquer à notre devoir envers Christ et envers son Église, en négligeant de signaler cette application.

En considérant l’histoire de l’Église de Dieu, comme témoin public de Christ sur la terre, nous voyons qu’à peine établie dans toute la plénitude des bénédictions et des privilèges qui ont marqué le début de sa carrière, elle commença à laisser échapper les vérités mêmes que le chrétien était spécialement responsable de maintenir et de confesser, et qui devaient caractériser le christianisme et le distinguer de tout ce qui avait précédé. Comme Adam au jardin d’Éden, comme Noé sur la, terre restaurée, comme Israël en Canaan, l’Église, à peine établie comme dispensateur responsable des mystères de Dieu, commença son déclin et sa chute. Sous les yeux mêmes des apôtres, des erreurs et des maux surgirent, travaillant à miner les fondements mêmes du témoignage de l’Église.

Les preuves de ce fait abondent. Écoutez les paroles de l’apôtre, qui a répandu plus de larmes sur la ruine de l’Église qu’aucun autre homme: «Je m’étonne», dit-il, «de ce que vous passez si promptement de celui qui vous a appelés par la grâce de Christ, à un évangile différent, qui n’en est pas un autre». «Ô Galates insensés, qui vous a ensorcelés, vous devant les yeux de qui Jésus Christ a été dépeint, crucifié au milieu de vous?» «Mais alors, ne connaissant pas Dieu, vous étiez asservis à ceux qui, par leur nature, ne sont pas dieux: mais maintenant, ayant connu Dieu, mais plutôt ayant été connus de Dieu, comment retournez-vous de nouveau aux faibles et misérables éléments auxquels vous voulez encore derechef être asservis? Vous observez des jours, et des mois, et des temps, et des années»; fêtes soi-disant chrétiennes, très imposantes devant la nature religieuse, et satisfaisant la chair; mais dont la signification, d’après le jugement de l’apôtre et celui du Saint Esprit, était simplement d’abandonner le christianisme pour retourner au culte des idoles. L’apôtre ajoute «Je crains quant à vous», (et quoi d’étonnant, quand ces Galates avaient pu si promptement se détourner des grandes vérités caractéristiques d’un christianisme céleste, pour s’occuper d’observances superstitieuses?) «que peut-être je n’aie travaillé en vain pour vous». «Vous couriez bien, qui est-ce qui vous a arrêtés pour que vous n’obéissiez pas à la vérité? La persuasion ne vient pas de celui qui vous appelle. Un peu de levain fait lever la pâte tout entière» (Gal. 1:6; 3:1; 4:8-11; 5:7-9).

Tout ceci se passait au temps même de l’apôtre. L’abandon de la vérité fut encore plus rapide que dans le cas d’Israël; car ils avaient servi l’Éternel tous les jours de Josué, et tous les jours des anciens qui lui survécurent; mais, dans la triste et humiliante histoire de l’Église, l’ennemi réussit presque immédiatement à introduire du levain dans la farine, de l’ivraie parmi le blé. Avant même que les apôtres eussent disparu de la scène, une semence avait été jetée, qui continuera dès lors à produire ses fruits pernicieux, jusqu’à ce que des moissonneurs angéliques viennent nettoyer le champ.

Cherchons des preuves de la chose dans l’Écriture. Écoutons le même témoin inspiré, épanchant, à la fin de son ministère, son cœur dans celui de son bien-aimé fils Timothée: «Tu sais ceci, que tous ceux qui sont en Asie, du nombre desquels sont Phygelle et Hermogène, se sont détournés de moi». Et encore: «Il y aura un temps où ils ne supporteront pas le sain enseignement; mais, ayant des oreilles qui leur démangent, ils s’amasseront des docteurs selon leurs propres convoitises, et ils détourneront leurs oreilles de la vérité et se tourneront vers les fables» (2 Tim. 1:15; 4:3-4).

Tel est le témoignage de l’homme qui, en sage architecte, avait posé les fondements de l’Église. Et quant à ses propres expériences personnelles, qu’en était-il? Comme son Maître; il avait été abandonné, délaissé par ceux qui, une fois, s’étaient rassemblés autour de lui, dans toute la fraîcheur et l’ardeur des premiers temps. Son cœur large et aimant avait été brisé par des docteurs judaïsants, qui cherchaient à renverser les fondements mêmes du christianisme et la foi des élus de Dieu. Il pleurait sur les voies de ceux qui, tout en faisant profession, étaient néanmoins «ennemis de la croix de Christ».

En un mot, l’apôtre Paul, de sa prison à Home, prévoyait la décadence et la ruine du corps professant, et un sort pareil à celui du vaisseau dans lequel il avait fait son dernier voyage.

Rappelons ici que nous ne sommes occupés maintenant que de la question de l’Église, dans son caractère de témoin responsable pour Christ sur la terre; il importe d’être au clair là-dessus, pour ne pas laisser nos pensées s’égarer à ce sujet. On ne saurait être assez exact à faire la distinction entre l’Église comme corps de Christ, et l’Église comme luminaire ou témoin de Christ dans le monde. Dans ce premier caractère, il ne peut y avoir de déchéance, tandis que dans le dernier, la ruine est complète et sans espoir.

L’Église, comme corps de Christ, unie à sa Tête vivante et glorifiée dans les cieux, par la présence et l’habitation du Saint Esprit, ne peut jamais, par aucun moyen faillir, — jamais être brisée, comme le vaisseau de Paul, par les orages et les flots d’un monde hostile; l’Église, dis-je, est aussi à l’abri que Christ lui-même. La Tête et le corps sont un — indissolublement liés. Aucune puissance sur la terre ou dans l’enfer ne pourra jamais toucher ou attaquer le plus faible ou le plus obscur des membres de son corps. Tous les membres ont la même position devant Dieu, tous sont sous son œil miséricordieux dans la plénitude, la beauté et l’acceptation de Christ lui-même. Telle qu’est la Tête, tels sont les membres — tous les membres ensemble — chaque membre en particulier. Tous ont droit aux pleins résultats éternels de l’œuvre accomplie sur la croix. Il ne peut être question ici de responsabilité. La Tête s’est rendue responsable pour les membres, a parfaitement répondu à toutes les obligations, et nous a déchargés de toute responsabilité. Il ne reste rien qu’amour, — un amour aussi profond que le cœur de Christ, parfait comme son œuvre, invariable comme son trône. Toute question qui aurait pu être soulevée contre quelque individu, ou collectivement contre tous les membres de l’Église de Dieu, a été définitivement réglée, entre Dieu et son Christ sur la croix. Tous les péchés, toute la culpabilité de chaque membre individuellement, et de tous les membres collectivement, — oui, tout, et cela de la manière la plus entière et la plus absolue, a été mis sur Christ et porté par Lui. Dieu, dans son inflexible justice, et sa sainteté infinie, a ôté tout ce qui pouvait s’opposer au plein salut, et à la bénédiction parfaite de chacun des membres du corps de Christ, de l’Assemblée de Dieu. Chaque membre du corps subsiste par la vie de la Tête. Tous sont unis ensemble par la puissance d’un lien qui ne peut jamais être dissout.

Comprenons bien, en outre, que l’unité du corps de Christ est absolument indissoluble; c’est là un point essentiel qui doit être fidèlement maintenu. Mais évidemment, si l’on ne croit pas cette vérité, on ne peut ni la maintenir, ni la confesser; et à en juger d’après certaines opinions émises à ce sujet, on est tenté de se demander si cette belle vérité de l’Unité du corps de Christ, — unité maintenue sur la terre par l’habitation du Saint Esprit, — a jamais été saisie dans son sens divin, par les personnes qui expriment ces opinions.

Par exemple, nous entendons parler de «diviser le corps de Christ», ce qui est une grave erreur, la chose étant complètement impossible. Les réformateurs furent accusés de rompre ou de désunir le corps de Christ, lorsqu’ils tournèrent le dos au système romain. Cela revenait simplement à la monstrueuse présomption que cette vaste masse de mal moral, d’erreurs doctrinales, de corruption ecclésiastique et de superstition avilissante, devait être reconnue comme le corps de Christ! Comment, avec le Nouveau Testament en main, aurait-il été possible de considérer la soi-disant église de Rome et ses abominations sans nom et sans nombre, comme étant le corps de Christ? Comment, avec la plus faible idée de ce qu’est la vraie Église de Dieu, quelqu’un penserait-il jamais à accorder ce titre au Romanisme, sombre amas de méchanceté, le plus grand chef-d’œuvre de Satan que le monde ait jamais contemplé?

Non, lecteur; il ne faut jamais confondre les systèmes ecclésiastiques de ce monde, — anciens ou modernes, grecs, latins, anglicans, nationaux ou populaires, établis ou dissidents — avec la vraie Église de Dieu, le corps de Christ. Il n’existe de nos jours et n’exista jamais un système religieux, comme qu’il se nomme, qui possède le moindre droit d’être appelé «l’Église de Dieu» ou «le corps de Christ». Par conséquent, on ne peut à juste titre et intelligemment appeler schisme ou division du corps de Christ, la séparation d’avec de pareils systèmes; au contraire, le devoir de toute âme qui désire maintenir fidèlement et confesser la vérité de l’unité du corps est de se séparer avec décision de tout ce qui s’appelle faussement une église. On ne peut appeler schisme que l’acte de se séparer de ceux qui, clairement et incontestablement, se rassemblent sur le terrain de l’Assemblée de Dieu.

Aucun corps de chrétiens ne peut maintenant revendiquer le droit au titre de corps de Christ, ou d’Église de Dieu. Les membres de ce corps sont dispersés partout; ils se trouvent dans toutes les diverses organisations religieuses du jour, excepté dans celles qui nient la divinité de notre Seigneur Jésus Christ, car impossible d’admettre l’idée que quelque vrai chrétien que ce soit, puisse continuer à fréquenter un endroit où son Seigneur est blasphémé. Mais quoiqu’aucun corps de chrétiens n’ait droit au titre d’Assemblée de Dieu, tous les chrétiens sont responsables de se réunir sur le terrain de cette Assemblée et sur aucun autre.

Et si l’on nous demande: «Comment reconnaître et où trouver ce terrain?» nous répondrons: «Lorsque ton œil est simple, ton corps tout entier aussi est plein de lumière» (Luc 11:34). «Si quelqu’un veut faire sa volonté, il connaîtra de la doctrine si elle est, de Dieu» (Jean 7:17). Il y a un sentier, — Dieu en soit béni, — «que l’oiseau de proie ne connaît pas et que l’œil du vautour n’a pas aperçu». La vue naturelle la plus pénétrante ne peut voir ce sentier; le lion ne l’a pas traversé. Où est-il donc? À l’homme, à chacun de nous, Dieu dit: «Voici la crainte du Seigneur, c’est là la sagesse; et se retirer du mal est l’intelligence» (Job 28:7, 28).

Il y a une autre expression dont se servent assez souvent des personnes desquelles on pourrait attendre plus d’intelligence, savoir «retrancher les membres du corps de Christ»1. Ceci aussi est impossible. Pas un seul membre du corps de Christ ne peut être séparé de la Tête, ou même ôté de la place dans laquelle le Saint Esprit l’a incorporé, d’après les desseins éternels de Dieu, et en vertu de l’expiation accomplie par notre Sauveur. Les trois personnes divines en une, sont le gage de l’éternelle sécurité du plus faible des membres du corps, et la cause du maintien de l’unité indissoluble du corps tout entier.

1 L’expression «retrancher les membres du corps de Christ», s’applique en général aux cas de discipline, ce qui, est une fausse application. La discipline de l’assemblée ne peut jamais toucher à l’unité du corps. Un membre du corps peut manquer quant à la moralité, ou s’égarer de telle manière quant à la doctrine, que l’assemblée soit appelée à agir, en le privant de la Cène; mais cela n’a rien à faire avec sa place dans le corps. Les deux choses sont parfaitement distinctes.

En un mot, il est aussi vrai aujourd’hui que lorsque l’apôtre inspiré écrivait le chapitre 4 de son épître aux Éphésiens, que «il y a un seul corps», dont Christ est la tête, dont le Saint Esprit est la puissance créatrice, et dont tous les vrais croyants sont les membres. Ce corps a été sur la terre depuis le jour de la Pentecôte; il est encore sur la terre et continuera d’y être, jusqu’au moment qui approche rapidement, où Christ viendra l’introduire dans la maison de son Père. Il en est de ce corps dans la succession continue de ses membres, comme, par comparaison, d’un certain régiment de l’armée de la Reine ayant été à Waterloo, maintenant en garnison à Aldershot, et qui ne reste pas moins le même régiment, quoique pas un des hommes dont il est composé aujourd’hui n’ait existé lors de la mémorable bataille de 1815.

Le lecteur éprouve-t-il encore quelque difficulté à comprendre tout ceci? Il se peut qu’il trouve difficile, en présence de la condition actuelle si affligeante des membres de ce corps, de croire et de confesser l’unité inviolable du corps. Il peut être tenté de limiter l’application de Éph. 4:4, aux jours où l’apôtre écrivait ces mots, lorsque les chrétiens étaient manifestement unis; lorsqu’il ne pouvait être question d’être membre de telle ou de telle église, parce que tous les croyants étaient membres de la seule Église de Dieu1.

1 L’unité de l’Église peut être comparée à une chaîne jetée à travers une rivière; nous la voyons aux deux bords, mais elle plonge au milieu. Quoique cachée dans l’eau, elle n’est pas rompue, et sans voir l’union du milieu nous y croyons néanmoins. L’Église a été vue dans son unité au jour de la Pentecôte; elle sera vue dans son unité dans la gloire; et, quoique ne voyant pas cela maintenant, nous y croyons néanmoins fermement.

Souvenons-nous aussi que l’unité du corps est une grande vérité pratique fondamentale, dont une déduction très importante et pratique aussi, est celle-ci, que l’état et la marche de chaque membre affectent tout le corps: «Si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui» (1 Cor. 12:26). Un membre de quoi? De quelque assemblée locale? Non; mais un membre du corps. Il ne faut pas faire du corps de Christ une question de géographie.

Mais, nous demandera-t-on peut-être, une chose que nous ne voyons ni ne connaissons, peut-elle nous affecter? Oui, assurément. Pouvons-nous limiter la grande vérité de l’unité du corps avec toutes ses conséquences pratiques, à la mesure de notre connaissance et de notre expérience personnelles? Loin de nous cette pensée. C’est la présence du Saint Esprit qui unit les membres du corps à la Tête et les uns aux autres; de là vient que la marche et les voies de chaque individu affectent tout le corps. Même dans le cas d’Israël, dont l’unité n’était pas de corps mais nationale, lorsqu’Acan pécha, il est dit: «Israël a péché»; et la congrégation tout entière eut à souffrir une humiliante défaite à cause d’un péché qu’elle ignorait.

Il est des plus étonnant de voir combien le peuple de Dieu paraît peu comprendre cette glorieuse vérité de l’unité du corps, et les conséquences pratiques qui en découlent.

En réponse à cette objection, nous devons protester contre l’idée de limiter ainsi la parole de Dieu. Quel droit avons-nous de séparer un membre de phrase d’Éph. 4:4-6, et de dire qu’il s’applique seulement aux jours des apôtres? Si une clause peut être limitée, pourquoi pas toutes? N’y a-t-il pas encore «un seul Esprit, un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous?» Quelqu’un mettra-t-il cette vérité en question? Sûrement pas. Eh bien donc, il en résulte qu’il y a aussi sûrement un seul corps et un seul Esprit, qu’il y a un seul Seigneur et un seul Dieu. Tous sont intimement liés ensemble, et vous ne pouvez toucher à l’un sans les toucher tous. Nous n’avons pas plus le droit de nier l’existence de ce corps, que de nier l’existence de Dieu, en tant que le même passage qui nous déclare une de ces vérités nous déclare l’autre aussi.

Quelqu’un, sans doute, nous demandera encore: «Où peut-on voir ce seul corps? N’est-ce pas une absurdité de parler d’une telle chose que l’unité, en face des innombrables dénominations de chrétiens?» Nous répondons ceci: Conviendrait-il d’abandonner la vérité de Dieu, parce que l’homme a manqué de la maintenir et cela d’une manière aussi signalée? Israël n’a-t-il pas complètement manqué à maintenir et à confesser la vérité de l’unité de la divinité? et cette glorieuse vérité a-t-elle été, en quelque manière, atteinte par ces manquements? N’était-il pas aussi vrai qu’il n’y avait qu’un Dieu, lorsque les autels idolâtres étaient aussi nombreux que les rues de Jérusalem, et que de chaque toit de maison, un nuage d’encens était envoyé à la reine des cieux, que lorsque Moïse prononça aux oreilles de la congrégation entière, ces paroles: «Écoute Israël: L’Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel?» Grâce à Dieu, sa vérité ne dépend pas des voies infidèles et insensées des hommes; elle demeure dans sa propre intégrité divine; elle brille de son propre éclat céleste, en dépit des manquements les plus grossiers de l’humanité. S’il n’en était pas ainsi, que ferions-nous? Où nous tournerions-nous, et qu’en adviendrait-il de nous? De fait, cela revient à ceci que, si nous ne croyions que la faible mesure de vérité pratiquée par les hommes dans leurs voies, nous l’abandonnerions avec désespoir, et serions de tous les hommes les plus misérables.

Mais comment cette vérité de l’unité du corps peut-elle être maintenue pratiquement? En refusant de reconnaître aucun autre principe de communion chrétienne, aucun autre terrain de rassemblement que Christ. Tous les vrais croyants devraient se réunir sur le simple terrain de communion du corps de Christ, et sur aucun autre. Ils devraient se réunir le premier jour de la semaine autour de la table du Seigneur et rompre le pain, comme membres d’un seul corps, suivant ce que nous lisons en 1 Cor. 10:17: «Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain».

Cela est aussi vrai et aussi pratique aujourd’hui que lorsque l’apôtre s’adressait à l’assemblée de Corinthe. Il est vrai qu’il y avait des divisions à Corinthe, comme il y en a dans la chrétienté; mais cela n’altérait en aucune manière la vérité de Dieu. L’apôtre blâmait les divisions il les déclarait charnelles. Il n’avait aucune sympathie pour cette misérable idée émise quelquefois, que les divisions sont une bonne chose pour exciter l’émulation. Il croyait au contraire qu’elles étaient une très mauvaise chose — le fruit de la chair une œuvre de Satan.

L’apôtre n’aurait pas non plus, nous en sommes certains, accepté cette explication populaire que les divisions dans l’Église sont comme autant de régiments avec des drapeaux divers, mais combattant tous sous le même chef. Cela ne saurait être vrai d’aucune manière. Cela ne peut avoir aucune application quelconque, mais est plutôt en contradiction flagrante avec ce fait distinct et emphatique «Il y a un seul corps».

Lecteur! c’est une vérité glorieuse et qui demande toute notre attention. Examinons la chrétienté à sa lumière, ainsi que notre propre position. Est-ce que nous marchons d’une manière conforme à cette vérité? Est-ce que nous la proclamons à la table du Seigneur, chaque premier jour de la semaine, comme c’est notre devoir sacré et notre précieux privilège de le faire? Ne disons pas qu’il se présente des difficultés de toute espèce, des pierres d’achoppement, des faiblesses chez ceux qui font profession de se réunir de la manière dont nous venons de parler. Tout cela, hélas! n’est que trop vrai, et nous devons nous y attendre. Satan met tout en œuvre pour nous aveugler, afin que nous ne percevions pas la grâce de Dieu envers son peuple; mais n’écoutons pas ses suggestions. Il y a toujours eu et il y aura toujours des difficultés à surmonter pour agir d’après la précieuse vérité de Dieu; l’une des principales se trouve peut-être dans la conduite inconsistante de ceux qui font profession de la pratiquer.

Mais il importe de faire une distinction entre la vérité et ceux qui la professent; entre le terrain et la marche de ceux qui l’occupent. Ils devraient être d’accord, mais ils ne le sont pas; et, par conséquent, nous sommes appelés à juger la conduite par le terrain et non le terrain par la conduite. Si nous voyions un agriculteur travailler d’après des principes que nous savons être excellents, tout en étant un mauvais agriculteur, que ferions-nous? Nous rejetterions sa manière de travailler, tout en maintenant les principes.

Il n’en est pas autrement relativement à la vérité qui nous occupe. Il y avait à Corinthe des hérésies, des schismes, des erreurs, du mal sous toutes les formes. Eh bien! la vérité de Dieu devait-elle être abandonnée comme un mythe, comme quelque chose de tout à fait impraticable? Fallait-il y renoncer? Les Corinthiens devaient-ils se réunir sur quelque autre principe? Devaient-ils s’organiser sur quelque nouveau terrain? Devaient-ils se grouper autour d’un autre centre? Non, Dieu en soit béni! Sa vérité ne devait pas être abandonnée un seul instant, quoique l’église de Corinthe fût déchirée par mille sectes et son horizon assombri par mille hérésies. Le corps de Christ était un, et l’apôtre déploie simplement à leurs yeux la bannière portant cette inscription bénie «Vous êtes le corps de Christ, et ses membres chacun en particulier» (1 Cor. 12:27).

Or ces paroles ne s’adressaient pas seulement à «l’assemblée de Dieu qui est à Corinthe», mais aussi «à tous ceux qui en tout lieu invoquent le nom de notre Seigneur Jésus Christ, et leur Seigneur et le nôtre». Par conséquent, la vérité de l’unité du corps est permanente et universelle. Tout vrai chrétien est appelé à la reconnaître et à la pratiquer, et toute assemblée de chrétiens, en quelque lieu que ce soit, devrait être l’expression locale de cette grande et si importante vérité.

On demandera, peut-être, comment on pouvait dire à une assemblée: «Vous êtes le corps de Christ?» N’y avait-il pas des saints à Éphèse, à Colosses et à Philippes? Sans doute, et si l’apôtre leur eût écrit sur ce même sujet, il aurait pu leur dire de même: «Vous êtes le corps de Christ», en tant qu’ils étaient l’expression locale du corps, et non seulement cela, mais en s’adressant à eux, il pensait à tous les saints jusqu’à la fin de la carrière terrestre de l’Église.

Mais nous devons nous rappeler que l’apôtre ne pouvait donner ce titre à aucun ordre de choses humain, ancien ou moderne; et, si même toutes ces diverses organisations, quel que soit le nom qu’on leur donne, étaient fondues en une, il ne pourrait les appeler «le corps de Christ». Ce corps est formé par tous les vrais croyants du monde entier. Si tous ne sont pas réunis sur ce terrain, seul divin, c’est à leur perte et au déshonneur de leur Seigneur. La précieuse vérité «Il y a un seul corps», subsiste tout de même, et c’est à cette mesure divine que doivent se mesurer toutes les associations ecclésiastiques et tous les systèmes religieux sous le soleil.

Il nous semble nécessaire d’étudier à fond le côté divin de la question de l’Église, afin de sauvegarder la vérité de Dieu, et aussi afin que le lecteur comprenne clairement que lorsque nous parlons de la ruine complète de l’Église, nous avons en vue le côté humain du sujet. C’est à celui-ci que nous revenons.

Il est impossible de lire le Nouveau Testament avec attention et de ne pas voir que l’Église, en tant que témoin responsable pour Christ sur la terre, a totalement et honteusement manqué à sa mission. On remplirait un volume si l’on voulait citer tous les passages à l’appui de cette assertion. Mais examinons les chapitres second et troisième de l’Apocalypse, où l’Église est vue sous le jugement. Nous avons, dans ces chapitres solennels, ce que nous pouvons appeler une histoire divine de l’Église. Sept assemblées sont choisies comme symboles des diverses phases de l’histoire de l’Église, depuis le jour où elle fut placée sur la terre avec sa responsabilité, jusqu’au moment où elle sera vomie de la bouche du Seigneur, comme quelque chose de parfaitement intolérable. Si nous ne discernons pas que ces deux chapitres sont prophétiques aussi bien qu’historiques, nous nous privons d’un vaste champ de précieuses instructions. Aucun langage humain ne pourrait exprimer toutes les richesses que nous avons recueillies dans ces chap. 2 et 3 de l’Apocalypse, considérés sous leur aspect prophétique.

Toutefois nous ne mentionnons maintenant ces richesses que comme les dernières preuves, parmi tant d’autres dans l’Écriture, à l’appui de notre thèse. Prenons l’adresse à Éphèse, cette même assemblée à laquelle l’apôtre Paul écrivit l’épître où il découvre, d’une manière si bénie, le côté céleste des choses, les desseins éternels de Dieu concernant l’Église — la position et la portion de l’Église acceptée en Christ, et bénie de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Lui. Là aucun manquement ne peut être trouvé. Tout procède de Dieu. Le conseil est de Lui; l’œuvre est de Lui. C’est sa grâce, sa gloire, sa toute-puissance, son bon plaisir; et tout cela, fondé sur le sang de Christ. Il n’est point là question de responsabilité. Les saints qui forment l’Église étaient «morts dans leurs fautes et dans leurs péchés», mais Christ est mort pour l’Église; il s’est placé judiciairement là où elle était moralement, et alors Dieu, dans sa grâce souveraine, a paru sur la scène et a ressuscité Christ d’entre les morts, et l’Église avec Lui — chose glorieuse! Ici tout est définitivement réglé. Nous voyons l’Église dans les lieux célestes, en Christ, non l’Église sur la terre pour Christ. C’est le corps «accepté», non le chandelier jugé. Si nous ne savons pas voir les deux côtés de cette grave question, nous avons encore beaucoup à apprendre.

Mais il y a le côté terrestre, aussi bien que le céleste; et c’est pourquoi, dans l’adresse judiciaire du chap. 2 de l’Apocalypse, nous avons des paroles solennelles telles que celles-ci: «J’ai contre toi que tu as abandonné ton premier amour».

Quelle différence! Rien de semblable dans l’épître aux Éphésiens; tandis que dans l’Apocalypse nous ne trouvons rien contre le corps, rien contre l’épouse, mais il y a quelque chose à reprocher au chandelier. Alors déjà la lumière s’était obscurcie. À peine était-elle allumée qu’il fallait employer des mouchettes.

Ainsi, dès le début, des symptômes de déclin se montraient à l’œil pénétrant de celui qui marchait au milieu des sept chandeliers, et lorsque nous arrivons au bout et considérons la dernière phase de la condition de l’Église, telle qu’elle est représentée par l’assemblée de Laodicée, il n’y a plus un seul point favorable; le cas est presque sans espoir. Le Seigneur se tient dehors, à la porte. «Voici, je me tiens à la porte, et je frappe». Ce n’est pas ici comme à Éphèse: «J’ai quelque chose contre toi». Tout l’état est mauvais. Toute l’assemblée professante va être rejetée. «Je vais te vomir de ma bouche». Il attend encore, car il est toujours lent à quitter le terrain de la grâce pour entrer sur celui du jugement. Cela nous rappelle le départ de la gloire au commencement d’Ézéchiel; elle marchait d’un pas lent et mesuré, comme regrettant de quitter la maison, le peuple et le pays. «Et la gloire de l’Éternel s’éleva de dessus le chérubin, et vint sur le seuil de la maison; et la maison fut remplie de la nuée, et le parvis fut rempli de la splendeur de la gloire de l’Éternel». «Et la gloire de l’Éternel sortit de dessus le seuil de la maison, et se tint au-dessus des chérubins». Et enfin: «Et la gloire de l’Éternel monta du milieu de la ville, et se tint sur la montagne qui est à l’orient de la ville» (Éz. 10:4, 18; 11:23). Que c’est touchant! Quel contraste entre ce départ retardé de la gloire, et sa rapide entrée dans la maison au jour de la dédicace de Salomon, en 2 Chr. 7:1. L’Éternel était prompt à entrer dans sa demeure au milieu de son peuple, mais lent à la quitter. Il en fut, pour ainsi dire, chassé par les péchés et l’impénitence invétérée de ce peuple insensé.

Il en est de même de l’Église. Nous voyons, au chap. 2 des Actes, de quelle manière rapide il entre dans sa maison spirituelle. Il vint comme un souffle violent et impétueux pour remplir toute la maison de sa gloire. Mais, au chap. 3 de l’Apocalypse, quelle est son attitude? Il est dehors. Oui, mais il frappe. Il s’attarde, non avec l’espoir d’une restauration en corps, mais pour le cas où «quelqu’un entendrait sa voix et lui ouvrirait la porte». Le fait qu’il est dehors, montre ce qu’est l’Église. Le fait qu’il frappe, montre ce qu’il est.

Lecteur chrétien, il est de la plus haute importance que vous compreniez bien ce sujet. Nous sommes submergés de tous côtés par de fausses notions quant à l’état actuel et à la destinée future de l’église professante. Nous devons les rejeter toutes avec une sainte fermeté, et nous en tenir scrupuleusement à l’enseignement de l’Écriture. Cet enseignement est aussi clair que le jour. L’église professante est en ruines et le jugement est à la porte. Lisez l’épître de Jude; lisez 2 Pierre 2 et 3, et la seconde épître à Timothée. Examinez attentivement ces passages solennels, et nous sommes assurés que cette étude vous prouvera infailliblement que la chrétienté n’a rien au-devant d’elle sinon la colère inflexible du Dieu Tout-Puissant. Son sort est prononcé dans cette courte, mais solennelle sentence de Romains 11: «Toi aussi, tu seras coupé».

Oui, tel est le langage de l’Écriture: «Coupé», «vomi». L’église professante a totalement failli en tant que témoin de Christ sur la terre. Il en a été de l’Église comme d’Israël, elle a abandonné la vérité même qu’elle était responsable de garder et de confesser. À peine les écrits du Nouveau Testament étaient-ils terminés, à peine les premiers ouvriers avaient-ils quitté le champ, que d’épaisses ténèbres se répandirent sur toute l’église professante. De quel côté que l’on se tourne ou que l’on feuillette les gros volumes des «Pères», comme on les appelle, on ne trouvera pas trace de ces grandes vérités caractéristiques de notre glorieux christianisme. Tout, tout avait été honteusement abandonné. Comme Israël, en Canaan, abandonna l’Éternel pour Baal et Ashtaroth, de même l’Église abandonna la précieuse parole de Dieu pour des fables puériles et de dangereuses erreurs. Ce déclin si rapide est des plus étonnants. Mais c’était précisément ce que l’apôtre Paul avait prédit aux anciens d’Éphèse: «Prenez donc garde à vous-mêmes, et à tout le troupeau au milieu duquel l’Esprit Saint vous a établis surveillants pour paître l’assemblée de Dieu, laquelle il a acquise par le sang de son propre Fils. Moi je sais qu’après mon départ il entrera parmi vous des loups redoutables qui n’épargneront pas le troupeau; et il se lèvera d’entre vous-mêmes des hommes qui annonceront des doctrines perverses pour attirer les disciples après eux» (Actes 20:28-30).

Quel tableau! Les saints apôtres de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ, remplacés presque immédiatement par des «loups redoutables» et par des propagateurs de doctrines perverses; l’Église tout entière plongée dans des ténèbres épaisses; la lampe de la révélation divine presque cachée aux regards; la corruption ecclésiastique sous toutes ses formes; la domination sacerdotale avec toutes ses terribles conséquences. Bref, l’histoire de l’Église — l’histoire de la chrétienté — est l’histoire la plus effroyable qui ait jamais été écrite.

Il est vrai que Dieu s’est toujours suscité des témoins. De siècle en siècle il a appelé, ici ou là, comme en Israël, des hommes pour proclamer sa vérité. Même au milieu des ténèbres les plus épaisses du moyen âge, une étoile paraît parfois au-dessus de l’horizon. Les Vaudois et d’autres encore purent, par la grâce de Dieu, s’en tenir à sa Parole, et confesser le nom de Jésus malgré la tyrannie et les cruelles persécutions de l’église romaine.

Puis vint l’époque du seizième siècle, où Dieu suscita Luther et ses bien-aimés compagnons d’œuvre, pour prêcher la grande vérité de la justification par la foi, et pour donner au monde le précieux livre de Dieu en langue moderne. Le langage humain est trop faible pour exprimer tous les bienfaits de cette époque mémorable. Des milliers d’âmes entendirent la bonne nouvelle du salut — l’entendirent, la crurent, et furent sauvées. Des milliers d’âmes qui avaient gémi longtemps sous le poids intolérable des superstitions romaines, accueillirent avec une profonde reconnaissance le message céleste. Des milliers s’abreuvèrent avec joie à ces sources inspirées, qui avaient été scellées pendant des siècles par l’ignorance et l’intolérance des papes. La lumière de la révélation divine, si longtemps voilée par la main de l’ennemi, put de nouveau jeter ses rayons au milieu des ténèbres, et des myriades se réjouirent à cette lumière céleste.

Mais, tout en bénissant Dieu pour tous les résultats glorieux de ce qu’on nomme ordinairement la Réformation, nous ne saurions y voir rien qui ressemble à un retour de l’Église à sa première condition. Loin de là. Luther et ses confrères, à en juger par leurs écrits, — quelque précieux qu’ils soient, — ne saisirent jamais la notion de l’Église, corps de Christ. Ils ne comprirent point l’unité du corps, ni la présence du Saint Esprit dans l’assemblée et son habitation en chaque croyant. Ils ne connurent pas la grande vérité du ministère dans l’Église, sa nature, sa source, sa puissance et sa responsabilité. Ils en restèrent toujours à l’idée que le ministère est basé sur une autorité humaine. Ils se taisent sur la vraie espérance de l’Église, savoir la venue de Christ pour son peuple — l’Étoile brillante du matin. Ils ne comprirent pas toute la portée des prophéties, et ne surent pas distribuer comme il faut la Parole de vérité.

Qu’on ne se méprenne pas, nous aimons la mémoire des réformateurs. Leurs noms nous sont chers et familiers. C’étaient des serviteurs de Christ, dévoués et bénis. Plût à Dieu qu’il y en eût beaucoup comme eux dans ces jours de papisme et de basse incrédulité! Nous ne le cédons à personne en amour et en estime pour Luther, Mélanchton, Calvin, Farel, Latimer et Knox. Ils furent des lumières brillantes en leur temps, et des milliers d’âmes béniront Dieu durant toute l’éternité de ce qu’ils ont vécu, prêché et écrit. Et si on les considère dans leurs vies privées et dans leurs ministères publics, ils font honte à beaucoup de chrétiens qui ont le privilège de connaître toute une série de vérités, que nous cherchons en vain dans les écrits volumineux des réformateurs.

Mais, en admettant tout cela, nous sommes néanmoins convaincus que ces honorés serviteurs de Christ ne saisirent point plusieurs des vérités spéciales et caractéristiques du christianisme, et par conséquent ne les prêchèrent, ni ne les enseignèrent; du moins nous ne trouvons pas ces vérités dans leurs écrits. Ils prêchèrent la précieuse vérité de la justification par la foi; ils donnèrent les Saintes Écritures au peuple; ils foulèrent aux pieds beaucoup de superstitions romaines. Ils firent tout cela, par la grâce de Dieu, et nous en bénissons le Père des miséricordes. Mais le protestantisme n’est pas le christianisme, et les églises nommées églises de la réformation, qu’elles soient nationales ou dissidentes, ne sont pas l’Église de Dieu, loin de là. Jetons un regard en arrière sur les dix-huit siècles écoulés, et malgré de soi-disant réveils, malgré les lumières brillantes qui ont lui de temps à autre sur l’horizon de l’Église, — lumières qui paraissaient d’autant plus vives par le contraste des ténèbres profondes qui les entouraient, — malgré les nombreuses manifestations de l’Esprit de Dieu, soit en Europe, soit en Amérique, au siècle passé et dans celui où nous sommes, malgré, dis-je, toutes ces choses, pour lesquelles nous bénissons Dieu, nous en revenons sans hésiter à notre assertion, savoir que l’église professante a fait naufrage, que la chrétienté descend rapidement la pente fatale qui mène aux ténèbres finales, que ces contrées favorisées, où la vérité évangélique a été prêchée, où les Bibles et les traités ont circulé par millions, seront couvertes de ténèbres épaisses, et tomberont dans une énergie d’erreur pour croire au mensonge.

Verra-t-on alors un monde converti? Non, mais une église jugée. Les saints de Dieu, dispersés dans la chrétienté, tous les vrais membres du corps de Christ, seront enlevés à la rencontre du Seigneur, — les saints endormis seront ressuscités, les vivants transmués en un instant, — et tous ravis en même temps pour être toujours avec le Seigneur. Alors le mystère d’iniquité se montrera en la personne de l’homme de péché, du méchant, de l’antichrist. Le Seigneur Jésus viendra, et tous ses saints avec Lui, pour exécuter le jugement sur la Bête, c’est-à-dire sur l’empire romain qui aura repris vie et sur l’antichrist; l’empire romain en Occident, le faux prophète en Orient.

Ce jugement sera un acte sommaire de jugement guerrier sans procès juridique quelconque, vu que soit la Bête, soit le faux prophète, seront trouvés en révolte ouverte et en opposition blasphématoire contre Dieu et contre l’Agneau. Ensuite aura lieu le jugement des nations vivantes, tel qu’il est rapporté en Matt. 25:31-46.

Dès lors, tout mal ayant été détruit, Christ régnera en justice et en paix pendant mille ans, — période heureuse et bénie, vrai sabbat pour Israël et pour toute la terre, — période marquée par ces deux grands faits Satan lié et Christ régnant. Faits glorieux, dont la seule mention fait déborder le cœur en louanges!

Mais, après sa captivité de mille ans, Satan sera délié, et il lui sera permis de faire encore un effort contre Dieu et contre son Christ. «Et quand les mille ans seront accomplis, Satan sera délié de sa prison; et il sortira pour égarer les nations qui sont aux quatre coins de la terre, Gog et Magog, pour les assembler pour le combat, eux dont le nombre est comme le sable de la mer1. Et ils montèrent sur la largeur de la terre, et ils environnèrent le camp des saints et la cité bien-aimée; et du feu descendit du ciel de la part de Dieu et les dévora. Et le diable qui les avait égarés fut jeté dans l’étang de feu et de soufre, où sont et la bête et le faux prophète; et ils seront tourmentés, jour et nuit, aux siècles des siècles» (Apoc. 20:7-10).

1 Le lecteur distinguera entre les Gog et Magog d’Apoc. 20, et ceux d’Éz. 38 et 39. Les premiers sont post-millénaires, les seconds anti-millénaires.

Ce sera le dernier effort de Satan, suivi de sa perdition éternelle. Ensuite, nous avons le jugement des morts, «petits et grands», de tous ceux qui sont morts dans leurs péchés, depuis les jours de Caïn. Scène terrible que rien ne saurait dépeindre!

Enfin nous voyons se dérouler devant nous l’état éternel les nouveaux cieux et la nouvelle terre où la justice habitera.

Tel est l’ordre des événements que nous trouvons tracés de la manière la plus claire dans les pages inspirées. Nous venons d’en donner un court résumé, en rapport avec les vérités qui nous ont occupés, vérités qui, nous le savons, ne sont point populaires; mais notre devoir est d’annoncer tout le conseil de Dieu et non pas de rechercher la popularité. Nous ne nous attendons pas à ce que la vérité de Dieu soit populaire dans la chrétienté; nous avons, au contraire, cherché à prouver que, tout comme Israël abandonna la vérité qu’il devait garder, de même l’église professante a laissé échapper toutes les grandes vérités qui caractérisent le christianisme du Nouveau Testament. Notre désir est de réveiller les cœurs de tous les vrais chrétiens, au sujet de ces vérités et de la responsabilité qui leur incombe, non seulement de les recevoir, mais de chercher à les réaliser mieux et à en faire une plus noble confession. Nous voudrions voir se lever nombreux, dans ces heures dernières de l’histoire terrestre de l’Église, des hommes doués d’une véritable puissance spirituelle, pour proclamer avec ardeur les vérités trop longtemps oubliées de l’évangile de Dieu. Veuille le Seigneur, dans sa grande bonté envers son peuple, susciter de tels hommes et les envoyer. Puisse le Seigneur Jésus frapper de plus en plus fort à la porte, afin que beaucoup d’âmes entendent et lui ouvrent, selon le désir de son cœur, et qu’elles goûtent la douceur d’une communion personnelle avec lui-même, en attendant sa venue!

Il n’y a aucune limite aux bénédictions de l’âme qui entend la voix de Christ et lui ouvre la porte; et ce qui est vrai pour une âme, l’est aussi pour des milliers. Mais soyons simples, sincères, reconnaissant notre faiblesse et notre néant, mettant de côté toute vaine prétention, ne cherchant pas être quelque chose, mais gardant la parole de Christ et ne reniant pas son nom, trouvant notre bonheur à rester à ses pieds, à nous nourrir de Lui, et notre joie à le servir en toutes choses. Alors nous cheminerons tous ensemble en bon accord et en amour, ayant notre centre commun en Christ, et pour but commun de faire avancer sa cause et connaître sa gloire. Plût à Dieu qu’il en fût ainsi, de nos jours, pour tous les chers enfants de Dieu! Quel aspect différent nous présenterions au monde! Le Seigneur veuille réveiller son peuple!

Le lecteur trouvera peut-être que nous nous sommes bien écartés du sixième chapitre du Deutéronome. Nous lui rappellerons, une fois pour toutes, que ce n’est point seulement ce que chaque chapitre renferme qui demande notre attention, mais aussi ce qu’il suggère. Et de plus, notre désir en écrivant est d’être conduit par l’Esprit de Dieu à développer certaines vérités qui peuvent s’appliquer aux besoins de tous nos lecteurs. Pourvu que le cher troupeau de Christ soit nourri, instruit et consolé, peu importe que ce soit par des explications complètes et suivies, ou par des fragments détachés.

Nous continuerons maintenant notre chapitre. Moïse ayant posé la grande vérité fondamentale, contenue au vers. 4: «Écoute, Israël: L’Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel», continue à enjoindre à la congrégation, ses devoirs sacrés envers cet Être béni. Il n’était pas seulement un Dieu, mais il était leur Dieu. Il avait daigné faire une alliance avec eux. Il les avait délivrés, portés comme sur des ailes d’aigle et amenés à Lui, afin qu’ils lui fussent un peuple et que Lui fût leur Dieu.

Relation précieuse! Mais il fallait qu’on rappelât à Israël quelle était la conduite qui convenait à une telle relation et qui ne pouvait résulter que d’un cœur aimant: «Tu aimeras l’Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur, et de toute ton âme et de toute ta force». C’est le secret de toute vraie religion pratique. Sans cela, tout est sans valeur pour Dieu: «Mon fils, donne-moi ton cœur». Lorsque le cœur est donné, tout va bien. On peut comparer le cœur au balancier d’une montre qui régule la force du ressort, lequel pousse les aiguilles dans leur marche tout autour du cadran. Si votre montre va mal, il ne suffit pas de changer la position des aiguilles, il faut toucher le balancier régulateur. Dieu demande un travail réel, venant du cœur. Il nous dit: «Enfants, n’aimons pas de parole, ni de langue, mais en action et en vérité» (1 Jean 3:18).

Comme nous devrions le bénir pour des paroles si touchantes Elles nous révèlent si bien son cœur aimant! Il nous aime en action et en vérité, et rien autre ne saurait le satisfaire, soit dans notre conduite envers lui, soit envers nos semblables. Tout doit procéder directement du cœur.

«Et ces paroles que je te commande aujourd’hui, seront sur ton cœur», à la source même de la vie. Tout ce qui est dans le cœur sort par les lèvres et dans la vie. Combien donc il importe que le cœur soit rempli de la parole de Dieu; tellement plein qu’il n’y ait plus de place pour les folies et les vanités de ce monde. Alors notre conversation sera toujours dans un esprit de grâce, assaisonnée de sel. «De l’abondance du cœur la bouche parle». Nous pouvons donc juger, par ce qui sort de la bouche, de ce qui est dans le cœur. La langue est l’organe du cœur — l’organe de l’homme. «L’homme bon, du bon trésor, produit de bonnes choses, et l’homme mauvais, du mauvais trésor, produit de mauvaises choses» (Matt. 12:34-35). Quand le cœur est réellement gouverné par la parole de Dieu, toute la conduite le montre et il faut qu’il en soit ainsi, car le cœur est le ressort principal de tout notre être moral; il est au centre de toutes ces influences morales qui gouvernent notre vie et dirigent notre carrière individuelle.

Dans toutes les pages du volume divin, nous voyons l’importance que Dieu attache à l’état du cœur vis-à-vis de Lui ou de sa Parole, ce qui est la même chose. Lorsque le cœur est vrai pour Dieu, tout va bien; s’il devient froid et négligent pour la vérité, tôt ou tard un éloignement manifeste du chemin de la justice s’en suivra. Il y a donc une grande force dans cette exhortation, adressée par Barnabas aux nouveaux convertis d’Antioche: «Il les exhortait tous à demeurer attachés au Seigneur de tout leur cœur (ou du propos de leur cœur)». (Actes 11:23).

Exhortation nécessaire, maintenant comme alors. Ce «propos du cœur» est précieux à Dieu. C’est ce que nous osons appeler le grand régulateur moral. Il donne au caractère chrétien un sérieux qui devrait être souhaité par chacun de nous. C’est l’antidote divin contre la tiédeur, la mort, le formalisme, toutes choses haïssables aux yeux de Dieu. La vie extérieure peut être correcte et les principes tout à fait orthodoxes, mais si le propos du cœur manque, si tout l’être moral ne s’attache pas avec amour à Dieu et à son Christ, tout le reste est sans valeur.

C’est par le cœur que le Saint Esprit nous enseigne. C’est pourquoi l’apôtre priait pour les saints à Éphèse, que «les yeux de leur cœur (cardias) fussent éclairés», et encore «que le Christ habite par la foi dans vos cœurs» (Éph. 1:18; 3:17).

Ainsi donc nous voyons l’harmonie parfaite de toute l’Écriture avec l’exhortation contenue dans notre chapitre: «Et ces paroles, que je te commande aujourd’hui, seront sur ton cœur». S’il les eût gardées, combien Israël aurait évité d’égarements, et surtout ce terrible péché national de l’idolâtrie dans lequel il retomba si souvent! Si les précieuses paroles de l’Éternel eussent trouvé leur place dans leur cœur, ils n’eussent pas eu peur de Baal ou d’Ashtaroth. En un mot, toutes les idoles des païens auraient été estimées pour ce qu’elles valaient, si la parole de l’Éternel avait été gardée dans le cœur d’Israël.

Remarquons ici comme tout cela est caractéristique du livre du Deutéronome. Il ne s’agit pas seulement ici de certaines observances religieuses, de sacrifices, de rites et de cérémonies. Tout cela y a sans doute sa place, mais ce n’est nullement la chose principale. LA PAROLE est l’objet capital dans le Deutéronome. C’est la parole de l’Éternel sur le cœur d’Israël. Le lecteur doit bien saisir cela, s’il désire avoir la clef du Deutéronome. Ce n’est point un livre de cérémonies; c’est un livre d’obéissance morale. Il enseigne, presque à chaque page, que le cœur qui aime, apprécie et honore la parole de Dieu, est prêt à tout acte d’obéissance, soit pour offrir un sacrifice, soit pour observer un certain jour. Il pouvait arriver qu’un Israélite se trouvât en un lieu ou au milieu de circonstances où il ne pouvait adhérer strictement aux rites et aux cérémonies de sa religion; mais il ne pouvait jamais être placé dans un milieu où il ne pût aimer, révérer la parole de Dieu, et lui obéir. Fût-il emmené captif aux bouts de la terre, rien ne pouvait lui enlever le précieux privilège de répéter ces paroles précieuses et d’agir en conséquence: «J’ai caché ta parole dans mon cœur, afin que je ne pèche pas contre toi».

Dans leur court commentaire, ces paroles renferment le grand principe du livre du Deutéronome, et nous pouvons ajouter le grand principe de la vie divine en tous temps, et en tous lieux. Il ne saurait jamais perdre sa force et sa valeur morales. Il subsiste à toujours. Il était vrai au temps des patriarches, pour Israël en Canaan, pour Israël dispersé jusqu’aux bouts de la terre, vrai pour l’Église entière, vrai pour chaque croyant individuel au milieu des ruines désolées de l’Église. En un mot, l’obéissance sera toujours le devoir sacré, le grand privilège de la créature — une obéissance simple, immédiate, à la parole du Seigneur. C’est là une grâce pour laquelle nous pouvons bénir sans cesse notre Dieu. Il nous a donné sa Parole, et il nous exhorte à laisser cette Parole habiter dans nos cœurs, et gouverner toute notre vie et toute notre conduite.

«Et ces paroles que je te commande aujourd’hui, seront sur ton cœur. Tu les inculqueras à tes fils, et tu en parleras, quand tu seras assis dans ta maison, et quand tu marcheras par le chemin, et quand tu te coucheras, et quand tu te lèveras et tu les lieras comme un signe sur ta main, et elles te seront pour fronteau entre les yeux, et tu les écriras aussi sur les poteaux de ta maison et sur tes portes».

Tout cela est magnifique: la parole de Dieu cachée dans le cœur, et découlant du cœur en douces instructions pour les enfants et en sainte conversation dans le sein de la famille; la parole brillant dans tous les actes de la vie journalière, de sorte que tous ceux qui passaient par les portes ou entraient dans la maison, pouvaient voir que la parole de Dieu était la bannière de tous ses habitants.

C’est ainsi qu’il en devait être jadis pour Israël, c’est ainsi qu’il en devrait être maintenant des chrétiens. En est-il ainsi? Est-ce de la sorte que nous enseignons nos enfants? Nous efforçons-nous toujours de rendre la parole de Dieu attrayante pour leurs jeunes cœurs? La voient-ils briller dans notre vie journalière, influencer notre humeur, notre caractère, nos habitudes, nos occupations, nos affaires? C’est ce que signifient ces expressions: «lier la Parole comme un signe sur la main et un fronteau entre les yeux»; «l’écrire sur les poteaux de la maison et sur les portes».

Il ne sert pas à grand-chose de nous efforcer d’enseigner la parole de Dieu à nos enfants, si nos vies ne sont pas gouvernées par elle. Ce précieux volume ne doit pas être un simple livre d’école qu’il s’agirait d’apprendre comme une tâche. Nos enfants devraient voir que nous vivons dans l’atmosphère de l’Écriture, et qu’elle forme le sujet de notre conversation dans nos moments de loisir, au sein de nos familles.

Mais n’avons-nous pas sujet d’être humiliés, lorsque nous réfléchissons au caractère habituel de nos conversations, soit à table, soit dans le cercle de la famille? Combien peu s’y trouvent les éléments de Deutéronome 6:7! Combien, au contraire, de causeries oiseuses et de plaisanteries qui ne sont point bienséantes! Que de médisances sur nos frères, nos voisins, nos connaissances! Que de babil futile!

D’où cela provient-il? Simplement de l’état de notre cœur. La parole de Dieu, les commandements et les préceptes de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ n’habitent pas dans nos cœurs, et par conséquent, ils ne sont pas remplis, et ne débordent pas en fleuves de grâce et d’édification.

Quelqu’un dira-t-il que le chrétien n’a pas besoin de considérer ces choses? Mais alors que signifie l’exhortation suivante: «Qu’aucune parole déshonnête ne sorte de votre bouche, mais celle-là qui est bonne, propre à l’édification selon le besoin, afin qu’elle communique la grâce à ceux qui l’entendent». Et celle-ci: «Soyez remplis de l’Esprit, vous entretenant par des psaumes et des hymnes et des cantiques spirituels, chantant et psalmodiant de votre cœur au Seigneur; rendant toujours grâces pour toutes choses, au nom de notre Seigneur Jésus Christ, à Dieu le Père» (Éph. 4:29; 5:18-20).

Ces paroles étaient adressées aux saints à Éphèse, et assurément elles nous concernent aussi. Il se peut que nous ne nous rendions pas compte quel degré nous manquons de maintenir notre conversation à un niveau spirituel. C’est dans nos familles et dans nos relations journalières, que le manque de spiritualité se remarque surtout. Aussi avons-nous grand besoin des paroles d’exhortation citées plus haut. Il est évident que le Saint Esprit prévit ce besoin et y pourvut dans sa grâce. Écoutez ce qu’il dit «aux saints et fidèles frères en Christ qui sont à Colosses»: «Que la paix du Christ, à laquelle aussi vous avez été appelés en un seul corps, préside dans vos cœurs; et soyez reconnaissants. Que la parole du Christ habite en vous richement, — en toute sagesse vous enseignant et vous exhortant l’un l’autre, par des psaumes, des hymnes, des cantiques spirituels, chantant de vos cœurs à Dieu dans un esprit de grâce» (Col. 3:15, 16).

Quel tableau délicieux de ce que devrait être toute vie chrétienne! C’est le développement de ce qui se trouve dans notre chapitre, où nous voyons l’Israélite au milieu de sa famille, la parole de Dieu découlant de son cœur en tendres instructions à ses enfants, où nous le voyons dans sa vie journalière, dans toutes ses occupations au dedans ou au dehors, sous l’influence bénie des paroles de l’Éternel.

Ayons donc un cœur rempli de la paix de Christ, de la parole de Christ, de Christ lui-même. Il ne faut rien moins que cela. Commençons avec le cœur, et quand il sera entièrement occupé des choses célestes, nous en aurons vite fini avec toute espèce de médisances et de plaisanteries.

«Et il arrivera, quand l’Éternel, ton Dieu, t’aura introduit dans le pays qu’il a juré à tes pères, à Abraham, à Isaac et à Jacob, de te donner: de grandes et bonnes villes que tu n’as pas bâties, et des maisons pleines de tous biens que tu n’as pas remplies; et des puits creusés que tu n’as pas creusés, des vignes et des oliviers que tu n’as pas plantés; et que tu mangeras, et que tu seras rassasié; alors prends garde à toi, de peur que tu n’oublies l’Éternel qui t’a fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude» (vers. 10-12).

Au milieu de toutes les bénédictions de la terre de Canaan, ils devaient se souvenir de Celui qui les avait tirés de la maison de servitude. Ils devaient se rappeler aussi que toutes ces choses leur étaient données gratuitement. Le pays et tout ce qu’il contenait devenait leur partage, en vertu des promesses de Dieu à Abraham, à Isaac et à Jacob. Les villes bâties, les maisons remplies, les puits creusés, les vignes et les oliviers prêts pour la récolte, tout était don gratuit de la grâce souveraine. Tout ce qu’ils avaient à faire, c’était de prendre possession avec une foi simple, et de garder à toujours dans leurs cœurs le souvenir du tendre Donateur. Ils devaient penser à Lui et trouver dans son amour le vrai motif d’une vie d’obéissance filiale. De quelque côté qu’ils tournassent leurs regards, ils voyaient les preuves de sa grande bonté, les fruits abondants de son amour merveilleux. Chaque ville, chaque maison, chaque puits, chaque vigne et chaque olivier leur parlaient de la grâce de l’Éternel et leur offraient la preuve évidente de sa fidélité inviolable à sa promesse.

«Tu craindras l’Éternel, ton Dieu, et tu le serviras, et tu jureras par son nom. Vous n’irez point après d’autres dieux, d’entre les dieux des peuples qui seront autour de vous; car l’Éternel, ton Dieu, qui est au milieu de toi, est un Dieu jaloux de peur que la colère de l’Éternel, ton Dieu, ne s’embrase contre toi, et qu’il ne te détruise de dessus la face de la terre» (vers. 13-15).

Deux grands motifs sont placés, dans notre chapitre, devant la congrégation: «l’amour», au vers. 5, et la «crainte», au vers. 13. Nous trouvons ces motifs dans toute l’Écriture, et on ne saurait leur donner trop d’importance comme mobiles de la vie et de la conduite du chrétien. «La crainte de l’Éternel est le commencement de la sagesse». Nous sommes exhortés à être «tout le jour dans la crainte de l’Éternel» (Prov. 9:10; 23:17). C’est le refuge moral contre le mal. «Et il dit à l’homme: Voici, la crainte du Seigneur c’est là la sagesse; et se retirer du mal est l’intelligence» (Job 28:28).

Le livre divin abonde en passages qui montrent la grande importance de la crainte de Dieu. «Comment», dit Joseph, «ferais-je ce grand mal, et pécherais-je contre Dieu?» Le chrétien, qui marche habituellement dans la crainte de Dieu, est préservé de commettre toute espèce de mal. La réalisation constante de la présence divine doit être une protection efficace contre toute tentation. Que de fois nous voyons la présence d’un chrétien spirituel, mettre un frein à la légèreté et à la folie; et si telle peut être l’influence d’un de nos semblables, combien plus puissante doit être celle de la présence de Dieu réalisée par une âme?

Lecteur chrétien, efforçons-nous de vivre comme étant en la présence immédiate de Dieu; alors nous serons préservés du mal sous mille formes diverses; nous y sommes exposés journellement, et nos dispositions nous y poussent. La pensée que les yeux de Dieu sont sur nous, aurait sur nos vies et nos paroles une influence beaucoup plus puissante que la présence de tous les saints sur la terre et que celle de tous les anges du ciel. Cette crainte de l’Éternel, dont l’Écriture parle tant, deviendrait pour nous un rempart contre toute mauvaise pensée ou action, contre tout ce qui est mal, quelle qu’en soit la forme.

Nous vivons, nous nous mouvons, et nous sommes peu en la présence de Dieu (Actes 17:28). Si nous nous rappelions que Dieu nous voit, et qu’il entend chacune de nos paroles, qu’il connaît chacune de nos pensées, chacun de nos actes, comme nous nous conduirions différemment!

C’est alors que nous pourrons montrer la vaste influence de l’amour qui nous «étreint». Nous entrerons dans la sainte activité que cet amour produit toujours. «L’amour du Christ nous étreint», dit l’apôtre, «en ce que nous avons jugé ceci, que si un est mort pour tous, tous donc sont morts, et qu’il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité» (2 Cor. 5:14-15).

Plût à Dieu que tout cela fût plus pleinement réalisé parmi nous, et que la crainte et l’amour de Dieu fussent continuellement dans nos cœurs avec leur puissance sanctifiante! Alors notre vie journalière serait à sa louange et en bénédiction pour tous ceux avec lesquels nous sommes appelés à être en contact.

Le vers. 16 de notre chapitre demande une attention toute spéciale. «Vous ne tenterez point l’Éternel, votre Dieu, comme vous l’avez tenté à Massa». Ces paroles furent citées par notre Seigneur, lorsqu’il fut tenté par Satan à se jeter du haut du temple: «Alors le diable le transporte dans la ville sainte, et le place sur le faîte du temple, et lui dit: Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas, car il est écrit: Il donnera des ordres à ses anges à ton sujet, et ils te porteront sur leurs mains, de peur que tu ne heurtes ton pied contre une pierre» (Matt. 4:5, 6).

Ce passage est très remarquable. Il prouve que Satan peut citer l’Écriture, lorsque cela lui convient. Mais il omet une clause importante: «De te garder en toutes tes voies». Or il n’entrait point dans les voies de Christ de se jeter du faîte du temple. Ce n’était pas le chemin du devoir. Il n’avait pas reçu de commandement de Dieu à ce sujet, et, par conséquent, il refuse de le faire. Il n’avait pas besoin de tenter Dieu, de le mettre à l’épreuve. Il avait, comme homme, la confiance en Dieu la plus entière, la plus grande assurance en sa protection.

De plus, il n’allait pas quitter le sentier du devoir afin de se convaincre si Dieu aurait soin de lui; et cela nous enseigne une importante leçon. Nous pouvons toujours compter sur la protection de Dieu, tant que nous sommes sur le chemin du devoir. Mais si nous choisissons notre propre route, si nous recherchons notre plaisir ou notre intérêt, c’est une coupable présomption que de dire que nous comptons sur Dieu.

Sans doute, notre Dieu est plein de grâce et d’amour et ses compassions sont sur nous, lors même que nous nous écartons du chemin du devoir; mais cela ne touche en rien ce que nous avançons, savoir que nous ne pouvons compter sur la protection divine que lorsque nous marchons dans le sentier de l’obéissance. Si un chrétien expose sa vie en escaladant les Alpes simplement pour son plaisir, a-t-il le droit de croire que Dieu prendra soin de lui? Que sa conscience réponde. Si Dieu nous appelle à traverser un lac en tourmente pour aller prêcher l’Évangile; s’il nous ordonne de traverser les Alpes en vue d’un service spécial à lui rendre, alors, assurément, nous pouvons nous confier à sa main puissante pour nous protéger contre tout mal. Le grand point, pour chacun de nous, c’est d’être trouvé dans le chemin du devoir. Il se peut qu’il soit étroit, rude et solitaire, mais il n’en est pas moins ombragé par les ailes du Tout-Puissant, et illuminé par la lumière de sa face.

Avant de quitter le sujet suggéré par le vers. 16, remarquons ce fait intéressant que notre Seigneur, dans sa réponse à Satan, ne fait aucune remarque sur sa fausse interprétation du Ps. 91:11. Au lieu de dire à l’ennemi: Tu as omis une clause importante du passage que tu viens de rapporter, il cite simplement un autre passage, comme faisant autorité pour sa propre conduite. C’est de cette manière qu’il vainquit le tentateur et qu’il nous laissa un exemple béni.

Remarquons encore que le Seigneur Jésus ne vainquit pas Satan par son pouvoir divin. S’il en eût été ainsi, il ne pourrait être un exemple pour nous. Mais lorsque nous le voyons, comme homme, se servir de la Parole seule pour arme, et par elle remporter la victoire, nos cœurs sont encouragés et consolés, et nous apprenons comment nous devons, dans notre sphère individuelle, agir et résister aux tentations. L’homme Christ Jésus vainquit en se confiant simplement en Dieu et en obéissant à sa Parole.

Fait rempli d’encouragement et de consolation pour nous! Satan ne pouvait rien sur Celui qui ne voulait agir que sur l’autorité divine et par la puissance de l’Esprit. Jésus ne fit jamais sa propre volonté, quoique, nous le savons, cette volonté fut absolument parfaite. Il descendit du ciel, ainsi, qu’il nous le dit lui-même en Jean 6, non pour faire sa volonté, mais la volonté du Père qui l’avait envoyé. Du commencement à la fin, il fut un serviteur parfait. Sa règle de conduite était la parole de Dieu, sa puissance pour agir était le Saint Esprit; son seul motif d’action, la volonté de Dieu; par conséquent le prince de ce monde n’avait rien en Lui. Satan, avec toutes ses ruses, ne pouvait lui faire quitter le chemin de l’obéissance ou la place de dépendance.

Lecteur chrétien, souvenons-nous que notre Seigneur et Maître nous a laissé un exemple, afin que nous suivions ses traces. Puissions-nous les suivre avec zèle, pendant le peu de temps qui nous reste, avec l’aide du Saint Esprit, comprendre davantage que nous sommes appelés à marcher comme Jésus a marché! Il est notre grand modèle en toutes choses. Étudions-le mieux, afin de le reproduire plus fidèlement.

Nous terminerons cette longue section, en vous priant de lire attentivement les versets 17 à 25 du chapitre qui vient de nous occuper; ce passage, d’une puissance, d’une plénitude et d’une profondeur remarquable, est aussi très caractéristique du livre tout, entier du Deutéronome.

La parole de Dieu est placée devant l’âme dans chaque page, dans chaque paragraphe de ce livre. C’est le grand sujet de tous les discours du législateur et celui qui lui tient le plus au cœur. Son but est de glorifier la parole de Dieu sous tous ses aspects, soit sous la forme de témoignages, de commandements, de statuts ou d’ordonnances, et de démontrer l’importance morale, l’urgente nécessité d’une obéissance entière, complète et zélée, de la part du peuple. «Vous garderez soigneusement les commandements de l’Éternel, votre Dieu». Et plus loin: «Tu feras ce qui est droit et bon aux yeux de l’Éternel».

Nous voyons ici se dérouler devant nos yeux ces principes éternels qu’aucun changement de dispensation, de milieu, ou de circonstances, ne peut altérer. «Ce qui est droit et bon» sera toujours d’une application universelle et permanente. Cela nous rappelle les paroles de l’apôtre Jean à son ami bien-aimé Gaïus. «Bien-aimé, n’imite pas le mal, mais le bien». Il se pouvait que l’assemblée fût dans un triste état, que beaucoup de choses affligeassent le cœur de Gaïus; Diotrèphe se comportait d’une manière impardonnable envers le vénérable apôtre et envers d’autres; tout cela était vrai et il se pouvait qu’il y eût des choses pires encore. Que devait faire Gaïus? Simplement imiter ce qui était droit et bon; ouvrir son cœur, sa main et sa maison à tous ceux qui apportaient la vérité; chercher de toute manière à aider la cause de Christ.

C’est aussi ce que doit faire tout vrai disciple de Christ, en toutes circonstances. Il se peut que nous soyons en petit nombre, peut-être même presque seuls, mais n’importe; nous devons imiter ce qui est bon, coûte que coûte. Nous devons nous retirer de l’iniquité, nous purifier des vases à déshonneur, fuir les convoitises de la jeunesse, nous détourner des professants sans vie; puis, «poursuivre la justice, la foi, l’amour et la paix». Dans l’isolement? Non, mais «avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur» (2 Tim. 2:22). Je puis me trouver seul pour un temps; mais il ne peut y avoir d’isolement aussi longtemps que le corps de Christ est sur la terre, et jusqu’à ce qu’il vienne nous prendre. Nous pouvons donc toujours espérer de trouver ici ou là des âmes qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur; c’est notre devoir de les chercher, et les ayant trouvées, de marcher avec elles dans une sainte communion «jusqu’à la fin».