2 Timothée

Chapitre 1er

V. 1-2

Paul, apôtre de Jésus Christ par la volonté de Dieu, selon la promesse de la vie qui est dans le Christ Jésus, à Timothée, mon enfant bien-aimé: Grâce, miséricorde, paix, de la part de Dieu le Père et du Christ Jésus notre Seigneur.

Il semble que ce terme: «par la volonté de Dieu», terme que l’on retrouve dans les épîtres aux Corinthiens, aux Éphésiens et aux Colossiens, acquière ici une force particulière par les circonstances que l’apôtre traverse. Sa volonté, à lui, n’y est pour rien et il y trouve un sujet d’entière confiance dans un temps où l’on cherchait à mettre en question s’il ne s’était pas trompé sur son apostolat. Mais lui, s’appuie sur cette certitude. Qu’il soit apôtre en liberté ou dans les chaînes, en captivité mitigée ou sévère, comme ici, il n’en est pas moins «apôtre par la volonté de Dieu». Son apostolat s’était exercé jadis en voyage; par la prédication au milieu des populations, dans les campagnes et dans les villes; puis en prison, soit par la parole écrite, soit en s’adressant oralement à ses compatriotes ou à ses juges; dans un temps de prospérité spirituelle pour l’Église, ou, comme ici, dans un temps de déclin; rien ne pouvait changer ce grand fait qu’il était apôtre par la volonté de Dieu et que Dieu dirigeait à Sa volonté toutes les circonstances de sa carrière. Or si son apostolat n’avait pas été par la volonté de Dieu, quand le témoignage, confié à l’Assemblée, était en train de disparaître, dans quel état moral ne serions-nous pas aujourd’hui, n’ayant pas la parole de cet apôtre pour nous enseigner le chemin agréable à Dieu en un temps de ruine 1 Toute la puissance de sa mission subsistait en un temps décrit dans cette seconde épître à Timothée; à bien plus forte raison en des jours comme les nôtres où l’activité même de l’apôtre est placée sous nos yeux dans cette parole infaillible, sortie par l’Esprit de Dieu de sa plume.

D’une manière générale l’apostolat de Paul avait pour but de porter le nom de Christ «devant les nations, et les rois, et les fils d’Israël» (Actes 9:15); aussi Paul est-il appelé, comme en d’autres épîtres: «Apôtre de Jésus Christ». Ce seul nom caractérisait le sujet tout entier de sa mission. En rapport avec ce nom, Paul portait l’Évangile de Dieu devant les hommes, Évangile ayant pour contenu: la ruine irrémédiable du vieil homme; une nouvelle nature communiquée à l’homme par la foi en Christ; une vie nouvelle, par le Saint Esprit, en Christ ressuscité; la justification, la paix, la liberté, la gloire — et tout cela en contraste avec Israël et la loi. Mais en outre cet apostolat, en contraste avec celui des autres apôtres, avait pour but spécial l’Assemblée, formée en un corps avec son Chef glorieux dans le ciel, par la descente du Saint Esprit; l’Assemblée bâtie par Christ; l’Assemblée enfin, maison de Dieu confiée à la responsabilité de l’homme.

Cependant le passage que nous venons de lire ne nous parle aucunement, comme d’autres épîtres, du sujet de l’apostolat de Paul, sujet que nous venons de mentionner. Il remonte aussi loin que possible, dans l’éternité passée, pour nous en montrer le caractère. Cet apostolat est «selon la promesse de la vie qui est dans le Christ Jésus», vie que l’apôtre possédait. Le caractère de son apostolat n’était donc ni la puissance, ni les dons miraculeux, mais la possession d’une vie qui était dès les temps éternels, d’une vie établie pour l’éternité. Quand tout est ébranlé, ce fondement ne peut l’être; il donnait une assurance absolue à Paul. Cette promesse de la vie est bien antérieure aux promesses dont Abraham était le dépositaire. Elle est dans le Christ Jésus, et c’est en Lui seul qu’on peut trouver cette vie. Cela signifie que tous les hommes sont sous la sentence de mort et que cette sentence est abolie en Christ. Quiconque a reçu le Christ par la foi possède cette vie, don suprême de Dieu. Aucune incertitude quant à sa possession! C’est une promesse à laquelle Dieu ne peut être que fidèle. Mais ce mot la promesse ne signifie pas que ce soit une chose future. Au contraire, c’est une chose accomplie, actuelle et éternelle, comme nous le verrons au v. 10. La vie promise nous appartient. C’est Christ en nous et nous en Lui. Elle rendait le caractère de l’apôtre absolument stable et inébranlable, quelle que fût la ruine de tout ce qu’il avait édifié.

«À Timothée, mon enfant bien-aimé», est une expression particulière de tendresse, plus intime encore que: «Mon véritable enfant dans la foi» de 1 Tim. 1:2, ou que: «mon véritable enfant selon la commune foi» de Tite 1:4. Timothée, caractère tendre, mais cœur facilement ébranlé et aussi facilement découragé, avait besoin de cette marque toute particulière d’affection, mais en avait aussi besoin afin d’être capable de recevoir les exhortations que l’apôtre lui adressait, plus instamment encore que dans la première épître. Les dangers de la position de Timothée (nous ne disons pas de sa mission, car il n’est pas prouvé que l’apôtre lui adressât cette épître à Éphèse) s’étaient considérablement accrus dans l’intervalle, car plusieurs années s’étaient écoulées entre les deux épîtres, et Paul lui-même réalisait, pendant cette seconde captivité à Rome, que le temps de son départ était arrivé. «Je sers déjà de libation», disait-il, libation pareille à celles qu’on faisait après le sacrifice (Ex. 29:40).

 

V. 3-4

Je suis reconnaissant envers Dieu, que je sers dés mes ancêtres avec une conscience pure, de ce que je me souviens si constamment de toi dans mes supplications, nuit et jour (désirant ardemment de te voir, me souvenant de tes larmes, afin que je sois rempli de joie).

Paul dit ici: «Je suis reconnaissant envers Dieu». Il ne parle, ni du Père, ni du Fils, mais du Dieu d’Israël que ses ancêtres avaient servi. Cela va plus loin, sans doute, que le service des «douze tribus» dont il parle en Actes 26:7. Ses pensées, presque à la veille de son sacrifice, peuvent se reporter vers la foi de ses ancêtres. Lui qui avait tant dû combattre pour faire triompher l’Évangile sur le judaïsme, il peut maintenant dire ce que la religion légale avait pu présenter d’agréable à Dieu. La foi qui saisissait la révélation de Dieu était une foi qui sauvait: Abraham crut Dieu. Les ancêtres de Paul étaient de vrais fils d’Abraham. L’apôtre partageait leur foi, bien qu’une tout autre révélation fût venue s’y ajouter. Quant à Paul, il pouvait servir Dieu «avec une conscience pure», ce que le service de Dieu ne pouvait jamais produire sous la loi. Il fallait l’aspersion du sang de Christ pour purifier le cœur «d’une mauvaise conscience» (Héb. 10:22). Il fallait avoir été purifié une fois, par un autre sacrifice que les sacrifices lévitiques, pour n’avoir plus aucune conscience de péchés (Héb. 10:2). La loi ne pouvait le faire qu’en type (Ex. 29:21), mais jamais en réalité. Maintenant l’apôtre, au moment de quitter la scène, peut jeter les yeux en arrière et se rappeler avec joie que ses ancêtres avaient une place dans les bénédictions futures et qu’il allait les retrouver dans le repos céleste où leurs âmes l’avaient devancé.

Paul était reconnaissant envers Dieu de ce qu’il se souvenait constamment de Timothée dans ses supplications. Ainsi le souvenir lui-même était un don de la grâce de Dieu. Sans doute, la grande affection de Paul pour son enfant dans la foi l’empêchait absolument d’oublier ce dernier, mais il était affermi dans la certitude que Dieu lui-même s’intéressait à l’état de Timothée dont il connaissait les besoins, les craintes, les dangers, et qu’Il présentait constamment ce sujet aux prières que son apôtre lui adressait nuit et jour.

Le désir de son cœur le portait aussi ardemment vers la possibilité de revoir Timothée. Cela faisait partie de ses supplications, mais il le demandait d’autant plus qu’il se souvenait des larmes de son enfant bien-aimé quand il s’était vu séparé de son protecteur au moment d’une seconde capture, suivie de ce second emprisonnement. En effet, quel brisement de cœur Timothée avait dû éprouver, réalisant, ou craignant seulement peut-être, que ce fidèle serviteur de Christ, son père dans la foi, allât au devant du supplice. Toutes les recommandations de Paul dans cette épître nous prouvent que Dieu lui a effectivement accordé de revoir son disciple bien-aimé. Au milieu de ces sombres et douloureuses perspectives, le Seigneur préparait à son fidèle apôtre cette réunion qui, à elle seule, devait lui apporter une plénitude de joie.

 

V. 5

Me rappelant la foi sincère qui est en toi, et qui a d’abord habité dans ta grand-mère Loïs et dans ta mère Eunice, et, j’en suis persuadé, en toi aussi.

En se souvenant de Timothée, de sa tendresse, des preuves d’amour qu’il en avait reçues, l’apôtre se souvenait en même temps des femmes de foi que son disciple avait eues dans sa famille. Ce souvenir dépassait sans doute en valeur celui de ses propres ancêtres. Il avait été frappé de la foi sincère rencontrée jadis en Timothée quand il fit sa connaissance à Lystre (Actes 16:1-3), foi qui, dès lors, n’avait pas varié, mais il avait trouvé dans cette famille, du côté des femmes, mère et grand-mère, un milieu favorable au développement de la piété de Timothée, piété qui existait chez lui, l’apôtre en était persuadé, au moment même de leur rencontre, car alors Timothée était déjà disciple. Ce souvenir était très doux à Paul, maintenant qu’il arrivait au bout de sa carrière. C’est au moment où notre service et notre témoignage sont terminés, où le présent n’a plus besoin d’exiger toute notre énergie pour nous adonner complètement à l’œuvre, qu’il est très précieux d’arrêter nos regards sur le passé et sur les affections naturelles. Nous en trouvons l’exemple parfait sur la croix où nous entendons ces paroles de la bouche du Sauveur: «Femme, voilà ton fils»; et encore: «Voilà ta mère»; tandis qu’au milieu de l’exercice de son ministère le Seigneur disait: «Qu’y a-t-il entre moi et toi, femme?» ou bien: «Qui est ma mère et qui sont mes frères?» Jamais le service ne refroidit le cœur et les affections, mais, précisément parce qu’elles sont si douces, nous ne devons rien enlever à la tâche qui nous est assignée, pour nous laisser retenir par les délices des relations naturelles, comme il nous est dit dans les Proverbes: «Mon fils, mange du miel, car il est bon». «Manger beaucoup de miel n’est pas bon». (Prov. 24:13; 25:27).

 

V. 6

C’est pourquoi je te rappelle de ranimer le don de grâce de Dieu qui est en toi par l’imposition de mes mains.

C’est en vertu de la «foi sincère» qui est en lui que l’apôtre exhorte Timothée à ranimer le don de grâce qu’il possède, c’est-à-dire à ne pas le laisser s’éteindre. Un don peut s’éteindre par manque d’usage. Le don de Timothée avait pour but l’exposition de la Parole, l’exhortation, l’enseignement (1 Tim. 4:13). Il lui était conféré afin de combattre les enseignements sataniques qui commençaient à s’introduire dans l’Église. (1 Tim. 4:1). Ce don avait d’autres faces, sans doute, mais était en somme assimilable à celui de pasteur et docteur en Éph. 4:11. Au chap. 4:14 de la première épître à Timothée, ce dernier est exhorté à ne pas le négliger. Il pouvait y être enclin à cause d’une certaine timidité de caractère qui l’aurait porté à céder devant ceux qui auraient pris occasion de sa jeunesse pour le mépriser et se faire valoir eux-mêmes. Nous devons estimer comme très précieux un don que Dieu nous a départi, mais nous ne le ferons que dans la proportion où nous ne nous estimerons pas nous-mêmes. Une vraie humilité caractérisera nécessairement celui qui réalise que son don provient uniquement de Dieu. L’humilité de Timothée le portait à négliger plutôt son don qu’à s’en parer, mais cela aussi constitue un danger réel. Ainsi l’on peut trouver, d’un côté l’orgueil de la chair qui s’attribue le don, de l’autre une certaine crainte charnelle qui nous empêcherait de le faire valoir. Défiance de soi, timidité naturelle, sont encore le moi. Nous estimer moins que peu de chose, c’est-à-dire rien du tout, nous met en garde contre le danger de n’estimer le don que peu de chose, au lieu de l’estimer bien haut, comme tout ce qui vient de Christ.

Mais, dans cette épître, Timothée courait un autre danger. En présence du triste état de l’Église, du mépris auquel était exposé l’apôtre bien-aimé, du peu de résultat qu’avaient eu ses exhortations et son enseignement, d’un mal grandissant, de telle manière que les porteurs du témoignage étaient attaqués, livrés à l’opprobre et qu’avec eux le témoignage lui-même semblait près de s’éteindre, il pouvait paraître que l’exercice d’un don était désormais inutile. De là l’exhortation de l’apôtre à le ranimer. Quelles que soient les circonstances, notre responsabilité à l’égard de ce que Dieu nous a confié, reste pleine et entière et nous n’avons qu’à nous acquitter de notre tâche en regardant à Lui, sans tenir compte de l’état de ruine de l’Église et du témoignage. S’agit-il de l’enseignement, enseignons; des soins du troupeau, exerçons le pastorat sans nous préoccuper du nombre grand ou petit des brebis. L’esprit de crainte (v. 7) n’est pas l’Esprit saint, mais est simplement la chair; il est dangereux, quoique moins peut-être que la confiance en soi. Il paralyse notre énergie spirituelle, tandis que la confiance en soi substitue l’énergie de la chair à celle de l’Esprit de Dieu.

 

V. 7

Car Dieu ne nous a pas donné un esprit de crainte, mais de puissance, et d’amour, et de conseil.

Timothée devait donc ranimer son don, car Dieu, dit l’apôtre, ne nous a pas donné un esprit de crainte. La crainte (à part, cela va sans dire, la crainte de Dieu) et l’Esprit sont incompatibles. La crainte hésite devant la tâche, est timide là où il faudrait la décision, le courage, la foi, la hardiesse qui surmonte les obstacles, et qui tient la tourmente de la mer pour non avenue, parce que le Seigneur est dans la nacelle avec nous, produisant un grand calme au moment où les vagues menacent de nous engloutir.

En parlant de l’esprit de crainte, l’apôtre ramène Timothée au don du Saint Esprit, à la bénédiction initiale ayant son origine à la Pentecôte. La puissance de l’Esprit que nous possédons reste la même, et ne change jamais aux plus mauvais jours de l’Église. Nous pouvons lui mettre des obstacles, le contrister, en sorte qu’il soit obligé de rester inactif, mais lui n’est nullement affaibli. Il n’y a aucune raison en lui-même pour ne pas remplir le vase dans lequel il a été versé. Son silence provient de notre mondanité et de ce que nous maintenons dans nos cœurs des idoles auxquelles le Saint Esprit ne peut permettre d’exister à côté de lui, en nous qui sommes son temple.

Mais ce n’est pas seulement la puissance; c’est aussi l’amour qui caractérise le Saint Esprit dont nous sommes les vases. Par la puissance seule les âmes ne sont pas attirées à Christ; c’est l’amour qui les attire. La puissance peut précipiter Satan du ciel, comme un éclair, elle peut nous assujettir les mauvais esprits, convaincre les contredisants, etc., etc. L’Esprit d’amour agit comme un aimant. C’est lui qui dit: «Venez à moi, vous qui êtes travaillés et chargés»; c’est lui qui nous ouvre le ciel et y inscrit nos noms pour toujours; lui qui nous révèle le cœur du Père et le cœur du Fils; lui qui dit: Aie bon courage; ne crains pas; ne pleure pas!

Timothée avait aussi à se souvenir que l’Esprit, donné de Dieu, est un Esprit de conseil ou de sobre bon sens. Nous avons besoin d’une direction, après être devenus les vases du Saint Esprit. Il ne s’agit plus, dans le temps de ruine qui caractérise l’Église, de manifestations frappantes de puissance, de dons miraculeux qui caractérisaient, à son début, le ministère des apôtres et des premiers disciples. La puissance est occupée aujourd’hui à résister à l’envahissement toujours croissant du mal, à tenir ferme sur les positions acquises, à vaincre en nageant contre le courant qui emporte rapidement la chrétienté vers l’apostasie finale: Il n’est question pour nous, ni d’activité prétentieuse, ni de vanterie, ni d’exaltation mystique qui n’est au fond que l’adoration de soi-même; non, mais il faut un Esprit qui pèse calmement les circonstances sous le regard du Seigneur, qui ne prétende pas à de grandes choses (ce serait renier l’affaissement général, la ruine humiliante à laquelle nous avons tous participé), qui juge enfin équitablement selon les circonstances et agit dans le cercle restreint qu’un sobre bon sens trace autour de nous. Cet esprit ne tremble pas, n’est pas saisi de crainte vis-à-vis des résultats de son action; il va paisiblement en avant dans le chemin uni que Dieu lui a tracé, sans grande manifestation, sans grand fracas, mais développant d’autant plus ses caractères de puissance et d’amour, qu’il le fait dans les circonstances de la vie moyenne et journalière où il est appelé à agir.

Nous trouvons, comme nous l’avons remarqué autre part, ces trois caractères de l’Esprit traités tout au long dans la première épître aux Corinthiens: au chap. 12, l’Esprit de puissance, au chap. 13, l’Esprit d’amour, au chap. 14, l’Esprit de Conseil. Ce dernier a pour résultat que nous ne sommes pas des enfants, mais des hommes faits dans nos entendements (14:20); il n’expose pas les enfants de Dieu à être nommés des fous par le monde (v. 23). Il exige que quelqu’un interprète quand un frère parle en langue (v. 13), il assujettit les esprits des prophètes aux prophètes (v. 32); il s’oppose à toute action des femmes dans l’Assemblée (v. 35).

 

V. 8

N’aie donc pas honte du témoignage de notre Seigneur, ni de moi son prisonnier, mais prends part aux souffrances de l’Évangile, selon la puissance de Dieu.

Cette épître contient, comme nous l’avons déjà remarqué, beaucoup de sujets dont nous aurons à nous occuper tour à tour. 1° La description du mal qui caractérise la maison de Dieu au temps de la fin. 2° Les ressources que les fidèles possèdent pour marcher d’une manière digne de Dieu en le glorifiant au milieu de ce mal. 3° Les expériences personnelles de l’apôtre dans un tel état de choses. 4° Les exhortations à Timothée pour s’y conduire personnellement d’une manière digne de Dieu. C’est de ces dernières, commencées déjà au v. 6, que nous allons continuer à nous occuper.

Le fait est que, dans les derniers jours de l’apôtre, le témoignage chrétien était en butte aux assauts victorieux de l’ennemi pour le corrompre. Or il ne l’était pas au commencement, sauf que, dès le début, il était un objet de persécution et de haine car il n’aurait pas été le témoignage de Dieu sans cela. Mais, dès lors, il a continué à être de plus en plus déprécié par l’infidélité avec laquelle l’ensemble de la famille de Dieu l’a rendu. Au temps que nous décrit la seconde épître à Timothée, ce témoignage était, en apparence, complètement ruiné et l’Esprit se sert de sa condition d’alors pour nous décrire prophétiquement ce qu’il est aujourd’hui et ce qu’il sera à la fin des jours. L’apôtre, placé à la tête de ce témoignage, était emprisonné; l’Évangile était méprisé et persécuté, ce qui n’était pas, comme au début, l’inévitable et précieux résultat de la fidélité des témoins.

On comprend que, voyant, du côté des hommes, tous ses espoirs anéantis, la honte du témoignage chrétien pût accabler le cœur de Timothée, si fidèle à le maintenir avec son cher père dans la foi. Anéantis quant à notre témoignage, mais nullement anéantis quant au témoignage de notre Seigneur! Telle est, en effet, la consolation et la seule ressource en un temps de ruine; il ne s’agit plus de nous appuyer sur notre témoignage, mais sur le témoignage infaillible du Seigneur. Jamais celui-ci ne peut sombrer, tandis que nous menons deuil avec raison sur les ruines de ce qui a été confié à notre responsabilité. Son témoignage, le Seigneur, sous une forme ou sous une autre, le conservera jusqu’à la fin. Les vérités qui le constituent aujourd’hui, il saura les maintenir jusqu’à sa venue pour enlever son Assemblée. Comment Timothée, comment nous-mêmes, en aurions-nous honte? Mais peut-être, voyant le porteur éminent de ce témoignage en prison et chargé de chaînes, Timothée aurait-il pu avoir honte? Non, dit l’apôtre. Paul n’était pas mis là à une place honteuse; il n’était pas le prisonnier des hommes, mais le prisonnier du Seigneur. C’était précisément pour son témoignage à Lui que le Seigneur l’y gardait. Il a complété sa Parole par un Paul prisonnier; dans un Paul prisonnier Il s’est glorifié devant le monde. Paul prisonnier a été seul quand tous l’avaient abandonné; en cela, comme en tant d’autres points, semblable à son Maître et le représentant devant le monde. Y avait-il lieu de rougir quand, sur les ruines du témoignage des hommes, celui du Seigneur demeurait en son entier?

Si Timothée pouvait être exhorté à ne pas avoir honte, il avait sous les yeux l’exemple de l’apôtre qui dit au v. 12: «Je n’ai pas de honte», passage sur lequel nous reviendrons. Au v. 16, Onésiphore est cité comme un frère fidèle qui n’a pas eu honte de la chaîne de l’apôtre. Aussi cela lui sera compté au jour des récompenses. Plus tard, dans les exhortations à Timothée (2:15), l’apôtre l’exhorte encore, comme il l’avait fait au sujet de la crainte, à n’avoir pas honte dans l’exercice de son ministère, et à ne pas penser à lui-même, ni aux hommes, mais uniquement à Dieu pour être approuvé de Lui. Cela ne devait-il pas lui suffire?

«Mais prends part aux souffrances de l’Évangile, selon la puissance de Dieu». Dans un temps de déclin, comme celui que traversaient le grand apôtre des Gentils et le fidèle Timothée, ce n’était pas seulement le témoignage de l’Église de Christ qui était tombé en discrédit par la faute de ceux qui en étaient les porteurs, en sorte que les yeux de la foi avaient à se porter sur le témoignage du Seigneur qui, ne pouvant être anéanti, s’adaptait aux circonstances actuelles de l’Église pour atteindre son but — c’était aussi l’Évangile, (la bonne nouvelle présentée aux hommes comme leur apportant le salut) qui, au lieu d’être exalté, était persécuté, rejeté, emprisonné, couvert d’opprobre, dans la personne de ceux qui le portaient. Timothée ne devait pas s’en indigner, mais avoir communion avec ses souffrances, car l’Évangile est personnifié ici. N’en avait-il pas été de même de Jésus Christ? Avait-il été reçu avec les honneurs et la reconnaissance dus au salut qu’il apportait? Il avait été rejeté, outragé, crucifié! Les fidèles devaient prendre part à ces souffrances, car elles étaient de tous les temps et le Seigneur les avait annoncées à ses disciples en les quittant. Sans doute il y avait eu des temps où les fidèles, bien unis et liés ensemble, avaient combattu comme une armée bien disciplinée dans un même esprit, avec une même âme et une même foi pour le triomphe de l’Évangile. Maintenant Satan semblait avoir le dessus, mais les chrétiens devaient s’adapter à ces circonstances et prendre part à ces souffrances spéciales; or il leur fallait autant de puissance, et plus même que par le passé, pour agir ainsi, car il fallait la puissance de Dieu pour endurer ces souffrances et pour maintenir et faire triompher, malgré tout, l’Évangile dans le monde.

 

V. 9-10

...qui nous a sauvés et nous a appelés d’un saint appel, non selon nos œuvres, mais selon son propre dessein, et sa propre grâce qui nous a été donnée dans le Christ Jésus avant les temps des siècles, mais qui a été manifestée maintenant par l’apparition de notre Sauveur Jésus Christ, qui a annulé la mort et a fait luire la vie et l’incorruptibilité par l’Évangile; pour lequel moi j’ai été établi prédicateur et apôtre et docteur des nations.

Cette puissance de Dieu était-elle diminuée par notre infidélité? Ne s’était-elle pas affirmée dans notre salut? Ne nous avait-elle pas appelés d’un saint appel? Appelés à être saints et irréprochables devant Lui, en amour? Tel est, en effet, notre appel céleste qui sera pleinement réalisé quand nous serons avec Christ et tels que Lui dans la gloire, mais qui, maintenant déjà, nous met à part pour Dieu (Éph. 1:4). Ce salut, cet appel, la ruine ne peut les atteindre. Ce que Dieu nous a donné, il l’a donné dès l’éternité et pour l’éternité; oui, immuable, inaltérable, éternel! La même puissance de Dieu qui nous appelle à souffrir au milieu de la ruine, nous a établis à jamais au milieu des choses immuables.

Remarquez que, dans ce passage où, en vertu de la ruine, tout est faiblesse, même dans l’âme d’un fidèle témoin comme Timothée, où le témoignage confié aux fidèles n’est plus que décombres, l’apôtre insiste sur la puissance, sur la puissance, si j’ose parler ainsi, de la Trinité avec nous: la puissance de l’Esprit pour remplacer la crainte (v. 7); la puissance de Dieu, pour nous faire prendre part aux souffrances de l’Évangile (v. 8); la puissance de Christ pour garder ce que l’apôtre lui a confié (v. 12). Pas un mot de notre propre puissance, car elle n’existe pas. Au contraire, c’est dans notre infirmité qu’elle s’accomplit (2 Cor. 12:9) et c’était cette expérience que Timothée avait à faire comme déjà l’apôtre lui-même l’avait faite.

Maintenant la mention de cette puissance de Dieu amène l’apôtre à décrire ce qu’elle a fait pour nous, et entièrement en dehors de nous. Merveilleuse description! D’abord, comme nous l’avons vu plus haut, nous avons par elle le salut et le saint appel; le salut qui comprend toute l’œuvre de la grâce à notre égard, depuis le pardon des péchés jusqu’à l’entrée dans la gloire; le saint appel, qui est notre parfaite conformité avec Christ dans la gloire: saints et irréprochables devant Lui en amour. Cette grâce n’a nullement affaire avec notre activité, nos œuvres, dont elle est absolument indépendante. Elle dépend uniquement du dessein éternel de Dieu. Elle nous a été donnée en Christ avant les temps des siècles (v. 9); elle a été manifestée par son apparition comme Sauveur (v. 10); elle est en Lui (2:1) et nous pouvons y puiser chaque jour et à chaque instant la force dont nous avons besoin, car elle est intarissable.

C’est un privilège immense, que cette grâce soit manifestée maintenant par la première apparition de notre Sauveur Jésus Christ, car nous en connaissons les résultats immuables dès ici-bas. Ils sont de deux sortes: 1° La mort, gage du péché, est annulée. Ce n’est pas seulement que celui qui avait le pouvoir de la mort, le Diable, a été rendu impuissant à la croix, mais la mort a été annulée par la résurrection de Christ. Il s’est trouvé un homme que la mort, dans laquelle il est volontairement entré et qu’il a subie dans toute son horreur, n’a pu retenir; un homme qui est sorti en résurrection de la mort et s’est assis à la droite de Dieu. Pour lui, la mort n’existe plus. Mais pourquoi y est-il entré et en est-il sorti? C’est afin que le pouvoir de la mort sur nous, fruit du péché, pût être anéanti à jamais!

2° Mais ce n’est qu’un côté de cette œuvre, son côté négatif. Le côté positif, c’est qu’Il a fait luire la vie et l’incorruptibilité par l’Évangile. La vie était la lumière des hommes (Jean 1:5). C’est nous qu’elle avait en vue! Quelle merveilleuse grâce! Maintenant elle a lui aux yeux des hommes dans la résurrection de Christ. Sans cette résurrection, la vie demeurait cachée. Sans doute elle pouvait produire ses effets, ce qui est prouvé par toute la carrière de Christ ici-bas. Ses paroles étaient Esprit et vie quand on les recevait par la foi; en outre, il ressuscitait les morts, leur communiquait la vie, mais une vie qui pouvait être de nouveau interrompue par la mort. Mais, dans sa personne, la vie a lui, une vie que ni la mort, ni la corruption ne pouvaient atteindre, une vie dont la qualité même était qu’elle se trouvait au-dessus et complètement indépendante de la corruption. Ainsi est maintenant accomplie la «promesse de la vie» du v. 1. Christ pouvait laisser sa vie humaine, et même c’était pour cela qu’il l’avait prise, mais en la laissant il a fait luire une vie que la corruption ne pouvait atteindre. L’incorruptibilité n’a été jusqu’ici manifestée que dans sa personne, selon qu’il est dit: «Tu ne permettras pas que ton saint voie la corruption» (Ps. 16:10), car il faut qu’en toutes choses il ait le premier rang. Quant à nous, par son œuvre, nous possédons déjà la vie éternelle pour nos âmes, mais non pas l’incorruptibilité pour nos corps. Dans un temps futur, à sa venue, nous la revêtirons. Alors ce sera une réalité, que nous lui serons semblables. Le Seigneur fait luire ces choses par l’Évangile, car l’Évangile nous apporte cette vie d’un côté, cette espérance de l’autre.

«Pour lequel moi j’ai été établi prédicateur et apôtre et docteur des nations». La prison et les chaînes ne changeaient rien à cet établissement. Dans cette épître même, nous voyons Paul exercer son apostolat sans qu’aucune entrave puisse y être apportée. En outre, n’est-il pas frappant de voir ici que, dans un temps de ruine, le croyant soit reporté aux vérités immuables de l’Évangile qu’aucune ruine ne peut atteindre: à la vie éternelle, à la grâce donnée en Christ avant les temps éternels, à l’annulation de la mort, à la manifestation de la vie et de l’incorruptibilité?

 

V. 12

C’est pourquoi aussi je souffre ces choses; mais je n’ai pas de honte, car je sais qui j’ai cru, et je suis persuadé qu’il a la puissance de garder ce que je lui ai confié, jusqu’à ce jour-là.

C’est en vue d’un tel Évangile — Évangile d’une si immense portée, annonçant hautement dans ce monde la fin des suites du péché: la mort; et le règne d’une chose toute nouvelle: la vie, entraînant avec elle l’impossibilité de la corruption qui avait régné dans le monde depuis la chute — que l’apôtre avait reçu sa mission parmi les nations; mission universelle, car elle n’avait pas seulement en vue le peuple juif. Il avait une telle conviction de l’importance de cette mission qu’il ne reculait pas, pour s’en acquitter, devant les souffrances à endurer, souffrances rendues mille fois plus cuisantes par l’abandon de ceux même qui avaient reçu cet heureux message. C’est pourquoi, comme nous l’avons déjà dit, il n’avait pas de honte, il levait la tête avec assurance, car, dit-il, «je sais qui j’ai cru». Il connaissait la personne de Celui dans lequel il avait mis sa confiance. C’est la connaissance de cette personne, d’elle-même, et non seulement de ses ressources, qui élève notre âme au-dessus des difficultés, des dangers, des obstacles de la route. Nous trouvons une vérité semblable au Psaume 27. La contemplation de la présence ravissante de l’Éternel élève la tête du croyant au-dessus de ses ennemis. Connaissant cette personne il se sent au siège même de la puissance. Ceci est de toute importance. Si Paul avait, si nous-mêmes avions confiance dans l’œuvre, quelque précieuse qu’elle soit, qui nous a été confiée, nous serions abattus et déçus, en la voyant perdue, ruinée, anéantie entre nos mains. Même le grand apôtre dut assister à cette ruine dans les derniers jours de sa carrière. La conséquence aurait été la honte d’une pareille faillite s’il n’avait connu la personne dans laquelle la réalité de cet Évangile de la vie et de l’incorruptibilité avait été démontrée. Cela lui donnait une pleine assurance. Christ avait la puissance de garder ce que Paul lui avait confié et Paul avait toute confiance en Lui. La sécurité de son âme et de son corps, le résultat de son œuvre, l’avenir du témoignage, en un mot tout ce que le Seigneur avait confié à sa responsabilité, l’apôtre le remettait à Sa garde. Lui seul avait la puissance de garder intact le dépôt qui, laissé entre les mains de l’homme, aurait été irrémédiablement perdu. Il le conserverait tout entier «jusqu’à ce jour-là», jusqu’au jour de son apparition en gloire avec tous ses rachetés. Ce jour est celui des récompenses. (Voyez v. 18).

 

V. 13

Aie un modèle des saines paroles que tu as entendues de moi, dans la foi et l’amour qui est dans le christ Jésus.

Après l’exposé de son Évangile et de sa doctrine, l’apôtre revient aux instructions et aux exhortations qu’il adresse à son cher Timothée. La première était d’avoir «un modèle»1 des saines paroles qu’il avait entendues de l’apôtre. En un temps où la parole inspirée n’était pas encore complétée et où tous ceux qui en étaient les porteurs n’avaient pas disparu de la scène, l’enseignement divin, donné par cet homme de Dieu, devait être gardé intact par son disciple. Ce dernier devait avoir pour lui un résumé des vérités qu’il avait entendues, car il y a plus de sûreté à retenir la vérité dans les termes dans lesquels elle a été communiquée. Ces saines paroles étaient la parole de Dieu, car Timothée devait en garder la forme, en faire, à son usage, l’exposé. Elles étaient des paroles inspirées, communiquées oralement, comme on le voit en 1 Thess. 2:13. La «saine doctrine», le «sain enseignement» ne sont jamais autre chose que la parole inspirée (voyez 1 Tim. 1:10; 2 Tim. 4:3; Tite 1:9; 2:1). Or Timothée qui avait à les communiquer à d’autres, était moins en danger de les altérer en se les remémorant à lui-même. C’était aussi ce que personnellement faisait l’apôtre (1 Cor. 2:12-13). Ce n’étaient pas des paroles sèches, des vérités théologiques, car Timothée devait garder ce modèle «dans la foi et dans l’amour qui est dans le christ Jésus». C’est ainsi que ces choses avaient été communiquées par l’apôtre et devaient être conservées. L’intelligence naturelle n’y était pour rien; la foi et l’amour qui est en Christ les communiquaient au cœur et à l’âme et leur donnaient leur réalité divine.

1 Hupotupôsis. En 1 Tim. 1:16, ce même mot est traduit par exemple.

 

V. 14

Garde le bon dépôt par l’Esprit Saint qui habite en nous.

C’était ce que l’apôtre avait déjà recommandé à Timothée dans sa première épître (6:20). Un dépôt lui avait été confié, il devait le garder fidèlement. Ce dépôt était le bon dépôt, les saines paroles; il n’y en avait pas un autre qui eût une pareille valeur, pas un autre qui méritât ce nom. La responsabilité de le garder incombe au fidèle.

Mon lecteur a-t-il jamais pensé à ce que cela signifie? Ne négliger aucune de ces «saines paroles», n’en perdre, n’en laisser tomber aucune à terre comme inutile; n’y introduire aucun élément étranger qui pourrait altérer son aspect ou diminuer son prix; être convaincu de la perfection divine de ce que Dieu nous a confié; être occupé, comme Timothée, à en faire ressortir à d’autres la valeur (et je ne parle pas ici de l’exercice d’un don à cet effet); estimer ce dépôt comme le plus précieux trésor, parmi tous ceux que nous pourrions posséder... mais comment énumérerais-je jamais ses perfections quand je le contemple et m’en nourris?

Ceux qui laissent dormir ce dépôt dans la poussière, qui préfèrent se nourrir de la parole humaine, plutôt que de ces «saines paroles», peuvent-ils prétendre le garder parce qu’ils en ont un exemplaire quelque part dans leur maison et le parcourent ici et là d’un œil distrait? Ah! combien de chrétiens sont coupables, comme le paresseux esclave, d’enfouir ce trésor! Ils diront peut-être: J’ai beau m’efforcer de comprendre ces choses; elles sont pour moi lettre morte. Un sermon, bien composé, m’édifie davantage... Un sermon, soit dit en passant, est souvent un fort mauvais dépôt. Vous dirai-je ce qui vous manque? Il vous manque de savoir comment vous pouvez garder ce dépôt. L’apôtre vous le dit ici: «par l’Esprit saint qui habite en nous». Il ne dit pas à Timothée: Par l’Esprit Saint qui habite en toi, mais en nous. On pourrait croire que Timothée, ce compagnon de l’apôtre, cet homme de Dieu, était, en vertu de sa position ecclésiastique, plus qualifié que d’autres pour garder le bon dépôt. Nullement! Le Saint Esprit habitait en lui comme en tout chrétien et chacun, du plus humble au plus intelligent, est tenu de le garder par l’Esprit. C’est lui seul qui enseigne la Parole, l’applique, la fait comprendre et mettre en pratique. Et remarquez que ce sont souvent les plus intelligents qui gardent le moins ce bon dépôt, car leur piège est précisément l’intelligence humaine se substituant à l’Esprit de Dieu qui seul peut faire comprendre et retenir les «saines paroles» dans la foi et dans l’amour. Oui certes, cette parole, la parole de la grâce «a la puissance d’édifier et de nous donner un héritage avec tous les sanctifiés!» (Actes 20:32).

Nous retrouverons au chapitre suivant les exhortations à Timothée, car cette épître en est pleine, nous montrant ainsi qu’à mesure que la ruine s’accentue, Dieu fait davantage appel à l’activité individuelle. Mais les derniers versets de notre chapitre vont d’abord nous présenter une nouvelle forme du mal qui caractérise la ruine de l’Assemblée.

 

V. 15-18

Tu sais ceci, que tous ceux qui sont en Asie, du nombre desquels sont Phygelle et Hermogène, se sont détournés de moi. Le Seigneur fasse miséricorde à la maison d’Onésiphore, car il m’a souvent consolé et n’a point eu honte de ma chaîne, mais, quand il a été à Rome, il m’a cherché très soigneusement et il m’a trouvé. Le Seigneur lui fasse trouver miséricorde de la part du Seigneur dans ce jour-là; et tu sais mieux que personne combien de services il a rendus dans Éphèse.

Le fait mentionné par l’apôtre dans ces versets et dont il avait amèrement souffert, lui qui se savait établi pour la défense de l’Évangile, c’était l’abandon qu’il avait subi de la part de tous ceux qui étaient occupés de l’œuvre en Asie, au moment où il fut appréhendé pour sa seconde captivité1. C’est ainsi, du moins, que je comprends le mot «tous ceux». Ils craignaient sans doute d’être compromis en se tenant à son côté2 Timothée le savait; nous verrons plus tard (3:1) qu’il avait encore à savoir que le développement du mal, dans l’Église, ne s’arrêterait pas là. Ce qui arrivait en Asie montrait que, de plus en plus, «tous cherchaient leurs intérêts particuliers, non pas ceux de Jésus Christ» (Phil. 2:21). D’entre ceux qui s’étaient détournés de l’apôtre étaient Phygelle et Hermogène. Nous verrons, dans le courant de cette épître quelle extension avait prise ensuite l’abandon dans lequel l’apôtre était laissé. C’était donc à ce point qu’était arrivé le témoignage aux derniers jours de Paul. Dans cette assemblée d’Éphèse où la position céleste de l’Église, corps de Christ, avait été enseignée, comprise, réalisée en pratique, comme dans tout le territoire dépendant de cette capitale; dans le lieu même où l’apôtre prisonnier leur avait envoyé son épître aux Éphésiens, il ne trouvait plus personne qui sympathisât avec lui! Mais que dis-je, personne? Au milieu de cet abandon général, un homme avait fait exception. Loin de se détourner de l’apôtre dans sa seconde captivité, ce qui, par parenthèse, explique qu’il ait dû le chercher très soigneusement à Rome pour le trouver, car il n’était plus «sans empêchement» comme lors de sa première captivité, Onésiphore avait eu la joie de pouvoir «souvent le consoler». Ce que Dieu lui-même avait si souvent fait directement envers son fidèle serviteur (voyez 2 Cor. 1), il le faisait maintenant par le moyen d’Onésiphore. Immense privilège pour ce dernier! Et plus que cela, Onésiphore était du bon côté, du côté de Dieu: il n’avait pas eu honte de voir l’apôtre traité comme un malfaiteur vulgaire. Sa chaîne était, pour Onésiphore, le titre de noblesse de l’apôtre bien-aimé. Certes, il n’en avait pas honte, ni l’apôtre, car si elle mettait le témoignage à l’épreuve et faisait ressortir ce qu’il était devenu, elle était en même temps la preuve de la toute-puissance de Dieu qui s’en servait pour répandre son Évangile dans le monde entier.

1 L’Asie proconsulaire était une province romaine située en Asie mineure. Éphèse en était la capitale; les sept églises de l’Apocalypse en faisaient partie. On ne peut définir exactement ses limites au temps de l’apôtre Paul mais l’on peut dire qu’elle comprenait d’une manière approximative l’ensemble partiel des territoires indiqués sur nos cartes bibliques par les provinces de Mysie, Lydie, Bitynie, Phrygie et Galatie. Passages où l’on rencontre le mot Asie: Actes 2:9; 6:9; 16:6; 19:10, 22, 26, 27; 20:4, 16, 18; 21:27; 27:2; Rom. 16:5; 1 Cor. 16:19; 2 Cor. 1:8; 2 Tim. 1:15; 1 Pierre 1:1; Apoc. 1:4.

2 Ce passage semblerait indiquer que c’est en Asie que Paul a été saisi de nouveau après la mise en liberté provisoire qui suivit sa première captivité.

Quand Onésiphore était venu à Rome, il n’avait épargné aucune peine pour chercher l’apôtre et l’avait trouvé. Combien souvent, peut-être, d’autres avaient entrepris cette recherche sans arriver au but; satisfaits de montrer ainsi aux yeux des églises ou de l’apôtre qu’ils avaient rempli leur devoir. Ils n’avaient pas poussé plus loin leur recherche parce qu’ils se contentaient, à leurs propres yeux ou aux yeux des autres, d’avoir fait, comme on dit, «leur possible» sans résultat. Le fait que l’apôtre n’était pas facile à trouver dans cette grande ville et dans la froide prison où il était gardé (voyez 4:13), et les résultats fâcheux que cette démarche pouvait avoir pour celui qui le cherchait, étaient autant de motifs que la conscience pouvait se donner pour interrompre ces investigations. Seulement, il y avait, au-dessus des motifs invoqués, Dieu qui voyait et savait ce qui se passait dans les cœurs. Aussi l’apôtre implore la miséricorde du Seigneur sur la maison d’Onésiphore (cf. 4:19) dans le temps actuel, et sur Onésiphore lui-même dans le temps futur, au jour où les récompenses seront distribuées. Onésiphore trouvera alors miséricorde de la part du souverain donateur, duquel dépend toute grâce; selon qu’il est dit: «Bienheureux les miséricordieux, car c’est à eux que miséricorde sera faite» (Matt. 5:7), et encore: «Attendant la miséricorde de notre Seigneur Jésus Christ, pour la vie éternelle» (Jude 21). C’est à «ce jour-là» que l’apôtre regarde pour lui-même au v. 12. En ce jour ce qu’il a confié au Seigneur, et ce que Celui-ci a gardé pour son cher apôtre, sera rendu à ce dernier. Au chap. 4:8 on voit que c’est bien du jour de son apparition qu’il est question, du jour où le sujet de notre responsabilité comme témoins de Christ sera considéré. C’est en ce jour-là que la couronne de justice (4:8), la récompense décernée au juste, sera décernée, comme, parmi les hommes, les médailles d’honneur, de courage, de sauvetage, sont distribuées. Le nom des diverses couronnes n’est-il pas d’un côté ce qui caractérise les actes accomplis par ceux qui reçoivent les récompenses, de l’autre, le caractère de Celui qui les donne. Ceux qui «aiment son apparition» sont ceux qui agissent et se conduisent à son honneur, en vue du jour où ils seront placés dans la pleine lumière de sa présence et où tout sera manifesté sans que rien ne puisse rester caché. Alors chacun des siens recevra selon ce qu’il aura fait.

Timothée lui-même pouvait rendre témoignage à Onésiphore des services qu’il avait rendus dans l’assemblée d’Éphèse où Timothée avait agi si longtemps pour maintenir l’ordre dans la maison de Dieu. Ainsi les services d’Onésiphore n’auraient pas à attendre «ce jour-là» pour être reconnus; ils l’étaient déjà pour toute âme fidèle et préoccupée du service et du témoignage de Christ. Il en est de même aujourd’hui.

Ces versets 16 à 18 nous montrent l’aide et les secours que le Seigneur place sur le chemin de ses serviteurs dans une carrière hérissée de tant de dangers et de souffrances. N’en fut-il pas de même du Serviteur parfait? Il but du torrent dans le chemin. Ah! comme, pour y boire, il a su baisser la tête! Et n’en fut-il pas de même de son fidèle serviteur? Il profitait avec joie de la consolation et du rafraîchissement qui lui venaient au sein de son humiliante condition, mais il savait que le jour arriverait où il «lèverait haut la tête»!