2 Samuel

Chapitre 21

V. 1-14 — Ritspa

Le royaume d’Israël restauré de nouveau, après les épreuves terribles et méritées qui l’ont assailli, on aurait pu croire qu’une ère de paisible prospérité allait s’ouvrir pour lui; au contraire, il est visité d’une nouvelle plaie. Je ne doute pas que cette famine n’ait pu avoir lieu à un autre moment du règne, car il est dit: «Il y eut, du temps de David, une famine…» (v. 1), mais ce n’est jamais sans intention que l’Esprit de Dieu intervertit l’ordre du récit, comme nous le voyons à la fin des Juges et dans cent endroits des évangiles.

Le gouvernement de Dieu ne peut ignorer le mal, quel qu’il soit, et le juge avec d’autant plus de sévérité que l’assemblée est relativement dans un bon état. Bien des années s’étaient écoulées depuis l’acte sanguinaire de Saül; l’histoire de ce roi n’en fait pas mention; le peuple l’a peut-être oublié, peut-être aussi est-il inconnu à David, mais Dieu ne l’a pas oublié, et ce fait est resté devant ses yeux. L’assemblée d’Israël n’avait pas trempé dans le crime; Saül qui l’avait commis était mort depuis longtemps; pourquoi donc le remettre en mémoire? C’est qu’il s’agit ici d’un principe de toute importance dans les voies de Dieu, soit envers son ancien peuple, soit envers l’Église. Le peuple est solidaire de l’acte de Saül, parce qu’il a eu lieu sur le terrain de l’assemblée d’Israël. La violation des engagements et du serment fait au nom de l’Éternel (Jos. 9:18), rendait la congrégation coupable du péché de son conducteur. Des générations s’étaient succédé depuis; elles pouvaient invoquer leur ignorance — le crime reste, et Dieu, en temps voulu, le remet en mémoire.

Des faits pareils ne se passent-ils pas de nos jours et ne parlent-ils pas aux consciences des saints? Peu importe le temps écoulé, l’Assemblée est solidaire de l’iniquité qu’elle a laissé commettre et reste souillée par un acte contre lequel elle n’a pas protesté.

Le lecteur connaît l’histoire des Gabaonites, on peut la lire au 9° chap. de Josué. Les Amoréens s’étaient fait recevoir par ruse dans la congrégation d’Israël, afin d’échapper au jugement de leur peuple. Dieu considérait comme lié ce que l’assemblée avait lié: elle ne pouvait révoquer son serment. Sans doute en plaçant les Gabaonites dans une position d’esclavage vis-à-vis du peuple, la grâce de Dieu avait affranchi Israël des suites d’un faux pas fait à la légère et par ignorance, mais la conséquence d’une décision selon la chair demeurait en permanence. Saül en juge autrement, car un homme dans la chair fait toujours exactement le contraire de ce que l’Esprit aurait enseigné. Et cependant Saül était plein de «zèle pour les fils d’Israël et de Juda» (v. 2), mais d’un zèle qui s’alliait hélas! fort bien avec la haine contre l’oint de l’Éternel. Saul de Tarse était aussi rempli d’un zèle qui faisait de lui le persécuteur de Christ dans son Assemblée. De nos jours encore, on peut être zélé pour sa nation, pour son église, sans que Dieu y ait aucune part.

Ce Saül qui, pour son propre serment téméraire, aurait sacrifié son propre fils, libérateur d’Israël (1 Sam. 14:24, 44), ce même Saül méprise le serment par lequel Josué et les princes d’Israël s’étaient engagés au nom de l’Éternel vis-à-vis des Gabaonites.

La famine sévit trois années de suite, les coups se répètent sur l’assemblée de Dieu. La conscience de David est amenée, par l’épreuve, à désirer en connaître la cause: «David rechercha la face de l’Éternel» (v. 1). C’était sa seule ressource, et Dieu lui répondit immédiatement: «C’est à cause de Saül et de sa maison de sang, parce qu’il a fait mourir les Gabaonites» (v. 1). «Sa maison de sang!…» Quand le fils de Guéra, poursuivant David humilié, lui criait: «Sors, sors, homme de

L’Éternel a fait retomber sur toi tout le sang de la maison de Saül... car tu es un homme de sang». Dieu enregistrait ces injures d’un homme de la maison de Saül, mais maintenant, le temps est venu d’exprimer Sa pensée sur cet outrage; Dieu qualifie la maison de Saül de sanguinaire et justifie celle de David.

David, après avoir consulté l’Éternel sur la cause du châtiment, aurait dû, sans doute, continuer à le faire sur la manière de rendre justice aux Gabaonites. Au lieu de cela, il consulte ces derniers qui demandent sept hommes de la famille de Saül pour les pendre «devant l’Éternel à Guibha» (v. 6). David y consent, car, quoiqu’il en fût de sa faiblesse, le jugement était nécessaire. Mephibosheth en est préservé. David qui l’avait, en une autre occasion, traité avec une apparence de dureté, montre ici qu’il le porte toujours sur son cœur. Ce n’est pas un David, qui oublie ses serments. N’avait-il pas juré à Jonathan: «L’Éternel sera entre moi et toi, et entre ma semence et ta semence, à toujours»? (1 Sam. 20:42).

Les deux fils de Ritspa, et les cinq fils de Mical (ou Merab) fille de Saül (conf. 1 Sam. 18:19), sont livrés aux Gabaonites. Le procédé de ces derniers — l’on ne peut s’étonner de leur indifférence aux prescriptions de la loi — n’est pas d’accord avec l’ordonnance du Deutéronome: «Et si un homme a commis un péché digne de mort, et qu’il ait été mis à mort, et que tu l’aies pendu à un bois, son cadavre ne passera pas la nuit sur le bois; mais tu l’enterreras sans faute le jour même, car celui qui est pendu est malédiction de Dieu; et tu ne rendras pas impure la terre que l’Éternel, ton Dieu, te donne en héritage» (Deut. 21:22, 23).

La «moisson des orges» pouvait être une excuse pour désobéir ainsi aux injonctions de l’Écriture, mais des excuses ne justifient pas la désobéissance. Il est probable cependant, d’après le récit, qu’ils furent enlevés du gibet pour rester exposés sur le rocher, au lieu de recevoir leur sépulture.

Ritspa, fille d’Aïa, mère de deux d’entre eux, déjà mentionnée auparavant au sujet du différend entre Abner et Ish-Bosheth (3:7), Ritspa accomplit un acte de piété qui mérite que son nom vive dans la mémoire des croyants. Elle se constitue la gardienne des sept cadavres. Le motif de son dévouement n’est pas que ses deux fils sont parmi les condamnés, car elle veille sur les cinq autres aussi bien que sur les siens. La postérité de celui qui avait été «l’élu de l’Éternel» (v. 6) lui tient au cœur. Elle montre sa piété envers la maison de son époux et de son maître. De plus, Ritspa est une femme de foi. Elle garde leur corps de toute profanation et les veille, n’ayant pour remplir sa pénible tâche que le sac de deuil qu’elle étend sous elle. Elle allie ainsi son deuil avec sa piété vigilante envers les morts. Il faut que leur sépulture au moins soit honorée. Elle ne veut pas les laisser de jour en pâture aux oiseaux des cieux, de nuit, aux bêtes des champs, comme s’ils étaient criminels et réprouvés. C’est ainsi qu’agissaient les nations envers le peuple de Dieu (Ps. 79:2), mais ce n’est pas ainsi que l’Éternel a commandé et qu’on agit en Israël!

La foi de Ritspa est récompensée: «Ce qu’elle avait fait fut rapporté à David» (v. 11). L’acte de cette femme est digne d’être enregistré dans le cœur du roi. Au milieu de son deuil, quelle joie! Elle a trouvé un cœur qui la comprend et qui trouve son bonheur à la récompenser; une grâce qui répond à ses désirs. Les os des descendants de Saül sont réunis à ceux de leurs pères dans le sépulcre de Kis. Celle femme était dans le chemin de Dieu et a obtenu la réponse que réclamait sa foi.

Désormais l’Éternel peut être propice au pays, car le jugement est exécuté, mais la grâce aussi a eu son cours, car, dans ses voies, Dieu ne s’arrête pas au jugement, et ce dernier prépare le chemin au triomphe de la grâce.

 

V. 15-22 — Les fils du géant

La fin de l’histoire de David a le caractère de son commencement. Goliath semble reprendre vie. Il en fut de même pour le Seigneur: après la tentation au désert, Satan le laissa pour un temps et réapparut en Gethsémané, cherchant à l’effrayer pour lui faire abandonner son œuvre. Ses efforts furent vains et, dans le dernier cas comme dans le premier, la dépendance de Jésus remporta la victoire.

Qu’après la victoire de Christ, les «enfants du géant» s’attaquent à ses rachetés, pensant en avoir plus facilement raison que de leur Maître, leur sort sera le même; ils sortiront vaincus de la lutte. Ce combat se répète quatre fois avec les Philistins; c’est d’entre ces ennemis du dedans que sortent les enfants du géant, ces «loups dévorants» qui cherchent à ravir le troupeau en effrayant ses conducteurs.

La première fois, David est personnellement en jeu (v. 15-17). Il était descendu avec ses serviteurs, ne tenant compte ni de son âge, ni de ses forces: «David était fatigué» (v. 15). Jishbi-Benob, qui était des enfants du géant, redoutable par son arme — «le poids de sa lance était de trois cents sicles d’airain» invulnérable à cause de «l’armure neuve» dont il était ceint, veut profiter de l’apparente faiblesse du roi. Mais «Abishaï, fils de Tseruïa le secourut, et frappa le Philistin et le tua» (v. 17). C’est ainsi que ce serviteur de David est mis à l’épreuve; il n’abandonne pas son maître dans le danger et a l’honneur d’être le sauveur de David. N’en est-il pas ainsi de nous? Le Seigneur ayant combattu pour nous et nous ayant délivrés, n’avons-nous pas dans un sens le devoir de le secourir? Son nom, sa personne, sa gloire, sont menacés par les agents de l’ennemi. Il s’attaque à notre David pour anéantir tout souvenir de Lui, et il sait qu’il a peu de temps, car déjà l’aube de Son règne glorieux est sur le point de se lever dans la personne de Salomon. L’ennemi réussira-t-il? Nous sommes responsables de sa victoire ou de sa défaite. À nous maintenant, dans la puissance de l’Esprit de Dieu, à frapper le fils du géant, à vaincre ce qui s’attaque à Christ, à garder son nom et sa Parole intacts devant l’ennemi qui voudrait les anéantir.

Et même, si nous n’étions pas des «hommes forts de David», ne devrions-nous pas encore lui jurer, comme le firent tous ses serviteurs: «Tu ne sortiras plus avec nous pour la guerre, et tu n’éteindras pas la lampe d’Israël» (v. 17)! La foi de tous est ainsi mise à l’épreuve. Ils sentent qu’ils ont à combattre eux-mêmes, chacun à son rang, afin que la lampe du peuple de Dieu ne soit pas éteinte et continue à briller de tout son éclat. Sans doute, notre David n’est jamais fatigué, comme celui de cette histoire: «Le Dieu d’éternité, l’Éternel, créateur des bouts de la terre, ne se lasse pas et ne se fatigue pas» (És. 40:28), mais, pour éprouver et fortifier notre foi, pour encourager nos cœurs dans la lutte et les réjouir par la victoire et la récompense, il aime à se placer, vis-à-vis des siens, dans une position où Lui, le vainqueur de Satan, semble avoir besoin de notre secours. Quel privilège de combattre pour Lui! Le jour est sérieux; Christ est attaqué de toutes parts; l’effort semble formidable et dépasse de beaucoup nos faibles ressources. Ceux qui devraient être avec Lui et défendre l’intégrité de sa Parole et de sa Personne, font, hélas! la plupart du temps, cause commune avec les fils du géant. Ne nous en mettons pas en peine.

Que notre David soit absent, comme dans les deux combats de Gob (v. 18, 19), il n’importe; le même Esprit qui l’animait est encore avec nous. Peut-être serons-nous seuls, comme Sibbecaï le Hushathite, seuls contre Saph, car le géant frappé renaît toujours sous une autre forme. Qu’importe encore? Peut-être, circonstance décourageante, le lieu où il a été vaincu, Gob, nous présentera une seconde fois le même terrain de bataille. Qu’importe, s’il nous faut rentrer dans les mêmes traces, alors que nous croyions en avoir fini avec une lutte déloyale?

Sur ce terrain, voici Goliath, l’ancien ennemi, qui reparaît. «Et il y eut encore un combat à Gob avec les Philistins: et Elkhanan, fils de Jaaré-Oreguim, le Bethléhémite frappa Goliath, le Guitthien; et le bois de sa lance était comme l’ensouple des tisserands» (v. 19). Goliath n’a donc pas été vaincu par David? Ne t’en inquiète pas, ne t’en effraie pas, Elkhanan, héros de «la grâce de Dieu» 1, ce Goliath, le Guitthien, est un faux Goliath, se parant d’un nom trompeur, d’un nom de mensonge. Il n’est que Lakhmi son frère (conf. 1 Chron. 20:5). Mais il a la même lance, comme l’ensouple des tisserands! (conf. 1 Sam. 17:7). Demande-lui, Elkhanan, où est son épée? Elle est restée entre les mains de David et y restera toujours. La victoire, Elkhanan, t’est assurée; il n’est pas même besoin, pour elle, d’une pierre de fronde que, certes, tu ne saurais manier comme ton roi. Ce qui le vaincra, c’est la confiance, c’est l’humble dépendance que tu as vues en David. Oui, quoi qu’il en soit, la victoire est à toi; elle est à nous, parce qu’elle est à Lui!

1 Elkhanan signifie: la grâce de Dieu.

Le dernier ennemi, monstrueux, formidable, n’est pas nommé, mais «lui aussi était né au géant», «homme de haute stature qui avait six doigts aux mains et six orteils aux pieds, en tout vingt-quatre» (v. 20-22). Comme jadis Goliath, il outrage Israël (v. 21; 1 Sam. 17:10). En l’absence de Christ, nous avons à combattre aussi bien pour Lui, que pour son peuple. Outrager l’un, c’est outrager l’autre. Nous avons des frères captifs de l’ennemi, comme Lot, tristement alliés comme lui au monde, dont il s’agit de les «sauver avec crainte, les arrachant hors du feu» (Jude 23). Mettons-nous à la brèche, comme Jonathan, fils de Shimha; montrons, comme lui, que nous portons par grâce le nom de «frères de David» (v. 21). Ayons à cœur, comme lui, les intérêts de son peuple.

Qu’il est pénible de s’entendre dire: De quoi vous mêlez-vous? Nous sommes bien où nous sommes. Vous nous faites la guerre; car ils s’identifient avec l’ennemi qui les asservit et préfèrent leur esclavage à la liberté qui leur est offerte. Qu’importe encore? Combattons pour eux, frappons cette puissance formidable qui outrage le peuple de Dieu. Encore un coup; ce sera le dernier. Plus qu’une victoire, et l’Éternel nous aura délivrés de la main de tous nos ennemis, et nous pourrons Lui adresser en paix, comme David, les paroles de notre cantique!