2 Samuel

Chapitre 2

Chapitres 2 à 4 — Royauté sur Juda

Hébron

Tout en prononçant une complainte sur Saül et sur Jonathan, David, nous l’avons vu, avait pour but d’enseigner aux fils de Juda à se servir de l’arc. Nous avons remarqué que l’arc signifie, pour le croyant, la force de Dieu qui ne se manifeste que dans la dépendance. Au début du chap. 2, la conduite de David est l’illustration de cette vérité. Les jours de son affliction sont passés, une ère nouvelle commence; le chemin du trône s’ouvre devant lui; il va prendre la place que Dieu, dès longtemps, lui a destinée. Or la première chose que fait David, c’est de consulter l’Éternel, de montrer qu’il dépend entièrement de Lui. On peut dire que la dépendance caractérise avant tout sa carrière. Auprès des parcs des brebis, quand il était aux prises avec le lion et l’ours, devant Goliath, dans le désert de Juda, à Kéhila, à Tsiklag (1 Sam. 30:6, 7), David est l’homme dépendant et par conséquent l’homme fort. Rien n’est plus agréable à Dieu que cela. Les incertitudes et les vacillations de notre marche s’expliquent par notre manque de dépendance. Quand elle existe, nous nous posons, en toute circonstance, cette première question: Quelle est la volonté de Dieu? Quelle œuvre nous a-t-il préparée? Nous l’interrogeons pour le savoir, car on consulte Dieu quand on dépend de Lui. Aussi notre chemin sera simple et béni, parce qu’il sera le chemin de Dieu. Il n’offre des complications que si nous n’en référons pas à Dieu, avant de prendre une décision.

Néanmoins les occasions ne manquent pas dans la vie de David où il oublie de consulter l’Éternel. Souvent l’ennemi nous attaque aux points où nous nous croyons invulnérables. On peut dire que l’histoire de David, modèle de dépendance, nous montre, plus qu’une autre, l’indépendance, ses dangers et ses suites. C’est ainsi que, de son propre chef, nous l’avons vu descendre deux fois à la cour du roi des Philistins. La première fois, il n’y récolte que mépris et humiliation; la seconde fois, sous l’empire de la crainte et pensant sauver sa vie, il abandonne les heureuses expériences du désert de Juda, perd son caractère de témoin et court le danger de s’allier aux incirconcis pour combattre le peuple de Dieu. Sous la discipline, il réapprend à consulter l’Éternel et recouvre tout ce que son manque de foi lui avait enlevé1. Nous verrons, au chap. 6, que le manque de dépendance fut cause de la «brèche d’Uzza». Toutes ces choses sont une source d’enseignements pratiques pour nos âmes.

1 Voyez Méditations sur premier livre de Samuel, par H. R.

«David interrogea l’Éternel, disant: Monterai-je dans une des villes de Juda? Et l’Éternel lui dit: Monte. Et David dit: Où monterai-je? Et il dit: À Hébron» (2:1). C’est Dieu qui choisit l’endroit spécial où son oint devra se rendre. David, livré à lui-même, aurait peut-être hésité entre beaucoup d’autres, mais Dieu en détermine un seul pour son serviteur; c’est Hébron.

Dans le livre de Josué1, nous avons fait remarquer ce qu’était Hébron: lieu des sépulcres, lieu de la mort, fin de l’homme, image frappante de ce qu’est pour nous la croix de Christ. Il était nécessaire, selon les pensées de Dieu, que David montât à Hébron, parce que c’était le seul point de départ de la royauté, et le règne de David n’est qu’un type de celui de Christ, fondé sur la croix. Son royaume est la conséquence et la récompense de sa croix. Les anciens, réunis autour du trône, chantent un cantique nouveau: «Tu es digne de prendre le livre et d’en ouvrir les sceaux, car tu as été immolé» (Apoc. 5:9). Il inaugurera toutes les voies gouvernementales de Dieu qui le conduiront au trône millénaire, parce qu’il a souffert et que son sang précieux a été répandu. Chose à jamais merveilleuse! On voit dans le ciel, au milieu du trône et des quatre animaux et des anciens, un agneau immolé qui est le centre de tout. Il n’est pas sur le trône, mais au milieu. De lui, comme de ce centre, partent, et à lui aboutissent tous les conseils écrits au dedans du livre, toutes les voies de Dieu, écrites sur son revers. Il se lève; ces voies s’ouvrent; les quatre animaux, attributs des jugements divins, se mettent en marche, la royauté du lion de Juda est établie, et les conseils de Dieu sont accomplis à toujours. Le «c’est fait» éternel a trouvé son point de départ au gibet d’ignominie où le Fils de l’homme a souffert, où le monde a cloué le Fils de Dieu!

1 Voyez Méditations sur le livre de Josué, par H. R.

Mais Hébron est aussi le centre du rassemblement des bien-aimés de David. Ses compagnons y demeurent autour de lui. «Ses hommes qui étaient avec lui, David les fit monter, chacun avec sa maison, et ils habitèrent dans les villes de Hébron» (v. 3). Là même où David a son domicile, les siens ont plusieurs demeures. C’est ainsi que l’Agneau immolé, le roi d’éternité, sera «au milieu des anciens», figures de tous les saints glorifiés. En attendant ce moment glorieux, sa croix nous réunit autour de Lui. Elle reste et restera toujours le centre du rassemblement des enfants de Dieu.

Hébron devient aussi (5:1) le centre du rassemblement de toutes les tribus d’Israël. Quand le peuple terrestre reconnaîtra Celui qu’ils ont percé et se soumettra à Lui, il sera le premier objet des bénédictions de son règne. Un autre fait semble encore indiqué dans ces versets: «David monta à Hébron et ses deux femmes aussi, Akhinoam, la Jizreélite, et Abigaïl, femme de Nabal, le Carmélite» (v. 2). L’homme de douleurs, le roi rejeté, a non seulement, à Hébron, des compagnons et un peuple, il y a sa femme et son épouse. Abigaïl est, comme Rebecca, un des rares types de l’Ancien Testament qui préfigure l’Église; elle est l’Épouse, l’associée volontaire, humble et joyeuse de David, aux jours de sa réjection. Akhinoam, figure plus effacée, représenterait plutôt, selon moi, le résidu d’Israël entré en relation avec le Messie avant l’établissement de son règne1. Quoi qu’il en soit, David possède à Hébron des liens plus intimes que ses rapports avec son peuple. C’est ainsi que nous voyons, à la fin de l’Apocalypse, l’Épouse de l’Agneau associée à toute sa gloire et, dans les prophètes, Jérusalem reconnue comme bien-aimée de l’Éternel. Ainsi le Christ devient, par sa mort, le centre de bénédictions pour tous.

1 Abigaïl signifie «joie du père», Akhinoam, «grâce du fils».

«Les hommes de Juda vinrent et oignirent là David pour roi sur la maison de Juda» (v. 4). Comme le règne de David, celui de Christ ne sera pas établi dans ce monde par un coup de théâtre. Son jugement sera subit, mais non pas son règne. Ce ne serait pas selon les pensées de Dieu qui veut laisser à la conscience des siens le temps d’être exercée. Il faut à Christ un «peuple de franche volonté au jour de sa puissance», non pas un peuple pareil aux nations qui, à part la «grande multitude» des sauvés d’entre les gentils, ne s’approcheront du roi qu’avec les «paroles flatteuses» et mensongères d’une apparente soumission. Ici, David est d’abord reconnu par les compagnons de sa réjection, puis Juda se réunit autour de lui. Ensuite (5:1) viennent les autres tribus, quand elles ont perdu le soutien de la chair dans la personne d’Ish-Bosheth. Enfin (5:11), les nations s’approchent, captivées par la grâce du roi et heureuses de le servir.

La suite du chapitre offre des faits importants sur une partie desquels nous aurons à revenir dans le chapitre suivant. Nous trouvons d’abord les hommes de Jabès de Galaad, loués par David, selon l’esprit de grâce qui le caractérise, de ce qu’ils ont usé de bonté envers Saül et l’ont enterré. Il leur fait annoncer que Juda l’a oint pour roi, et cette nouvelle pénètre ainsi jusqu’aux confins de la terre d’Israël.

Nous trouvons ensuite Abner, chef de l’armée de Saül, qui ne veut pas se soumettre à David, homme honorable selon le monde, très vaillant, avec une noblesse de cœur native, mais d’un caractère violent et orgueilleux. Il soutient, dans la personne d’Ish-Bosheth, le principe de succession selon la chair, revêtu d’autorité apparente, car Saül avait été choisi de Dieu. Ce principe, les hommes le défendent à outrance, car c’est celui de la religion de leurs pères, de la religion nationale, bien plus respectable aux yeux des hommes que l’opinion de quelques-uns qui se singularisent en suivant le fils d’Isaï. Tout un système politique se lie à ce système religieux. La chose doit être bonne, puisque Dieu y a mis son sceau, à une époque reculée, et, par là même, respectable. Abner emploie son énergie naturelle à le défendre. Qu’y a-t-il à objecter? Une seule chose: c’est que tout ce système s’oppose aux pensées de Dieu et fait la guerre à son oint. On combat pour sa propre cause et, comme plus tard Saul de Tarse, l’on se trouve être l’ennemi de Celui auquel Dieu a donné la suprématie.

Fait digne de remarque, David ne paraît pas dans ce conflit et n’y joue aucun rôle, quand même, en apparence, il s’agit de lui. Un homme de son entourage, Joab, accompagné de ses frères, se met à la tête des serviteurs du roi. En 1 Chron. 2:16, nous voyons qu’ils étaient les propres neveux de David, par Tseruïa, sa sœur. Ils avaient, par ce fait, une haute position et tenaient de fort près à la maison royale. Joab, homme ambitieux, cherche à se pousser dans le monde, et à conquérir la première place sous la royauté. Quoiqu’il ne soit pas nommé, et pour cause, parmi les «hommes forts de David», il est homme de courage. Le sentiment du juste et de l’injuste ne lui manque pas, mais il ne s’oppose à l’injustice que lorsqu’elle contrarie ses desseins, et quand une chose juste lui est contraire il la supprime. Rien ne l’arrête; il est sans scrupules pour satisfaire son ambition. Quelqu’un a dit de lui: «On le trouve partout où il y a du mal à faire ou beaucoup à gagner». Joab, c’est la chair politique. Son avantage est de soutenir la cause de David. Si nous comparons Abner à Joab, le beau rôle est pour le premier. Et cependant Joab entre en scène comme champion du témoignage. C’est sur lui que va bientôt reposer le poids des événements militaires et d’autres encore; c’est lui qui dirige en sous main et fait mouvoir bien des intrigues. En présence de cette habileté, David lui-même se sent faible (3:39). Du moment que la chair s’empare du témoignage, voyez le résultat. Des ruines et rien que des ruines. L’un combat pour David, l’autre pour celui que Dieu ne reconnaît plus. Valent-ils mieux l’un que l’autre? Lorsque la chair soutient David — ou Christ — les résultats ne sont pas meilleurs que lorsqu’elle soutient l’Antichrist.

Les deux troupes (v. 12-17) se trouvent en présence. Dans quel but? Pour essayer leurs forces. Où est Dieu? Absent. Où est David? Son nom n’est pas même prononcé. Dans ce champ clos, c’est à qui aura le dessus. Pas un des combattants n’échappe. David y perd ses serviteurs et le résultat est nul pour sa cause.

La suite de ce combat singulier est une bataille en règle, où Joab perd un frère chéri envers lequel Abner avait montré la noblesse naturelle de son caractère. Asçaël ne veut rien entendre; il s’élance, plein de présomption et, victime de son désir de gloire, tombe frappé par la lance d’Abner. Joab n’oubliera pas cette mort et satisfera sa vengeance au moment où elle lui apportera le plus grand profit.

Hélas! que reste-t-il de toutes ces luttes? On n’y trouve rien de Dieu, rien pour Dieu, quand même le monde combat en apparence sous le drapeau du Christ; et l’âme du fidèle n’a pour ressource que de se réfugier à Hébron auprès de celui qui est le seul centre de bénédiction et dont la présence lui donne paix, bonheur et repos excellent. Mais, quand notre David se lèvera pour combattre, marchons hardiment à sa suite, car, combattre avec Lui c’est remporter une victoire certaine et durable sur l’ennemi.