2 Rois

Chapitre 17

V. 1-6 — Osée, roi d’Israël

Nous voici arrivés au dernier acte de l’histoire d’Éphraïm, autrement dit des dix tribus. Osée, meurtrier de Pékakh, règne neuf ans à Samarie. Tout en faisant ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, sa conduite vis-à-vis de Lui est moins profane que celle de ses prédécesseurs; seulement, il ne tient pas compte des jugements de Dieu qui avait annoncé, par tous ses prophètes, l’asservissement d’Israël à l’Assyrie. D’année en année, le roi Osée avait envoyé des présents au roi d’Assyrie (v. 3), suivant l’exemple de l’un de ses prédécesseurs Menahem qui, par des présents, s’était déclaré vassal de Pul, afin que ce dernier établît le royaume entre ses mains (15:19-20). Plus tard, Tiglath-Piléser était monté contre Pékakh et, comme nous l’avons vu, avait transporté en Assyrie les tribus d’au delà du Jourdain. Pékakh n’avait évidemment pas suivi, comme Menahem, la règle de soumission à l’Assyrie, ce qui expliquerait les motifs politiques de cette transportation qui ne nous sont pas donnés dans la Parole, tandis que le motif divin nous est indiqué par un mot des Chroniques: «Dieu réveilla l’esprit de Tiglath-Piléser, et il les transporta» (1 Chron. 5:26). Ici, les procédés habituels des rois d’Assyrie envers Israël sont mis au jour. «Shalmanéser, roi d’Assyrie, monta contre lui, et Osée devint son serviteur, et lui envoya des présents» (v. 3). La menace d’une invasion par un ennemi plus fort que lui, oblige Osée à se soumettre, bien à contre-cœur sans doute, à ce vasselage. Mais ces présents ne lui servent guère. «Ils sont montés vers l’Assyrien», dit Osée, le prophète, «un âne sauvage se tient isolé. Éphraïm a fait des présents à des amants. Quand même ils ont fait des présents parmi les nations, maintenant je les assemblerai, et ils commenceront à être amoindris sous le fardeau du roi des princes» (Osée 8:9-10).

«Et le roi d’Assyrie découvrit qu’Osée conspirait; car Osée avait envoyé des messagers à Sô, roi d’Égypte, et il n’envoyait pas de présents au roi d’Assyrie, comme il avait fait d’année en année» (v. 4). En effet, cette conduite double et suspecte du roi est mentionnée par le prophète: «Éphraïm se repaît de vent, et poursuit le vent d’orient; tout le jour il multiplie le mensonge et la dévastation; et ils font alliance avec l’Assyrie, et portent de l’huile en Égypte» (Osée 12:2), et encore: «Éphraïm est devenu comme une colombe niaise, sans intelligence; ils appellent l’Égypte, ils vont vers l’Assyrie» (Osée 7:11). Aussi, découvrant la conspiration du roi, Shalmanéser «l’enferma dans une prison et le lia» (v. 4). «Le roi périt», selon la prophétie d’Osée (10:7), sans que les circonstances de sa mort nous soient rapportées. Le roi d’Israël, une fois prisonnier, «le roi d’Assyrie monta par tout le pays, et monta à Samarie, et l’assiégea trois ans» (v. 5; cf. 18:9); mais ce ne fut pas Shalmanéser en personne qui s’empara de la ville, car il est dit: «Ils la prirent au bout de trois ans» (18:10). En effet, dans l’intervalle, Sargon (Ésaïe 20:1) avait succédé à Shalmanéser, ou du moins, était à la tête de l’armée pendant un court interrègne. Le sort de la ville rebelle fut terrible, selon la parole de Michée, qui prophétisa «au sujet de Samarie et de Jérusalem»: «Je ferai de Samarie un monceau dans les champs, des plantations de vigne; et je ferai rouler ses pierres dans la vallée, et je découvrirai ses fondements. Et toutes ses images taillées seront mises en pièces; et tous ses présents de prostitution seront brûlés au feu; et je mettrai en désolation ses idoles; car c’est avec un présent de prostituée qu’elle les a rassemblées, et elles redeviendront un présent de prostituée» (Michée 1:6-7). Osée nous décrit aussi cet événement: «Samarie portera son iniquité, car elle s’est révoltée contre son Dieu; ils tomberont par l’épée, leurs petits enfants seront écrasés, et on fendra le ventre à leurs femmes enceintes» (Osée 13:16).

«Et le roi d’Assyrie... transporta Israël en Assyrie, et les fit habiter à Khalakh, et sur le Khabor, fleuve de Gozan, et dans les villes des Mèdes» (v. 6). On a supposé qu’une partie des dix tribus s’était enfuie en Égypte à ce moment-là. Nous ne pensons pas que le passage d’Osée (8:13): «Ils retourneront en Égypte», puisse être interprété de cette manière. Ce même prophète avait dit: «Ils appellent l’Égypte, ils montent vers l’Assyrie» (7:11): puis: «Éphraïm a fait des présents à des amants» (8:9); puis encore: «Éphraïm retournera en Égypte, et mangera en Assyrie ce qui est impur» (9:3). Tout cela s’accorde complètement avec la conspiration d’Osée, comme aussi cette autre parole: «Il ne retournera pas dans le pays d’Égypte, mais l’Assyrien sera son roi» (11:5). «Descendre en Égypte» ne signifie pas nécessairement s’y enfuir, mais y chercher du secours, comme il est dit en Ésaïe 31:1: «Malheur à ceux qui descendent en Égypte pour avoir du secours».

Quant aux passages d’Osée 8:13 et 9:3, il faut bien remarquer que le prophète associe continuellement l’iniquité de Juda avec celle d’Éphraïm: «Les peuples seront rassemblés contre eux, quand ils seront liés pour leurs deux iniquités. Et Éphraïm est une génisse dressée, qui aime à fouler le blé; et j’ai passé sur son beau cou: je ferai tirer le chariot à Éphraïm; Juda labourera, et Jacob hersera» (10:10-11); comme il les réunit aussi, après qu’ils auront été au comble de l’asservissement, dans la même bénédiction future (10:13). Cette remarque fait comprendre que: «Ils retourneront en Égypte», au chapitre 8:13, s’applique à Juda, moralement associé à Israël. Ce qui le prouve, c’est le verset suivant: «Israël... bâtit des palais, et Juda multiplie les villes fortes» (v. 14), mais bien plus encore: «Voici, ils s’en sont allés à cause de la dévastation: l’Égypte les rassemblera, Moph (ou Noph, Memphis), les enterrera» (9:6). Or nous savons, d’après le récit de Jérémie (43, 44:1), que les transfuges de Juda s’enfuirent devant le roi de Babylone et se réfugièrent en Égypte, et entre autres à Noph, forçant le prophète à les y accompagner, et que là, il prophétisa contre eux, quand ils se croyaient à l’abri de leur oppresseur (cf. 2 Rois 25:26)1.

1 À part cette explication, nous n’avons pas l’intention de résoudre les difficultés historiques contenues dans ces livres. C’est ainsi que nous laissons de côté, pour la plupart, les questions chronologiques. D’autres ont répondu aux objections de la soi-disant «haute critique» à leur sujet.

 

V. 7-41 — Récapitulation divine de l’histoire d’Israël

Dieu récapitule maintenant, lui-même, cette longue histoire d’Israël, qui commence à l’Exode et se termine à notre chapitre. Non pas qu’elle soit close définitivement; elle ne l’est qu’en ce qui concerne ce peuple et ses rois, envisagés comme responsables. Les entrailles du prophète Osée, émues des compassions divines, annoncent sa restauration future. «Mon cœur est changé en moi; toutes ensemble, mes compassions se sont émues. Je ne donnerai pas cours à l’ardeur de ma colère, je ne détruirai pas de nouveau Éphraïm; car je suis Dieu, et non pas un homme — le Saint, au milieu de toi; et je ne viendrai pas avec colère. Ils marcheront après l’Éternel. Il rugira comme un lion; car il rugira, et les fils accourront en émoi de l’Occident, ils accourront en émoi de l’Égypte comme un oiseau, et, comme une colombe, du pays d’Assyrie; et je les ferai habiter dans leurs maisons, dit l’Éternel» (Osée 11:8-11). Ce même Dieu, qui leur avait donné un roi dans sa colère et l’avait ôté dans sa fureur (13:11), dit: «Je les délivrerai de la main du shéol, je les rachèterai de la mort» (13:14), et encore: «Je guérirai leur abandon de moi, je les aimerai librement, car ma colère s’est détournée d’eux. Je serai pour Israël comme la rosée; il fleurira comme le lis, et il poussera ses racines comme le Liban. Ses rejetons s’étendront, et sa magnificence sera comme l’olivier, et son parfum comme le Liban: ils reviendront s’asseoir sous son ombre, ils feront vivre le froment, et ils fleuriront comme une vigne; leur renommée sera comme le vin du Liban» (14:4-7).

Du v. 7 à 18 de notre chapitre, Dieu montre ce qu’il avait fait pour Israël depuis que, les délivrant d’Égypte, il les avait introduits en Canaan (v. 7). Il parle ensuite de ce qu’eux avaient fait, agissant d’abord «en secret» contre l’Éternel, marchant suivant l’idolâtrie des nations que Dieu avait dépossédées devant eux, et dans les statuts que les rois d’Israël, à commencer par Jéroboam I, avaient établis, en fondant et maintenant la religion nationale des veaux de Dan et de Béthel. De plus, ils avaient érigé partout, dans leurs villes fortes, et jusqu’auprès des tours de garde, observatoires isolés, des hauts lieux et des idoles mâles et femelles, avec plus de débordement que Juda qui s’était contenté de conserver les hauts lieux, consacrés autrefois au culte de l’Éternel, et en avait fait des places de pratiques idolâtres (v. 8-13). L’Éternel avait rendu témoignage contre eux et contre Juda par tous les prophètes. Les avaient-ils écoutés? Non, ils avaient abandonné les commandements de l’alliance pour se livrer à l’affreuse apostasie, décrite sous toutes ses faces aux v. 14-17. Enfin, dans sa colère, Dieu les avait ôtés de devant sa face et il «n’en était resté que la seule tribu de Juda», sans doute pour peu de temps, mais Dieu la reconnaissait encore, selon la parole d’Osée: «Éphraïm m’entoure de mensonge, et la maison d’Israël de fraude; mais Juda marche encore avec bien et avec les vrais saints» (Osée 12:1).

Aux v. 19-20, Dieu mentionne Juda comme en passant. Ce dernier avait suivi les statuts établis par les dix tribus, aussi l’Éternel rejeta toute la semence d’Israël, mais du v. 21 au v. 24, il revient à Éphraïm et à sa séparation de la maison de David. C’était là, sans doute, un jugement de l’Éternel contre Salomon, et comme tel ordonné de Dieu, mais, d’autre part, c’était le fruit du mauvais cœur d’Israël, pour lequel le temple de Dieu à Jérusalem avait peu d’importance, quand il pensait à devenir une nation indépendante de Juda. Peut-être, néanmoins, Israël n’aurait-il pas songé, malgré cela, à se forger de toutes pièces une nouvelle religion, si les vues politiques de Jéroboam, entièrement étranger à toute crainte de Dieu, n’avaient forcé son peuple à entrer dans cette voie. «Jéroboam avait détourné violemment Israël de suivre l’Éternel, et les avait fait commettre un grand péché» (v. 21). Mais, d’autre part, «les fils d’Israël marchèrent» (ils étaient donc coupables eux-mêmes) «dans tous les péchés que Jéroboam avait commis; ils ne s’en détournèrent point» (v. 22). Aussi Israël fut transporté en Assyrie. On voit ici, v. 24, et au v. 6, l’immense extension qu’avait prise ce royaume. Le monarque assyrien fit venir des gens de Babel et autres lieux pour remplacer les déportés dans les villes de la Samarie.

Ces nations idolâtres, transportées dans la terre d’Israël, ne craignaient pas l’Éternel. Il envoya contre elles des lions qui les tuaient. Malgré la désolation présente, Dieu avait souci du pays de son héritage; il revendiquait ses droits sur lui et ne se les laissait pas enlever. Il ne voulait pas qu’il retombât sous la malédiction dont il l’avait délivré en exterminant les Cananéens. Quelle que fût la ruine, il ne fallait pas que le nom de l’Éternel fût entièrement arraché du pays d’Israël, et cela en vue de l’avenir, car le résidu, le vrai Israël, doit hériter la terre.

Décimés par les lions, ces pauvres païens ignorants qui assimilaient le Dieu d’Israël à leurs faux dieux, comprennent ce jugement. Ils sont plus intelligents que le peuple de l’Éternel (v.26). Le roi d’Assyrie leur fait envoyer l’un des sacrificateurs transportés, pour «leur enseigner la coutume du dieu du pays»; mais ce sacrificateur lui-même avait soutenu l’affreux mélange des idoles avec la religion du vrai Dieu et ne peut leur enseigner que sa propre corruption, en sorte que, d’un côté, ils «apprennent à craindre l’Éternel», tandis que, de l’autre, chacun se fait ses dieux et les place «dans les maisons des hauts lieux que les Samaritains avaient faites» (v. 29).

Une religion corrompue — ce fait si évident a cependant besoin que l’on y insiste particulièrement — ne peut conduire les hommes dans la vérité et les formera toujours sur son modèle. Aussi est-il dit: «Ils craignaient l’Éternel, et se firent d’entre toutes les classes du peuple des sacrificateurs des hauts lieux, qui offraient des sacrifices pour eux dans les maisons des hauts lieux» (v. 32). Jéroboam n’avait-il pas fait de même à l’égard de la sacrificature? Ce qu’ils apprennent du sacrificateur de Samarie les engage dans le même chemin, seulement, ils vont un peu plus loin, et les sacrificateurs qu’ils établissent à la façon de Jéroboam deviennent, tout simplement, des sacrificateurs de leurs idoles (v. 32; cf. v. 29). La parole de Dieu répète qu’ils «craignaient l’Éternel, et... servaient leurs dieux selon la coutume des nations d’où ils avaient été transportés» (v. 33), mais elle ajoute, au v. 34: «Jusqu’à ce jour, ils font selon leurs premières coutumes: ils ne craignent pas l’Éternel, et ils ne font pas selon leurs statuts et selon leurs coutumes, ni selon la loi et selon le commandement que l’Éternel avait commandés aux fils de Jacob, qu’il nomma Israël» (v. 34). N’oublions pas que la crainte de l’Éternel, ce premier pas dans la voie de la sagesse, ne peut pas s’allier avec l’idolâtrie du monde, pas davantage avec les idoles des païens qu’avec celles du monde actuel qui, en rejetant Christ, a reconnu la domination de Satan. Ceux qui, en apparence, le craignent, de fait ne le craignent pas réellement, s’ils ne lui obéissent pas, car le craindre, c’est lui obéir. Dieu ne souffre pas de mélange.

Remarquez, dans tout ce passage, combien la crainte de l’Éternel, ce commencement de la sagesse, avait été placée sur la conscience à la fois du peuple (v. 35-40) et des nations. L’Éternel avait dit à Israël: «Vous ne craindrez point d’autres dieux» (v. 35, 37, 38). Vous craindrez l’Éternel, «et vous vous prosternerez devant lui» (v.36). «Vous craindrez l’Éternel, votre Dieu, et il vous délivrera de la main de tous vos ennemis» (v.39). Dans ce court passage, le mot «craindre l’Éternel» revient jusqu’à onze fois! De cette ordonnance élémentaire, tout le reste dépendait et dépend encore!

Quant à ces nations, en leur faisant sentir son déplaisir par l’attaque des lions, l’Éternel leur avait, pour ainsi dire, imprimé une direction vers lui, puis, suivant envers elles le même principe qui l’avait dirigé envers son peuple, il les avait laissées à leur propre responsabilité. Pas plus qu’Israël, elles n’en avaient tenu compte, mais lequel de ces deux partis était le plus coupable? Quand les captifs de Juda furent réintégrés dans leur pays pour recevoir le Christ, ils méprisaient profondément les Samaritains et n’avaient point de relations avec eux (Jean 4:9). Mais ils allaient plus loin, et disaient à leur Messie: Tu es un Samaritain! (Jean 8:48). C’est ainsi que l’homme religieux juge les autres hommes, lui qui est sous le même jugement, et c’est ainsi qu’il juge Dieu! Jésus rejeté accepte ce nom, pour montrer dans une parabole que, malgré cette position de déshonneur qui lui était faite, lui seul était le dispensateur de la grâce, en contraste avec l’homme religieux, que sa propre justice empêchait d’être le prochain du malheureux Israël, tombé entre les mains des nations qui l’avaient pillé!