2 Chroniques

Chapitre 32

Les trois épreuves d’Ézéchias.

Dans ce chapitre le récit diffère considérablement de celui des Rois, tandis que ce dernier reproduit presque mot pour mot celui d’Ésaïe (chap. 36-39), excepté la «prière d’Ézéchias» omise à la fois dans les Chroniques et dans les Rois, et dont nous avons parlé précédemment1.

1 Méditations sur le second livre des Rois.

«Après ces choses et cette fidélité, Sankhérib, roi d’Assyrie, vint et entra en Judée, et campa contre les villes fortes, et il pensait en forcer l’entrée» (v. 1). Qu’il est précieux d’entendre Dieu reconnaître ici la fidélité de son serviteur! Sous ce rapport Ézéchias avait été sans reproche et avait récolté, dans ce monde, une abondance de joie et de prospérité. Mais si sa vie religieuse avait l’approbation de Dieu, allait-il montrer la même fidélité vis-à-vis du monde? Notez que l’attaque de l’Assyrien est présentée ici comme une épreuve et nullement comme un jugement de Dieu dont l’Assyrien aurait été l’instrument contre Ézéchias. Toute l’histoire passée des rois et du peuple de Juda, que nous venons de parcourir, appelait ce jugement, mais ce n’était pas au moment où Ézéchias avait montré un cœur intègre envers Dieu que le châtiment serait tombé sur lui et sur son peuple. Il en était tout autrement des dix tribus dont l’histoire avait abouti à la transportation définitive, dans le temps même où Dieu voyait encore «de bonnes choses» en Juda. Ce dernier était revenu à l’Éternel et avait détruit les idoles, quoique, de fait, son cœur ne fût pas changé, comme nous le voyons en Ésaïe 22. Ce n’était pas non plus qu’Ézéchias fût puni du fait d’avoir mal agi en se révoltant contre le roi d’Assyrie (2 Rois 18:7), circonstance sur laquelle, du reste, les Chroniques se taisent. Dans tout le chapitre qui nous occupe, Ézéchias est, non pas châtié, mais mis à l’épreuve, précisément parce qu’il avait été jusque-là fidèle à son Dieu.

La première de ces épreuves est donc l’assaut de l’Assyrien qui pense forcer l’entrée des villes fortes et s’emparer de Jérusalem. Devant cette attaque, qu’est-ce qu’Ézéchias avait à faire? La grâce de Dieu le lui suggère: «Et quand Ézéchias vit que Sankhérib venait, et qu’il se dirigeait contre Jérusalem pour lui faire la guerre, il tint conseil avec ses chefs et ses hommes forts pour arrêter les eaux des sources qui étaient en dehors de la ville; et ils lui aidèrent. Et un grand peuple se rassembla, et ils bouchèrent toutes les sources et le torrent qui coulait au milieu du pays1, disant: Pourquoi les rois d’Assyrie viendraient-ils et trouveraient-ils des eaux abondantes?» (v. 2-4). Ézéchias était décidé à ne pas laisser entre les mains de l’ennemi les sources qui alimentaient la ville, soit à l’Orient, soit à l’Occident. Si l’Assyrien en avait pris possession elles lui auraient fourni une précieuse ressource pour continuer le siège de Jérusalem en même temps que le peuple de la ville aurait été réduit à mourir de soif. Sankhérib ignorait le vaste travail auquel Ézéchias et son peuple s’étaient livrés pour parer à ce danger. Alors que Jérusalem était abondamment pourvue d’eau vive, il fait dire au peuple par ses serviteurs: «Ézéchias ne vous incite-t-il pas pour vous livrer à la mort par la faim et par la soif?» (v. 11). Dieu rend témoignage au roi de tout le zèle qu’il déploya à ce sujet: «Ce fut lui, Ézéchias, qui boucha l’issue supérieure des eaux de Guihon, et les conduisit sous le sol, à l’occident de la ville de David» (v. 30). On a retrouvé les travaux, formidables pour ce temps-là, par lesquels les sources de Guihon et de la fontaine qui déborde furent conduites jusqu’au-dedans des murs de Jérusalem. Tout cela montre une grande prévoyance devant cette dangereuse épreuve.

1 Proprement: «Le torrent qui débordait» dans la vallée du Cédron.

Nous pouvons tirer nous-mêmes de ce fait une sérieuse leçon. Au Ps. 87:7, les habitants de Jérusalem disent: «Toutes mes sources sont en toi». Il en est de même pour nous; toutes les sources auxquelles nous nous abreuvons sont en Christ. Il est lui-même la source d’eau vive et peut dire: «Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive». Nos sources sont la connaissance de Christ et la communion avec Lui. C’est ce que l’Ennemi de nos âmes, le monde, cherchera toujours à nous enlever. Il sait fort bien qu’un christianisme qui ne s’abreuve pas à la source, qui ne s’alimente pas de Christ, ne peut nous faire vivre. Tout son effort consiste donc à séparer le chrétien de Christ et il a mille moyens d’occuper nos cœurs et nos pensées d’autre chose que de Lui. De plus, il a la prétention de posséder ce qui est notre propriété exclusive. N’acceptons pas qu’il nous dérobe nos sources, n’acceptons pas davantage son affirmation qu’il les possède. Quand nous avons affaire à lui, prouvons-lui clairement la vanité de ses prétentions. C’est le plus grand service que nous puissions lui rendre; il ne peut découvrir Christ que dans la ville de Dieu en faisant partie du peuple de Dieu. Si nous «bouchons les sources», nous pouvons prouver au monde qu’il ne les a pas et lui montrer que le seul moyen de les posséder c’est d’être, non pas du côté des ennemis, mais des amis de Christ. Notre activité ne doit pas se borner à ne pas nous laisser dépouiller par le monde; il nous faut déployer toute l’énergie possible pour mettre Christ à la portée de tous ses rachetés, afin qu’ils s’abreuvent constamment d’eau vive et des richesses insondables de Christ. Ce n’est pas un Christ banal dont nous avons besoin, un Christ qui soit aussi bien la propriété du monde que la nôtre; il nous faut un Christ n’ayant rien de commun avec l’image que s’en fait le monde, qui le façonne pour ainsi dire à son usage. Il faut que ces eaux qui coulent au milieu du pays deviennent pour nous comme les eaux de Guihon, cachées profondément sous la surface du sol et qui atteignent le cœur même de la cité de Dieu.

Tel fut le premier soin d’Ézéchias, mais, d’autre part, il ne négligea rien pour la défense de Jérusalem. Lui qui avait bouché les sources porta aussi sa sollicitude sur la muraille: «Et il s’encouragea, et bâtit toute la muraille où il y avait des brèches, et l’éleva jusqu’aux tours, et bâtit une autre muraille en dehors; et il fortifia Millo dans la ville de David» (v. 5). Ce n’est pas qu’Ézéchias eût confiance dans ses ressources et sa force pour résister au roi d’Assyrie bien au contraire, quand celui-ci se présente, il s’écrie: «Il n’y a point de force pour enfanter» (Ésaïe 37:3), et il sait que le secours ne peut se trouver que dans la dépendance de Dieu seule; mais tout cela n’exclut nullement une vigilance constante à l’égard de l’ennemi. Si, par négligence, nous avons laissé des brèches s’établir, par lesquelles l’adversaire peut monter à l’assaut, il faut diligemment les réparer au lieu de les laisser s’agrandir. De plus, Ézéchias «fit beaucoup de javelines et de boucliers». En prévision d’une attaque il fallait des armes pour tous. Cette nécessité subsiste encore aujourd’hui. Pour combattre victorieusement l’ennemi il ne suffit pas qu’une ou deux personnes éminentes parmi le peuple de Dieu soient pourvues des armes nécessaires. Ces armes, comme nous le voyons en Éph. 6, ne sont pas seulement la Parole, mais un état d’âme conforme à la connaissance de Dieu. Sans doute, quand l’ennemi se présente, c’est Dieu qui combat pour son peuple, comme Ézéchias le dit ici: «Fortifiez-vous et soyez fermes... car avec nous il y a plus qu’avec lui: avec lui est un bras de chair, mais avec nous est l’Éternel, notre Dieu, pour nous aider et pour combattre nos combats», mais cela n’empêche nullement de se «revêtir de l’armure complète de Dieu» (Éph. 6:11). Dieu veut, d’un côté, chez les siens la confiance et la dépendance qui caractérisèrent si remarquablement la carrière d’Ézéchias; mais il veut, de l’autre côté, l’énergie de la foi qui lutte, résiste et tient ferme avec les armes de l’Esprit pour que le Seigneur soit glorifié dans notre combat, comme il doit l’être dans notre marche.

Chose humiliante! cette délivrance, opérée par l’Éternel, ne pouvait être que momentanée. Si l’Assyrien ne put s’emparer de Jérusalem, Babylone le fit plus tard, parce que, non seulement le cœur du roi s’était élevé, mais qu’avant tout, le cœur du peuple n’était pas changé. «Vous n’avez pas regardé», dit Ésaïe, faisant allusion au siège de Jérusalem par Sankhérib, «vers celui qui a fait cela, ni tourné vos regards vers celui qui l’a formé dès longtemps» (És. 22:11). Aussi le jugement historique par Babylone eut lieu pour ce peuple, avant le jugement prophétique par l’Assyrien des derniers jours. Ce dernier jugement, nous en trouvons la description très intéressante au chap. 22 d’Ésaïe, qui fait allusion aux événements historiques dont nous nous occupons pour annoncer ce qui aura lieu à la fin des temps. D’abord, v. 1-6, nous rencontrons une allusion évidente au siège de Jérusalem par Nebucadnetsar tel qu’il nous est décrit en 2 Rois 25:4-5, puis, aux v. 7-11, une allusion tout aussi frappante au siège de Jérusalem par Sankhérib sous Ézéchias; mais ce siège révèle l’état moral du peuple (v. 11), et a pour résultat, non pas sa délivrance, mais son jugement, son iniquité ne lui étant pas pardonnée (v. 14). Toute cette scène se termine par la destruction de Shebna, l’administrateur infidèle, l’Antichrist; et l’établissement d’Éliakim, Christ, qui portera, en justice, toute l’administration du royaume de David (v. 15-25). Aux deux événements contenus dans ce chapitre, correspond le premier siège de Jérusalem aux derniers jours, tandis que, de fait, le siège de Jérusalem par Sankhérib, sous Ézéchias, est une image du second siège prophétique dans lequel Jérusalem sera épargnée et son dernier ennemi, l’Assyrien, détruit par l’apparition du Seigneur1.

1 Pour plus amples détails sur la portée prophétique des deux sièges de Jérusalem, voyez: «L’histoire prophétique des derniers jours et les Cantiques des degrés», par H. R.

Dans les v. 9 à 15 de notre chapitre, Sankhérib envoie ses serviteurs à Jérusalem vers Ézéchias et vers tous ceux de Juda qui étaient à Jérusalem. Ici se montre l’illusion de l’ennemi. Il dit: «En quoi vous confiez-vous, que vous demeuriez assiégés dans Jérusalem?» (v. 10). Il tient le peuple pour «assiégé» avant même qu’il ait commencé le siège. Il se doute bien peu que lui, Sankhérib, soit l’assiégé de Dieu et ignore que sa puissance et l’immense armée dont il couvre le pays, conquérant toutes ses villes fortes, ne tiendra pas un jour devant une poignée de gens faibles et angoissés, mais dont la confiance est en l’Éternel. «Si Dieu est pour nous, qui serait contre nous?» Sankhérib dit: «Ézéchias ne vous incite-t-il pas, pour vous livrer à la mort par la faim et par la soif?» (v. 11), et il ignore que Jérusalem possède déjà, à elle seule, toutes les sources d’eau cachées et les canalisera bientôt en vue d’agressions futures! D’où proviennent, chez l’ennemi, de pareilles illusions? De ce qu’il ignore Dieu et Sa puissance. L’orgueil de Sankhérib lui fait estimer son pouvoir à lui, bien plus haut que celui du Dieu d’Israël, qu’il assimile aux idoles des nations. Il confond les faux dieux avec le vrai Dieu. Pour lui, la folie consiste à ne vouloir qu’un seul Dieu, qu’un seul autel. Le monde d’aujourd’hui est-il très éloigné de pareilles pensées? Il est vrai qu’il n’en est pas encore arrivé, comme Sankhérib, à «outrager le Dieu vivant», mais a-t-il plus d’estime pour Dieu que pour ses propres idoles, et ne cherche-t-il pas, dans les objets de ses convoitises, de quoi endormir sa conscience à l’égard du jugement qui s’avance à grands pas?

Dans notre livre Sankhérib met particulièrement l’accent sur ces mots: «Combien moins votre Dieu vous délivrera-t-il de ma main!» (v. 15) Quel réveil terrible aura cet homme orgueilleux et impie! La destruction de son armée, la honte, ses propres enfants devenus ses meurtriers.

Sankhérib méprise et blasphème l’Éternel, et l’assimile aux idoles (voyez 14, 15, 16, 17, 19), et cela est mis en relief dans notre récit dont la brièveté contraste avec celui des Rois et d’Ésaïe. Ses serviteurs parlent «contre l’Éternel, le vrai Dieu, et contre Ézéchias». Quel privilège pour ce roi pieux! La haine de l’ennemi le désigne comme compagnon du Dieu souverain! En effet, Ézéchias, suivant en cela l’exemple de Christ, pouvait dire: «Les outrages de ceux qui t’outragent sont tombés sur moi», et encore: «Celui qui me rejette, rejette Celui qui m’a envoyé» (Ps. 69:10; Luc 10:16).

L’ennemi cherchait à faire peur au peuple de Jérusalem et à «les épouvanter, afin de prendre la ville» (v. 18). Il en est ainsi de tout temps. Quand Satan ne réussit pas à nous séduire il cherche à nous effrayer afin de s’emparer de nos biens, de nous dépouiller de notre bonheur, et de remplacer la sécurité et la paix dont nous jouissons sous la protection de notre Dieu, par l’agitation, les angoisses et les douleurs. Tenons fermes, comme Ézéchias, et nous assisterons à la défaite de l’adversaire: «Le Dieu de paix brisera bientôt Satan sous nos pieds», et rien n’arrêtera ce jugement. L’armée de Sankhérib est exterminée par l’ange de l’Éternel; lui-même tombe sous les coups des «fils de ses propres entrailles» en présence du dieu impuissant dont il cherchait la protection et qu’il opposait au Dieu vivant, tandis qu’Ézéchias délivré, protégé tout à l’entour, est comblé de biens et élevé aux yeux de toutes les nations (v. 22-23).

Ainsi se termina la première épreuve d’Ézéchias, à la gloire du Dieu dont il était le serviteur.

Au v. 24 nous trouvons la seconde épreuve. Bien différents sont les récits de 2 Rois 20:1-11 et d’Ésaïe 38:1-22. Le nôtre tient en quelques paroles: «En ces jours-là» — aux jours où Ézéchias fut aux prises avec l’Assyrien — «Ézéchias fut malade à la mort; et il pria l’Éternel, et l’Éternel lui parla, et lui donna un signe» (v. 24). Nous nous bornerons à ce qui nous est dit ici, ayant traité ce sujet en détail autre part.

La mort par maladie, la fin habituelle de tout homme, menace ici le roi fidèle. Ce qu’il y a de plus poignant, c’est que lui, l’instrument de Dieu pour le salut du peuple, va être supprimé brusquement, au moment même où Juda a, plus que jamais, besoin de lui. La seule ressource d’Ézéchias est de s’en remettre à Dieu dans une humble dépendance de Lui: «Il pria l’Éternel»; il eut recours à Celui qui l’avait suscité et conduit jusque-là. Alors «l’Éternel lui parla». Est-ce que cela ne valait pas mieux que toute autre chose? Pour obtenir un pareil résultat, l’épreuve était-elle trop grande? Quand le croyant peut dire: Dans l’épreuve, l’Éternel m’a parlé, voudrait-il, en quoi que ce soit, avoir échappé à la souffrance? «Et Dieu lui donna un signe»; il fit un miracle en sa faveur. Combien Ézéchias était précieux à Dieu! Il trouva dans l’épreuve non seulement des communications divines, mais il obtint la certitude de l’intérêt immense que Dieu lui portait. Ézéchias était réduit ici au néant le plus complet; après avoir été sans force devant l’ennemi, il se trouvait être sans aucune ressource devant la mort; et cependant sa position était infiniment élevée, puisqu’il avait Dieu pour lui, s’identifiant avec tous ses intérêts et toute son existence! Ainsi, dans cette seconde épreuve, Ézéchias acquit des bénédictions nouvelles.

Il restait encore pour lui une troisième épreuve. Job en avait eu le même nombre et de la même qualité: d’abord les ennemis (Job 1:13-22), ensuite la maladie (Job 2:7-10), enfin les amis (2:11-13). Telle fut aussi la troisième épreuve d’Ézéchias. Ce dernier allait-il en sortir victorieux, lorsque, devant elle, Job avait péché en paroles et était tombé?

Nous lisons au v. 31: «Cependant, lors de l’ambassade que les chefs de Babylone envoyèrent vers lui pour s’informer du miracle qui avait été opéré dans le pays, Dieu l’abandonna pour l’éprouver, afin qu’il connût tout ce qui était dans son cœur». Telle fut l’épreuve et aussi l’occasion de la chute d’Ézéchias. Berodac-Baladan recherche son amitié et le fait complimenter sur sa guérison. À ce moment l’Éternel abandonne Ézéchias à lui-même pour l’éprouver. Il fallait cela; il était nécessaire que cet homme de Dieu apprît à connaître son propre cœur. Dieu aurait pu le garder de chute comme dans les deux premières occasions, mais alors il n’aurait pas fait l’expérience de la racine du mal qui était au-dedans de lui. Il s’agissait ici d’une chose bien plus importante que tels manquements partiels ou tels actes de péché, dont la carrière d’Ézéchias, considérée dans les trois récits que nous en avons, offre plus d’un exemple; c’était une épreuve qui, comme dans le cas de Job, découvrait le mal caché dans le fond du cœur et fit dire à ce patriarche: «J’ai horreur de moi!»

Le v. 25 nous montre en quoi consistait cette épreuve à laquelle Ézéchias succomba: «Ézéchias ne rendit pas en raison du bienfait qu’il avait reçu; car son cœur s’éleva, et il y eut de la colère contre lui et contre Juda et Jérusalem». Quand l’Éternel lui-même l’avait élevé aux yeux de toutes les nations (v. 23), le cœur d’Ézéchias s’éleva. Au lieu de rester dans l’humble attitude qui le caractérisait lors des deux premières épreuves, il se servit des bénédictions divines pour nourrir son orgueil, cet orgueil qui, depuis Adam, est le fond même du cœur de l’homme pécheur.

Nous n’insistons pas sur les détails de la chute d’Ézéchias, relatés autre part; il nous semble même qu’en les mentionnant nous gâterions l’impression que la parole de Dieu veut nous donner ici. Notre récit s’accorde si bien avec le plan divin des Chroniques que toute autre addition y nuirait. Les Chroniques font ressortir la grâce et non la responsabilité, mais elles nous montrent ici le cœur du croyant abandonné une fois à sa responsabilité, sans intervention de la grâce et, la seule fois que cela a lieu dans l’histoire d’Ézéchias, la chute est complète et profonde, irrémédiable même, puisqu’elle a pour conséquence la destruction de Jérusalem et la transportation de Juda. Or, voici que notre livre insiste sur une chose que les deux autres récits traitent à peine d’un mot: Au moment où tout est irrémédiablement ruiné, la grâce intervient pour placer la conscience d’Ézéchias devant Dieu, dans un état que Celui-ci puisse pleinement approuver. Si le péché a abondé, la grâce surabonde; elle triomphe et délivre Ézéchias et son peuple (momentanément sans doute, car il s’agit ici non des conseils, mais des voies de Dieu) d’un jugement qui les aurait anéantis. «Ézéchias», nous est-il dit, «s’humilia de ce que son cœur s’était élevé, lui et les habitants de Jérusalem; et la colère de l’Éternel ne vint pas sur eux pendant les jours d’Ézéchias» (v. 26). Le roi s’humilie en proportion de l’orgueil qu’il avait nourri dans son cœur et manifesté au-dehors. Ayant appris sa leçon, il reprend devant Dieu la seule place qui lui convienne, et dit, en d’autres termes que Job: «Voici, je suis une créature de rien, que te répliquerai-je? Je mettrai ma main sur ma bouche» (Job 39:37). Comme lui il ajoute: «J’ai horreur de moi, et je me repens dans la poussière et dans la cendre» (42:6).

Chose précieuse, cette humiliation d’Ézéchias produit des fruits dans son entourage; «les habitants de Jérusalem» s’humilient avec lui. Les yeux de l’Éternel pouvaient de nouveau découvrir en Juda «de bonnes choses»; il est intéressant de voir que Dieu cherche attentivement toute manifestation de la conscience qui puisse lui donner occasion de patienter encore envers son peuple. «Il est patient envers vous», nous dit l’apôtre Pierre. Désormais l’épreuve est terminée, la leçon apprise. Dieu peut donner à son roi bien-aimé ce qu’il donnera dans une toute autre mesure à Christ, au roi de ses conseils, parce que Lui a toujours marché, ce que ne fit pas Ézéchias, dans le chemin de l’humilité et de la débonnaireté, en même temps que dans celui de la vérité et de la justice (Ps. 45:5).

«Ézéchias eut de très grandes richesses et une très grande gloire; et il se fit des trésoreries pour l’argent, et l’or, et les pierres précieuses, et les aromates, et les boucliers, et pour toute sorte d’objets d’agrément, et des magasins pour les produits en blé, en moût, et en huile, et des stalles pour toute espèce de bétail, et il se procura des troupeaux pour les stalles; et il se bâtit des villes, et il eut des troupeaux de menu et de gros bétail en abondance; car Dieu lui donna de fort grands biens» (v. 27-29).

L’amitié du monde est le plus grand danger que nous puissions courir. Dans cette épreuve Ézéchias a succombé, mais le Dieu de grâce ne l’a pas abandonné; il l’a restauré, et, après cette restauration, lui a rendu témoignage. Jusque dans sa mort il lui donna une place d’honneur qu’aucun des fils de David n’avait occupée! «On l’enterra à l’endroit le plus élevé des sépulcres des fils de David; et tout Juda et les habitants de Jérusalem lui rendirent honneur à sa mort» (v. 33).

Quel Dieu que le nôtre! C’est Lui qui donne la grâce, et la gloire, et si l’homme y était pour quelque chose, ce serait pour ne pas mériter l’une, et ne jamais atteindre l’autre!