2 Chroniques

Chapitre 21

Joram

Le récit du règne de Joram, contenu dans le second livre des Rois (8:16-24), correspond en substance à ce qui nous est dit aux v. 5 à 10 de ce chapitre, mais, à part ces quelques versets, tout ce qui nous est dit ici de Joram est nouveau. Nous avons parlé, dans les Méditations sur le second livre des Rois, des difficultés chronologiques soulevées au sujet de ce règne; elles tombent devant le fait que Joram fut chargé de la régence du vivant de Josaphat, son père, au moment où ce dernier, s’alliant avec Achab, cherchait à reconquérir Ramoth de Galaad, occupé par le roi de Syrie. De là cette parole en 2 Rois 8:16: «La cinquième année de Joram, fils d’Achab, roi d’Israël, et Josaphat étant roi de Juda, Joram, fils de Josaphat, roi de Juda, commença de régner». Ce fut pendant sa régence que Joram extermina ses sept frères, établis par Josaphat dans les villes fortes de Juda (v. 3). La date en est confirmée par ce qui nous est dit au v. 4: «Joram s’établit (ou s’éleva) sur le royaume de son père, et s’y fortifia»; elle l’est encore, par le fait que l’écrit d’Élie, qui n’avait pas encore été enlevé au ciel, fait mention du meurtre des frères de Joram (v. 13). Ces détails confirment la parfaite exactitude du récit biblique.

Nous avons dit plus haut que les règnes de Joram et d’Achazia, son fils, ne présentent pas un seul fait qui ne doive attirer un jugement définitif sur Juda. Cependant l’Éternel reste fidèle à ses promesses et ne détruit pas «la maison de David, à cause de l’alliance qu’il avait faite avec David et selon ce qu’il avait dit, qu’il lui donnerait une lampe, à lui et à ses fils, à toujours» (v. 7). La révolte de Libna, ville sacerdotale (v. 10), semblerait indiquer que du moins la sacrificature en Juda protestait contre les abominations du roi. La raison de cette révolte nous est donnée: Joram «avait abandonné l’Éternel, le Dieu de ses pères». La maison royale n’était épargnée qu’en vue de l’héritier futur qui devait en descendre.

Toutefois les conséquences de la conduite révoltante de Joram ne se font pas attendre. Édom, jusqu’ici tributaire de Juda, et qui n’avait pas de roi, mais un gouverneur (1 Rois 22:48), se révolte, «et ils établirent un roi sur eux» (v. 8). Joram le combat avec succès, mais sa victoire est sans fruit, car Édom est resté «jusqu’à ce jour» affranchi du joug de Juda.

Joram «fit aussi des hauts lieux dans les montagnes de Juda»; c’était bien pire que de ne pas détruire ceux qui existaient, comme avaient fait plusieurs de ses prédécesseurs: Joram les crée et les établit, ce qu’aucun roi de Juda n’avait fait avant lui. Bien plus, il favorise la prostitution à Jérusalem et «il y poussa Juda» (v. 11). Quel tableau! C’est abandonner volontairement Dieu pour l’idolâtrie; c’est, en un mot, l’apostasie et le complet oubli de la sainteté de Dieu, à laquelle Joram préfère la corruption et la souillure.

Jusqu’ici nous avons vu le rôle des prophètes de Juda pour reprendre, exhorter, encourager et remplir les cœurs de crainte devant les jugements prochains de l’Éternel. Maintenant ces précieux auxiliaires manquent. Seul «un écrit d’Élie», prophète d’Israël et prophète de jugement, parvient au roi Joram. Élie avait surveillé les premiers actes de ce règne de violence et avait écrit contre le roi. Cet écrit, conservé après l’enlèvement du prophète, vint à Joram. «Ainsi dit l’Éternel, le Dieu de David, ton père: Parce que tu n’as pas marché dans les voies de Josaphat, ton père, ni dans les voies d’Asa, roi de Juda, mais que tu as marché dans la voie des rois d’Israël, et que tu as fait que ceux de Juda et les habitants de Jérusalem se sont prostitués selon les prostitutions de la maison d’Achab, et aussi parce que tu as tué tes frères, la maison de ton père, qui étaient meilleurs que toi, — voici, l’Éternel te frappera d’un grand coup dans ton peuple et dans tes fils et dans tes femmes et dans tous tes biens, et toi-même de grandes maladies, d’une maladie d’entrailles, jusqu’à ce que tes entrailles sortent par l’effet de la maladie, jour après jour» (v. 12-15).

Les trois faits articulés par Élie pour justifier le jugement de Dieu, sont l’abandon de l’Éternel, la corruption et la violence, tout ce qui caractérise le péché de l’homme, au sujet duquel Dieu avait jadis détruit le monde par le déluge. Mais Dieu est patient envers le peuple: il ne parle pas d’autre chose que d’un jugement personnel sur le roi. Joram est frappé dans ses entrailles qui sortent par l’effet de cette épouvantable maladie, et meurt dans de «cruelles souffrances». Ainsi s’accomplit à la lettre la prophétie d’Élie. Joram avait choisi «la voie des rois d’Israël»; il est condamné par un prophète d’Israël, le seul témoin public qui restât au milieu de l’idolâtrie des dix tribus et de leur roi.

Les défections continuent; ce n’est plus seulement Édom, mais les Philistins et les Arabes qui s’élèvent contre Juda; ces nations envahissent son territoire ainsi que Jérusalem, pillent les trésors du roi, emmènent ses fils et ses femmes et massacrent les premiers, comme il avait lui-même massacré ses frères. Il ne lui reste de sa famille qu’un seul rejeton. Joakhaz, autrement dit Achazia, car l’Éternel voulait conserver un lumignon à David et à ses fils. Joram meurt «sans être regretté»; on ne brûle pas d’aromates pour lui comme pour Asa. S’il est enterré dans la cité de David, l’honneur de partager les tombeaux des rois est refusé à son sépulcre.

Que deviendra le lumignon que Dieu conserve encore à David?