1 Samuel

Chapitre 23

Les Philistins font la guerre à Kéhila. David aurait pu ne pas intervenir et laisser à Saül le soin de les secourir, mais une telle abstention est loin des pensées de l’homme de foi. David rejeté devient ici un Sauveur pour Israël. Il se met à la brèche, mais non sans avoir consulté l’Éternel. Abiathar n’étant pas encore descendu avec l’éphod, ce moyen ordonné de Dieu pour le consulter manquait encore à David. Les ressources extérieures peuvent être hors de portée, mais jamais l’accès vers Dieu ne le sera, car il est libre et largement ouvert pour tous. David parle avec Dieu comme avec un ami. Plein de condescendance, l’Éternel répond et, chose frappante, d’une manière plus intime et plus détaillée que lorsque David le consulte avec l’éphod. Il remplit de confiance et d’assurance le cœur de son bien-aimé. Quoi que disent ses compagnons (v. 3), David, fondé sur la parole de Dieu, ne s’arrête pas à leurs craintes et combat pour le peuple d’Israël, bien que ce dernier soit l’instrument de son pire ennemi. Il en est ainsi du salut par Christ, accompli pour nous, dans notre condition d’inimitié contre Lui.

Nous trouvons encore ici cette vérité, déjà aperçue dans l’histoire de Jonathan, que le combat de la foi se livre en dehors du système religieux des hommes, qui ne pourrait que l’entraver. Saül, dans les rares occasions où il consulte l’Éternel, ne reçoit pas de réponse ou en reçoit une par le sort qui prononce un jugement sur toute sa conduite (14:40). David, sans le secours extérieur des ordonnances divines, s’entretient directement avec son Dieu.

Dès lors nous voyons David traqué, poursuivi, trahi, se cachant dans les cavernes, dans les forêts, en danger dans les villes, se réfugiant dans les lieux forts, errant sur les montagnes, sur les collines, habitant les déserts de Juda, de Ziph, de Maon, de Paran, n’ayant pas un lieu où reposer sa tête.

Il entre à Kéhila. Saül, dans son atroce aveuglement, peut dire: «Dieu l’a rejeté et livré en ma main», lui qui avait entendu la solennelle parole de Samuel: «L’Éternel t’a rejeté comme roi!» (15:23). Quel endurcissement de cœur! Le persécuteur du «Bien-aimé» croit connaître Dieu et l’avoir de son côté, et il ne connaît pas mieux le Dieu d’Israël qu’il ne se connaît lui-même. Aussi, comme il est dit au Ps. 2:4. «Celui qui habite dans les cieux» s’est ri de lui, le Seigneur s’en est moqué; la Parole répond ici avec une ironie méritée: «Dieu ne le livra pas en sa main» (v. 14).

Quand l’éphod est apporté (v. 6), Dieu répond par l’éphod et David reçoit une direction suffisante. Il est beau de lui voir prendre ici le caractère de serviteur. Lui, auquel la royauté appartient, revendique devant Dieu la condition la plus humble. «Éternel, Dieu d’Israël! ton serviteur a appris…» «Saül descendra-t-il comme ton serviteur l’a entendu dire!» «Éternel, Dieu d’Israël! déclare-le, je te prie, à ton serviteur» (v. 10, 11). N’est-il pas en cela un beau type de Christ qui, sachant que le Père lui avait mis toutes choses entre les mains, est venu, non pour être servi, mais pour servir Dieu et les siens!

Au désert de Ziph, David reçoit la visite de Jonathan (v. 16-18). En mainte occasion ce dernier avait prouvé, comme nous l’avons vu, combien David lui était cher. Il l’avait averti du danger qu’il courait (19:2), avait parlé de lui en bien à Saül (19:4), avait fait alliance avec lui, reconnaissant ses droits au royaume (20:12-17), avait porté ses outrages et souffert pour lui (20:34); que lui restait-il donc à faire? Une visite à David, pour lui renouveler l’assurance de son affection? Non. Il arrive toujours dans la vie d’un homme de foi un moment critique, où il est obligé de rompre ses liens avec l’ancien système selon la chair qui, de fait, est entre les mains de l’ennemi de Dieu. Dieu va juger ce système politique et religieux, et il en est aujourd’hui de la chrétienté comme jadis du monde de Saül. Ce qui est allié avec le système tombera avec lui et sera impliqué, ne fût-ce qu’extérieurement, dans sa perte. Bien qu’aimant David, Jonathan marchait dans cet ordre de choses vieilli, établi autour du roi selon la chair et qui allait disparaître. Qu’y avait-il à faire, sinon de le quitter, quand il faisait une opposition haineuse et directe à l’oint de l’Éternel! Il lui fallait rompre avec la cour de son père, prendre place auprès de David, avec les banqueroutiers d’Adullam, position humiliante pour un fils de roi; il lui fallait rester à Ziph avec David, prenant en pensée, non pas la seconde place après lui (v. 17), mais, comme Abigaïl, celle de serviteur des serviteurs de son seigneur. Hélas! Jonathan avait une position à garder et, tandis que David retourne dans les bois, Jonathan s’en va à sa maison! (v. 18).

Et cependant Dieu lui accorde le beau privilège d’encourager David dans son chemin. Jonathan, est-il dit, «fortifia sa main en Dieu» (v. 16). Et de plus, il est pour David un porteur de la parole prophétique: «Ne crains pas, car la main de Saül, mon père, ne te trouvera pas; et tu régneras sur Israël...», mais il ajoute: «Et moi, je serai le second après toi». Quand il s’agit de lui-même, il perd complètement la vue prophétique et cela correspond bien à la condition mixte de son âme.

Kéhila aurait trahi David; Ziph le trahit positivement et fait part à Saül de ses mauvais desseins. Même endurcissement chez le roi, se servant du nom de l’Éternel pour couvrir son iniquité. «Bénis soyez-vous de par l’Éternel, de ce que vous avez eu pitié de moi!» (v. 21). Et, parlant de David: «On m’a dit qu’il est très rusé» (v. 22). Rusé! quand l’Éternel qu’il consultait le mettait en garde contre les embûches de son ennemi! Ce mot «très rusé» était un outrage direct à l’Éternel, sans que Saül s’en rendît compte!

C’est ici que se place le Ps. 54, composé «lorsque les Ziphiens vinrent, et dirent à Saül: David ne se tient-il pas caché auprès de nous?» En contraste avec Saül qui invoque le nom de l’Éternel, David rejeté du sein du peuple, sans lien apparent avec Jéhovah, fait appel au nom de Dieu: «Ô Dieu! sauve-moi par ton nom, et fais-moi justice par ta puissance» (v. 1). Ce que Dieu est comme tel est la ressource de son âme. «Des étrangers», les Ziphiens, s’étaient élevés contre lui, «des hommes violents», Saül et ses bandes, cherchaient sa vie; et tout en invoquant le nom de l’Éternel, n’avaient «pas mis Dieu devant eux» (v. 3). Mais ce Dieu qu’ils ne connaissaient pas était le secours de David (v. 4), et quand ses ennemis seront détruits et que lui sera délivré de toute détresse, ce sera lui qui pourra célébrer le nom de l’Éternel, du Dieu d’Israël dont les relations avec son peuple seront ainsi rétablies.

Au désert de Maon, David est à l’extrémité, mais l’extrémité de l’homme est l’opportunité de Dieu. Il dirige les événements et compte les heures, les minutes, les secondes. Tous nos temps sont en Sa main. Au dernier moment un messager vient annoncer à Saül l’attaque des Philistins (v. 27), et le roi abandonne sa poursuite. C’est ainsi que notre Dieu se montre supérieur aux difficultés qui semblent devoir nous engloutir.

Le Ps. 63 est un magnifique exemple des expériences intimes que fait l’âme de David «quand il était dans le désert de Juda». Il l’estime un lieu désolé, parce qu’il se souvient du sanctuaire où il a contemplé Dieu; mais s’il y a soif, c’est de Dieu, et il désire que la force et la gloire du lieu saint l’accompagnent dans le désert et se manifestent dans sa vie ici-bas. Le désert le pousse vers Dieu et lui fait désirer que Dieu montre Son caractère dans les circonstances difficiles qu’il traverse. Dieu répond à sa demande en lui montrant sa bonté. Sa bonté, c’est sa gloire, David la trouve plus précieuse que sa vie, préservée par la puissance de Dieu des embûches de Saül. Mais cette puissance le soutiendra encore: «Ta droite me soutient».

Le résultat de cette connaissance de Dieu dans le désert, c’est que l’âme de David «s’attache à Lui pour le suivre». Ainsi son cœur est lié plus intimement, plus pratiquement à son Dieu, par les expériences du lieu désolé. Quant à Saül, il sera «livré à la puissance de l’épée», tandis que le roi, l’oint de l’Éternel, a devant lui la joie en Dieu au jour où toute bouche sera fermée, joie qu’il goûte déjà dans le désert (v. 5, 7), en sorte que son âme est rassasiée.