1 Rois

Chapitre 4

La gloire du royaume

Ce chapitre nous parle de l’ordre intérieur et de l’éclat du royaume de Salomon, mais aussi de sa gloire morale caractérisée par la sagesse du roi.

Tout Israël était rassemblé sous son sceptre (v. 1), formant ainsi une paisible unité, inconnue au règne de son père. Les sept années d’Hébron, la révolte d’Absalom, celle de Shéba, fils de Bicri, celle d’Adonija, en étaient la preuve. Maintenant tout est en ordre et digne de ce règne glorieux, mais on ne trouve que onze princes (v. 2-6). L’ordre parfait, en rapport avec le gouvernement de la terre, représenté par le nombre douze, n’était pas encore arrivé et ne devait l’être qu’à l’apparition d’un plus grand que Salomon.

Azaria, fils de Tsadok, est placé à la tête des princes. «C’est lui qui exerça la sacrificature dans la maison que Salomon bâtit à Jérusalem»1 (1 Chron. 6:10). La plus haute fonction lui est dévolue. Le temple va devenir le centre de tout l’ordre du royaume salomonique, comme il le sera sur la terre, lors de l’établissement du royaume millénaire de Christ (Ézéch. 40-48). Abiathar lui-même (v. 4), qui avait été chassé de la sacrificature, est compté parmi les princes aux côtés de Tsadok. Il avait porté l’arche et partagé toutes les afflictions de David, et, quoique sa charge lui soit enlevée, son seigneur ne veut pas le priver de la dignité qu’il confère à tous ceux qui ont souffert avec le roi rejeté.

1 Il est probable que cet Azaria était le fils d’Akhimaats et le petit-fils de Tsadok. Le terme fils pour un descendant quelconque se retrouve continuellement dans les généalogies juives. Un passage d’une certaine obscurité, en 1 Chron. 6:9, semblerait rapporter la sacrificature à Azaria, arrière-petit-fils d’Akhimaats.

Parmi les douze intendants de Salomon (v. 7-19), nous en trouvons deux qui avaient épousé des filles du roi, honneur singulier accordé au fils de cet Abinadab qui avait recueilli l’arche et l’avait gardée pendant vingt ans dans la maison du coteau. C’était un titre de noblesse aux yeux du roi, d’être de la famille qui avait religieusement veillé autour de l’arche de l’Éternel.

Un honneur égal est accordé à Akhimaats, fils de Tsadok1, fidèle à David au péril de sa vie, et auquel le vieux roi rendait ce témoignage: «C’est un homme de bien, il vient avec de bonnes nouvelles». Le premier, il avait annoncé à David la victoire qui lui rendait son trône et l’assurait à l’héritier selon Dieu.

1 Les critiques, sans raison apparente, font de cet Akhimaats un autre personnage.

Les v. 20 à 28 nous décrivent la condition du peuple sous le règne de Salomon et le caractère de ce règne. «Juda et Israël étaient nombreux comme le sable qui est près de la mer, en multitude» (v. 20). La promesse faite à Abraham après qu’il eut offert son fils sur l’autel, se réalisait maintenant (Gen. 22:17), partiellement toutefois, car sa semence devait être «comme les étoiles des cieux et comme le sable qui est sur le bord de la mer». La promesse ne sera pleinement réalisée que lors du règne millénaire de Christ, où, pour ce qui concerne Israël, les deux parties du royaume, la céleste et la terrestre, seront, dans un parfait accord, établies à perpétuité. Ici, le peuple est en nombre comme le sable de la mer. Il contient en même temps et garde dans leurs limites les peuples qui l’entourent. Les sujets de Salomon «mangent, boivent et se réjouissent» (v. 20). Ils ont l’abondance matérielle; les besoins non satisfaits n’existent plus. La joie remplit les cœurs; la sécurité règne partout (v. 25). Chacun a sa possession et habite sous sa vigne et sous son figuier. Ce que les hommes cherchent vainement dans ce monde d’iniquité dont Christ a été chassé, se trouvera pleinement réalisé, quand le Seigneur, reconnu de tous, dominera sur tous les royaumes de la terre (v. 21, 24). Bien plus, ce règne puissant sera un règne de paix universelle: «Il était en paix avec tous ses alentours, de tous côtés» (v. 24). Toute la prospérité, toutes les ressources du royaume, servaient à exalter le roi, concouraient à faire ressortir sa gloire (v. 22, 23; 26-28).

Mais ce qui caractérisait avant tout cette domination universelle, c’était son aspect moral, bien plus glorieux encore que son côté matériel (v. 29-34). «Dieu donna à Salomon de la sagesse et une très grande intelligence, et un cœur large comme le sable qui est sur le bord de la mer» (v. 29). Dieu avait donné à Salomon la sagesse, le discernement moral qui s’applique à toutes choses, au bien, au mal, aux circonstances diverses de l’homme, et la connaissance de la conduite à tenir à l’égard de ces choses. Ce discernement moral ne se trouve que là où il y a la crainte de l’Éternel qui, nous l’avons vu, caractérise Salomon au début de sa carrière. La parole de Dieu est le moyen de nous communiquer cette sagesse; c’est pourquoi Salomon demandait à Dieu «un cœur qui écoute». Cette sagesse a trouvé son expression dans les Proverbes de Salomon, devenus eux-mêmes la parole de Dieu.

«Et une très grande intelligence». L’intelligence de Salomon était aussi grande que sa sagesse, à laquelle elle était intimement liée. L’intelligence est la capacité de comprendre et de s’approprier les pensées de Dieu, en sorte que l’on peut les communiquer à d’autres. Outre cela, «un cœur large comme le sable qui est au bord de la mer», un cœur capable d’embrasser tout son peuple (cf. v. 20), identifiant Israël avec lui-même, pourvoyant selon son amour à tous leurs besoins, répondant à tous leurs intérêts en les faisant siens. Cela ne nous parle-t-il pas de Christ, de ce qu’il manifestera pleinement, quand il nous aura introduits dans le repos glorieux de sa présence, quand son cœur, divinement large, nous embrassera tous; quand «il se reposera dans son amour»? (Soph. 3:17).

La largeur de l’intelligence de Salomon nous est décrite aux v. 33, 34. Il y avait dans son règne bien plus qu’une domination matérielle. Son intelligence dominait tout. «Et il parla sur les arbres, depuis le cèdre qui est sur le Liban, jusqu’à l’hysope qui sort du mur; et il parla sur les bêtes, et sur les oiseaux, et sur les reptiles, et sur les poissons» (v. 33). Adam avait dominé matériellement «sur les poissons de la mer, et sur les oiseaux des cieux, et sur le bétail, et sur toute la terre, et sur tout animal rampant qui rampe sur la terre» (Gen. 1:26). Dieu avait livré entre les mains de Noé «tout animal de la terre, et tout oiseau des cieux, et tout ce qui se meut sur la terre, aussi bien que tous les poissons de la mer» (Gen. 9:2). Plus tard, le Dieu des cieux avait mis «les bêtes des champs et les oiseaux des cieux entre les mains» du roi des gentils, et l’avait fait dominer sur eux et sur les hommes. Tout cela n’est pas dit de Salomon, mais sa sagesse dominait toutes ces choses, du cèdre à l’hysope, des bêtes aux poissons. Il connaissait leur vie, leur raison d’être, leurs rapports entre eux et avec l’ensemble de la création, les exemples que Dieu fournissait par eux à la vie morale des hommes, et il parlait de tout cela. La science moderne avec ses hautes prétentions n’est qu’un amas de ténèbres vis-à-vis de ces certitudes. Mais Salomon ne possédait pas la domination universelle sous ses deux aspects. Elle est réservée à un plus grand que Salomon, au second Adam: «Tu l’as couronné de gloire et d’honneur; tu l’as fait dominer sur les œuvres de tes mains; tu as mis toutes choses sous ses pieds: les brebis et les bœufs, tous ensemble, et aussi les bêtes des champs, l’oiseau des cieux, et les poissons de la mer, ce qui passe par les sentiers des mers». C’est de Lui qu’il est dit aussi: «Digne est l’Agneau qui a été immolé de recevoir la puissance, et richesse, et sagesse, et force, et honneur, et gloire, et bénédiction» (Apoc. 5:12).

La domination de Salomon n’était qu’un faible type de celle de Christ qui aura «pour sa possession les bouts de la terre» (Ps. 2:8). Le roi d’Israël dominait «sur tout ce qui était en deçà du fleuve», «jusqu’au pays des Philistins et jusqu’à la frontière d’Égypte» (v. 24 et 21). C’étaient en somme les limites que l’Éternel assignait à Israël, en Josué 1:4; mais quand il s’agissait de la sagesse de Salomon, ces limites étaient bien dépassées: Tous les peuples venaient pour l’entendre; tous les rois de la terre venaient s’en enquérir (v. 34), et l’on voyait se réaliser en type ce qui est dit de Christ: «Voici, je t’ai donné pour être une lumière des nations et pour être mon salut jusqu’au bout de la terre».

«La sagesse de Salomon était plus grande que la sagesse de tous les fils de l’Orient et toute la sagesse de l’Égypte. Et il était plus sage qu’aucun homme, plus qu’Ethan, l’Ezrakhite, et qu’Héman, et Calcol et Darda, les fils de Makhol» (v. 30, 31). Nous n’avons pas d’autre mention des deux derniers de ces hommes, sinon en 1 Chron. 2:6, mais nous avons dans la Parole une indication de la sagesse d’Ethan et d’Héman. Héman, l’Ezrakhite, est l’auteur inspiré du Psaume 88, Ethan, l’Ezrakhite, celui du Psaume 89. Or quelle est la sagesse contenue dans ces deux Psaumes? Le Psaume 88 a un caractère absolument spécial, qu’aucun autre Psaume ne reproduit à ce degré. Il nous montre Israël, convaincu d’avoir violé la loi et sous les conséquences de cette désobéissance. Rien de plus terrible! La mort, le sépulcre, le retranchement et les ténèbres sont sa part. Bien plus, la fureur de l’Éternel s’est appesantie sur lui et il l’a accablé de toutes ses vagues. Il est abandonné des hommes et n’a aucune issue. Il crie, il crie en vain (v. 2, 10, 14). Il est rejeté; Dieu lui cache sa face. Les ardeurs de la colère de l’Éternel ont passé sur lui; il est anéanti par ses frayeurs. Dieu a éloigné de lui tous ceux qui auraient pu sympathiser avec lui. Et la conclusion de tout cela? Aucune! Pas un rayon d’espérance. Une âme qui crie, et Dieu qui ne répond pas!1

1 Nous trouvons ces mêmes sentiments exprimés dans la prière de Moïse, au Ps. 90; versets 1-6, au sujet du péché, versets 7-12, au sujet de la violation de la loi, mais non sans espoir.

Or, remarquons-le, ce Psaume est le seul témoignage qui nous soit donné de la sagesse d’Héman. Grande, immense sagesse, en effet, que celle qui, considérant la responsabilité de l’homme vis-à-vis des exigences de la justice et de la sainteté divines, constate que la position est sans issue, et que la loi, mesure de cette responsabilité, doit jeter l’homme dans les ténèbres de la mort, à jamais loin de la face de Dieu.

Héman arrivait, par la sagesse, au bout de ce que Dieu voulait enseigner à l’homme par la loi de Moïse. L’expérience à laquelle devaient aboutir les longs siècles de l’histoire de l’homme et qui devait former la base de l’Évangile, l’esprit de cet homme de Dieu n’en était-il pas déjà convaincu? En lisant ce Psaume, ne croirait-on pas lire dans l’épître aux Romains la description de la loi qui tue le pécheur?

Au Psaume 89, c’est la sagesse d’Ethan qui nous instruit. De quoi parle-t-il, cet autre sage? De la grâce! Ce Psaume est celui des immuables promesses de Dieu et des grâces assurées de David. Les relations du peuple avec Dieu, sur le pied de la loi, ne peuvent aboutir qu’aux ténèbres du jugement et de la mort; ces relations, sur le pied de l’alliance de grâce faite avec David, aboutissent à ceci: «La bonté sera édifiée pour toujours; dans les cieux mêmes tu établiras ta fidélité» (v. 3) — dans les cieux, où jamais rien ne pourra l’atteindre. Ce magnifique Psaume est l’hymne de la grâce et de toute la gloire de Dieu que cette grâce a établie et mise en lumière. La justice, le jugement, la bonté, la vérité, la fidélité, la puissance de Dieu sont célébrés, comme manifestés dans une personne, elle-même centre et clef du Psaume, le vrai David, haut élevé comme un élu d’entre le peuple, l’Oint de l’Éternel (v. 20, 21), celui qui sera fait le premier-né, le plus élevé des rois de la terre (v. 27), celui dont il ne retirera pas sa bonté, auquel il ne démentira pas sa fidélité (v. 33), celui dont la semence sera à toujours, dont le trône sera comme le soleil devant l’Éternel! (v. 37).

Sans doute, dans ce merveilleux tableau de la grâce, vue dans le vrai David et dans son trône glorieux, la question de la responsabilité des fils de David (v. 31-33) ne peut manquer, ni les conséquences qui en sont résultées pour le peuple qui a failli (v. 39-52), mais cette scène sombre elle-même se termine par la bénédiction: «Béni soit l’Éternel pour toujours! Amen, oui, amen» (v. 53).

Tels sont les enseignements de la sagesse, par la bouche de ces deux hommes de Dieu, l’un montrant le régime de la loi qui aboutit à la malédiction et aux ténèbres de la mort, l’autre le régime de la grâce basée sur la personne du vrai David et aboutissant à la gloire éternelle. Le premier proclame la fin du vieil homme, le second le règne sans fin de l’homme nouveau.

Quelle devait donc être la sagesse de Salomon, pour surpasser celle de ces deux sages!