Montée de Paul à Jérusalem, et pensée divine à cet égard
Différentes positions de Paul
Condescendance aux sentiments juifs, et primauté aux Juifs dans l’évangélisation
Après l’histoire du christianisme envisagé comme se rattachant au judaïsme (en rapport avec les promesses et leur accomplissement dans le Messie), nous trouvons Paul dans trois positions différentes. Nous le voyons premièrement condescendre aux sentiments juifs et à la conscience que les Juifs avaient de leurs anciennes relations avec Dieu, dans un but de conciliation et pour tenir compte de ce qui existait à Jérusalem ; il s’adresse même partout aux Juifs dans leurs synagogues, comme à ceux qui avaient administrativement le premier droit à entendre l’Évangile : « Au Juif premièrement, puis au Grec » [(Rom. 1:16)], car Jésus était ministre de la circoncision pour la vérité de Dieu pour accomplir les promesses faites aux pères. Paul n’a jamais manqué à cette déférence aux voies de Dieu, et il constate clairement et dogmatiquement, dans l’épître aux Romains, les principes sur lesquels cette marche était fondée.
Liberté de la grâce selon Dieu, dans une vraie élévation spirituelle
Ensuite on trouve l’apôtre dans toute la liberté de la pleine vérité de la grâce et des desseins de Dieu : cette liberté, découlant de la plénitude de la grâce, se déploie dans l’œuvre qui était propre à Paul, elle caractérise la vraie élévation spirituelle de son ministère, élévation de laquelle il descendait par grâce. Ceci est enseigné dans l’épître aux Éphésiens. Dans ces deux positions, Paul agit sous la conduite du Saint Esprit, accomplissant la volonté du Seigneur.
Confrontation à l’hostilité du judaïsme légal
En troisième lieu enfin, nous voyons l’apôtre aux prises lui-même avec l’hostilité du Judaïsme légal dont il rencontrait constamment les émissaires, et dans le foyer même duquel — dans la partie de son histoire que nous considérons actuellement — il se jette à la fin, en se rendant à Jérusalem. Nous avons aussi à considérer dans cette histoire ce qui était de Dieu et ce qui était la suite des démarches de Paul lui-même. Que la main de Dieu ait été dans tout ce qui est arrivé à l’apôtre, c’est ce qui est hors de doute, comme aussi que Dieu, en résultat, ait tout dirigé pour le bien de l’Église et de son bien-aimé serviteur. Il ne reste qu’à chercher jusqu’à quel point la volonté et les pensées de Paul sont entrées, comme moyens dont Dieu s’est servi, dans la production du résultat que Dieu a voulu amener soit pour l’Église, soit pour son serviteur, soit pour les Juifs eux-mêmes. Ces considérations sont du plus haut intérêt et exigent un humble examen de ce que Dieu, pour nous instruire à cet égard, nous a présenté dans le récit qui nous est donné par l’Esprit lui-même des derniers événements de la vie de Paul.
Volonté de Paul et pensée de l’Esprit
Ch. 21 v. 4 — L’Esprit dit à Paul de ne pas monter à Jérusalem, alors qu’il s’y sent lié
[21:4] La première chose qui nous arrête à l’entrée de ce récit, c’est que le Saint Esprit dit à Paul de ne pas aller à Jérusalem (vers. 4) ; et cette parole a une importance évidente. L’apôtre se sentait lié à monter à Jérusalem [(20:22)] ; il y avait dans son esprit à lui quelque chose qui le poussait là, un sentiment qui le dominait intérieurement et l’engageait dans ce chemin ; mais l’Esprit dans son témoignage positif et extérieur lui dit de ne pas monter à Jérusalem.
Motifs de monter à Jérusalem, liés à l’affection charnelle pour le peuple juif
[19:21] L’intention de l’apôtre avait été d’aller à Rome ; et Paul étant apôtre des Gentils, envoyé pour prêcher l’Évangile à toute créature, il n’y avait rien en soi dans son projet qui ne fût selon la grâce (Rom. 1:13-15) ; cependant Dieu ne lui avait jamais permis de se rendre à Rome et il dut écrire aux Romains son Épître sans les avoir vus. Le ciel est la capitale du christianisme : Rome et Jérusalem ne devaient avoir aucune importance pour Paul, sauf à ce qu’il supportât avec affection l’une, et fût disposé, quand cela se pourrait, à évangéliser l’autre. Le passage des Actes (chap. 19:21) qui est souvent traduit : « Paul s’était proposé par l’Esprit » ou : « par un mouvement de l’Esprit », ne se rapporte réellement qu’à l’esprit de Paul. L’apôtre se proposait ces choses « dans son esprit », c’est-à-dire dans sa pensée à lui, disant : « Après que j’aurai été là, il faut que je voie Rome aussi ». [Rom. 15:25-28] Puis nous le voyons se charger des offrandes des saints en Achaïe et en Macédoine : il désirait prouver son affection pour les pauvres de son peuple (Gal. 2:10). C’était très bien ; mais je ne sais si c’était là une fonction apostolique. C’était un sentiment évidemment juif qui faisait un cas particulier des pauvres de Jérusalem, et partant de Jérusalem même. Un Juif préférait être pauvre à Jérusalem que riche parmi les Gentils. De pauvres chrétiens se trouvaient, sans doute, déjà dans cette ville lors de leur conversion ; mais l’affection pour Jérusalem, naturelle à un Juif, et même louable chez lui, était l’origine de ces rapports des autres Juifs avec ceux qui demeuraient à Jérusalem (comp. Néh. 11:2 et Actes 24:17). Ce sentiment qui subsistait chez eux, tenait à leurs relations avec le Judaïsme (Rom. 15:25-28). L’attachement du cœur de Paul à la nation à laquelle il appartenait selon la chair, qui avait été le peuple chéri de Dieu, et l’était encore, quoique rejetée pour un temps, avait son côté vrai et profondément touchant. Le Résidu devait entrer dans le royaume de Dieu par le christianisme, toutefois Israël demeurait toujours le bien-aimé de Dieu. Mais ce sentiment d’affection de l’apôtre pour Israël touchait, d’un autre côté, à la chair. L’apôtre — le messager de la gloire céleste qui a fait ressortir la doctrine de l’Église composée de Juifs et de Gentils, unis sans distinction dans le corps de Christ, doctrine qui effaçait le judaïsme — a été jeté par ce sentiment dans le sein du judaïsme hostile, du judaïsme furieux contre cette égalité spirituelle.
Dieu maintient Sa suprématie en toutes choses, quoique fasse Son serviteur
Dieu exerce Paul, mais est avec lui, manifestant sa fidélité
Cependant la main de Dieu a maintenu, sans doute, sa suprématie dans tout ce qui est arrivé. Paul, individuellement, a trouvé son niveau. Comme instrument de la révélation de Dieu, il avait annoncé dans toute leur étendue et toute leur force les conseils de la grâce souveraine de Dieu : le vin n’était pas frelaté ; il était pur, comme l’apôtre l’avait reçu. Il marche aussi lui-même et d’une manière remarquable à la hauteur de la révélation qui lui avait été confiée (comp. 2 Cor. 2:17 ; 4:1-4) ; mais Paul individuellement est un homme : il faut qu’il soit exercé et manifesté. Or dans les exercices auxquels Dieu nous assujettit, il arrive que là où la chair a trouvé son plaisir et dans la sphère où elle s’est complue à elle-même, elle trouve son affliction quand Dieu agit. Toutefois, si Dieu a trouvé bon d’éprouver son serviteur et de lui manifester quel était son état sous ce rapport, il s’est tenu près de lui et l’a béni à travers l’épreuve même qu’il a fait servir au témoignage de l’apôtre, et il a rafraîchi le cœur de son bien-aimé et fidèle serviteur. La manifestation de ce qui, dans celui-ci, n’était pas selon l’Esprit et selon la hauteur de sa vocation apostolique, était en amour pour sa bénédiction et pour celle de l’Église. Heureux celui qui pourra marcher aussi fidèlement, et se maintenir au même degré, par la grâce, dans le chemin de la grâce ! Toutefois, Christ est le seul modèle. Je ne vois personne qui (dans une autre carrière) ait ressemblé au Seigneur lui-même dans sa vie publique autant que Paul. Plus on suit la marche de l’apôtre, plus on verra cette ressemblance ; seulement Christ était le modèle de la perfection en obéissance, tandis que dans son précieux serviteur la chair se trouvait : celui-ci aurait été le premier à reconnaître que la perfection ne devait être attribuée qu’à Jésus seul.
Action de la main divine, même si c’est par l’affection humaine de Paul
Je crois donc que la main de Dieu était dans ce voyage de Paul ; je crois qu’il voulait dans sa souveraine sagesse faire passer son serviteur par ce chemin et l’y bénir aussi, mais que le moyen employé selon cette sagesse souveraine, pour y introduire l’apôtre, a été son affection humaine pour le peuple de sa parenté selon la chair, et non pas le Saint Esprit agissant de la part de Christ dans l’Assemblée. Cet attachement à son peuple, cette affection humaine a rencontré dans le peuple ce qui la mettait à sa place. Humainement parlant, le sentiment de l’apôtre était un sentiment aimable, mais il n’était pas le fruit propre de la puissance de l’Esprit, fondée sur la mort et la résurrection de Christ. Dans le résultat de cette œuvre divine, dans les pensées qui y dominaient, il n’y avait plus de Juifs ni de Gentils. Dans le Christ, vivant ici-bas, ce sentiment de liaison avec Jérusalem était juste : Christ, à la fin de sa vie, allait à Jérusalem pour mourir ; il était venu dans ce but.
L’activité de Paul était loin de Jérusalem, étant envoyé vers les nations
L’affection de Paul était bonne, mais, comme source d’activité, elle n’était pas selon la hauteur de l’œuvre de l’Esprit qui, de la part d’un Christ glorifié, avait envoyé Paul loin de Jérusalem vers les Gentils [(22:21)] pour révéler l’Église, unie à Christ dans le ciel comme un corps à sa tête. [22:22] Aussi les Juifs ont-ils écouté l’apôtre jusqu’au moment où il a parlé de cette mission ; [22:23-24] et alors ils ont poussé les cris qui ont amené son emprisonnement1. L’apôtre a souffert pour la vérité, mais en un lieu où cette vérité n’avait aucun accès, selon le témoignage de Christ lui-même. Cependant les Juifs ont dû manifester leur haine contre l’Évangile et donner cette dernière preuve de leur opposition obstinée aux voies de Dieu en grâce.
1 Il est digne de remarque que la volonté de Christ était que Paul allât vers les Gentils. Ajoutons à cela qu’Il avait jadis fait connaître cette volonté par la déclaration suivante : « Sors au plus tôt de Jérusalem, parce qu’ils ne recevront pas ton témoignage à mon égard » (22:18). En sorte que cette déclaration de Paul que son témoignage ne serait pas reçu à Jérusalem a été l’occasion de sa capture. La parole de Christ et celle de Paul, montraient que son service n’était pas à Jérusalem, mais autre part.
Fin des travaux de Paul, et conformité à Christ dans son service et son rejet
En même temps, quels qu’aient pu être les travaux ultérieurs de l’apôtre (s’il y en eût), le Saint Esprit n’en fait pas mention. [28:23] Paul voit les Juifs dans sa maison à Rome [28:30] et reçoit ceux qui veulent venir le voir ; mais la page du récit tracé par l’Esprit se ferme là. Cette histoire est terminée : la mission apostolique au milieu des Gentils, en rapport avec la fondation de l’Église, est close. Rome n’est que la prison de l’apôtre de la vérité. Jérusalem le rejette, et Rome l’emprisonne et le met à mort, comme elles l’avaient fait à Jésus, à qui le bienheureux apôtre a dû ressembler en cela aussi, d’après le vœu qu’il exprime au chapitre 3 de l’épître aux Philippiens [(v. 10-11)], car Christ et la conformité à lui étaient son seul objet. Il a été donné à Paul de trouver cette conformité avec son maître dans son service, comme elle existait déjà si puissamment dans son cœur et dans son âme, avec la différence nécessaire entre un ministère qui ne devait ni briser le roseau froissé, ni élever sa voix dans les rues [(Matt. 12:19-20)] — et un ministère qui, en témoignage, devait montrer le jugement aux Gentils.
Mise de côté des centres de l’homme, l’Église selon Dieu étant manifestée
La mission des douze aux Gentils, ayant Jérusalem pour point de départ, selon Matthieu 28 [(v. 19)], n’a jamais reçu d’exécution1, le Saint Esprit ne rapportant pas ce fait. Jérusalem a retenu les douze : ils n’ont pas même parcouru toutes les villes d’Israël. Pierre a reçu le ministère de la circoncision [(Gal. 2:7)] ; le ministère des Gentils a été confié à Paul, en rapport avec la doctrine de l’Église et d’un Christ glorieux, d’un Christ que l’apôtre ne connaissait plus selon la chair. Jérusalem, où il a été attiré par son affection, a rejeté Paul ainsi que sa mission : son ministère envers les Gentils en tant que libre effet de la puissance de l’Esprit, a eu aussi son terme. L’histoire ecclésiastique peut nous dire davantage, peut-être, sur l’œuvre de l’évangélisation du monde ; mais Dieu a pris soin d’ensevelir l’histoire de cette œuvre dans une profonde obscurité. L’Esprit ne reconnaît rien de cette œuvre : on n’entend plus parler des apôtres à Jérusalem — et Rome, ainsi que nous l’avons vu, n’a pas eu d’apôtres pour fonder une église dans ses murs (pour autant que le Saint Esprit reconnaît l’œuvre accomplie là, dans le récit qu’il nous en donne), si ce n’est que l’apôtre des Gentils y a été prisonnier et finalement mis à mort. L’homme a manqué partout sur la terre ; les centres, religieux et politique, du monde, centres que Dieu avait établis dans ses voies envers la terre, ont rejeté le témoignage, ont mis à mort le témoin. Mais le résultat a été que le ciel a maintenu ses droits intacts et dans leur pureté absolue. L’Église, la vraie capitale céleste et éternelle de la gloire et des voies de Dieu ; l’Église qui avait sa place dans les conseils de Dieu avant que le monde fût ; l’Église qui répond au cœur de Dieu en grâce, comme unie à Christ dans la gloire ; l’Église reste l’objet de la foi. Elle est révélée selon les pensées de Dieu et parfaitement telle qu’elle est dans ses pensées, jusqu’à ce que — Jérusalem céleste — elle soit manifestée en gloire, en rapport avec l’accomplissement des voies de Dieu sur la terre, lorsque Jérusalem sera rétablie comme centre de ses voies terrestres en grâce, comme Son trône, comme sa capitale, même au milieu des nations, et que la puissance des Gentils dont Rome était le centre et le siège aura disparu.
1 Marc 16:20 est le seul passage qui pourrait sembler faire allusion à l’accomplissement de cette mission et il n’en donne pas même le caractère, car, comme Colossiens 1:6, il se rapporte au monde entier et est fondé sur l’ascension de Christ. Ce n’est pas une mission aux Gentils fondée sur la résurrection seule.
Pensées de Paul et déroulement historique, entre Rome et Jérusalem
Liens de Paul avec les croyants de Rome
Rome, capitale du monde, a une assemblée sans que l’apôtre y soit passé
Examinons maintenant les pensées de l’apôtre et ce qui, historiquement, s’est passé : l’apôtre écrit de Corinthe aux Romains quand il avait en vue son voyage à Rome. Le christianisme avait pris racine dans ce centre du monde sans qu’un apôtre quelconque l’y eût planté : Paul le suit ; la capitale de l’empire est comme une partie de son territoire apostolique qui lui échappe (voyez Rom. 1:13-15 et ch. 15 [(v. 22-29)], où il revient au même sujet). S’il n’a pas pu aller à Rome, car Dieu ne veut pas commencer par la capitale du monde (comparez la destruction de la capitale cananéenne Hatsor en Josué 11:10-13), il écrira au moins aux chrétiens à Rome en se fondant sur son apostolat universel envers les Gentils. Des chrétiens étaient déjà établis à Rome ; Dieu l’a voulu ainsi ; mais ces chrétiens étaient en quelque sorte du ressort de l’apôtre et beaucoup de personnes qui avaient été personnellement en relation avec lui se trouvaient dans cette ville. Le nombre et le caractère des salutations qui se trouvent à la fin de l’épître aux Romains sont remarquables et ont un cachet particulier, faisant voir que les chrétiens de Rome étaient en grande partie les enfants en la foi de Paul.
Position apostolique de Paul quant à Rome et aux Gentils
Au chapitre 15:14-29, de cette même épître, Paul développe sa position apostolique vis-à-vis des Romains et des autres Gentils. Il veut aussi aller en Espagne, quand il aura un peu vu ses frères de Rome ; il veut communiquer à ceux-ci des grâces (Rom. 1 [v. 11]), mais être consolé par leur foi mutuelle [(Rom. 1:12)] ; il veut jouir un peu de leur compagnie. Ils sont en rapport avec lui, mais ils existent sans lui à Rome ; quand donc il les aura vus un peu, il se propose d’aller en Espagne. Mais il a été désappointé à l’égard de ses projets ; et tout ce que le Saint Esprit nous raconte, c’est qu’il a été prisonnier à Rome : — silence profond quant à l’Espagne. Au lieu de passer outre, après avoir vu ses frères de Rome et leur avoir communiqué ses dons, l’apôtre reste deux ans prisonnier à Rome [(Act. 28:30)] et on ne sait s’il a jamais été libéré ; — les uns disent oui, les autres disent non — la Parole ne dit rien1.
1 Note Bibliquest : sur ce sujet, voir A.L., les derniers jours de l’apôtre Paul.
Jérusalem intercepte les pensées et le service de Paul, avant Rome
Paul part à Jérusalem quand un grand champ d’évangélisation est ouvert à l’occident
C’est dans le moment où, à son passage à Corinthe, l’apôtre a exposé son intention d’aller à Rome et le caractère de ses relations selon l’Esprit avec cette ville, un vaste champ à l’occident s’ouvrant devant lui, que ses anciennes affections pour son peuple et Jérusalem interviennent : « Mais à présent je vais à Jérusalem, étant occupé au service des saints » (Rom. 15:25-28). Pourquoi ne pas aller à Rome selon l’énergie de l’Esprit quand son œuvre était achevée en Grèce (Rom. 15:23) ? Dieu a voulu sans doute que tout ce qui était arrivé à Paul à Jérusalem eût lieu, et que Rome et les Romains prissent, à l’égard du témoignage d’un Christ glorieux et de l’Église, le triste caractère d’une prison ; mais, quant à Paul, pourquoi placer Jérusalem entre son désir évangélique et son œuvre ? L’affection était louable — le service bon pour un serviteur (diacre) ou un messager des assemblées, mais pour Paul qui avait tout l’occident ouvert à ses pensées pour y prêcher l’Évangile… ?
Danger pressenti à Jérusalem, indiqué par l’Esprit, et venue à Rome comme prisonnier
Jérusalem a intercepté sa vue pour le moment, aussi le Saint Esprit (chap. 21:41) l’avertit en chemin et lui dit, comme nous l’avons vu, de ne pas aller dans cette ville. L’apôtre lui-même pressentait le danger qu’il courait en y allant ; il était sûr de venir à Rome dans la plénitude de la bénédiction de l’Évangile, mais il n’était rien moins que sûr qu’il viendrait avec joie (Rom. 15:29-32). La chose pour laquelle il demandait les prières des Romains, a tourné tout autrement qu’il ne l’avait désiré. Il a été délivré des mains des Juifs à Jérusalem, mais comme prisonnier : [28:15] quand il est arrivé en Italie, il a pris courage lorsqu’il a vu ses frères au Forum d’Appius et aux Trois-Tavernes. Il n’y avait pas pour lui non plus de voyage en Espagne.
Action de la grâce divine, et accomplissement des voies de Dieu
Dieu est avec Paul, pour le discipliner et le soutenir, et agissant pour Sa gloire
Tout ceci me semble très solennel. Le Seigneur plein de grâce et de tendresse a été avec son pauvre, mais bien-aimé serviteur. Un pareil récit, et un récit où il s’agit d’une personne telle que Paul, est du plus touchant intérêt ; les voies du Seigneur y sont adorables et parfaites en bonté. La réalité de la foi se trouve en plein chez Paul ; les voies de grâce de Dieu envers lui sont parfaites, et parfaites en tendresse aussi chez le Seigneur. Dieu se tient avec son serviteur pour l’encourager et pour le fortifier dans l’épreuve même où il se trouve. En même temps, à l’égard de ce désir d’aller à Jérusalem, [21:4] l’apôtre est averti par l’Esprit [21:11] et les conséquences de ce voyage lui sont déclarées ; ne se détournant pas de son projet, il subit la discipline qui met son âme à sa place, mais dans une place de pleine bénédiction devant Dieu : sa marche trouve son niveau quant à la puissance spirituelle. Il subit extérieurement la puissance de ce qui avait exercé de l’influence sur lui moralement, cherchant à entraver son ministère ; et un joug sur sa chair répond à la liberté qu’il lui avait accordée. Il y avait de la justice dans les voies de Dieu ; son serviteur lui était trop précieux pour qu’il permît qu’il en fût autrement. En même temps, quant au résultat et au témoignage, Dieu a tout ordonné pour sa propre gloire, et dans une parfaite sagesse à l’égard de l’avenir de l’Église.
Rejet définitif de la grâce par Jérusalem, et témoignage du Seigneur pour tous
Jérusalem, ainsi que nous l’avons vu, repousse définitivement la pensée qu’un témoignage soit adressé aux Gentils, et ainsi la grâce qui l’envoyait — en un mot, les voies de Dieu dans l’Église (comp. 1 Thess. 2:14-16) ; et Rome devient la prison de ce témoignage, tandis que, selon la promesse du Seigneur, le témoignage est porté devant les gouverneurs et les rois [(Act. 9:15)], et devant César lui-même.
Même position pour Jésus et pour Paul, mais pas comme dans la même place devant Dieu
J’ai dit que la grâce mettait Paul dans la position où avait été Jésus, livré aux Gentils par la haine des Juifs : c’était une grande grâce ! La différence entre l’amour infini du Seigneur qui se livrait lui-même à la mort, et la relation dans laquelle Paul se trouvait avec les Juifs, était celle-ci que Jésus était en butte à leur haine comme étant à sa vraie place devant Dieu. Jésus était venu aux Juifs ; qu’il fût livré, c’était réellement de sa part mettre le comble à son dévouement et à son service ; c’était au fond s’offrir par l’Esprit éternel [(Héb. 9:14)]. C’était la sphère propre de son service, comme envoyé de Dieu. Paul, lui, rentrait dans cette sphère judaïque d’où l’énergie du Saint Esprit l’avait tiré. « Te retirant », dit le Seigneur, « du milieu du peuple et des nations, vers lesquelles moi je t’envoie pour ouvrir leurs yeux » (Actes 26:17). Paul avait été pris par Jésus qui l’avait établi, en dehors des Juifs et des Gentils, pour exercer un ministère qui les liait tous les deux en un seul corps dans le ciel, avec Christ qui l’avait ainsi envoyé. Paul ne connaissait personne selon la chair ; il n’y avait dans le Christ Jésus ni Juif, ni Grec.
Ch. 21 : Montée de Paul à Jérusalem et arrestation
Ch. 21 v. 1-14 — Chemin de Paul vers Jérusalem et avertissements de l’Esprit
Ch. 21 v. 1-11 — Avertissement de ne pas aller à Jérusalem, et des dangers
Mais reprenons l’histoire de notre apôtre. [21:4] Il est averti par le Saint Esprit de ne pas monter à Jérusalem, ainsi que nous l’avons vu (chap. 21:4) ; [21:5] cependant il continue son chemin. [21:10] À Césarée un prophète, nommé Agabus, descend de Judée [21:11] et lui annonce qu’il sera lié et livré aux Gentils (vers. 10, 11). On peut dire qu’il n’y avait rien là qui interdît à l’apôtre de monter à Jérusalem : cela est vrai, mais venant après l’ordre qu’il avait reçu, cet avertissement renforçait la direction déjà donnée par l’Esprit de n’y pas aller. Quand Paul marchait dans la liberté de l’Esprit, et qu’il était averti d’un danger, il s’enfuyait, tout en sachant braver aussi tous les périls quand le témoignage l’exigeait : à Éphèse il s’est laissé persuader de ne pas entrer au théâtre [(19:30-31)].
Ch. 21 v. 12-14 — Détermination de Paul et volonté du Seigneur
Le Saint Esprit n’avertit pas en général les croyants des dangers qui peuvent les menacer ; il conduit dans le chemin du Seigneur, et si la persécution arrive, il donne la force pour la supporter. Ici Paul était constamment averti : [21:12] ses amis aussi l’engagent à ne pas monter à Jérusalem ; [21:14] mais il ne veut pas se laisser persuader. Ils se taisent, peu satisfaits, en disant : « La volonté du Seigneur soit faite » (vers. 14) ; et c’était, je n’en doute pas, la volonté du Seigneur, mais pour l’accomplissement de desseins que Paul ne connaissait pas par l’intelligence donnée par le Saint Esprit. Il se sentait seulement pressé d’aller à Jérusalem, [21:13] prêt à tout souffrir pour le Seigneur.
Ch. 21 v. 15-29 — Paul se place sous l’influence des chrétiens juifs judaïsants
Ch. 21 v. 15-25 — Paul est soumis aux préjugés des Juifs vers qui il est venu
[21:15] Paul monte donc à Jérusalem ; [21:18] et là, il va chez Jacques ; les anciens s’y réunissent (vers. 17, 18). [21:19] Il leur raconte l’œuvre de Dieu parmi les Gentils ; [21:20] eux invoquent le Judaïsme dont la multitude était remplie, et, tout en se réjouissant du bien que Dieu avait opéré par l’Esprit, [21:21] ils désirent que Paul se montre obéissant à la loi. [21:22] Il faut que les croyants de Jérusalem se réunissent à l’occasion de l’arrivée de Paul, [21:24] et il faut satisfaire à leurs préjugés à l’égard de la loi. Paul s’est placé dans la présence des exigences des hommes : refuser d’y obtempérer, c’eût été déclarer que leurs pensées étaient fondées à son égard ; agir selon leur désir, c’eût été faire une règle, non de la direction de l’Esprit, en toute liberté d’amour, mais de l’état de préjugé et d’ignorance où se trouvaient ceux qui l’entouraient. La cause de la difficulté pour l’apôtre était qu’il se trouvait à Jérusalem, non selon l’Esprit, mais selon son attachement à ses anciennes liaisons avec le judaïsme. Il faut être au-dessus des préjugés des autres, et libre de leur influence pour pouvoir condescendre en amour à ces préjugés.
Ch. 21 v. 26-29 — Paul est livrée ainsi à ses ennemis, les Juifs opposés à l’évangile
[21:26] Une fois à Jérusalem, Paul n’a guère pu faire autre chose que de satisfaire aux demandes des chrétiens judaïsants. Or, la main de Dieu y est. En cherchant à plaire aux Juifs croyants, l’acte de Paul le jette au pouvoir de ses ennemis ; il se trouve dans la gueule du lion, entre les mains des Juifs adversaires de l’Évangile. Ajoutons qu’à dater de ce moment on n’entend plus parler des chrétiens de Jérusalem : ils avaient fait leur œuvre. Ils ont bien accepté, sans doute, l’aumône des Gentils.
Ch. 21 v. 30-40 — Paul délivré des Juifs et arrêté par les Romains
[21:30] Toute la ville était en émoi et le temple fermé (vers. 30). [21:32] Le commandant de la place vient délivrer Paul des mains des Juifs [21:31] qui voulaient le tuer, [21:33] en l’arrêtant cependant lui-même, car les Romains étaient habitués à ces violences et méprisaient cordialement le peuple bien-aimé de Dieu, mais également fier et dégradé quant à son état. [21:37-39] Paul, néanmoins, commande le respect du commandant par sa manière de l’interpeller, [21:40] et celui-ci lui permet de parler au peuple.
Chapitre 21
Montée de Paul à Jérusalem, et pensée divine à cet égard
Différentes positions de Paul
Condescendance aux sentiments juifs, et primauté aux Juifs dans l’évangélisation
Après l’histoire du christianisme envisagé comme se rattachant au judaïsme (en rapport avec les promesses et leur accomplissement dans le Messie), nous trouvons Paul dans trois positions différentes. Nous le voyons premièrement condescendre aux sentiments juifs et à la conscience que les Juifs avaient de leurs anciennes relations avec Dieu, dans un but de conciliation et pour tenir compte de ce qui existait à Jérusalem ; il s’adresse même partout aux Juifs dans leurs synagogues, comme à ceux qui avaient administrativement le premier droit à entendre l’Évangile : « Au Juif premièrement, puis au Grec » [(Rom. 1:16)], car Jésus était ministre de la circoncision pour la vérité de Dieu pour accomplir les promesses faites aux pères. Paul n’a jamais manqué à cette déférence aux voies de Dieu, et il constate clairement et dogmatiquement, dans l’épître aux Romains, les principes sur lesquels cette marche était fondée.
Liberté de la grâce selon Dieu, dans une vraie élévation spirituelle
Ensuite on trouve l’apôtre dans toute la liberté de la pleine vérité de la grâce et des desseins de Dieu : cette liberté, découlant de la plénitude de la grâce, se déploie dans l’œuvre qui était propre à Paul, elle caractérise la vraie élévation spirituelle de son ministère, élévation de laquelle il descendait par grâce. Ceci est enseigné dans l’épître aux Éphésiens. Dans ces deux positions, Paul agit sous la conduite du Saint Esprit, accomplissant la volonté du Seigneur.
Confrontation à l’hostilité du judaïsme légal
En troisième lieu enfin, nous voyons l’apôtre aux prises lui-même avec l’hostilité du Judaïsme légal dont il rencontrait constamment les émissaires, et dans le foyer même duquel — dans la partie de son histoire que nous considérons actuellement — il se jette à la fin, en se rendant à Jérusalem. Nous avons aussi à considérer dans cette histoire ce qui était de Dieu et ce qui était la suite des démarches de Paul lui-même. Que la main de Dieu ait été dans tout ce qui est arrivé à l’apôtre, c’est ce qui est hors de doute, comme aussi que Dieu, en résultat, ait tout dirigé pour le bien de l’Église et de son bien-aimé serviteur. Il ne reste qu’à chercher jusqu’à quel point la volonté et les pensées de Paul sont entrées, comme moyens dont Dieu s’est servi, dans la production du résultat que Dieu a voulu amener soit pour l’Église, soit pour son serviteur, soit pour les Juifs eux-mêmes. Ces considérations sont du plus haut intérêt et exigent un humble examen de ce que Dieu, pour nous instruire à cet égard, nous a présenté dans le récit qui nous est donné par l’Esprit lui-même des derniers événements de la vie de Paul.
Volonté de Paul et pensée de l’Esprit
Ch. 21 v. 4 — L’Esprit dit à Paul de ne pas monter à Jérusalem, alors qu’il s’y sent lié
[21:4] La première chose qui nous arrête à l’entrée de ce récit, c’est que le Saint Esprit dit à Paul de ne pas aller à Jérusalem (vers. 4) ; et cette parole a une importance évidente. L’apôtre se sentait lié à monter à Jérusalem [(20:22)] ; il y avait dans son esprit à lui quelque chose qui le poussait là, un sentiment qui le dominait intérieurement et l’engageait dans ce chemin ; mais l’Esprit dans son témoignage positif et extérieur lui dit de ne pas monter à Jérusalem.
Motifs de monter à Jérusalem, liés à l’affection charnelle pour le peuple juif
[19:21] L’intention de l’apôtre avait été d’aller à Rome ; et Paul étant apôtre des Gentils, envoyé pour prêcher l’Évangile à toute créature, il n’y avait rien en soi dans son projet qui ne fût selon la grâce (Rom. 1:13-15) ; cependant Dieu ne lui avait jamais permis de se rendre à Rome et il dut écrire aux Romains son Épître sans les avoir vus. Le ciel est la capitale du christianisme : Rome et Jérusalem ne devaient avoir aucune importance pour Paul, sauf à ce qu’il supportât avec affection l’une, et fût disposé, quand cela se pourrait, à évangéliser l’autre. Le passage des Actes (chap. 19:21) qui est souvent traduit : « Paul s’était proposé par l’Esprit » ou : « par un mouvement de l’Esprit », ne se rapporte réellement qu’à l’esprit
. L’apôtre se proposait ces choses « dans son esprit », c’est-à-dire dans sa pensée à lui, disant : « Après que j’aurai été là, il faut que je voie Rome aussi ». [Rom. 15:25-28] Puis nous le voyons se charger des offrandes des saints en Achaïe et en Macédoine : il désirait prouver son affection pour les pauvres de son peuple (Gal. 2:10). C’était très bien ; mais je ne sais si c’était là une fonction apostolique. C’était un sentiment évidemment juif qui faisait un cas particulier des pauvres de Jérusalem, et partant de Jérusalem même. Un Juif préférait être pauvre à Jérusalem que riche parmi les Gentils. De pauvres chrétiens se trouvaient, sans doute, déjà dans cette ville lors de leur conversion ; mais l’affection pour Jérusalem, naturelle à un Juif, et même louable chez lui, était l’origine de ces rapports des autres Juifs avec ceux qui demeuraient à Jérusalem (comp. Néh. 11:2 et Actes 24:17). Ce sentiment qui subsistait chez eux, tenait à leurs relations avec le Judaïsme (Rom. 15:25-28). L’attachement du cœur de Paul à la nation à laquelle il appartenait selon la chair, qui avait été le peuple chéri de Dieu, et l’était encore, quoique rejetée pour un temps, avait son côté vrai et profondément touchant. Le Résidu devait entrer dans le royaume de Dieu par le christianisme, toutefois Israël demeurait toujours le bien-aimé de Dieu. Mais ce sentiment d’affection de l’apôtre pour Israël touchait, d’un autre côté, à la chair. L’apôtre — le messager de la gloire céleste qui a fait ressortir la doctrine de l’Église composée de Juifs et de Gentils, unis sans distinction dans le corps de Christ, doctrine qui effaçait le judaïsme — a été jeté par ce sentiment dans le sein du judaïsme hostile, du judaïsme furieux contre cette égalité spirituelle.Dieu maintient Sa suprématie en toutes choses, quoique fasse Son serviteur
Dieu exerce Paul, mais est avec lui, manifestant sa fidélité
Cependant la main de Dieu a maintenu, sans doute, sa suprématie dans tout ce qui est arrivé. Paul, individuellement, a trouvé son niveau. Comme instrument de la révélation de Dieu, il avait annoncé dans toute leur étendue et toute leur force les conseils de la grâce souveraine de Dieu : le vin n’était pas frelaté ; il était pur, comme l’apôtre l’avait reçu. Il marche aussi lui-même et d’une manière remarquable à la hauteur de la révélation qui lui avait été confiée (comp. 2 Cor. 2:17 ; 4:1-4) ; mais Paul individuellement est un homme : il faut qu’il soit exercé et manifesté. Or dans les exercices auxquels Dieu nous assujettit, il arrive que là où la chair a trouvé son plaisir et dans la sphère où elle s’est complue à elle-même, elle trouve son affliction quand Dieu agit. Toutefois, si Dieu a trouvé bon d’éprouver son serviteur et de lui manifester quel était son état sous ce rapport, il s’est tenu près de lui et l’a béni à travers l’épreuve même qu’il a fait servir au témoignage de l’apôtre, et il a rafraîchi le cœur de son bien-aimé et fidèle serviteur. La manifestation de ce qui, dans celui-ci, n’était pas selon l’Esprit et selon la hauteur de sa vocation apostolique, était en amour pour sa bénédiction et pour celle de l’Église. Heureux celui qui pourra marcher aussi fidèlement, et se maintenir au même degré, par la grâce, dans le chemin de la grâce ! Toutefois, Christ est le seul modèle. Je ne vois personne qui (dans une autre carrière) ait ressemblé au Seigneur lui-même dans sa vie publique autant que Paul. Plus on suit la marche de l’apôtre, plus on verra cette ressemblance ; seulement Christ était le modèle de la perfection en obéissance, tandis que dans son précieux serviteur la chair se trouvait : celui-ci aurait été le premier à reconnaître que la perfection ne devait être attribuée qu’à Jésus seul.
Action de la main divine, même si c’est par l’affection humaine de Paul
Je crois donc que la main de Dieu était dans ce voyage de Paul ; je crois qu’il voulait dans sa souveraine sagesse faire passer son serviteur par ce chemin et l’y bénir aussi, mais que le moyen employé selon cette sagesse souveraine, pour y introduire l’apôtre, a été son affection humaine pour le peuple de sa parenté selon la chair, et non pas le Saint Esprit agissant de la part de Christ dans l’Assemblée. Cet attachement à son peuple, cette affection humaine a rencontré dans le peuple ce qui la mettait à sa place. Humainement parlant, le sentiment de l’apôtre était un sentiment aimable, mais il n’était pas le fruit propre de la puissance de l’Esprit, fondée sur la mort et la résurrection de Christ. Dans le résultat de cette œuvre divine, dans les pensées qui y dominaient, il n’y avait plus de Juifs ni de Gentils. Dans le Christ, vivant ici-bas, ce sentiment de liaison avec Jérusalem était juste : Christ, à la fin de sa vie, allait à Jérusalem pour mourir ; il était venu dans ce but.
L’activité de Paul était loin de Jérusalem, étant envoyé vers les nations
L’affection de Paul était bonne, mais, comme source d’activité, elle n’était pas selon la hauteur de l’œuvre de l’Esprit qui, de la part d’un Christ glorifié, avait envoyé Paul loin de Jérusalem vers les Gentils [(22:21)] pour révéler l’Église, unie à Christ dans le ciel comme un corps à sa tête. [22:22] Aussi les Juifs ont-ils écouté l’apôtre jusqu’au moment où il a parlé de cette mission ; [22:23-24] et alors ils ont poussé les cris qui ont amené son emprisonnement1. L’apôtre a souffert pour la vérité, mais en un lieu où cette vérité n’avait aucun accès, selon le témoignage de Christ lui-même. Cependant les Juifs ont dû manifester leur haine contre l’Évangile et donner cette dernière preuve de leur opposition obstinée aux voies de Dieu en grâce.
1 Il est digne de remarque que la volonté de Christ était que Paul allât vers les Gentils. Ajoutons à cela qu’Il avait jadis fait connaître cette volonté par la déclaration suivante : « Sors au plus tôt de Jérusalem, parce qu’ils ne recevront pas ton témoignage à mon égard » (22:18). En sorte que cette déclaration de Paul que son témoignage ne serait pas reçu à Jérusalem a été l’occasion de sa capture. La parole de Christ et celle de Paul, montraient que son service n’était pas à Jérusalem, mais autre part.
Fin des travaux de Paul, et conformité à Christ dans son service et son rejet
En même temps, quels qu’aient pu être les travaux ultérieurs de l’apôtre (s’il y en eût), le Saint Esprit n’en fait pas mention. [28:23] Paul voit les Juifs dans sa maison à Rome [28:30] et reçoit ceux qui veulent venir le voir ; mais la page du récit tracé par l’Esprit se ferme là. Cette histoire est terminée : la mission apostolique au milieu des Gentils, en rapport avec la fondation de l’Église, est close. Rome n’est que la prison de l’apôtre de la vérité. Jérusalem le rejette, et Rome l’emprisonne et le met à mort, comme elles l’avaient fait à Jésus, à qui le bienheureux apôtre a dû ressembler en cela aussi, d’après le vœu qu’il exprime au chapitre 3 de l’épître aux Philippiens [(v. 10-11)], car Christ et la conformité à lui étaient son seul objet. Il a été donné à Paul de trouver cette conformité avec son maître dans son service, comme elle existait déjà si puissamment dans son cœur et dans son âme, avec la différence nécessaire entre un ministère qui ne devait ni briser le roseau froissé, ni élever sa voix dans les rues [(Matt. 12:19-20)] — et un ministère qui, en témoignage, devait montrer le jugement aux Gentils.
Mise de côté des centres de l’homme, l’Église selon Dieu étant manifestée
La mission des douze aux Gentils, ayant Jérusalem pour point de départ, selon Matthieu 28 [(v. 19)], n’a jamais reçu d’exécution1, le Saint Esprit ne rapportant pas ce fait. Jérusalem a retenu les douze : ils n’ont pas même parcouru toutes les villes d’Israël. Pierre a reçu le ministère de la circoncision [(Gal. 2:7)] ; le ministère des Gentils a été confié à Paul, en rapport avec la doctrine de l’Église et d’un Christ glorieux, d’un Christ que l’apôtre ne connaissait plus selon la chair. Jérusalem, où il a été attiré par son affection, a rejeté Paul ainsi que sa mission : son ministère envers les Gentils en tant que libre effet de la puissance de l’Esprit, a eu aussi son terme. L’histoire ecclésiastique peut nous dire davantage, peut-être, sur l’œuvre de l’évangélisation du monde ; mais Dieu a pris soin d’ensevelir l’histoire de cette œuvre dans une profonde obscurité. L’Esprit ne reconnaît rien de cette œuvre : on n’entend plus parler des apôtres à Jérusalem — et Rome, ainsi que nous l’avons vu, n’a pas eu d’apôtres pour fonder une église dans ses murs (pour autant que le Saint Esprit reconnaît l’œuvre accomplie là, dans le récit qu’il nous en donne), si ce n’est que l’apôtre des Gentils y a été prisonnier et finalement mis à mort. L’homme a manqué partout sur la terre ; les centres, religieux et politique, du monde, centres que Dieu avait établis dans ses voies envers la terre, ont rejeté le témoignage, ont mis à mort le témoin. Mais le résultat a été que le ciel a maintenu ses droits intacts et dans leur pureté absolue. L’Église, la vraie capitale céleste et éternelle de la gloire et des voies de Dieu ; l’Église qui avait sa place dans les conseils de Dieu avant que le monde fût ; l’Église qui répond au cœur de Dieu en grâce, comme unie à Christ dans la gloire ; l’Église reste l’objet de la foi. Elle est révélée selon les pensées de Dieu et parfaitement telle qu’elle est dans ses pensées, jusqu’à ce que — Jérusalem céleste — elle soit manifestée en gloire, en rapport avec l’accomplissement des voies de Dieu sur la terre, lorsque Jérusalem sera rétablie comme centre de ses voies terrestres en grâce, comme Son trône, comme sa capitale, même au milieu des nations, et que la puissance des Gentils dont Rome était le centre et le siège aura disparu.
1 Marc 16:20 est le seul passage qui pourrait sembler faire allusion à l’accomplissement de cette mission et il n’en donne pas même le caractère, car, comme Colossiens 1:6, il se rapporte au monde entier et est fondé sur l’ascension de Christ. Ce n’est pas une mission aux Gentils fondée sur la résurrection seule.
Pensées de Paul et déroulement historique, entre Rome et Jérusalem
Liens de Paul avec les croyants de Rome
Rome, capitale du monde, a une assemblée sans que l’apôtre y soit passé
Examinons maintenant les pensées de l’apôtre et ce qui, historiquement, s’est passé : l’apôtre écrit de Corinthe aux Romains quand il avait en vue son voyage à Rome. Le christianisme avait pris racine dans ce centre du monde sans qu’un apôtre quelconque l’y eût planté : Paul le suit ; la capitale de l’empire est comme une partie de son territoire apostolique qui lui échappe (voyez Rom. 1:13-15 et ch. 15 [(v. 22-29)], où il revient au même sujet). S’il n’a pas pu aller à Rome, car Dieu ne veut pas commencer par la capitale du monde (comparez la destruction de la capitale cananéenne Hatsor en Josué 11:10-13), il écrira au moins aux chrétiens à Rome en se fondant sur son apostolat universel envers les Gentils. Des chrétiens étaient déjà établis à Rome ; Dieu l’a voulu ainsi ; mais ces chrétiens étaient en quelque sorte du ressort de l’apôtre et beaucoup de personnes qui avaient été personnellement en relation avec lui se trouvaient dans cette ville. Le nombre et le caractère des salutations qui se trouvent à la fin de l’épître aux Romains sont remarquables et ont un cachet particulier, faisant voir que les chrétiens de Rome étaient en grande partie les enfants en la foi de Paul.
Position apostolique de Paul quant à Rome et aux Gentils
Au chapitre 15:14-29, de cette même épître, Paul développe sa position apostolique vis-à-vis des Romains et des autres Gentils. Il veut aussi aller en Espagne, quand il aura un peu vu ses frères de Rome ; il veut communiquer à ceux-ci des grâces (Rom. 1 [v. 11]), mais être consolé par leur foi mutuelle [(Rom. 1:12)] ; il veut jouir un peu de leur compagnie. Ils sont en rapport avec lui, mais ils existent sans lui à Rome ; quand donc il les aura vus un peu, il se propose d’aller en Espagne. Mais il a été désappointé à l’égard de ses projets ; et tout ce que le Saint Esprit nous raconte, c’est qu’il a été prisonnier à Rome : — silence profond quant à l’Espagne. Au lieu de passer outre, après avoir vu ses frères de Rome et leur avoir communiqué ses dons, l’apôtre reste deux ans prisonnier à Rome [(Act. 28:30)] et on ne sait s’il a jamais été libéré ; — les uns disent oui, les autres disent non — la Parole ne dit rien1.
1 Note Bibliquest : sur ce sujet, voir A.L., les derniers jours de l’apôtre Paul.
Jérusalem intercepte les pensées et le service de Paul, avant Rome
Paul part à Jérusalem quand un grand champ d’évangélisation est ouvert à l’occident
C’est dans le moment où, à son passage à Corinthe, l’apôtre a exposé son intention d’aller à Rome et le caractère de ses relations selon l’Esprit avec cette ville, un vaste champ à l’occident s’ouvrant devant lui, que ses anciennes affections pour son peuple et Jérusalem interviennent : « Mais à présent je vais à Jérusalem, étant occupé au service des saints » (Rom. 15:25-28). Pourquoi ne pas aller à Rome selon l’énergie de l’Esprit quand son œuvre était achevée en Grèce (Rom. 15:23) ? Dieu a voulu sans doute que tout ce qui était arrivé à Paul à Jérusalem eût lieu, et que Rome et les Romains prissent, à l’égard du témoignage d’un Christ glorieux et de l’Église, le triste caractère d’une prison ; mais, quant à Paul, pourquoi placer Jérusalem entre son désir évangélique et son œuvre ? L’affection était louable — le service bon pour un serviteur (diacre) ou un messager des assemblées, mais pour Paul qui avait tout l’occident ouvert à ses pensées pour y prêcher l’Évangile… ?
Danger pressenti à Jérusalem, indiqué par l’Esprit, et venue à Rome comme prisonnier
Jérusalem a intercepté sa vue pour le moment, aussi le Saint Esprit (chap. 21:41) l’avertit en chemin et lui dit, comme nous l’avons vu, de ne pas aller dans cette ville. L’apôtre lui-même pressentait le danger qu’il courait en y allant ; il était sûr de venir à Rome dans la plénitude de la bénédiction de l’Évangile, mais il n’était rien moins que sûr qu’il viendrait avec joie (Rom. 15:29-32). La chose pour laquelle il demandait les prières des Romains, a tourné tout autrement qu’il ne l’avait désiré. Il a été délivré des mains des Juifs à Jérusalem, mais comme prisonnier : [28:15] quand il est arrivé en Italie, il a pris courage lorsqu’il a vu ses frères au Forum d’Appius et aux Trois-Tavernes. Il n’y avait pas pour lui non plus de voyage en Espagne.
Action de la grâce divine, et accomplissement des voies de Dieu
Dieu est avec Paul, pour le discipliner et le soutenir, et agissant pour Sa gloire
Tout ceci me semble très solennel. Le Seigneur plein de grâce et de tendresse a été avec son pauvre, mais bien-aimé serviteur. Un pareil récit, et un récit où il s’agit d’une personne telle que Paul, est du plus touchant intérêt ; les voies du Seigneur y sont adorables et parfaites en bonté. La réalité de la foi se trouve en plein chez Paul ; les voies de grâce de Dieu envers lui sont parfaites, et parfaites en tendresse aussi chez le Seigneur. Dieu se tient avec son serviteur pour l’encourager et pour le fortifier dans l’épreuve même où il se trouve. En même temps, à l’égard de ce désir d’aller à Jérusalem, [21:4] l’apôtre est averti par l’Esprit [21:11] et les conséquences de ce voyage lui sont déclarées ; ne se détournant pas de son projet, il subit la discipline qui met son âme à sa place, mais dans une place de pleine bénédiction devant Dieu : sa marche trouve son niveau quant à la puissance spirituelle. Il subit extérieurement la puissance de ce qui avait exercé de l’influence sur lui moralement, cherchant à entraver son ministère ; et un joug sur sa chair répond à la liberté qu’il lui avait accordée. Il y avait de la justice dans les voies de Dieu ; son serviteur lui était trop précieux pour qu’il permît qu’il en fût autrement. En même temps, quant au résultat et au témoignage, Dieu a tout ordonné pour sa propre gloire, et dans une parfaite sagesse à l’égard de l’avenir de l’Église.
Rejet définitif de la grâce par Jérusalem, et témoignage du Seigneur pour tous
Jérusalem, ainsi que nous l’avons vu, repousse définitivement la pensée qu’un témoignage soit adressé aux Gentils, et ainsi la grâce qui l’envoyait — en un mot, les voies de Dieu dans l’Église (comp. 1 Thess. 2:14-16) ; et Rome devient la prison de ce témoignage, tandis que, selon la promesse du Seigneur, le témoignage est porté devant les gouverneurs et les rois [(Act. 9:15)], et devant César lui-même.
Même position pour Jésus et pour Paul, mais pas comme dans la même place devant Dieu
J’ai dit que la grâce mettait Paul dans la position où avait été Jésus, livré aux Gentils par la haine des Juifs : c’était une grande grâce ! La différence entre l’amour infini du Seigneur qui se livrait lui-même à la mort, et la relation dans laquelle Paul se trouvait avec les Juifs, était celle-ci que Jésus était en butte à leur haine comme étant à sa vraie place devant Dieu. Jésus était venu aux Juifs ; qu’il fût livré, c’était réellement de sa part mettre le comble à son dévouement et à son service ; c’était au fond s’offrir par l’Esprit éternel [(Héb. 9:14)]. C’était la sphère propre de son service, comme envoyé de Dieu. Paul, lui, rentrait dans cette sphère judaïque d’où l’énergie du Saint Esprit l’avait tiré. « Te retirant », dit le Seigneur, « du milieu du peuple et des nations, vers lesquelles moi je t’envoie pour ouvrir leurs yeux » (Actes 26:17). Paul avait été pris par Jésus qui l’avait établi, en dehors des Juifs et des Gentils, pour exercer un ministère qui les liait tous les deux en un seul corps dans le ciel, avec Christ qui l’avait ainsi envoyé. Paul ne connaissait personne selon la chair ; il n’y avait dans le Christ Jésus ni Juif, ni Grec.
Ch. 21 : Montée de Paul à Jérusalem et arrestation
Ch. 21 v. 1-14 — Chemin de Paul vers Jérusalem et avertissements de l’Esprit
Ch. 21 v. 1-11 — Avertissement de ne pas aller à Jérusalem, et des dangers
Mais reprenons l’histoire de notre apôtre. [21:4] Il est averti par le Saint Esprit de ne pas monter à Jérusalem, ainsi que nous l’avons vu (chap. 21:4) ; [21:5] cependant il continue son chemin. [21:10] À Césarée un prophète, nommé Agabus, descend de Judée [21:11] et lui annonce qu’il sera lié et livré aux Gentils (vers. 10, 11). On peut dire qu’il n’y avait rien là qui interdît à l’apôtre de monter à Jérusalem : cela est vrai, mais venant après l’ordre qu’il avait reçu, cet avertissement renforçait la direction déjà donnée par l’Esprit de n’y pas aller. Quand Paul marchait dans la liberté de l’Esprit, et qu’il était averti d’un danger, il s’enfuyait, tout en sachant braver aussi tous les périls quand le témoignage l’exigeait : à Éphèse il s’est laissé persuader de ne pas entrer au théâtre [(19:30-31)].
Ch. 21 v. 12-14 — Détermination de Paul et volonté du Seigneur
Le Saint Esprit n’avertit pas en général les croyants des dangers qui peuvent les menacer ; il conduit dans le chemin du Seigneur, et si la persécution arrive, il donne la force pour la supporter. Ici Paul était constamment averti : [21:12] ses amis aussi l’engagent à ne pas monter à Jérusalem ; [21:14] mais il ne veut pas se laisser persuader. Ils se taisent, peu satisfaits, en disant : « La volonté du Seigneur soit faite » (vers. 14) ; et c’était, je n’en doute pas, la volonté du Seigneur, mais pour l’accomplissement de desseins que Paul ne connaissait pas par l’intelligence donnée par le Saint Esprit. Il se sentait seulement pressé d’aller à Jérusalem, [21:13] prêt à tout souffrir pour le Seigneur.
Ch. 21 v. 15-29 — Paul se place sous l’influence des chrétiens juifs judaïsants
Ch. 21 v. 15-25 — Paul est soumis aux préjugés des Juifs vers qui il est venu
[21:15] Paul monte donc à Jérusalem ; [21:18] et là, il va chez Jacques ; les anciens s’y réunissent (vers. 17, 18). [21:19] Il leur raconte l’œuvre de Dieu parmi les Gentils ; [21:20] eux invoquent le Judaïsme dont la multitude était remplie, et, tout en se réjouissant du bien que Dieu avait opéré par l’Esprit, [21:21] ils désirent que Paul se montre obéissant à la loi. [21:22] Il faut que les croyants de Jérusalem se réunissent à l’occasion de l’arrivée de Paul, [21:24] et il faut satisfaire à leurs préjugés à l’égard de la loi. Paul s’est placé dans la présence des exigences des hommes : refuser d’y obtempérer, c’eût été déclarer que leurs pensées étaient fondées à son égard ; agir selon leur désir, c’eût été faire une règle, non de la direction de l’Esprit, en toute liberté d’amour, mais de l’état de préjugé et d’ignorance où se trouvaient ceux qui l’entouraient. La cause de la difficulté pour l’apôtre était qu’il se trouvait à Jérusalem, non selon l’Esprit, mais selon son attachement à ses anciennes liaisons avec le judaïsme. Il faut être au-dessus des préjugés des autres, et libre de leur influence pour pouvoir condescendre en amour à ces préjugés.
Ch. 21 v. 26-29 — Paul est livrée ainsi à ses ennemis, les Juifs opposés à l’évangile
[21:26] Une fois à Jérusalem, Paul n’a guère pu faire autre chose que de satisfaire aux demandes des chrétiens judaïsants. Or, la main de Dieu y est. En cherchant à plaire aux Juifs croyants, l’acte de Paul le jette au pouvoir de ses ennemis ; il se trouve dans la gueule du lion, entre les mains des Juifs adversaires de l’Évangile. Ajoutons qu’à dater de ce moment on n’entend plus parler des chrétiens de Jérusalem : ils avaient fait leur œuvre. Ils ont bien accepté, sans doute, l’aumône des Gentils.
Ch. 21 v. 30-40 — Paul délivré des Juifs et arrêté par les Romains
[21:30] Toute la ville était en émoi et le temple fermé (vers. 30). [21:32] Le commandant de la place vient délivrer Paul des mains des Juifs [21:31] qui voulaient le tuer, [21:33] en l’arrêtant cependant lui-même, car les Romains étaient habitués à ces violences et méprisaient cordialement le peuple bien-aimé de Dieu, mais également fier et dégradé quant à son état. [21:37-39] Paul, néanmoins, commande le respect du commandant par sa manière de l’interpeller, [21:40] et celui-ci lui permet de parler au peuple.