Jean

Chapitre 13

Le lavage des pieds

(v. 1-11) — Le service du Seigneur était achevé au milieu des Juifs; il avait parfaitement accompli tout ce qui devait être fait pour les amener à croire en lui. Dès lors, il pense à ceux qui avaient cru, c’est d’eux seuls qu’il va s’occuper jusqu’à l’heure de sa mort et dans la gloire où il entrera.

«Or, avant la fête de Pâques, Jésus, sachant que son heure était venue pour passer de ce monde au Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’à la fin» (v. 1). Précieuse déclaration! L’amour de Jésus, repoussé par le monde, demeurait actif en faveur de ceux qui l’avaient reçu. Il les aima jusqu’à la fin: jusqu’à la fin de son séjour ici-bas, et jusqu’à la fin du temps pendant lequel ils auraient besoin de ses soins sur la terre, c’est-à-dire jusqu’à son retour, car il savait dans quel monde souillé il allait les laisser. C’est pourquoi il leur présente, dans les chapitres 13 à 17, les ressources et les encouragements nécessaires durant son absence.

Jésus était à table avec ses disciples, pour le souper de la Pâque où il institua la cène, fait qui n’est pas rapporté dans cet évangile. Judas Iscariote était présent, Satan ayant déjà mis dans son cœur la pensée inique de livrer son Maître. Le Seigneur le savait et son cœur en souffrait douloureusement. Il savait aussi que son Père «avait mis toutes choses entre ses mains, et qu’il était venu de Dieu, et s’en allait à Dieu».

Mais ni la douleur que lui causait la trahison de Judas, ni la connaissance du pouvoir que le Père lui confiait, ni la perspective de la gloire dans laquelle il allait entrer, ne détournaient ses pensées des disciples qu’il allait laisser. Sur le point de les quitter, Jésus veut qu’ils jouissent de la part qu’ils auraient avec lui dans la nouvelle position où il les placerait, une fois élevé dans le ciel. Il savait que ce qui les priverait de cette jouissance, c’est le péché, qui s’attache non à la position du croyant, puisqu’elle résulte de l’œuvre de Christ à la Croix, mais à sa marche au travers d’un monde souillé. Lorsque nous serons dans la gloire, semblables au Seigneur, nous nous y trouverons dans une perfection absolue, foulant la rue de la cité d’or pur transparent (Apoc. 21:21), à l’abri de toute souillure, mais les disciples n’y étaient pas encore, ni nous non plus. En attendant, le Seigneur, qui est mort pour nous acquérir une place avec lui dans la gloire et une part avec lui actuellement, s’occupe aussi de nous, afin que nous jouissions de cette faveur merveilleuse; communion que nous perdons chaque fois que nous péchons. C’est ce précieux service que le lavage des pieds symbolise. Jésus «se lève du souper et met de côté ses vêtements; et ayant pris un linge, il s’en ceignit. Puis il verse de l’eau dans le bassin, et se met à laver les pieds des disciples, et à les essuyer avec le linge dont il était ceint» (v. 4, 5). En se levant et en mettant de côté ses vêtements, Jésus quitte, en figure, la position qu’il avait prise sur cette terre au milieu des disciples. Il ne pouvait demeurer plus longtemps avec eux; l’œuvre qu’il avait à faire dans ce monde allait être accomplie. Il s’en allait au Père; mais là, quoique dans la gloire, il conserve la position de serviteur qu’il a prise ici-bas, et même celle du plus humble serviteur, qu’il ne quittera pas. Lorsque tous les siens seront dans la gloire, son service d’amour se continuera, puisqu’il les fera jouir de tout ce qu’il leur a acquis par sa mort (Luc 12:37). En Orient, lorsqu’un voyageur arrive, les pieds couverts de la poussière de la route, un esclave les lui lave, avant qu’il n’entre dans la maison. Autrefois même, si l’on recevait un hôte de distinction, le maître de la maison accomplissait lui-même cet office et s’abaissait aux pieds souillés du voyageur. Le Seigneur se sert de cette coutume, bien connue alors, pour montrer à ses disciples ce que lui le «Seigneur et Maître» (v. 14) fera pour qu’ils entrent pratiquement dans le lieu où ils peuvent jouir de sa communion dans la présence de Dieu. L’eau versée dans le bassin représente la Parole de Dieu, qui applique la mort au vieil homme et aux fruits qu’il produit. Car rien de cette nature ne subsiste devant Dieu. C’est pourquoi Christ dut mourir. De son côté percé sortit du sang et de l’eau. Le sang expie les péchés et l’eau purifie de tout ce qu’est l’homme en Adam; la Parole de Dieu n’en laisse rien subsister. Ainsi lorsqu’il se produit une souillure, ce fruit de notre mauvaise nature, il faut l’application de la Parole au cœur et à la conscience pour juger ce péché et en être pleinement purifié. Tel est le service que le Seigneur accomplit, de la gloire où il se trouve. Il fait valoir sa Parole, par la puissance du Saint Esprit, pour amener à juger le mal et à le confesser afin d’en être purifié. «Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité» (1 Jean 1:9).

Lorsque Jésus vint à Pierre, celui-ci lui dit: «Seigneur, me laves-tu, toi, les pieds? Jésus répondit et lui dit: Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant, mais tu le sauras dans la suite. Pierre lui dit: Tu ne me laveras jamais les pieds. Jésus lui répondit: Si je ne te lave, tu n’as pas de part avec moi» (v. 6-8). Par déférence pour son Seigneur, Pierre s’oppose à l’accomplissement d’un service humiliant dont il ne comprenait pas alors la signification; mais il ne tarda pas à en connaître la nécessité; il fut le premier à en faire l’expérience. Si le Seigneur ne s’était pas occupé de lui, que serait-il devenu après la souillure horrible de son reniement? Déjà un regard du Seigneur dans la cour du souverain sacrificateur (Luc 22:61, 62) fit jaillir les pleurs de Pierre dans le sentiment de sa faute et l’empêcha de s’abandonner au désespoir, comme Judas. Puis Jésus le rencontra le premier de tous, le jour de sa résurrection (Luc 24:34), et enfin la pleine restauration eut lieu par l’entretien rapporté au chapitre 21 de notre évangile. Alors Pierre sut ce que Jésus voulait lui enseigner par le lavage des pieds.

Pierre s’oppose encore en disant à Jésus: «Tu ne me laveras jamais les pieds. Jésus lui répondit: Si je ne te lave, tu n’as pas de part avec moi» (v. 8). Voyant qu’il ne peut empêcher le Seigneur d’accomplir son office, Pierre lui dit: «Non pas mes pieds seulement, mais aussi mes mains et ma tête. Jésus lui dit: Celui qui a tout le corps lavé n’a besoin que de se laver les pieds; mais il est tout net; et vous, vous êtes nets, mais non pas tous. Car il savait qui le livrerait; c’est pourquoi il dit: Vous n’êtes pas tous nets» (v. 9-11). Au chapitre 15:3, Jésus leur dit aussi: «Vous, vous êtes déjà nets, à cause de la parole que je vous ai dite». La foi en la parole du Seigneur, reçue par les disciples, les plaçait dans le même état de netteté que la foi en son œuvre accomplie. Pierre était net de cette manière. Son objection donne ainsi au Seigneur l’occasion de définir la qualité ou la position de ceux dont il s’occupe. Ils sont nets en vertu de son œuvre. Ceux-là seuls se salissent les pieds. Purifiés par le sang de Christ à la croix, ils sont l’objet de ses soins. Ceux qui ne sont pas nettoyés de leurs péchés par la foi au sang de Christ sont entièrement souillés; il serait inutile de leur laver les pieds; ils ont besoin de l’évangile qui leur apprend ce que le Seigneur a fait, pour sauver le pécheur et le rendre propre pour la présence de Dieu. Le Seigneur ne lave donc pas les pieds des inconvertis; il leur présente le salut et leur offre d’être entièrement lavés de tous leurs péchés. Judas n’était pas net, car sa conscience n’avait jamais été touchée par la parole qu’il s’était habitué à entendre; elle n’avait produit aucun effet sur lui.

Sous la loi nous avons aussi en figure ce que le Seigneur enseigne par le lavage des pieds, et ce qu’il dit à Pierre au verset 10. Lorsque les sacrificateurs étaient consacrés, ils étaient lavés tout entiers (Exode 29:4 et Lévitique 8:6). Leur consécration correspond à l’application de l’œuvre de la croix au croyant, en vertu de laquelle il est purifié de ses péchés une fois pour toutes. Quand les sacrificateurs reprenaient leur service, ils n’avaient pas à être lavés de nouveau tout entiers, mais ils ne pouvaient entrer dans le tabernacle sans se laver les mains et les pieds à la cuve d’airain (Exode 30:17-21). Ainsi le croyant qui a péché n’a pas besoin de recourir à nouveau au sacrifice de Christ, il doit laisser agir sur sa conscience l’eau de la Parole que le Seigneur lui applique pour qu’il juge sa faute et les causes de son manquement, comme cela eut lieu pour Pierre au chapitre 21.

Le Seigneur, dans son amour infini, ne peut supporter de voir les siens privés des joies et des bénédictions qu’il leur a acquises à si grand prix; il veut que leur communion avec lui ne demeure pas interrompue lorsque le péché est survenu. Il importe donc de se prêter à l’action de cette Parole en la laissant agir en nous pour nous restaurer chaque fois que nous en avons besoin et, d’une manière permanente, pour nous empêcher de tomber.

 

Un exemple donné

(v. 12-20) — Après avoir montré aux disciples ce qu’il ferait pour eux de la gloire dans laquelle il allait entrer le Seigneur se remet à table avec eux et les exhorte à accomplir ce service les uns envers les autres. Il leur dit: «Savez-vous ce que je vous ai fait? Vous m’appelez maître et seigneur, et vous dites bien, car je le suis; si donc moi, le seigneur et le maître, j’ai lavé vos pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Car je vous ai donné un exemple, afin que, comme je vous ai fait, moi, vous aussi vous fassiez» (v. 12-15). Si l’on possède la même vie que le Seigneur, il est possible d’être animé du même amour que lui; les croyants ont à se porter un intérêt réciproque dont le modèle est en lui. Tous doivent chercher à ramener leurs frères, souillés par une faute quelconque, afin qu’ils jouissent à nouveau de la communion perdue. Pour cela, ils se serviront de la Parole, afin de produire chez le coupable la conviction de son péché et de l’amener à le confesser à Dieu. Si c’est une offense personnelle, il la confessera aussi à celui envers lequel il a manqué. Alors la restauration peut avoir lieu par la Parole qui, après avoir montré l’horreur du mal et l’avoir jugé, fait voir que, du côté de Dieu, rien n’a changé; son amour est toujours le même; cela touche le cœur et produit une vraie repentance et une pleine restauration. Tout est non seulement lavé, mais essuyé, comme le Seigneur le fit avec le linge dont il était ceint; il ne reste aucune trace de souillure.

«En vérité, en vérité, je vous dis: L’esclave n’est pas plus grand que son seigneur, ni l’envoyé plus grand que celui qui l’a envoyé. Si vous savez ces choses, vous êtes bienheureux si vous les faites» (v. 16, 17). En effet, si lui, le Seigneur et Maître, conscient de toute sa gloire, mais toujours l’expression de l’amour divin, s’est abaissé et s’abaisse au point de s’occuper de ses bien-aimés, coupables de s’être souillés par le péché, nous, ses heureux esclaves, demeurerions-nous indifférents en présence des fautes les uns des autres, sans nous aider mutuellement à retrouver la communion perdue? N’irons-nous pas aux pieds de nos frères ou sœurs, en les considérant dans la haute position que le Seigneur leur a faite par son œuvre à la croix, en les estimant supérieurs à nous-mêmes, en les voyant comme Dieu les voit?

L’amour selon Dieu ne consiste pas à se dire seulement des choses agréables, car il se réjouit avec la vérité, et il y a des vérités pénibles à entendre, que l’on est obligé de dire, pour être vrai en cherchant le bien d’autrui. Mais l’amour endure tout pour obtenir le bien chez son frère; il travaille au bien de tous en s’effaçant lui-même. Nous savons cela, mais le Seigneur ne dit pas au v. 17: «Vous êtes bienheureux si vous savez ces choses», mais bien, «si vous les faites». Pour les accomplir, il faut jouir personnellement du grand amour du Seigneur, et penser que nous sommes continuellement des objets de grâce et de miséricorde. Si nous sentons notre faiblesse, nous rappelant combien de fois nous sommes tombés, nous serons pleins d’égards pour nos frères. Si nous apprenons que l’un d’eux a manqué, nous irons à lui directement, craignant que son mal soit connu par d’autres, au lieu de le divulguer sans honte, comme cela nous arrive si souvent. Nous nous souviendrons que «l’amour couvre une multitude de péchés».

Jésus éprouvait douloureusement dans son cœur le fait qu’il allait être livré par Judas. Il dit: «Je ne parle pas de vous tous; moi, je connais ceux que j’ai choisis; mais c’est afin que l’Écriture soit accomplie: «Celui qui mange le pain avec moi a levé son talon contre moi» (Ps. 41:10). Je vous le dis dès maintenant, avant que cela arrive, afin que, quand ce sera arrivé, vous croyiez que c’est moi» (v. 18, 19). Jésus avait choisi Judas comme les autres disciples (chapitre 6:70); son cœur en souffrait; mais il fallait que les Écritures fussent accomplies. Il prévient les disciples, afin que, le voyant trahi par Judas, ils ne doutassent pas que Jésus fût bien celui en qui ils avaient cru, mais, au contraire, que tout arrivait comme les Écritures l’avaient annoncé. Jésus ajoute: «En vérité, en vérité, je vous dis: Celui qui reçoit quelqu’un que j’envoie, me reçoit; et celui qui me reçoit, reçoit celui qui m’a envoyé» (v. 20). Ceux qui avaient reçu Judas auraient pu en avoir du regret; mais en le recevant comme envoyé de Jésus, on l’avait reçu lui-même, et en recevant Jésus, on recevait le Père qui l’avait envoyé. On peut être trompé en recevant quelqu’un au nom du Seigneur; mais ce qui est fait pour lui n’est jamais fait en vain. Ce que nous faisons pour nous-mêmes, pour notre propre satisfaction, ou avec des motifs charnels, n’a point de valeur. C’est une grande grâce de pouvoir recevoir le Seigneur et Dieu lui-même, en recevant ceux qu’il envoie.

 

Judas est dénoncé

(v. 21-30) — «Ayant dit ces choses, Jésus fut troublé dans son esprit, et rendit témoignage et dit: En vérité, en vérité, je vous dis que l’un d’entre vous me livrera» (v. 21). Ce qui pèse particulièrement sur le cœur du Seigneur, c’est qu’il sera livré par un de ses disciples, «l’un de vous», dit-il. Nous lisons dans le Psaume 55:13-15: «Ce n’est pas un ennemi qui m’a outragé, alors je l’aurais supporté; ce n’est point celui qui me hait, qui s’est élevé orgueilleusement contre moi, alors je me serais caché de lui; mais c’est toi, un homme comme moi, mon conseiller et mon ami: nous avions ensemble de douces communications; nous allions avec la foule dans la maison de Dieu». Quelles souffrances le Seigneur n’a-t-il pas éprouvées dans ce monde! Nous avons vu, au chapitre précédent, son âme troublée en présence de la mort. Ici son esprit s’émeut à la pensée que l’un des siens le livrera. Il savait dès le début, que Judas accomplirait cet acte; cependant il n’avait fait aucune différence entre lui et les autres disciples; il lui avait prodigué les mêmes soins, témoigné la même bonté, la même confiance, puisque c’est à lui qu’il avait confié la bourse. Mais la parole de Jésus n’avait atteint ni son cœur, ni sa conscience.

En entendant que c’était l’un d’eux qui livrerait Jésus, «les disciples se regardaient les uns les autres, étant en perplexité, ne sachant de qui il parlait (v. 22). À dessein Jésus ne désigne pas le traître; il veut exercer la conscience de chacun des disciples. Tous possédaient une nature capable de commettre un tel acte, et chacun de nous aussi, chers lecteurs. Mais il existe un moyen pour qu’elle ne manifeste pas ce qu’elle est; c’est l’action de la Parole de Dieu sur le cœur et la conscience; elle nous fait porter constamment sur nous-mêmes le jugement que Dieu y porte: «Le cœur est trompeur par dessus tout, et incurable; qui le connaît? Moi, l’Éternel, je sonde le cœur, et j’éprouve les reins» (Jér.. 17:9, 10). C’est par sa Parole que Dieu nous fait connaître ce que nous sommes: «Car la Parole de Dieu est vivante et opérante, et plus pénétrante qu’aucune épée à deux tranchants, et atteignant jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des jointures et des Moelles; et elle discerne les pensées et les intentions du cœur» (Héb. 4:12). Usons tous de ce moyen, veillant à ne manifester aucune des choses affreuses qui peuvent se trouver dans nos cœurs cachées et inconnues à nous-mêmes!

En Marc 14:19, les disciples se demandent: «Est-ce moi? Est-ce moi? » Ils ne pensent pas que l’un soit moins capable que l’autre de livrer le Seigneur. Cette parole les sonde tous: «L’un d’entre vous me livrera». Jean, appelé «le disciple que Jésus aimait», était près du Seigneur, «dans le sein de Jésus», est-il dit. Pierre, plus éloigné, lui fit signe de demander duquel il parlait. Jean occupait la place où l’on peut recevoir les communications du Seigneur, celle que Marie avait choisie. Si nous vivions tous aussi près du Seigneur, il n’y aurait point d’ignorants parmi nous. Le sein du Seigneur est assez vaste pour que nous y soyons tous, et là nous apprendrions ce que l’on ne peut apprendre ailleurs. Jean «s’étant penché sur la poitrine de Jésus, lui dit: Seigneur, lequel est-ce? Jésus répond: C’est celui à qui moi je donnerai le morceau après l’avoir trempé. Et, ayant trempé le morceau, il le donne à Judas Iscariote, fils de Simon» (v. 25, 26). S’il y avait eu encore une corde si peu sensible que ce fût dans le cœur de Judas, elle aurait vibré à ce témoignage de sincère amitié, de confiance, que donnait autrefois le maître de la maison à l’un de ses conviés. Judas ne bronche pas. Tout était inutile: la parole du Seigneur demeure sans effet sur ce cœur endurci par Satan. «Et après le morceau, alors Satan entra en lui. Jésus donc lui dit: Ce que tu fais, fais-le promptement» (v. 27). Satan ayant préparé sa demeure en prit possession!

Rien de plus solennel que l’exemple de cet homme. Il a travaillé en compagnie du Fils de Dieu. Témoin de son ministère d’amour, objet de sa bonté, il a entendu les enseignements confidentiels que Jésus donnait à ses disciples en dehors de la foule. Malgré cela, son cœur était plus sensible aux suggestions de Satan qu’à l’amour de Jésus, car l’amour de l’argent le caractérisait; il cultivait la passion de l’avarice. Aussi comprend-on que le dernier témoignage d’amour que Jésus lui donnait par le morceau trempé, le trouvât insensible. Dès lors, il n’est plus son maître. Satan le possède. «On est esclave de celui par qui on est vaincu» (2 Pierre 2:19). Après l’avoir trompé, Satan va le précipiter dans les tourments éternels. Voilà l’œuvre de celui qui est menteur et meurtrier dès le commencement. Quel avertissement sérieux pour ceux qui ont le privilège d’être en contact avec la Parole de Dieu, avec des chrétiens et surtout avec des parents chrétiens, afin qu’ils ne résistent pas à l’action de la Parole, pour s’exposer à devenir la proie de l’Ennemi; il sait travailler dans les cœurs avec une habileté satanique, sans que l’on ait pu, ou voulu, s’en rendre compte, jusqu’au moment où il est trop tard, même en ayant du remords comme Judas (Matthieu 27:3).

Pleinement conscient de tout ce qui se passe et de tout ce qui l’attend, Jésus lui dit: «Ce que tu fais, fais-le promptement». Son travail fut accompli quelques heures plus tard, que le Seigneur emploie à enseigner ses disciples en vue de son départ, auquel nul ne songeait que lui seul.

Les disciples pensent que le Seigneur avait chargé Judas de donner quelque chose aux pauvres ou de faire quelques achats pour la fête; car la fête de Pâque était suivie de celle des pains sans levain; elles n’en formaient donc qu’une, durant laquelle tout travail était interdit (Exode 12:16). «Ayant reçu le morceau, il sortit aussitôt; or il était nuit» (v. 30). La nuit régnait dans la nature; mais moralement, elle était plus profonde encore: nuit sur Judas, désormais nuit sur le monde, nuit morale qui dure toujours pour lui, puisqu’il a rejeté la lumière du monde, venue dans la personne de Jésus. Au chapitre précédent (v. 35), Jésus avait dit: «Marchez pendant que vous avez la lumière, afin que les ténèbres ne s’emparent pas de vous». Maintenant la lumière a disparu; les ténèbres sont la part du monde jusqu’au jour où Jésus apparaîtra en gloire comme le soleil de justice, mais en jugement sur ceux qui ne l’ont pas voulu comme Sauveur.

Pendant le temps où le monde est dans les ténèbres, les croyants sont appelés des «luminaires» qui brillent dans la nuit, semblables aux étoiles qui donnent leur lumière lorsque le soleil a disparu à l’horizon. Ils veillent durant cette longue nuit et attendent, non le lever du Soleil de justice, mais l’Etoile du matin, Jésus, qui vient enlever les siens dans la maison du Père, afin qu’ils soient gardés de l’heure de l’épreuve qui vient sur la terre entière et qu’ils reviennent avec lui lorsqu’il apparaîtra en gloire, mais dans un jour qui est «brûlant comme un four, et tous les orgueilleux, et tous ceux qui pratiquent la méchanceté seront du chaume, et le jour qui vient les brûlera» (Malachie 4:1).

 

Le fils de l’homme glorifié

(v. 31-33) — Lorsque Judas fut sorti, Jésus dit: «Maintenant le fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui-même; et immédiatement il le glorifiera». Par le départ de Judas, la scène qui termine si douloureusement le souper a passé; le Seigneur élève ses pensées vers les conséquences, glorieuses pour lui et pour Dieu, de l’œuvre qu’il allait accomplir. Il voit la gloire qui résultera de la mort dont il s’approchait par la trahison de Judas, mais qu’il était venu accomplir pour la gloire de Dieu.

L’homme avait déshonoré Dieu par le péché, sous toutes ses formes; il avait, comme dit le fils prodigue, péché contre le ciel et devant Dieu. La conséquence en était le jugement de la part d’un Dieu juste et saint sur les coupables. Mais voici un homme, l’homme des conseils de Dieu, qui s’offre à Dieu pour le glorifier en se soumettant au jugement qu’avait mérité la race humaine coupable. Quelle gloire pour lui d’avoir ôté le péché que le premier homme avait introduit, en satisfaisant à toutes les exigences de la justice et de la sainteté du Dieu déshonoré par le péché. Par cette œuvre il rendait possible que l’amour de Dieu fût connu de ceux qui, sans lui, eussent été dans le malheur éternel, loin de sa présence! Ce qui fait la gloire du Fils de l’homme, c’est que Dieu est glorifié en lui. Tout ce qu’est Dieu dans sa nature et dans ses attributs, a été pleinement établi et maintenu à la croix. Dieu dans son amour voulait sauver des pécheurs; sa justice inflexible s’y opposait et maintenait son arrêt de mort. Jésus subit cette mort et satisfait la justice de Dieu. Dieu, qui a les yeux trop purs pour voir le mal, voulait ces pécheurs dans sa présence, sa sainteté parfaite s’y opposait et les repoussait. Jésus, sur la croix, subit l’abandon du Dieu saint à leur place. La majesté de Dieu exigeait que tous ses droits fussent maintenus. Tous l’ont été, parce que Jésus a subi le jugement sur la croix. Dieu est glorifié en son Fils. C’est au Fils de l’homme que revient la gloire de cette œuvre que nul ne peut apprécier à sa juste valeur que Dieu seul. Aussi Dieu le glorifie aussitôt. Il l’a fait en le ressuscitant et en le faisant asseoir à sa droite, en le couronnant de gloire et d’honneur, en attendant qu’il ait avec lui tous ceux qui sont le fruit de son œuvre, alors «il verra du fruit du travail de son âme» (Ésaïe 53:11).

Dieu n’a pas attendu la résurrection de tous pour ressusciter son Fils. Glorifié par lui, il le glorifia aussitôt quarante jours après sa résurrection. Par cet acte, Dieu montre sa pleine satisfaction de l’œuvre parfaite de son Fils. Et par l’introduction du Christ homme dans la gloire, l’homme est admis dans la présence de Dieu. L’homme en Adam, chassé du paradis terrestre, à jamais banni de la présence divine, a pris fin dans la mort de Christ et un homme nouveau est introduit en Christ dans la gloire de la présence de Dieu, agréé par lui selon toutes les perfections de Christ, représenté par lui, en attendant d’être dans la même gloire que lui, semblable à lui.

Nous comprenons qu’en présence de toutes les gloires qui rayonnaient de sa mort, le Seigneur, qui seul pouvait les contempler, dise à ses disciples: «Enfants, je suis encore pour un peu de temps avec vous: vous me chercherez; et, comme j’ai dit aux Juifs: Là où moi je vais, vous, vous ne pouvez venir, je vous le dis aussi maintenant à vous» (v. 33). Pas plus que les Juifs (chap. 7:34-36), les disciples ne pouvaient aller où Jésus allait. Lui seul pouvait subir une mort telle qu’il en jaillit une si grande gloire. Le Sauveur devait être seul pour porter le poids du jugement que nous avions mérité. Ce qui le conduisait à cette heure, c’était l’amour pour son Dieu qui voulait sauver des pécheurs. Si le Seigneur était monté au ciel sans passer par la mort, il y fût demeuré seul homme, jouissant de son Dieu, comme il l’avait fait durant l’éternité. Dieu aurait eu devant lui un homme, un seul, qui dans sa marche de parfaite obéissance, l’aurait glorifié en contraste avec le premier homme désobéissant. Dieu n’aurait été glorifié que dans le jugement des coupables, sans que ce qu’il est dans son essence, AMOUR, fût connu. Mais le Seigneur n’aurait jamais brillé de la gloire qu’il s’est acquise en accomplissant l’œuvre de la rédemption; jamais des myriades de myriades de bienheureux n’auraient pu refléter la gloire du Seigneur qui brillera sur eux de tout son éclat. Par eux, Dieu montrera «dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, dans sa bonté envers nous dans le Christ Jésus» (Epha. 2:7).

À toi soit la gloire,
Ô Fils éternel!
Ta mort, la victoire,
Nous ouvrit le ciel.
À toi qui nous aimes
Pour l’éternité,
Louanges suprêmes,
Force et majesté.

 

Un commandement nouveau

(v. 34-38) — «Je vous donne un commandement nouveau, que vous vous aimiez l’un l’autre; comme je vous ai aimés, que vous aussi vous vous aimiez l’un l’autre. À ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour entre vous» (v. 34, 35). Centre et soutien de ses disciples, Jésus les avait gardés autour de lui, les avait enseignés, conduits, supportés avec un amour inlassable. Maintenant qu’il allait les quitter, ils auraient à agir les uns envers les autres avec l’amour dont ils avaient eu le modèle en lui. Ils devraient se rejeter, pour ainsi dire, les uns sur les autres, puisqu’il les avait enseignés et rendus participants de sa nature, ils auraient le privilège de s’aimer, de s’encourager avec le même amour. «Comme je vous ai aimés, que vous aussi vous vous aimiez l’un l’autre»: commandement nouveau dont Jésus lui-même était l’expression et le modèle, et non pas celui de la loi qui s’adressait à une nature égoïste, incapable d’aimer. C’est l’amour de Jésus se reproduisant dans les siens, s’exprimant dans leurs rapports mutuels, comme Jésus l’avait fait envers eux; ils le pouvaient, parce que Jésus était leur vie. S’ils s’aimaient de cette manière, tous connaîtraient en eux les disciples de celui qui avait été ici-bas l’expression de l’amour de Dieu. Un disciple ne reçoit pas seulement les enseignements de son maître; il doit les adopter et les mettre en pratique. La nature de l’homme en Adam, essentiellement égoïste, veut tout pour elle, rapporte tout à elle. L’amour de Dieu, tout à l’opposé, ne pense qu’au bien d’autrui; si nous nous aimons l’un l’autre, notre vie présentera un contraste absolu avec celle du monde; tous s’apercevront bientôt que nous obéissons aux enseignements de celui qui a été ici-bas l’expression de l’amour. Pour qu’il en soit ainsi, il faut se nourrir du Seigneur, l’écouter en lisant beaucoup sa parole et pratiquer ses enseignements.

Au lieu de suivre les exhortations du Seigneur, Simon Pierre pense à ce qu’il leur a dit au verset 33 et demande: «Seigneur, où vas-tu? Jésus lui répondit: Là où je vais, tu ne peux pas me suivre maintenant, mais tu me suivras plus tard. Pierre lui dit: Seigneur, pourquoi ne puis-je pas te suivre maintenant? Je laisserai ma vie pour toi. Jésus répond: Tu laisseras ta vie pour moi! En vérité, en vérité, je te dis: Le coq ne chantera point, que tu ne m’aies renié trois fois» (v. 36-38). On voit en Pierre une nature ardente, aimant sincèrement le Seigneur, mais il ne se connaissait pas; il se fiait à son amour pour lui dans l’énergie de son caractère naturel, au lieu de sentir sa faiblesse et de chercher la force en dehors de lui, en Dieu lui-même, plus occupé de ce qu’il était pour le Seigneur que de ce que le Seigneur était pour lui et de ce qu’il lui avait dit. Il ignorait les pensées de Dieu et la mort du Seigneur, surtout ce qu’était cette mort. Ne lui avait-il pas dit, lorsque Jésus leur en parlait: «Seigneur, Dieu t’en préserve!» (Matt. 16:22). Il ne servait à rien de lui donner de nouveaux enseignements. Il avait à faire la douloureuse expérience sous l’action de Satan, de ce que valait sa force pour suivre le Seigneur, puisqu’il ne l’avait pas écouté. Qu’était devenue sa résolution de laisser sa vie pour son maître, lorsqu’il se trouva dans la cour du souverain sacrificateur comme nous le verrons au chapitre 18?

Si notre chair nous engage dans une voie quelconque, nous pouvons être sûrs qu’elle y sera consumée. Nous constaterons avec humiliation ce qu’elle est, alors que nous aurions pu l’apprendre en écoutant la Parole, sans perte de temps et sans déshonorer le Seigneur.

Le Seigneur a tenu compte du désir qu’avait son disciple de le suivre; il le suivit, en effet, comme il le lui dit ici: «Tu me suivras plus tard» et au chapitre 21:18, 19 et 22; mais pour cela il fallut deux choses: la victoire remportée sur la mort par Christ qui en est sorti vainqueur: chez Pierre, la perte de toute confiance en lui-même pour suivre son Maître dans le chemin de l’obéissance qui doit caractériser tout croyant et en a conduit un grand nombre à la mort, pour avoir ensuite la couronne de vie.

Dans les jours où nous vivons, où, par la grâce de Dieu, nous ne sommes plus exposés au martyre, nous avons cependant à suivre le Seigneur dans le chemin de la mort au monde et à la chair, dans le renoncement à nous-mêmes, afin que la vie de Jésus puisse se manifester et que Dieu soit glorifié. Pour cela, pensons à tout ce que nous avons coûté au Seigneur, à ses souffrances pour expier nos péchés. Nos cœurs étreints par son amour, nous ne vivrons plus pour nous-mêmes, mais pour celui qui pour nous est mort et a été ressuscité (2 Cor. 5:14, 15).