Ézéchiel

Chapitre 40

Interprétation des prophéties des ch. 40 à 48 — littérales et futures

Les derniers chapitres du livre nous présentent une vision des plus remarquables, dans laquelle le prophète communique la promesse et l’assurance de la restauration d’Israël et de leur pays, et même plus qu’une restauration, une gloire de couronnement. C’est là la signification toute simple de cette vision, quoiqu’il y ait des détails profonds, et maintes difficultés comme cela est normal dans ce genre de descriptions. Mais il y a à peine plus d’obscurité en Ézéchiel 40 à 48 qu’en Exode 25 à 40. La difficulté provient du détail des circonstances sortant de nos habitudes ordinaires, ou même de notre étude. Il n’y a pas de difficulté réelle quant à la portée générale, sauf pour ceux qui se trompent dans l’application qu’ils font de la vision. Bien sûr, ce n’est pas une prophétie accomplie, mais cela n’est pas la vraie source de difficulté pour nous, comme on le verra du parallèle auquel j’ai fait référence: Les détails du temple futur dans le pays ne sont pas plus difficiles à comprendre que ceux du tabernacle d’autrefois dans le désert.

On sait que certains considèrent que la vision s’applique à l’Église d’aujourd’hui. Ceux-là devraient trouver les figures et symboles faciles à expliquer, car de tels auteurs prétendent en général que nous ne pouvons avoir une compréhension exacte d’une prophétie tant qu’elle n’est pas accomplie. Or l’Église existe depuis plus de 1800 ans, ce qui devrait suffire à fournir d’abondants matériaux pour soutenir leurs démonstrations. Or ce sont justement ceux qui trouvent des difficultés insurmontables à interpréter la prophétie. Ce n’est pas étonnant, puisque leur pensée tout entière est erronée. Jérôme et Grégoire n’en tirent qu’une adaptation ingénieuse. Ils ne font pas un réel exposé, car leurs remarques sont même incapables de les satisfaire eux-mêmes. Un de leurs commentateurs des plus érudits, et qui partage leur opinion, s’exprime ainsi sur une portion de leurs écrits, — nous pouvons l’appliquer à l’ensemble: «personne ne peut expliquer comment on doit la comprendre, et personne n’oserait même s’y aventurer». Pourtant, cet homme, Cornelius à Lapide, ne doit pas être méprisé, mais plutôt admiré pour la confession honnête de leur échec et du sien. Tous les interprètes qui recherchent des allégories sont évidemment sur une fausse piste. Il serait étrange qu’une vision symbolique de la chrétienté laissât de côté le jour des expiations, la fête des semaines et l’action du souverain sacrificateur dans la présence de Dieu — autrement dit les types des aspects majeurs du christianisme.

Beaucoup d’autres théologiens ont fait de grands efforts, sans plus de succès, pour appliquer la vision aux Juifs revenus de la captivité de Babylone. Or, ce qui s’est alors passé est infiniment en dessous de ce que promet la prophétie d’Ézéchiel.

Les applications faites par ces deux genres d’écoles ne peuvent aboutir qu’à rabaisser le caractère de la Parole divine1. Parlons clairement: il y a plus de contrastes que d’analogies entre les promesses brillantes d’Ézéchiel et les toute petites installations payées sous Zorobabel selon ce qu’Esdras et Néhémie relatent. Non seulement ces deux genres d’interprétation ne réussissent pas à concorder avec la prophétie, mais elles déprécient l’Écriture. Car si les prophètes deviennent hyperboliques et qu’on ne peut plus s’y fier, que reste-t-il des évangiles et des épîtres, comme de la loi et des psaumes? La tendance de ces deux écoles est bien de saper l’inspiration, réellement même si c’est involontaire.

1 Écoutez les paroles d’un de ceux qui ne paraissent pas être toujours des ennemis: «Tout l’accomplissement est du passé, et il ne faut s’attendre à rien de plus pour le futur. Les Juifs sont retournés dans leur pays et ont reconstruit le temple. Si la restauration s’est opérée d’une manière différente de ce que le prophète a prédit [car Dieu ne se trouve nulle part dans leurs pensées], — si les circonstances de cette restauration n’ont été qu’un faible contre-type de ce que le prophète imaginait, — si la réalité n’a été qu’un accomplissement chétif de la prophétie, les événements montrent l’imperfection des figures d’Ézéchiel» (Davidson, Introduction à l’Ancien Testament, III, 156). Cela montre plutôt, doit-on dire, la folie de ce genre d’interprétation. Le Dr Davidson est-il prophète pour affirmer que la prophétie ne sera pas accomplie dans le futur? Qu’il prenne garde au caractère et au jugement qui attend les faux prophètes. On ne se moque pas de Dieu, bien que ce soit le temps de la grâce et de la patience de Dieu avec l’homme sur la terre.

Quant aux tentatives modernes de sauver les apparences en rapport avec l’application au retour de la captivité de Babylone, qui pourrait penser qu’elles aient réussies? Le Dr Henderson (p. 187) s’exprime ainsi: «Ézéchiel a fait une représentation idéale de l’état Juif sur le point d’être restauré après la captivité». Mais, demanderons-nous, cet idéal a-t-il été réalisé? N’y avait-il pas une immense différence par rapport à l’état des Juifs en Palestine après leur retour? Le temple bâti après la captivité correspondait-il au bâtiment si soigneusement mesuré en Ézéchiel? Avaient-ils des prêtres, un prince, des fêtes et des sacrifices sans souverain sacrificateur (particularité si remarquable dans cette prophétie) selon ce que décrit Ézéchiel? La gloire est-elle revenue dans le pays des Juifs? Les douze tribus ont-elles pris leur place dans le pays selon ce qui est si soigneusement décrit par le prophète, et selon les dispositions spéciales prévues pour les sacrificateurs, les lévites et le prince? Des eaux permettant des guérisons ont-elles coulé du temple vers la mer Morte en ce temps-là, dans quel que sens qu’on le prenne? Les sacrificateurs et les lévites cessèrent-ils d’habiter dans toute la Palestine, pour ne demeurer qu’autour du sanctuaire, aux endroits attribués à chacun d’eux? Nous savons bien qu’aucune de ces choses ne s’est réalisée après la captivité.

Sans doute, le prophète avait en vue la restauration du temple matériel alors en ruine, ainsi que celle du culte, tout autant que de la nation entière dans les privilèges les plus riches d’un gouvernement théocratique, non pas seulement spirituel. Il n’est pas non plus douteux qu’une juste et vraie interprétation supprime tout besoin de confondre le chrétien et l’Église avec les espérances d’Israël; mais l’explication la moins satisfaisante de toutes est celle qui rapporte cette prophétie d’Ézéchiel aux cinq siècles précédant la naissance de Christ, en niant son accomplissement littéral et futur pour Israël dans leur pays. Il n’y a pas de base pour soutenir qu’un seul détail de ces visions se soit réalisé en aucun point parmi les captifs de retour dans l’histoire passée. Moins de 50000 hommes, femmes et enfants revinrent de Babylone, seulement un petit résidu de résidu, et nullement douze tribus prenant la portion de pays qui leur était échue, comme le prophète le voit, sept au Nord, cinq au Sud, dépassant les anciennes frontières de la Palestine, avec Jérusalem entre elles.

En tout cas, il n’y a jamais rien eu ayant la moindre ressemblance avec la sainte offrande élevée, pas plus qu’à la division du pays en bandes de terre d’est en ouest, selon ce qui est prédit ici. Il est ridicule de prétendre qu’il n’existe pas d’objection valable contre cette interprétation: en effet, sur bien des points, la ville, le temple, les services, etc. ne s’accordent pas avec la prophétie. Ceux qui retournèrent de Babylone revinrent en fait à l’ordre existant avant la captivité, et ne réalisèrent en aucune manière la condition particulière prédite par Ézéchiel. Aucun d’entre eux ne paraît avoir correspondu au prince, et le souverain sacrificateur restait comme auparavant un personnage important; le pays ne fut pas réparti par le sort au résidu, encore moins à tout Israël, et les étrangers n’y trouvèrent pas plus leur héritage que dans le temps d’autrefois. La Pentecôte restait comme jadis l’une des trois grandes fêtes des Juifs, tandis qu’on ne la retrouve pas dans la prophétie. Ces différences sont parmi les plus nettes. Au moins pour les croyants, elles sont la preuve que la dernière vision n’a pas été du tout accomplie dans l’histoire des Juifs; dire qu’elle ne le sera jamais, c’est s’avouer incrédule, en tout cas quant à la prophétie.

Il est bien vrai que la vision ne doit pas être vue comme une description des souvenirs du temple de Salomon — travail bien inutile pour ceux qui possédaient les livres des Rois et des Chroniques. C’est une révélation divine de la nouvelle condition d’Israël restauré, à la fin et pour toujours. Le temple est un temple matériel; l’ordre des fêtes, des sacrifices, des rites, de la sacrificature est littéral, et sous certains aspects importants il n’y a rien eu de pareil auparavant; il en va de même pour l’ordonnancement général de la nouvelle capitale et de la nation, le tout étant couronné par la gloire de l’Éternel, dans des circonstances entièrement nouvelles: cette gloire daigne revenir habiter leur pays. Il n’est pas cohérent d’interpréter littéralement le temple et les ordonnances et de voir des figures dans les eaux apportant la fertilité et la beauté à la Mer Morte et au désert stérile. Pourquoi ceci ne serait qu’un symbole et non pas une réalité? Il n'y a guère de réponse, sinon que certains hommes comme Secker et Boothroyd et d’autres, prétendent qu’il en est ainsi. Mais n’en disons pas plus pour le moment, nous aurons largement l’occasion d’y revenir quand nous en viendrons aux détails des chapitres.

Il nous faut cependant insister sur un point: il n’est pas légitime de séparer de manière tranchée ces chapitres de ceux que nous avons déjà vus. La dernière série (ch. 40 à 48) est la suite glorieuse, convenable et parfaitement compréhensible des prophéties précédentes: cela est si vrai que la série précédente (ch. 33 à 39) en est la préparation, car elle annonce le jugement et l’heureux retour de la nation élue, aux derniers jours, bien au-delà de ce qui était proche. Le chapitre 33 établit le nouveau terrain de la conduite individuelle devant Dieu; les chefs sont jugés au ch. 34, et Édom au ch. 35; ensuite le ch. 36 prédit la restauration d’Israël dans son propre pays, avec un cœur nouveau et un esprit nouveau — l’Esprit même de Dieu en eux. Nous avons vu, sous forme de parabole, la vision du ch. 37 où les ossements desséchés reçoivent soudain vie et force, et il est dit expressément qu’ils représentent non pas les chrétiens ou les hommes en général, mais la maison d’Israël sous la figure de la résurrection, ramenée à la vie et placée par l’Éternel dans son propre pays; elle y est alors unie — Éphraïm et Juda — comme elle ne l’a jamais été depuis les jours de Jéroboam, sous un seul chef, un seul roi, dans leur pays, sur les montagnes d’Israël. Nous avons eu devant nous la dernière et formidable attaque qui sera faite contre Israël en train de s’établir en paix en Canaan, quand le grand chef du nord-est, avec les multitudes de ceux qui le suivront, sera exterminé par l’intervention divine (ch. 38 et 39). Ce ne sont pas des allégories, et ceux-ci l’apprendront à leurs dépens. Israël et les Gentils épargnés le sauront, car l’Éternel sera ainsi glorifié par Son peuple sur la terre. La dernière vision (ch. 40-48) vient alors bien à sa place; il y est établi avec précision la constitution religieuse et civile d’Israël; la Shekinah reprend sa place au milieu du peuple, — le sceau de la gloire qui ne sera plus jamais brisé, — jusqu’à ce que ce qui n’est que moyens intermédiaires s’efface devant la bénédiction complète et éternelle, et que le jugement ne trouve plus de mal à juger.

Il n’est pas douteux que, dans ces chapitres, la plupart des chrétiens achoppent sur cet obstacle de la prédiction toute simple de sacrifices, de fêtes et autres ordonnances de la loi lévitique. Ils pensent qu’il faut les expliquer (en réalité les éliminer) de manière à ôter tout désaccord avec l’épître aux Hébreux. Mais cette idée suppose qu’il ne peut pas y avoir de changement de dispensation et que, parce que nous sommes chrétiens, ceux que vise la prophétie doivent se trouver dans la même relation que nous. Or ceci est entièrement faux, car l’épître aux Hébreux s’adresse aux croyants depuis la rédemption, Christ étant dans les lieux célestes jusqu’à Son retour en gloire. La prophétie d’Ézéchiel, au contraire, s’occupe du peuple terrestre et suppose la gloire de l’Éternel demeurant à nouveau dans le pays de Canaan. En vérité, un état de choses où Israël est béni en tant que tel, et les Gentils ne le sont que par le moyen des Juifs et de manière subordonnée à eux, est totalement distinct du christianisme; pourtant c’est bien ce que cette prophétie d’Ézéchiel et presque tous les autres supposent et annoncent bien nettement; dans le christianisme au contraire, il n’y a ni Juifs ni Gentils, mais tous sont uns dans le Christ Jésus. C’est pourquoi le terrain et la position sont tout différents de ce qu’on voit dans l’épître aux Hébreux.

Ézéchiel annonce clairement des sacrificateurs terrestres distincts du peuple, en position spéciale vis-à-vis du prince, un sanctuaire matériel avec des sacrifices et des offrandes concrets; tout cela est évidemment entièrement étranger au christianisme. C’est aussi incompatible avec la doctrine de l’épître aux Hébreux pour ceux qui sont «participants à l’appel céleste» (Héb. 3:1); mais ne seraient-ils pas à leur place pour ceux qui ont un appel terrestre, quand l’Éternel choisit de nouveau Jérusalem et que la gloire habite le pays? Personne n’a prouvé le contraire, et rares sont ceux qui ont essayé; pourtant c’est là la vraie question. Nous reconnaissons pleinement que les sacrifices sont incompatibles avec la foi chrétienne en la seule offrande qui nous a rendus parfaits à perpétuité (Héb. 10:14). Un temple sur la terre ne s’accorde pas en pratique avec le vrai tabernacle que le Seigneur a dressé et non pas l’homme (Héb. 8:2), et où nous sommes invités à entrer hardiment jusqu’au lieu très saint, le voile étant maintenant déchiré (Héb. 10:19-22). D’ailleurs l’affirmation d’une sacrificature terrestre pour les chrétiens est en principe, sinon en fait, la négation de la proximité de Dieu par le sang de Christ, et de l’évangile lui-même tel que nous le connaissons.

La venue du Seigneur pour régner sur la terre apportera forcément un changement d’une importance et d’une ampleur immense. C’est même l’objet majeur de toute prophétie de mettre en avant une nouvelle condition où Israël est à la tête des nations, sous le Messie et la nouvelle alliance, l’Église ayant entièrement disparu de la terre, et régnant en fait sur elle avec Christ, l’Époux de l’Épouse alors glorifiée.

Or les prophètes, d’Ésaïe à Malachie, mettent en lumière pour ce jour glorieux, un temple terrestre avec des sacrifices, une sacrificature et des cérémonies appropriées. Ce n’est évidemment pas du christianisme. Devant une telle nuée de témoins inspirés, qui oserait prétendre qu’un tel état de choses ne s’accorde pas avec la vérité et la gloire de Dieu dans ce jour? Il est vain de se retrancher derrière la ressource habituelle de l’incrédulité, le nuage qui recouvre la prophétie non accomplie. Non, pour l’incrédulité toute l’Écriture est obscure; pour la foi elle est la lumière de Dieu communiquée par des hommes auxquels l’Esprit Saint avait conféré la puissance de le communiquer. La difficulté particulière du cas présent réside seulement dans l’opinion de la chrétienté qui admet, ou plutôt présume que la chute des Juifs est définitive, et que les Gentils les ont supplantés pour toujours. La vérité est que Dieu n’épargnera pas les Gentils dans leur incrédulité actuelle qui ne fait que croître; en revanche, dans Sa grâce et avant longtemps, il appellera sûrement Israël une nouvelle fois à la repentance. Ceux qui maintenant attendent Christ, avec les saints ressuscités, seront enlevés vers Lui, et le Libérateur viendra de Sion et détournera l’impiété de Jacob (Rom. 11:16-29). Si le Roi des rois et Seigneur des Seigneurs prend ainsi une position toute nouvelle, il serait singulier que rien ne fût changé en conséquence de cette position et en accord avec elle. C’est précisément ce que les prophètes montrent, en contraste avec l’épître aux Hébreux et les autres épîtres apostoliques. Notre sagesse est d’apprendre de Dieu par Sa parole et Son Esprit, et de ne pas juger l’Écriture par des conclusions tirées de notre propre position, de nos circonstances ou même de notre relation avec Dieu. Laissons place aux diverses évolutions et manifestations de Sa gloire dans les siècles à venir, au lieu de tenir Ses voies actuelles comme la norme absolue, aussi profondes et bénies soient-elles: c’est un piège bien naturel pour l’esprit étroit et égoïste de l’homme, mais sec vis-à-vis de toute croissance dans et par la connaissance de Dieu. Pour Lui, Christ est Son objet, non pas l’Église; mais l’Église est bénie proportionnellement.

 

Préambule de la vision — Différents systèmes d’interprétation

Venons-en maintenant au préambule de la vision «En la vingt-cinquième année de notre transportation, au commencement de l’année, le dixième jour du mois, en la quatorzième année après que la ville eut été frappée, en ce même jour, la main de l’Éternel fut sur moi, et il m’amena là. Dans les visions de Dieu, il m’amena au pays d’Israël, et me posa sur une très haute montagne; et sur elle il y avait comme une ville bâtie, du côté du midi. Et il m’amena là, et voici un homme dont l’aspect était comme l’aspect de l’airain; et il avait dans sa main un cordeau de lin et une canne à mesurer, et il se tenait dans la porte. Et l’homme me dit: Fils d’homme, regarde de tes yeux, et écoute de tes oreilles, et applique ton cœur à tout ce que je te fais voir; car c’est afin de te le faire voir que tu as été amené ici. Déclare à la maison d’Israël tout ce que tu vois» (40:1-4).

Le but de cette vision est ainsi évident. Dieu n’a certainement pas révélé le mystère de Christ et l’Église à Israël ou à quiconque, mais Il l’a gardé secret en Lui-même jusqu’au moment venu de le faire connaître. Une grande partie de l’épreuve de l’homme, si fertile en événements, restait à accomplir. Dieu devait encore envoyer Son Fils unique, l’Héritier sans parler des prophètes postérieurs à Ézéchiel et antérieurs à Jean Baptiste. Après cela, Il allait ajouter le témoignage final du Saint Esprit au Seigneur ressuscité et glorifié, outre Sa présence en humiliation au milieu d’eux. La vision concerne donc les espérances d’Israël ramené dans son pays, pour leur montrer combien l’œuvre sera complète dans les derniers jours (malgré leurs péchés d’autrefois), surtout en rapport avec la présence de Dieu dans un sanctuaire nouveau et convenable, — une présence qui ne sera plus jamais perdue, d’autant moins quand le temps cédera sa place à l’éternité, et aux nouveaux cieux et à la nouvelle terre, dans toute la force de ces termes.

Il est bien connu que les quatre principales lignes de divergences d’interprétations de ces ch. 40 à 48 entre les commentateurs sont les suivantes:

  1. l’interprétation historique-littérale, adoptée par Villalpandus, Grotius, etc. qui en fait une description prosaïque destinée à conserver le souvenir du temple de Salomon;
  2. l’interprétation historique-idéale de Eichhorn, Date, etc. qui en fait une annonce vague d’un avenir où il y aura du bien;
  3. la théorie juive de Lightfoot, etc. qui admet que l’idée a été effectivement adoptée par le résidu rentré dans le pays; et
  4. l’hypothèse chrétienne ou allégorique, de Luther et d’autres réformateurs, suivie de manière plus élaborée par Cocceius, etc. et par beaucoup aujourd’hui en général; ils s’efforcent de découvrir dans ces chapitres un immense système symbolique du bien qui reste en réserve pour l’Église.

Mais tout cela laisse de côté une cinquième explication, la seule véritable, je n’en doute pas, qui voit dans ces chapitres la conclusion appropriée de toute la prophétie, et spécialement des chapitres précédents — la prédiction du complet rétablissement, dans les derniers jours, d’Israël converti, et mis en possession pour toujours de toutes les bénédictions promises dans leur pays, avec la gloire de l’Éternel au milieu d’eux. C’est là le seul accomplissement vrai et messianique de la vision, qui doit donc être prise dans son sens simple et juste grammaticalement, littéral, symbolique ou figuré selon ce qu’indique le contexte de chaque passage.

Ainsi, dans la vision suivante dans ce ch. 40, nous avons une description des mesures surtout des parvis du temple et de leurs dépendances, le ieron (comme au ch. 41 on a la description du naoV, ou oikoV); seul le portique du temple proprement dit est donné au ch. 40, avec une suite au chapitre 42, qui peut être considérée comme la conclusion de la première partie de la description, et est importante en ce qu’elle réduit à néant la notion qu’il y avait ou qu’il ait pu y avoir la moindre ressemblance entre la vision prophétique d’Ézéchiel et un temple ayant existé auparavant. Le mur en dehors de la maison tout à l’entour (40:5) n’est pas mesuré avant la fin du chapitre 42, où il est dit qu’il a 500 cannes en carré: donné avec l’exactitude la plus expresse, cela ne peut être considéré comme une «hyperbole» sans ébranler le caractère du prophète et de toute l’Écriture; l’indication est donc que l’enceinte est considérablement plus grande que la cité tout entière. Comment cela est-il possible, nous le verrons peut-être quand nous en viendrons à ce passage.

Il suffit ici de remarquer que, dès l’instant où le temple décrit par Ézéchiel est un vrai temple, il doit être vu dans l’avenir, vers lequel tout ce qui l’entoure dirige les regards. On peut bien concevoir un tabernacle du passé comme type des choses célestes actuelles en Christ; mais ici, c’est une prophétie qui ne trouvera son accomplissement que pour Israël dans son pays, lorsque l’Église aura été transmuée à la venue du Christ et qu’elle règnera avec Lui sur la terre. Il n’y a donc pas place pour une application allégorique. L’application au passé juif est un échec comme nous l’avons déjà vu, et même une impossibilité. On peut éliminer le vague idéal comme trop proche de l’incrédulité. Les disciples d’aujourd’hui comme ceux d’autrefois, sont sans intelligence en ce qui concerne les prophètes, et lents de cœur à croire (Luc 24:25). L’application de la description d’Ézéchiel à l’avenir est non seulement la seule raisonnable, mais la seule vraiment possible. Par ailleurs, tout en maintenant que toutes les preuves militent en faveur d’un temple futur sous le Messie et la nouvelle alliance, on peut quand même accepter qu’il y a en même temps bien des leçons de vérité et de justice cachées dans le bâtiment, les cérémonies et l’ordre général décrits ici par Ézéchiel, sans pour autant accepter les fantaisies de John Bunyan (l’excellant auteur du pèlerinage du chrétien, sous forme d’allégorie), et sans non plus accepter de confondre tous les temples de l’Écriture, ceux de Salomon, de Zorobabel, d’Hérode et d’Ézéchiel. En présence de ces interprétations erronées, veillons avec vigilance de peur de pervertir la sainte parole de Dieu. J’ai confiance quant à moi-même d’être plus du côté de la prudence que du côté de ceux qui font du tort à la Parole.

 

Détails du ch. 40

Il y a peu de remarques à faire sur les détails de notre chapitre. Dans la première partie (40:6-16) la porte orientale est mesurée, ainsi que le seuil et les piliers, le portique au dedans et au dehors, les chambres des deux côtés, la largeur de l’entrée, la longueur de la porte et des piliers; la canne servant à mesurer est longue de six coudées, chaque coudée ayant une paume de plus que la coudée ordinaire.

Dans la seconde partie (40:17-23), où se trouve le parvis extérieur, il est mesuré la porte qui regarde vers le nord, ses chambres, ses piliers, ses portes, ses degrés, ainsi que la distance entre la porte du parvis intérieur et les portes de l’orient et du nord.

Dans la troisième partie nous avons la mesure de la porte du midi et de ses dépendances, avec, comme d’habitude, la distance depuis la porte du midi du parvis intérieur (40:24-27). Cette porte est mesurée (40:28-31) de la même manière, ainsi que la porte orientale du même parvis (40:32-34), et celle du nord (40:35-38).

Dans les versets 40:38-43, on a la description des cellules et des entrées auprès des piliers des portes, et des huit tables en pierres de taille sur lesquelles on égorgeait l’holocauste et les autres sacrifices; il y avait quatre tables de chaque côté, et (40:44-47) des cellules en dehors de la porte, pour les sacrificateurs, l’une regardant vers le midi pour les sacrificateurs qui font l’acquit de la charge de la maison, l’autre regardant vers le nord pour les sacrificateur qui font l’acquit de la charge concernant l’autel (le parvis lui-même ayant 100 coudées de côté en carré, avec l’autel devant la maison). Le chapitre se termine avec la mesure du portique de la maison, la longueur et la largeur, avec la porte (40:48-49).

On remarquera que ce sont les fils de Tsadok qui sont désignés pour le service de la maison. Ils avaient l’assurance d’avoir cette sacrificature perpétuelle comme privilège de la lignée d’Aaron. Ce qui avait été garanti à Phinées fils d’Éléazar pour toujours est revenu en son temps à Tsadok. Celui-ci sous le règne de Salomon, fut mis à la place de la lignée d’Ithamar selon le jugement de l’Éternel annoncé à Éli, après qu’Abiathar ait pris part à la rébellion d’Adonija. Nous trouverons la même restriction tout au long de la vision (48:19; 44:15; 48:11).