Le nom au-dessus de tout nom (suite et fin)

E. Dennett

12. Tu demeures

«Toi, dans les commencements, Seigneur, tu as fondé la terre, et les cieux sont les œuvres de tes mains: eux, ils périront, mais toi, tu demeures; et ils vieilliront tous comme un habit, et tu les plieras comme un vêtement, et ils seront changés; mais toi, tu es le même, et tes ans ne cesseront point» (Hébreux 1:10-12 — citation du psaume 102).

Tout au long de cette année nous avons été occupés du nom qui est au-dessus de tout nom, ce nom qui est l'expression des gloires variées et de l'excellence de notre Seigneur et Sauveur. Nous avons été réjouis de pouvoir nous arrêter sur ses perfections infinies les unes après les autres et de porter notre attention sur celui vers qui toutes les pensées et les voies de Dieu convergent. Il est aussi celui qui constitue la part éternelle et constante du cœur du croyant. Contempler Christ et être rempli d'admiration, comme la reine de Sheba face à la gloire de Salomon, c'est un avant-goût de la jouissance qui nous est réservée dans le ciel. Mais pour y entrer tant soit peu, il faut suivre le Seigneur jusque dans le lieu saint, le lieu où il demeure. Ceci n'est possible qu'au travers de sa mort et de sa résurrection reconnues dans leur application à nous-mêmes. Là uniquement, nous pouvons contempler à face découverte la gloire du Seigneur et être «transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par Seigneur en Esprit». Le désir de son cœur est d'avoir ses bien-aimés dans l'intimité de sa présence. Qu'il veuille susciter dans tous nos cœurs le désir du psalmiste: «J'ai demandé une chose à l'Éternel, je la rechercherai: c'est que j'habite dans la maison de l'Éternel tous les jours de ma vie, pour voir la beauté de l'Éternel et pour m'enquérir diligemment de lui dans son temple» (Psaumes 27:4)!

Le sujet qui est devant nous maintenant, c'est le caractère immuable du Seigneur en contraste avec le caractère passager de ce monde. Notre corps est lié à cette création qui «soupire et est en travail», et il y a des moments où la pensée de la corruption et de la mort dont elle est marquée nous oppresse particulièrement. Déjà sous le jugement, cette création disparaîtra bientôt: «Les cieux et la terre de maintenant sont réservés par sa parole pour le feu, gardés pour le jour du jugement et de la destruction des hommes impies» (2 Pierre 3:7). Les œuvres des mains du Seigneur périront. Comme un vêtement, il les pliera lui-même; la terre et les cieux seront changés. Pour quelle raison? Parce que la première création partagera le sort du premier homme. Pour un temps limité, en témoignage des droits et de la gloire du Fils de l'Homme, elle sera «affranchie de la servitude de la corruption, pour jouir de la liberté de la gloire des enfants de Dieu» (Romains 8:21). Mais le jugement prononcé sur elle, bien que reporté, est irrévocable et définitif.

Il est extrêmement réconfortant de se rappeler que le Seigneur, le Créateur, demeure à toujours. La fuite rapide du temps — sur laquelle nos pensées se portent davantage à la fin de l'année —, les départs successifs de ceux que nous avons connus et aimés, les signes de vieillissement qui s'offrent constamment à notre vue, tout cela pourrait bien remplir nos cœurs de tristesse et d'appréhension si notre horizon était limité au temps qui passe. Mais, Dieu soit béni, nous sommes liés à une Personne qui est au-dessus et au-delà de tout changement, à Celui qui reste le Même et dont les années ne cesseront pas. Nous le connaissons comme Sauveur, Rédempteur et Seigneur. C'est un des traits caractéristiques du christianisme que les croyants soient liés à une Personne divine qui, ayant été ici-bas Homme parmi les hommes, connaît tous nos besoins et toutes nos douleurs. Dans le psaume même dont l'épître cite le passage placé en tête, nous trouvons les sentiments auxquels j'ai fait allusion. Pour l'encouragement de nos cœurs, méditons un peu ce qui y est rapporté.

Le titre de ce psaume 102 est: «Prière de l'affligé, quand il est accablé et répand sa plainte devant l'Éternel». Souvenons-nous que «l'affligé», ici, c'est le Messie dans la souffrance et la réjection. Mais, sans nous arrêter sur les circonstances particulières dans lesquelles il est vu ici, et en venant d'emblée à notre sujet, nous lisons au verset 23: «Il a abattu ma force dans le chemin, il a abrégé mes jours». Et alors, se tournant vers Dieu, il dit: «Mon Dieu, ne m'enlève pas à la moitié de mes jours! … Tes années sont de génération en génération!» Rien ne rend notre Seigneur plus précieux à nos cœurs que le fait de le voir dans des circonstances semblables aux nôtres. Nous comprenons qu'en devenant homme, il a connu le sentiment de la faiblesse et de la brièveté de la vie — d'une vie qui devait être abrégée. Il «a été tenté en toutes choses comme nous, à part le péché» (Hébreux 4:15). C'est précisément pour cette raison qu'il est à même de sympathiser avec nous dans nos infirmités et de nous donner le secours dont nous avons besoin.

Considérons maintenant la réponse à son cri. «Tu as jadis fondé la terre, et les cieux sont l'ouvrage de tes mains; eux, ils périront, mais toi, tu subsisteras; et ils vieilliront tous comme un vêtement; tu les changeras comme un habit, et ils seront changés; mais toi, tu es le Même, et tes années ne finiront pas» (Psaumes 102:25). Nous pouvons dire en toute révérence que Dieu, en réponse à la détresse de son Oint, lui rappelle qu'il est Créateur, et que si les œuvres de ses mains sont destinées à périr, lui demeurera. En contraste avec leur altération, leur détérioration et leur dissolution, lui, bien qu'à ce moment-là dans la faiblesse et dans la détresse, est, dans son être même, celui qui ne change pas. Un tel langage ne peut être compris qu'à la lumière du mystère de sa Personne. Mais le point sur lequel j'aimerais attirer l'attention, c'est que le réconfort et l'encouragement qui sont donnés ici à son âme sainte sont en relation avec l'éternité et l'immuabilité de son être. Combien cette «prière de l'affligé» et la réponse qui lui est donnée le rendent proche de nous dans notre faiblesse!

Il y a une autre chose à relever. Comme «Chef de notre salut», il a été rendu parfait par les souffrances qu'il a subies. Il est ainsi devenu l'exemple type de tous ses saints dans la lutte et les souffrances. Ce qui est merveilleux, c'est que la consolation qui lui est donnée, lorsqu'il suit son chemin de réjection — quand, selon l'apparence extérieure, il travaille en vain et consume sa force pour le néant — cette consolation est de même nature que celle qui nous est donnée sur notre chemin de pèlerin. S'il lui est parlé de son être immuable, il nous est aussi rappelé, alors que nous parcourons ce monde où tout change, que lui demeure, qu'il reste toujours le Même — le Même au travers des siècles présents comme il l'est d'éternité en éternité. Ainsi, nous sommes placés sur un Rocher, un Rocher que rien ne peut ébranler, et sur lequel nous pouvons contempler en parfaite paix, sans appréhension aucune, la dissolution de toutes choses. Si nous perdons tout, Christ demeure. Que toutes autres choses s'effacent de notre regard! Nous ne manquerons de rien puisque nous possédons Christ.

Tout ceci nous montre que nous appartenons déjà à une autre scène, qui est aussi invariable que Christ lui-même. C'est un enseignement que le Seigneur a soigneusement donné à ses disciples. En Jean 13, par exemple, toute la signification du lavage des pieds des disciples par le Seigneur pourrait être exprimée comme suit: Si je ne puis rester avec vous dans vos circonstances, je vais vous montrer comment vous pouvez me suivre et avoir part avec moi dans le nouveau lieu où je me rends. De même, quand Marie de Magdala voudrait le retenir, il lui dit: «Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers mon Père; mais va vers mes frères, et dis-leur: Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu» (Jean 20:17). Il s'agit de la même leçon, mais exprimée d'une autre manière. Par ce message, il met ses disciples à sa propre place et dans sa propre relation en les associant à lui-même, et cela nécessairement dans le ciel. Ainsi, non seulement nous appartenons à une autre scène — en dehors de ce monde —, mais le Seigneur désire que nous le suivions et que nous soyons dans sa compagnie, alors même que nous marchons encore sur cette terre.

«Tu demeures» est donc une expression pleine d'encouragement et de réconfort. La certitude qu'il en est ainsi nous apporte un fondement immuable et sûr au milieu de la mouvance et de la peine; elle attire aussi notre cœur vers ce lieu, vers ce nouvel ordre de choses qu'il a formé et inauguré en vertu de sa mort et de sa résurrection, où il est lui-même le centre de toute gloire. Car, comme nous le lisons ailleurs, il est «monté au-dessus de tous les cieux, afin qu'il remplît toutes choses» (Éphésiens 4:10). Nous pouvons donc accepter la fin et l'usure de toute chose ici-bas, car déjà notre âme entrevoit la lumière d'un autre monde — un monde nouveau où ni changement, ni peine, ni mort ne peut entrer, et où nous serons pour toujours avec Christ, rendus conformes à son image. Il est le Commencement de cette nouvelle création comme il est le Premier-né d'entre les morts, et il demeure. Nous pouvons nous adresser à lui en lui disant: «Tu es le Même, et tes années ne finiront pas.»

Reposons-nous sur celui qui est le même hier, et aujourd'hui, et éternellement. Devant Dieu, il n'y a pas d'autre fondement pour notre âme. Si nous construisons sur ce Roc, nous sommes assurés pour le temps et pour l'éternité, car alors Dieu est pour nous. Et si Dieu est pour nous, qui sera contre nous?

Fin