Le résidu juif et le jour du Seigneur

J.N. Darby

Le résidu juif dans l'Ancien Testament

Le prophète Ésaïe déclare: «Le résidu reviendra, le résidu de Jacob, au Dieu fort; car ton peuple Israël fut-il comme le sable de la mer, un résidu seulement reviendra» (Ésaïe 10:21, 22). Il est évident, d'après ce texte et d'autres1 , qu'il y aura un résidu d'Israël épargné par le Seigneur, et que c'est ce résidu qui verra la réalisation des promesses faites par l'Éternel à Abraham. C'est lui qui recevra le pays promis au patriarche et à sa descendance. Le résidu, qui se trouvera dans la terre de Judée à l'époque où deux tiers du peuple seront retranchés, et qui y sera affiné par le feu (Zacharie 13:8, 9), appartient spécialement aux deux tribus formant l'ancien royaume de Juda2 (Ésaïe 37:32).

1 Voir aussi Ésaïe 1:9; 4:2-6; 8:16-18; Daniel 12:1.

2 En ce qui regarde les dix tribus d'Israël, le cas est à certains égards différent: les rebelles n'entreront pas dans le pays. Le Seigneur fera un triage, et ne laissera pénétrer que ceux qui héritent de la bénédiction (Ézéchiel 20:34-38).

Quelle sera la condition morale de ce résidu? Malachie dépeint d'une manière très claire l'état du résidu des derniers jours (Malachie 3:16, 17). Selon ce tableau, le résidu d'Israël est un résidu pieux, des fidèles qui craignent l'Éternel, qui pensent à son nom. Celui-ci les mettra à part comme étant ses plus précieux joyaux (3:17). Ils sont mis en contraste avec les méchants (3:18); c'est sur eux que le soleil de justice se lèvera (4:2); en ce jour-là, ils triompheront de leurs oppresseurs (4:3). En attendant, ils sont invités à se souvenir de Moïse et de la loi donnée à Israël (4:4).

Le résidu des derniers jours est ainsi identifié avec les hommes pieux d'Israël qui, au temps des prophètes, étaient attentifs à la parole de Dieu. Les prophètes parlent du jour qui vient, comme le fait ici Malachie (4:1), sans donner d'indice d'une interruption dans le temps qui allait s'écouler jusqu'à ce jour, c'est-à-dire sans rien indiquer de la période intermédiaire de l'Église. Et le Seigneur fait de même.

Dans les premiers versets du chapitre 61 d'Ésaïe, que le Seigneur cite en partie en Luc 4:18, 19, le résidu des derniers jours est mis clairement en rapport avec le ministère du Messie sur la terre. La gloire future de Sion et la bénédiction terrestre des juifs sous le règne de Christ y sont annoncées comme faisant suite à son ministère: «L'Esprit du Seigneur, l'Éternel, est sur moi, parce que l'Éternel m'a oint pour apporter de bonnes nouvelles aux débonnaires,… pour proclamer aux captifs la liberté,… pour proclamer l'année de la faveur de l'Éternel et le jour de la vengeance de notre Dieu,… pour mettre et donner à ceux de Sion qui mènent deuil l'ornement au lieu de la cendre… Et ils bâtiront ce qui était ruiné dès longtemps,… les lieux désolés de génération en génération» (Ésaïe 61:1-4).

Le résidu juif dans quelques psaumes

Les Psaumes abondent sur le sujet du résidu. Ils présentent les pensées et les sentiments de ces fidèles sous le double aspect de la relation du juste avec l'Éternel et de l'accomplissement des conseils de Dieu touchant son Oint: deux classes de vérités résumées dans les psaumes 1 et 2.

Psaume 1. Les psaumes, dès le commencement, font la distinction entre le juste et le reste du peuple, ce qui démarque moralement le résidu. L'homme qui ne marche pas dans le conseil des méchants prospérera, tandis que «les méchants ne subsisteront point dans le jugement, ni les pécheurs dans l'assemblée des justes». On a ainsi la position du résidu, et le résultat de cette position selon le gouvernement de Dieu: les méchants seront jugés, et la bénédiction temporelle sera la part du résidu seulement.

Les versets 1 à 3 parlent du juste, et les versets 5 et 6 des justes. Cette distinction identifie le Seigneur avec le résidu de son peuple; car le Christ a été par excellence le Juif pieux, l'homme qui ne marchait pas selon le conseil des méchants.

Psaume 2. Là nous sont présentés: la rébellion des chefs des nations et des juifs contre l'Éternel et contre son Oint, le décret qui établit cet Oint sur le trône de Sion en sa qualité de Fils de Dieu, et l'ordre donné aux rois et aux juges de la terre de se soumettre à lui.

Psaumes 3-7. Ces psaumes décrivent les divers sentiments des justes, lorsqu'ils sont exposés à la haine des impies: leur foi malgré les efforts des ennemis et l'apparence de l'abandon de Dieu, leurs louanges à Dieu dans une confiance paisible, leurs requêtes contre les méchants, etc.

Psaume 8. Le moment arrive enfin où le décret de Dieu s'accomplit, et où Christ reçoit la domination universelle. Rejeté quand il s'est présenté dans sa qualité de Messie (l'Oint, Psaumes 2), le Seigneur apparaît maintenant dans la gloire du Fils de l'homme qui domine sur toutes les œuvres de Dieu.

Dans ce psaume, le résidu se voit implicitement. Il célèbre l'Éternel, qui a rendu son nom magnifique par toute la terre en établissant le Fils de l'homme sur toutes ses œuvres. Ce langage, évidemment, n'est pas celui des méchants qui seront frappés quand le Seigneur prendra le gouvernement en main; c'est le langage du résidu: souffrant d'abord, délivré ensuite.

Psaume 16. «Garde-moi, ô Dieu! car je me confie en toi. Tu as dit à l'Éternel: Tu es le Seigneur, ma bonté ne s'élève pas jusqu'à toi. Tu as dit aux saints qui sont sur la terre, et aux excellents: En eux sont toutes mes délices» (versets 1-3). Le premier verset est cité dans l'épître aux Hébreux pour montrer que Celui qui sanctifie et les sanctifiés sont tous d'un. Et nous voyons dans le psaume que Christ prend devant Dieu la place de serviteur, non sa place divine, et qu'il entre ensuite dans une condition d'association avec le résidu fidèle. C'est ce qui a eu lieu historiquement quand le Seigneur a reçu le baptême de Jean-Baptiste. Ce baptême était le premier indice de l'action du Saint Esprit séparant le résidu de l'ensemble de la nation, en vue de l'entière purification de l'aire du Seigneur (Matthieu 3:12).

Le résidu dans le Nouveau Testament

L'évangile de Luc commence par montrer Christ, lorsqu'il est venu ici-bas, entrant en pleine relation avec Israël. Nous y voyons les espérances du résidu. Ces fidèles «attendaient la délivrance» (2:38). Ils étaient «justes et pieux», ils «attendaient la consolation d'Israël» (2:25); et, par l'Esprit Saint, ils voyaient dans le Christ le salut de Dieu: «une lumière pour la révélation des nations», et la gloire d'Israël, le peuple de Dieu (verset 32). Les bergers, en recevant des anges la nouvelle de la naissance du Christ, apprenaient la bonne nouvelle d'un sujet de joie pour tout le peuple (c'est-à-dire celui d'Israël): dans la cité de David, leur était né le Christ, le Seigneur. À Marie, il est annoncé que l'enfant qui naîtrait d'elle serait appelé Fils du Très Haut, et que le trône de David, son père, lui serait donné. Le cantique de Zacharie est aussi composé d'actions de grâces envers le Dieu qui avait visité et racheté son peuple.

Dans l'évangile de Matthieu, le sermon sur la montagne (chapitres 5-7) distingue moralement le résidu, et décrit les qualités de ceux qui héritent du royaume, qualités qui font contraste avec la propre justice des juifs.

Au chapitre 10, le Seigneur envoie les douze apôtres en mission. Mais ils devaient aller seulement vers «les brebis perdues de la maison d'Israël» (verset 6), et leur déclarer que le royaume des cieux s'était approché. Ils devaient s'informer des personnes dignes (versets 11-13), c'est-à-dire chercher, non de pauvres pécheurs perdus, mais le résidu fidèle. En même temps, ils devaient rejeter ceux qui ne les recevraient pas, et proférer contre eux le jugement le plus sévère, en secouant la poussière de leurs pieds. Quoique cette mission doive s'accomplir au milieu d'Israël, les disciples se trouveraient comme des brebis au milieu des loups. L'infidélité de la nation était constatée, et le jugement sur elle était prononcé. Aussi les disciples n'avaient-ils autre chose à faire qu'à chercher ceux qui étaient dignes, les «fils de paix» (Luc 10:6), c'est-à-dire le résidu qui échappait à cet état général.

De plus, nous voyons là une mission circonscrite à la Judée, poursuivie durant la vie du Seigneur, continuée après lui par la puissance du Saint Esprit, et devant durer jusqu'à la fin. Cette mission, quoiqu'elle ne dépasse pas la limite des villes d'Israël, ne serait pas achevée avant la venue du Fils de l'homme. Toute la période intermédiaire de l'Église n'est jamais mentionnée par le Seigneur.

Le Nouveau Testament confirme les promesses faites à Israël et les espérances de ce peuple: «Jésus Christ a été serviteur de la circoncision, pour la vérité de Dieu, pour la confirmation des promesses faites aux pères» (Romains 15:8). Le rejet de Jésus a-t-il mis de côté les promesses? Loin de là. En Romains 11, l'apôtre montre que la mort de Christ fait que les promesses s'accompliront par pure grâce. Cette mort en assure l'accomplissement. Quelle sera donc la part du résidu — en contraste avec celle de l'Église — quand ces promesses s'accompliront?

La grande tribulation et la venue de Christ pour régner

En Apocalypse 12:7-12, nous trouvons la révélation directe que Satan, l'accusateur de nos frères, est précipité du ciel trois ans et demi avant la fin, c'est-à-dire au milieu de la dernière semaine de Daniel 9. L'enlèvement de l'Église aura eu lieu avant cette scène. Dans ce chapitre 12, il est compris dans l'enlèvement de l'enfant mâle qui doit gouverner les nations (verset 5). En effet, l'Église et Christ sont un, et elle gouvernera avec lui (cf. Apocalypse 2:26, 27; 19:14, 15). Dès que Satan est chassé du ciel commence le temps de sa grande colère contre les habitants de la terre. Ce moment est celui dont le prophète Daniel a parlé, et auquel le Seigneur s'est référé, comme un temps d'une tribulation telle qu'il n'y en a jamais eu depuis le commencement du monde (Daniel 12:1; Matthieu 24:21). La femme persécutée, dans ce chapitre, représente la nation juive. Ce sont donc les habitants de la terre que la tribulation atteindra. Mais cette grande tribulation précède immédiatement «le salut et la puissance et le royaume de notre Dieu et le pouvoir de son Christ». Ce sera alors le temps de la délivrance pour le résidu d'Israël par l'apparition glorieuse de Christ et l'établissement de son règne millénaire en Sion.

L'enlèvement aura-t-il lieu avant le règne millénaire de Christ ou après?

Cette question trouve sa réponse aux chapitres 19 et 20 de l'Apocalypse. Les noces de l'Agneau sont célébrées dans le ciel (19:7), par conséquent après que l'enlèvement de l'Église a eu lieu. C'est ensuite seulement que prennent place successivement:

  • la manifestation de Christ en puissance, pour exercer de grands jugements sur la terre. Il vient accompagné par les saints célestes «vêtus de fin lin, blanc et pur» (19:8, 14),
  • la destruction de la bête et du faux prophète, l'antichrist; cet événement met fin à la grande tribulation (2 Thessaloniciens 2:8; Apocalypse 19:20; 20:4),
  • le royaume millénaire de Christ (20:4-10),
  • le jugement du grand trône blanc (20:11-15).

Tous ces événements font partie du «jour du Seigneur» annoncé par les prophètes de l'Ancien et du Nouveau Testament. Dans la première épître aux Thessaloniciens, Paul présente successivement l'enlèvement des saints comme leur espérance et leur consolation (chapitre 4), puis le jour du Seigneur comme jugement sur le monde (chapitre 5). Dans la seconde épître, il montre d'abord (chapitre 1) que les saints seront associés au Seigneur lors de sa manifestation glorieuse (qui introduira le jour du Seigneur). Et il prie ensuite les croyants (chapitre 2) de ne pas se laisser bouleverser par les souffrances qu'ils subissaient, «comme si le jour du Seigneur était là». Le motif à l'appui de son exhortation, c'est la perspective de «la venue de notre Seigneur Jésus Christ et notre rassemblement auprès de lui» (verset 1) qui doivent intervenir auparavant et nous délivrer de la colère qui vient (1 Thessaloniciens 1:10).

L'Église aura-t-elle à traverser la grande tribulation?

Avant de terminer, considérons quelques passages qui montrent que nous serons gardés de la tribulation qui sévira sur le monde et plus spécialement sur les juifs rétablis comme nation dans leur pays.

Tous les passages qui révèlent cette dernière crise montrent que l'Église n'y sera pas. Jérémie nous dit de ce jour: «Il n'y en n'a point de semblable; et c'est le temps de la détresse pour Jacob» (Jérémie 30:7). Daniel nous montre que ce «temps de détresse tel qu'il n'y en a pas eu depuis qu'il existe une nation» (Daniel 12, 1) concerne Israël, le peuple de Daniel: «Ton peuple sera délivré: quiconque sera trouvé écrit dans le livre». Le Seigneur, en citant ce passage (Matthieu 24:21; Marc 13:19), ne laisse pas le moindre doute qu'il s'applique à Israël, à ceux du peuple qui seront dans la Judée et à Jérusalem: «Quand vous verrez l'abomination de la désolation… établie dans le lieu saint… alors que ceux qui sont en Judée s'enfuient dans les montagnes… Et priez que votre fuite n'ait pas lieu… un jour de sabbat». En un mot, la grande tribulation sera à Jérusalem, en Judée et parmi les juifs. Jérémie, Daniel et le Seigneur lui-même le déclarent.

En Apocalypse 3:10 il est parlé de «l'heure de l'épreuve» qui viendra «sur la terre habitée tout entière, pour éprouver ceux qui habitent sur la terre».

C'est par conséquent quelque chose de plus général que la tribulation circonscrite aux juifs qui a été annoncée par Jérémie, par Daniel et par le Seigneur. Cette tribulation générale est mentionnée dans la lettre à l'assemblée qui attend Christ. Mais que lui est-il dit? «Je te garderai de l'heure de l'épreuve» (en grec: hors de l'heure…). Cette assemblée reçoit la promesse pleine de grâce, qu'ayant gardé la parole de la patience de Christ, elle sera gardée hors de ce temps de tribulation.

Le passage qu'on présente quelquefois pour porter atteinte à la confiance des saints dans l'attente de Christ avant la tribulation, c'est Apocalypse 7:9-17. Ce passage ne se rapporte pas à l'Église. La famille de sauvés qu'on y trouve forme une classe distincte des vingt-quatre anciens, qui représentent les rois et sacrificateurs célestes assis sur des trônes devant Dieu (Apocalypse 5). L'un de ces anciens explique quelles sont ces personnes venues de toutes les nations, tribus, peuples et langues, et il montre précisément dans sa description que cette classe est aussi distincte que possible de celle des vingt-quatre.

Nous avons trouvé six passages qui mentionnent ce temps de douleurs: quatre d'entre eux révèlent positivement que la tribulation sera pour les juifs; un autre déclare que les saints fidèles de l'Église en seront gardés; et le dernier, parlant des Gentils, les distingue de la manière la plus positive des anciens couronnés et assis sur des trônes, qui représentent l'Église et les saints dans le ciel. Ainsi, l'Écriture est, sur le sujet, aussi claire que la lumière peut l'être.