Soins divins (fin)

R.F. Wall

5. Les soins de Timothée (Philippiens 2:19-21)

Tant par son appel que par son service, l'apôtre Paul occupe une place unique. Mais cela n'empêche pas qu'il y ait dans son appel des éléments qui se retrouvent dans l'appel de chaque chrétien, et dans son service, des principes directeurs qui devraient agir dans le service de chaque chrétien. Paul était un homme ayant les mêmes passions que nous, mais son obéissance, son énergie, son intelligence spirituelle ainsi que son amour profond pour les saints, ont fait de lui un instrument par lequel les soins divins ont pu être exercés de façon remarquable. En cela comme en toutes choses, il n'était certainement «en rien moindre que les plus excellents apôtres» (2 Corinthiens 11:5).

Mais comment ces soins sont-ils à l'œuvre en ceux qui ne sont pas apôtres? En Philippiens 2, Timothée est placé devant nous. Les versets 5 à 11 de ce chapitre nous présentent Christ, celui qui, en dehors de toute comparaison, n'a pas regardé ce qui était à lui mais ce qui était aux autres (verset 4). Bien qu'il fût et restât Dieu, sa «pensée» était de servir en humilité et obéissance, même jusqu'à la mort. Il doit nécessairement y avoir une distance infinie entre le Créateur et la créature, mais est-ce que la même pensée n'a pas été vue en Paul? Il exhortait les Philippiens à avoir en eux «cette pensée» qui avait été aussi dans le Christ Jésus. Et qui, parmi les serviteurs de Christ, était plus marqué par «cette pensée» que Paul lui-même? Or il peut dire ici de Timothée, «car je n'ai personne qui soit animé d'un même sentiment avec moi pour avoir une sincère sollicitude à l'égard de ce qui vous concerne» (verset 20). Dans ces jours-là comme aujourd'hui, la tendance allait évidemment dans la direction opposée. Au lieu de rechercher le bien des autres, chacun cherchait ses propres intérêts, «non pas ceux de Jésus Christ» (verset 21). En contraste total avec cet égoïsme, il y avait chez Timothée un véritable intérêt quant au bien-être des saints (verset 20).

De quelle façon se manifestait la sollicitude de Timothée pour les saints? Plusieurs passages du Nouveau Testament nous parlent de lui et nous permettent de répondre à cette question. Il avait été appelé et formé par le Seigneur pour un service particulier et, très heureusement, il pouvait l'accomplir en plein accord avec ses frères (1 Timothée 1:18; 4:14). Paul parle de lui comme son «enfant bien-aimé», «qui est fidèle dans le Seigneur», et ces qualités s'étaient manifestées durant les années où Timothée était avec lui (1 Corinthiens 4:17).

Paul avait pris Timothée pour la première fois avec lui lors de son second voyage missionnaire (Actes des Apôtres 16:1-3). Ils étaient venus ensemble à Thessalonique, où ils étaient restés pendant trois semaines, avec une bénédiction évidente (17:1-10). Très tôt, ils durent partir à cause de la persécution. Paul, Silas et Timothée se rendirent à Bérée, et Paul continua jusqu'à Athènes, où Silas et Timothée le rejoignirent plus tard (versets 10-15). En souci pour les Thessaloniciens, Paul leur renvoya Timothée pour les affermir et les encourager (1 Thessaloniciens 3:1, 2, 6). Timothée s'est beaucoup dépensé pour ces nouveaux convertis; il avait aussi la sagesse nécessaire pour les aider dans leurs difficultés.

Ici, dans l'épître aux Philippiens, Paul se propose d'envoyer Timothée afin d'avoir «bon courage» quand il connaîtra «l'état de leurs affaires». Timothée avait «une sincère sollicitude» aussi pour ces frères (Philippiens 2:19, 20). Ce n'étaient pas de nouveaux convertis; ils étaient mûrs spirituellement. Ils avaient communion dans l'évangile avec Paul et ses collaborateurs (1:4-7). Comme Timothée, ils avaient beaucoup d'affection pour Paul (4:10-18; 2:17).

Servir le Seigneur parmi les Thessaloniciens et parmi les Philippiens était sans aucun doute une heureuse tâche, quelle qu'ait pu être l'opposition du dehors. Cependant Timothée fut envoyé dans d'autres assemblées aussi, où la tâche était plus délicate. Paul ne désirait pas aller lui-même à Corinthe, à cause de la basse condition spirituelle des croyants de cette localité. S'il y était allé, il aurait dû user de sévérité et exercer une discipline de la part du Seigneur (1 Corinthiens 4:18-21; 2 Corinthiens 1:23; 13:10). C'est pourquoi il leur a envoyé Timothée. Comme bien-aimé et fidèle enfant dans le Seigneur et compagnon de travail de Paul, Timothée était capable de rappeler aux Corinthiens les voies et les enseignements de l'apôtre (1 Corinthiens 4:17). Combien ceux-ci étaient différents de ce qui était pratiqué et enseigné dans l'assemblée à Corinthe! La tâche de Timothée n'était pas facile. Il y en avait qui s'opposaient fortement à Paul (1 Corinthiens 9:1-12; 15:12; 2 Corinthiens 10:1-11; 11:1-15). Il semble que Timothée était de nature plus sensible que Paul et qu'il devait sentir fortement le poids de sa tâche. Les Corinthiens sont exhortés à faire en sorte qu'il soit sans crainte au milieu d'eux (1 Corinthiens 16:10). La première épître parle de la repentance qui était nécessaire, et il est probable que, par son service fidèle, Timothée ait contribué à ce résultat (2 Corinthiens 7:8-12).

Plus tard, lorsque Paul alla en Macédoine, il pria Timothée de rester à Éphèse (1 Timothée 1:3)1.

1 Dans l'histoire relatée dans les Actes, Paul se rendit deux fois de cette région en Macédoine (Actes des Apôtres 16:8-11; 20:1). Timothée l'accompagna la première fois et alla avant l'apôtre la seconde fois(Actes des Apôtres 17:1-15; 1 Thessaloniciens 3:1-6; Actes des Apôtres 19:22; 20:1-5). Il est probable que 1 Timothée 1:3 fasse allusion à une occasion située entre le premier et le second emprisonnement de Paul à Rome.

Les saints à Ephese avaient été favorisés par une visite prolongée de l'apôtre parmi eux et par une épître qui présente les desseins de Dieu dans une plénitude remarquable. Timothée avait à surveiller ce qui était enseigné, à s'assurer que c'était la saine doctrine. Ceux qui désiraient enseigner des doctrines étrangères, comme aussi la loi de Moïse, ne manquaient pas (1:1-7). Un ordre selon Dieu devait être maintenu et Timothée avait une responsabilité en cela. Il y avait sans doute une difficulté particulière pour lui, jeune homme, à intervenir auprès de frères plus âgés que lui (5:1, 2). Il ne devait donner l'occasion à personne de mépriser sa jeunesse, mais être un modèle des fidèles (4:12).

La sollicitude de Timothée pour les saints lui faisait sans doute ressentir très vivement que tous ceux qui étaient en Asie s'étaient détournés de Paul (2 Timothée 1:15). Si le ministère de Timothée à Corinthe avait aidé à endiguer cette marée, il ne semble pas que cela ait suffi plus tard à Éphèse. Paul était conscient que son jeune collaborateur aurait pu se décourager, et il insistait sur sa responsabilité envers le Seigneur (1 Timothée 1:18-20; 5:21; 6:13-16). Dans la seconde épître, il lui rappelle que tout est sûr «dans le Christ Jésus», et que nous avons des ressources infaillibles en Lui pour affronter les difficultés des derniers jours.

6. Les soins mutuels des membres du corps de Christ (1 Corinthiens 12:25)

«afin… que les membres aient un égal soin les uns des autres».

Nous venons de considérer la sollicitude de Timothée pour les saints, et quelques occasions où elle s'est manifestée. Il était un délégué de l'apôtre, ce que nous ne sommes pas, et il avait des dons que nous n'avons pas. Il pouvait prendre soin des saints d'une manière qui est hors de notre portée. C'est vrai, mais nous sommes tout de même responsables de prendre soin les uns des autres. Beaucoup de passages nous enseignent à ce sujet, cependant nous nous limiterons ici à la considération de 1 Corinthiens 12:25 et de quelques exemples que l'épître elle-même nous fournit.

A Corinthe, les saints avaient été «enrichis en toute parole et toute connaissance», et ne manquaient «d'aucun don» (1:5, 7). Ces dons dispensés par la grâce de Dieu étaient destinés au profit de toute l'assemblée (12:7). Malheureusement, quelques-uns utilisaient mal ce que Dieu avait donné; ils l'employaient pour s'exalter eux-mêmes, au lieu de prendre soin de leurs frères. D'autres, en suivant des chefs de file, favorisaient un esprit de parti (1:12, 13; 3:4-7, 22, 23; 4:6; 11:18, 19). Ceci avait conduit à l'envie, aux querelles et aux divisions, caractéristiques de l'homme dans la chair plutôt que de ceux qui sont «sanctifiés dans le Christ Jésus» (3:3; 1:2). Au début de l'épître, Paul montre que la croix de Christ a mis de côté la chair et tout ce dont l'homme dans la chair pourrait se glorifier (1 Corinthiens 1:18 à 2:8; Colossiens 2:11).

Ici, dans le chapitre 12, il montre combien leur comportement était en contradiction avec l'interdépendance des membres du corps de Christ. Il illustre cela au moyen du corps humain (versets 14-26). S'il y avait une diversité des membres — «car aussi le corps n'est pas un seul membre, mais plusieurs» —, il y avait aussi une unité essentielle — «les membres sont plusieurs, mais le corps, un» (versets 14, 20). En rappelant que Dieu a voulu que «les membres aient un égal soin les uns des autres», Paul avait clairement devant lui l'état de division des Corinthiens. Au lieu de l'exaltation de soi-même et de préférences pour l'un ou l'autre, une compréhension et une appréciation du fait qu'il y a «un seul corps» aurait dû stimuler les soins mutuels (Éphésiens 4:4). Cela aurait montré le fonctionnement de chacun, à la place qui lui est assignée dans le corps (1 Corinthiens 12:18). Bien que quelques-uns aient été plus en évidence que d'autres, il aurait dû y avoir «l'opération de chaque partie dans sa mesure» (Éphésiens 4:16). La contribution de chacun ne devait être ni sous-estimée ni surestimée (1 Corinthiens 12:15-17, 21, 22). Paul écrit qu'ils étaient «le corps de Christ» à Corinthe; c'était Christ qui devait être manifesté en eux et non pas les caractères du vieil homme (verset 27). Ils devaient avoir les mêmes soins les uns pour les autres que ceux que Christ avait pour eux. Les dons de grâce de Dieu sont très divers, comme Romains 12, 1 Corinthiens 12 et Éphésiens 4 le montrent.

Il nous est dit en 2 Timothée 3:1 «que dans les derniers jours il surviendra des temps fâcheux». Si notre œil n'est pas simple, et fixé fermement sur Christ, les difficultés de ces temps fâcheux peuvent nous conduire au découragement et au désespoir. Souvenons-nous qu'«à chacun de nous la grâce a été donnée selon la mesure du don de Christ». Peut-être que, comme Timothée, nous avons besoin parfois «de ranimer le don de grâce» qui est en nous (Éphésiens 4:7; 2 Timothée 1:6). Dieu avait prévu toutes les difficultés des derniers jours; lui-même et sa parole sont les ressources suffisantes pour y faire face (Actes des Apôtres 20:32). Ce ne sont pas les innovations qui vont renforcer le témoignage de Dieu, mais l'obéissance du cœur à la Parole, dans le premier amour pour Christ. C'est seulement quand les dons reçus sont exercés sous la direction du Saint Esprit et dans la soumission à la Tête, le Seigneur Jésus, que le corps de Christ est édifié.

Les Corinthiens pouvaient exercer des soins mutuels et avoir des égards les uns envers les autres dans beaucoup de domaines que Paul touche dans la première épître. Nous nous arrêterons plus particulièrement sur quelques exemples.

Dans le chapitre 6, Paul écrit: «C'est donc de toute manière déjà une faute en vous, que vous ayez des procès entre vous» (verset 7). Quelques-uns faisaient tort à leurs frères, commettant des injustices. Les différends étaient portés devant les tribunaux de ce monde sans que l'on pense au déshonneur jeté sur le nom du Seigneur et sur le témoignage. De véritables soins pour le peuple de Dieu auraient conduit à supporter la perte, en comptant sur le Seigneur pour mettre les choses en ordre, et en cherchant à gagner le frère ou la sœur concerné (1 Corinthiens 6:7; Matthieu 18:15).

Paul parle de nouveau de questions financières à la fin de l'épître. Alors qu'ils craignaient de perdre la moindre des choses, en dépit de leurs richesses, les Corinthiens étaient lents à s'occuper des besoins des autres. Au chapitre 16, il les entretient de la collecte pour les saints de Jérusalem et, dans la seconde épître, il les exhorte quant à la manière de faire (1 Corinthiens 16:1-4; 2 Corinthiens 8:11). Il leur écrit: «Vous connaissez la grâce de notre Seigneur Jésus Christ, comment, étant riche, il a vécu dans la pauvreté pour vous, afin que par sa pauvreté vous fussiez enrichis» (2 Corinthiens 8:9). Quelle honte pour les Corinthiens de ce que d'autres, bien moins favorisés qu'eux, soient beaucoup plus zélés pour cela! Paul parle de la «profonde pauvreté» des croyants de Macédoine, et, malgré cela, de «la richesse de leur libéralité». Ils demandaient «avec de grandes instances la grâce et la communion de ce service envers les saints» (8:4). L'apôtre exhorte alors les Corinthiens: «Que chacun fasse selon qu'il se l'est proposé dans son cœur, non à regret, ou par contrainte, car Dieu aime celui qui donne joyeusement» (9:7).

Les Corinthiens avaient aussi été lents à contribuer aux besoins matériels de Paul et de ceux qui, avec lui, avaient semé pour eux des biens spirituels (1 Corinthiens 9:11). Pourtant, «le Seigneur a ordonné à ceux qui annoncent l'évangile, de vivre de l'évangile». Néanmoins, Paul n'avait pas usé de ce droit (9:14). D'autres lui avaient envoyé de l'argent pour ses besoins, mais pas l'assemblée de Corinthe comme telle (1 Corinthiens 16:17; 2 Corinthiens 11:8, 9).

Il y avait un autre sujet pour lequel d'amples soins et des égards particuliers étaient indiqués. Dans le chapitre 8, Paul leur écrit longuement concernant les «choses sacrifiées aux idoles» (verset 4).

Quelques-uns d'entre eux, sachant bien qu'une idole n'est rien, étaient si hardis que non seulement ils mangeaient ce qui avait été offert, mais qu'ils le mangeaient dans l'enceinte du temple de l'idole. En mangeant là, ils compromettaient la sainte communion chrétienne à laquelle ils avaient été appelés et provoquaient le Seigneur à la jalousie (1 Corinthiens 1:9; 10:19-22). Et simplement en mangeant  de tels sacrifices, ils méprisaient et blessaient les consciences de leurs frères plus faibles. Ils les incitaient à se permettre de faire la même chose, tout en ayant «conscience de l'idole». Ceux-ci, en mangeant des choses «comme sacrifiées aux idoles» souillaient leur conscience faible (8:7). Paul utilise ici des paroles très fortes: «Et celui qui est faible, le frère pour lequel Christ est mort, périra par ta connaissance. Or en péchant ainsi contre les frères, et en blessant leur conscience qui est faible, vous péchez contre Christ» (8:11, 12). En souillant la conscience d'un frère, on l'éloignait de Dieu par une infidélité et on ruinait son témoignage chrétien. Le soin que nous devons à nos frères se manifeste ici sous forme d'égards envers leur conscience. «C'est pourquoi, si la viande est une occasion de chute pour mon frère, je ne mangerai pas de chair, à jamais, pour ne pas être une occasion de chute pour mon frère» (8:13). Il faut prendre en considération tout ce qui pourrait être impliqué dans une telle action: «Mais si quelqu'un vous dit: Ceci a été offert en sacrifice, n'en mangez pas, à cause de celui qui vous a avertis, et à cause de la conscience» (10:28, 32, 33). Nous n'allons pas faire un spectacle de notre propre liberté, ou chercher notre propre profit, mais l'édification des autres (10:23, 24).

Tout le chapitre 14 de l'épître aux Romains traite de questions similaires, bien que les choses offertes aux idoles ne soient pas mentionnées. Les principes énoncés sont valables de façon très générale. Nous avons à tenir compte des consciences des autres et à être indulgents envers ceux qui ne jouissent pas de la liberté chrétienne entière. Tant que l'enseignement de la parole de Dieu n'est pas mis en cause et que la vie chrétienne dans la sainteté n'est pas compromise, nous n'avons pas à nous juger l'un l'autre. Chacun a sa responsabilité personnelle devant son Seigneur et Maître, et c'est ceci qui est souligné (versets 4, 6-9). Devant le tribunal de Dieu, c'est de notre propre conduite et de notre propre service que nous aurons à rendre compte, et non pas de ceux des autres (versets 10, 12).

Avant de conclure, rappelons quelques versets de 1 Corinthiens 13: «L'amour use de longanimité; il est plein de bonté; l'amour n'est pas envieux; l'amour ne se vante pas; il ne s'enfle pas d'orgueil; il n'agit pas avec inconvenance; il ne cherche pas son propre intérêt; il ne s'irrite pas; il n'impute pas le mal; il ne se réjouit pas de l'injustice, mais il se réjouit avec la vérité; il supporte tout, croit tout, espère tout, endure tout. L'amour ne périt jamais» (versets 4-8). L'amour divin est le motif de tous les soins divins. Dans quelques-uns de ces versets, Paul doit écrire ce que l'amour divin n'est pas ou ne fait pas. Malheureusement, cet aspect négatif des choses existait parmi les Corinthiens. Que Dieu nous accorde de manifester cet amour et qu'il mette dans nos cœurs le désir d'avoir soin les uns des autres, pour leur bien! Ainsi, ce qui s'est vu en perfection en Christ dans ses soins pour les siens, pourra se voir dans une mesure en chacun de nous aujourd'hui.