Le serviteur et son service

U. Furrer

Don et service

Chaque chrétien possède un don, d'après 1 Corinthiens 12, selon ce que Dieu lui a confié. Soulignons qu'il s'agit d'un don. Dieu le place entre nos mains pour que nous l'administrions d'une manière fidèle. C'est dans sa grâce illimitée qu'il nous le remet, aussi est-il appelé un don de grâce! Nous ne pouvons pas l'acquérir de nous-mêmes, mais seulement le recevoir avec reconnaissance. Nous n'avons pas non plus le moindre motif d'en être fier, puisqu'il s'agit de quelque chose qui nous est donné.

Bien sûr, ce don est destiné à être utilisé d'une bonne manière, et non pour soi-même, ou pour être laissé en friche, ou même encore pour être enterré (cf. Matthieu 25: 25). Ainsi, chaque chrétien a un service que le Seigneur de la moisson lui a confié, et il doit l'accomplir avec le don  qui lui a été remis. L'un correspond à l'autre, selon la sagesse divine. Lorsque le Seigneur confie un service — petit ou grand — à l'un des siens, il ne manque pas de lui faire le don  nécessaire pour l'accomplir.

Récolter et redonner

Avant de pouvoir transmettre quelque chose de la plénitude de la parole de Dieu, nous devons d'abord:

  • «récolter» jour après jour, comme le faisaient les Israélites avec la manne au cours de leur voyage dans le désert (Exode 16);
  • «manger et laisser de reste» (cf. Ruth 2: 14, 18), c'est-à-dire manger nous-mêmes de ce que nous avons recueilli et en transmettre quelque chose à d'autres;
  • «prendre possession du pays» (Josué 1: 11), comme Israël avait à le faire, avant de pouvoir en montrer à d'autres la beauté, c'est-à-dire avant de pouvoir leur décrire les bénédictions spirituelles des lieux célestes;
  • «acheter la vérité» (Proverbes 23: 23), en d'autres termes nous l'approprier personnellement — en payer le prix — en lisant la Bible, en la méditant, en la recevant par la foi, en nous inclinant devant elle et en la vivant pratiquement.

C'est ainsi seulement que nous serons en état de faire apprécier à d'autres les vérités de la parole de Dieu.

Dans la vie spirituelle pas davantage que dans les choses matérielles, nous ne pouvons dépenser plus que nous ne récoltons  sans que cela entraîne tôt ou tard la conséquence fatale d'une faillite. Cela explique que des croyants qui avaient une fois bien commencé ont soudain diminué de zèle, et ont petit à petit renoncé à ce qu'ils avaient cru un jour, si même ils n'ont pas tout jeté par-dessus bord. Ce qu'ils avaient autrefois reconnu comme étant de Dieu n'a plus de valeur pour eux maintenant. Ce qu'ils avaient auparavant annoncé, ils en font maintenant un sujet de raillerie. Ils ont dépensé plus qu'ils n'avaient récolté dans la parole de Dieu. Ils ont accumulé des livres au lieu de les lire. Ils ont lu et appris par cœur, au lieu de s'approprier la vérité. Ou bien ils n'ont fait que répéter ce qu'ils avaient entendu dire, sans que leur conscience soit atteinte. Cela ne peut pas aller longtemps ainsi; il n'y a pas à s'étonner des conséquences.

Une mesure à ne pas dépasser

Dieu est un Dieu de mesure (2 Corinthiens 10: 13). Il a tout mesuré, tant le don qu'il nous a confié que le service qui lui est lié. Jamais il n'exige trop de ses serviteurs. C'est pourquoi il est important que nous connaissions et acceptions notre mesure, et que nous ne la dépassions pas sous la pression des circonstances ou par un zèle débordant. S'il en était ainsi, nous ne vivrions plus selon la volonté de Dieu. Nous nous surchargerions, ce qui, à la longue, ne peut qu'avoir des conséquences fâcheuses. Trop faire se révèle aussi dangereux que ne rien faire.

Nous pouvons apprendre de Paul à ne pas dépasser la sphère d'action qui nous a été départie. L'apôtre se gardait de pénétrer dans le champ d'activité des autres et de négliger le sien (2 Corinthiens 10: 13-15). Il accomplissait sa tâche et attendait des autres qu'ils en fassent de même. C'est ainsi qu'il écrit dans sa lettre à Colosses: «Dites à Archippe: Prends garde au service que tu as reçu dans le Seigneur, afin que tu l'accomplisses» (Colossiens 4: 17). De la même manière, il encourage Apollos à aller à Corinthe, mais lui laisse sagement la décision (1 Corinthiens 16: 12). Paul travaillait beaucoup, mais il comprenait qu'il ne pouvait et ne devait pas tout faire. Parfois aussi, le Seigneur dut l'empêcher d'entreprendre un voyage, afin qu'il n'en fasse pas trop.

Déjà, le Seigneur avait dit à ses disciples: «Venez à l'écart vous-mêmes dans un lieu désert, et reposez-vous un peu» (Marc 6: 31). Il voulait les préserver de la suroccupation. Puis, quand les foules restent jusqu'à l'heure du repas — ce qui dérange les disciples —, ils disent au Maître: «Renvoie-les». Alors il doit leur rappeler leur responsabilité en leur disant: «Vous, donnez-leur à manger». Il ne leur permet pas de s'esquiver.

Être fidèle dans ce qui est petit

En règle générale, le service commence par être petit et ne grandit que par la suite. Il en est de même pour la sphère d'activité. Son rayon augmente — si c'est la volonté de Dieu — selon la fidélité avec laquelle nous nous acquittons de notre tâche. Nous ne devrions rien forcer, ni jamais nous précipiter dans des services dépassant ceux que le Seigneur nous a attribués.

Mais le principe demeure: «À quiconque a, il sera donné» (Matthieu 13: 12). Une croissance, une progression, est normale.

Souvent, il arrive ceci: aussi longtemps que nous aspirons à davantage de service, le Seigneur nous laisse attendre. Plus tard, si nous pensons être assez chargés, il peut se faire qu'il nous en demande pourtant davantage. Il veut en premier lieu nous préserver de l'orgueil, de la pensée que nous sommes capables. Il nous faut cultiver l'attitude de cœur qu'expriment les mots: «Nous sommes des esclaves inutiles; ce que nous étions obligés de faire, nous l'avons fait» (Luc 17: 10). Le Seigneur veut aussi nous enseigner à ne pas parler de par nous-mêmes, mais par l'Esprit de Dieu qui habite en nous. Ainsi il ne s'agira pas de notre propre force, mais de la sienne.

Récompense de la fidélité

Ce que nous recevons, ce n'est pas seulement le don, le service à accomplir, la croissance spirituelle et le champ d'activité, mais c'est aussi la récompense pour le fidèle accomplissement de notre tâche. Devant le tribunal de Christ, ni la grandeur du don, ni l'ampleur du service, ni encore la maturité spirituelle ou l'étendue du champ de travail ne seront récompensés, mais uniquement la fidélité que nous aurons manifestée jour après jour!

Cette récompense sera attribuée par Celui qui a dit: «Le fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir» (Marc 10: 45). Qui a servi fidèlement comme lui?