Son parfait amour

P. Seignobos

Cantique des Cantiques 4:12 à 6:1

Le Cantique des Cantiques, partie de la Parole inspirée, est rempli d'images qu'il faut méditer avec crainte dans la dépendance de l'Esprit. Les images s'expliquent par la Parole elle-même. Il est donc particulièrement instructif de considérer ce livre, parce qu'il nous amène à lire toute la Parole pour trouver la signification des images qui sont placées devant nous.

Le Cantique des Cantiques relate les relations d'affection entre le bien-aimé et la bien-aimée. Le bien-aimé est une image de Christ. Il est le roi, titre qui nous parle de son autorité. Pour nous, il est le Seigneur qui doit avoir toute autorité sur nos cœurs. Il y a un réel bonheur pour le croyant à se soumettre entièrement à l'autorité du Seigneur. Ce livre nous parle aussi des affections. La bien-aimée représente l'épouse terrestre, Israël restauré; mais on peut aussi voir entre le bien-aimé et la bien-aimée une figure des relations qui existent entre le croyant et Christ, ou entre Christ et une assemblée. La bien-aimée n'est pas toujours à la hauteur nécessaire pour jouir de l'amour du bien-aimé et y répondre. Nous aussi, dans nos affections, nous connaissons des hauts et des bas, et peut-être plus de bas que de hauts.

Dans les deux premiers chapitres, la bien-aimée est dans un bon état. Elle est dans les chambres du roi (1:4), le lieu d'une intimité particulière que personne ne trouble. Le roi est à table (verset 12) et, comme Marie, elle répand le parfum sur ses pieds. Elle est dans la maison du vin (2:4); elle se réjouit avec son bien-aimé. L'intimité, la communion heureuse dans laquelle elle exalte celui-ci, la joie, voilà ce qui caractérise la bien-aimée dans ces deux premiers chapitres.

Au chapitre 3, c'est déjà différent. «Sur mon lit, durant les nuits, j'ai cherché celui qu'aime mon âme; je l'ai cherché, mais je ne l'ai pas trouvé» (verset 1). Si, pendant la nuit de l'absence du Seigneur, nous cherchons à trouver le repos sur terre, une communion heureuse avec lui n'est plus possible. Le bien-aimé s'est éloigné. La bien-aimée s'est assoupie, et tandis qu'elle le cherche, lui se dérobe. Il permet cette discipline à son égard, afin qu'un exercice profond lui montre la perte qu'elle a faite en se reposant sur son lit.

«Voici, tu es belle, mon amie; voici, tu es belle!» (4:1). Le bien-aimé décrit sa beauté, qui est en fait le reflet de sa propre beauté. Comme le croyant qui, «contemplant à face découverte la gloire du Seigneur», est «transformé en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur en Esprit» (2 Corinthiens 3:18). De même, le visage de Moïse rayonnait parce qu'il avait parlé avec lui. Quelle joie pour le Seigneur de voir une assemblée où l'on jouit de sa présence!

«Tu es un jardin clos, ma sœur, ma fiancée, une source fermée, une fontaine scellée» (verset 12). Dans un grand domaine, en plus des terres et de la maison du propriétaire, il existe toujours un jardin qui est propre au maître du domaine. Un jardin qui comporte des fleurs et des fruits qui ne sont que pour lui. C'est une image du cœur du croyant, du cœur de l'assemblée. Rien des choses du monde n'y a sa place. L'ennemi cherche à y entrer pour ruiner la vie spirituelle, et il a mille moyens subtils pour cela. S'il entre, ce n'est plus ni le jardin clos, ni la fontaine scellée. L'Esprit de Dieu fait jaillir une fontaine d'eau en vie éternelle, des fleuves d'eau vive qui coulent parce que le croyant a bu lui-même (Jean 7:38). Si nos cœurs brûlent pour d'autres objets que Christ, nous n'avons pas réalisé ce que sont le jardin clos, la source fermée, la fontaine scellée.

«Tes plants sont un paradis de grenadiers et de fruits exquis, de henné et de nard, de nard et de safran, de roseau odorant et de cinnamome» (verset 13). Un paradis, c'est un lieu de délices. Le cœur du croyant devrait toujours être un lieu de délices pour le Seigneur. La grenade est un fruit qui peut être une image de l'assemblée. Elle a de nombreux grains qui évoquent des croyants liés en un, dans la manifestation pratique de l'unité de l'Esprit. Et cela est une joie pour le Seigneur. Le nard fait penser à l'excellence de la personne de Christ méprisé dans le monde. C'est ce qui ressort de l'acte de Marie qui a versé le nard pur sur les pieds du Seigneur avant sa mort. Le roseau odorant et le cinnamome sont aussi associés en Exode 30, dans la composition de l'huile de l'onction sainte. Le roseau est une image de Christ dans sa faiblesse, dans sa condition humaine. Le cinnamome est un arbre toujours vert, toujours odorant; cela évoque pour nous la vie du Seigneur, toujours parfaite, sans fléchissement ni déclin. Les parfums que respire le bien-aimé dans la bien-aimée nous parlent de lui-même. Tel est le croyant qui, bouillant pour Christ, répand la bonne odeur de Christ en tout lieu (2 Corinthiens 2:15). Il en est de même pour une assemblée.

«Réveille-toi, nord, et viens, midi; souffle dans mon jardin, pour que ses aromates s'exhalent!» (verset 16). Le bien-aimé désire que les parfums s'exhalent. De même, le Seigneur souhaite que le croyant, qu'une assemblée, répandent ces parfums. Le vent du nord, vent froid, glacial, nous parle de l'épreuve. Le vent du midi suggère plutôt des circonstances paisibles. Toutes les circonstances, qu'elles soient éprouvantes ou paisibles, devraient contribuer à accroître le parfum répandu, le parfum du beau nom de Christ. Si un croyant ou une assemblée passent par des épreuves, qu'ils les traversent avec le Seigneur pour que les aromates s'exhalent! Quand c'est le vent du midi, nous avons tendance à nous assoupir. Mais si nous avons affaire avec le Seigneur pour nous nourrir de lui, en étudiant la Parole, alors les aromates s'exhaleront.

La bien-aimée est en plein accord avec le bien-aimé. Pour que les parfums embaument, il faut que le jardin soit en bon état. S'il est inculte, autrement dit si l'état de notre cœur est mauvais, nous ne désirons pas la présence du Seigneur; cette présence nous jugerait. La bien-aimée possède un jardin, un cœur prêt à recevoir le bien-aimé.

«Je suis venu dans mon jardin, ma sœur, ma fiancée! J'ai cueilli ma myrrhe avec mes aromates, j'ai mangé mon rayon de miel avec mon miel, j'ai bu mon vin avec mon lait. Mangez, amis; buvez, buvez abondamment, bien-aimés!» (5:1). La myrrhe évoque les souffrances de Christ. La bien-aimée a connu quelque chose de la communion de ses souffrances. Le bien-aimé a cueilli ce fruit, il y a eu pour lui de la douceur (du miel), de la joie (du vin) et de la nourriture (du lait). «J'ai de la viande à manger», révèle le Seigneur à ses disciples après son entretien avec la femme du puits de Sichar (Jean 4:32). Le bien-aimé invite tous ses amis à partager sa joie. «Mangez, amis; buvez, buvez abondamment». C'est la communion collective avec le bien-aimé, que la chose soit réalisée à titre individuel ou en assemblée.

«Je dormais, mais mon cœur était réveillé» (verset 2). Il semble que l'on trouve ici chez la bien-aimée un fléchissement. Au chapitre 3, il ne nous est pas dit qu'elle dormait. Au contraire elle était sur son lit et cherchait celui qu'aimait son âme. Maintenant, elle dort. Il en est souvent ainsi lorsque nous avons fait un faux pas. Nous avons tendance à faire une chute plus grave encore, et nous nous exposons à une discipline plus sévère. Si nous n'écoutons pas, les disciplines peuvent s'accumuler jusqu'à ce que nous soyons brisés. Mais le cœur est réveillé. Il y a toujours des affections pour le Seigneur, même si nous dormons. Il en est de même pour une assemblée. Il peut y avoir de la routine, peu de zèle, et pourtant il y a malgré cela une certaine affection pour le Seigneur. Nous dormons spirituellement, mais au fond du cœur les affections sont là, même si elles ne sont pas manifestées.

Le bien-aimé heurte; il est à la porte. C'est un peu ce que l'on trouve à Laodicée (Apocalypse 3:20). La bien-aimée reconnaît sa voix car elle a bien quelque affection pour lui. Il s'adresse à elle: Ma sœur, celle qui a la même vie que lui. Mon amie, celle qu'il aime, ma colombe, celle qui est pure. Ma parfaite — c'est ainsi qu'elle est vue par le bien-aimé, son cœur la désire telle. Et pourtant il est dehors, exposé au froid de la nuit. Elle entend ces paroles qui devraient la faire tressaillir, mais elle reste insensible à la voix de son bien-aimé. Elle s'est mise à l'aise (verset 3), elle ne veut pas qu'on la dérange. Quel état que celui d'un croyant qui a bien arrangé sa vie sans Christ, et qui est insensible à tous les appels du Seigneur!

«Je reprends et je châtie tous ceux que j'aime», dit le Seigneur à Laodicée. Je reprends, c'est la parole, puis je châtie, c'est la discipline. Ici, il en est de même. Après avoir parlé, il avance sa main par le guichet (verset 4). Maintenant, il ne parle plus. Il nous rappelle à quel prix il nous a acquis. Sa main percée parle de l'amour dont nous avons été aimés. Aussitôt «mes entrailles se sont émues». Ce que n'a pu faire la voix de l'amour, la main l'a fait. Alors il n'y a plus d'hésitation. Il n'est plus question de tunique, de pieds lavés. «Je me suis levée», dit-elle immédiatement.

Quand elle ouvre la porte, elle voit la myrrhe sur le verrou. Le bien-aimé a laissé le témoignage de ses souffrances. «Mais mon bien-aimé s'était retiré, il avait passé plus loin» (verset 6). Comment! Le bien-aimé qui lui a parlé ainsi s'en va quand elle ouvre? Oui, et c'est dans son amour qu'il le fait. Elle va passer par une discipline pénible. Pourtant il l'aime autant quand il passe plus loin que lorsqu'il lui parlait ou qu'il passait sa main par le guichet. Il en est de même du Seigneur quand il nous dispense des épreuves. Il nous aime autant que lorsqu'il donnait sa vie pour nous sur la croix.

«Les gardes qui font la ronde par la ville me trouvèrent; ils me frappèrent, ils m'ont blessée… ils m'ont ôté mon voile de dessus moi» (verset 7). C'était humiliant pour la bien-aimée qu'on lui ôte son voile. Pourquoi son voile est-il ôté, pourquoi est-elle blessée, elle n'a pourtant rien fait de mal? La discipline est-elle injuste, est-elle trop sévère? Cette discipline par les gardes peut faire penser à une discipline d'assemblée qu'on trouve trop sévère. On dit: «Je cherchais le Seigneur, et on a été trop dur pour moi». Mais cela ne serait pas arrivé à la bien-aimée si elle avait été avec son bien-aimé comme elle aurait dû.

«Ton bien-aimé qu'est-il de plus qu'un autre bien-aimé, ô la plus belle parmi les femmes?» (verset 9). Comment? On l'appelle la plus belle parmi les femmes alors que son voile a été ôté, alors qu'on l'a blessée, meurtrie? Oui, elle est la plus belle, spirituellement et moralement, parce qu'elle est malade d'amour (verset 8); elle ne pense qu'au bien-aimé, elle ne parle que de lui. Et alors, elle décrit sa beauté. C'est le tableau qui termine le chapitre 5. Certains traits nous parlent de la divinité du Seigneur, d'autres de son humanité.

Le bien-aimé est blanc (verset 10). Le Seigneur est d'une pureté immaculée, il n'a pas connu le péché; c'est la perfection de son humanité. Il est vermeil, couleur de sang, évoquant Celui qui s'est offert en sacrifice. Il est un porte-bannière, le Seigneur est le centre du rassemblement. «Sa tête est un or très fin» (verset 11): l'or nous parle de la justice de Dieu. «Ses boucles sont flottantes»: c'est le nazaréen qui laissait croître ses cheveux, le nazaréen entièrement séparé du mal pour l'Éternel. Ses boucles sont noires, il n'y a pas de cheveu gris, signe du déclin (Osée 7:9).

«Ses yeux, comme des colombes près des ruisseaux d'eau» (verset 12). Le Saint Esprit est descendu sur lui comme une colombe; des ruisseaux d'eau, c'est la pensée de l'Esprit. Ses regards étaient conduits par l'Esprit. Il était l'homme dépendant.

«Ses joues, comme des parterres d'aromates, des corbeilles de fleurs parfumées» (verset 13). Les joues, c'est ce qui est proéminent, ce qui apparaît, qui est un signe de vigueur ou d'absence de vigueur. Le Seigneur a donné ses joues à ceux qui arrachaient le poil (Ésaïe 50:6). Il a enduré des souffrances et quel parfum s'en est dégagé! «Ses lèvres, des lis distillant une myrrhe limpide». S'il allait de lieu en lieu en faisant du bien (Actes des Apôtres 10:38), parlant de grâce, il fallait pourtant qu'il endure la souffrance.

«Ses mains, des rondelles d'or, où sont enchâssés des chrysolithes» (verset 14). Les rondelles n'ont ni commencement, ni fin. Ses mains nous parlent de ses œuvres infinies. La chrysolithe est une des pierres qui étaient sur les épaules et sur le cœur du sacrificateur. «Son ventre, un ivoire poli, couvert de saphirs». Le ventre est ce qu'il y a de plus caché, de plus secret. En Jésus, tout pouvait supporter le regard de Dieu, c'était un ivoire poli; rien d'inégal, rien n'entachait ce que Dieu désirait et pouvait voir en lui. Il était couvert de saphirs (couleur du ciel). Il manifestait ici-bas qu'il était du ciel. «Ses jambes, des colonnes de marbre blanc, reposant sur des socles d'or fin» (verset 15). Cela nous parle de sa marche puissante et pure dans les sentiers de justice, reflets de ses pensées parfaitement conformes à la justice de Dieu. «Son port, comme le Liban, distingué comme les cèdres». Quelle dignité! «Son palais est plein de douceur» (verset 16). Il a éprouvé lui-même la douceur des paroles qu'il prononçait. Alors la bien-aimée n'a plus rien à ajouter; elle résume ce dont son cœur est plein en s'exclamant: «toute sa personne est désirable!».

«Où est allé ton bien-aimé…?» (6:1). La bien-aimée a parlé de son bien-aimé en termes tels que ses compagnes désirent le chercher avec elle. C'est un exemple du témoignage que nous avons à rendre, individuellement ou en assemblée. Que le fruit de la discipline soit d'occuper nos cœurs du Seigneur Jésus! Et puis, que cela en conduise d'autres à chercher le bien-aimé! Il n'est pas question de chercher un autre lieu de rassemblement mais de chercher le Seigneur. La véritable évangélisation, c'est de présenter Christ de telle manière que les autres désirent le chercher.

Soyons comme le Seigneur désire nous voir. Et s'il y a des épreuves dans notre vie, des disciplines amères, retenons l'instruction du chapitre 5. Qu'il en résulte de la gloire pour lui et un témoignage puissant rendu à sa personne!