Crucifié avec Christ (suite)

Jacques-André Monard

Chapitre 15 - Affranchis de la loi du péché

(Exposé de Romains 8: 1-11)

Ainsi que nous l'avons déjà constaté, la seconde moitié de Romains 7 montre un croyant dont l'état pratique contredit la position dans laquelle Dieu l'a placé, position décrite au chapitre 6. Tandis que son «vieil homme a été crucifié avec Christ» (6: 6), et que par là il a «été affranchi du péché» (versets 18, 22), il doit confesser au chapitre 7 que, sur un plan pratique, il est sous la domination du péché. Il dit: «je suis vendu au péché», «captif de la loi du péché qui existe dans mes membres» (versets 14, 23).

Il se débat ainsi avec lui-même jusqu'au moment où il crie au secours (verset 24). C'est alors que tout change, et qu'il peut rendre grâces à Dieu (verset 25). Le détail et les motifs de la délivrance sont donnés au chapitre 8. Nous allons considérer quelques versets du début de ce chapitre.

«Il n'y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus» (verset 1). La position des croyants est définie par cette expression qui mérite d'être pesée: ils sont dans le Christ Jésus, ou, selon d'autres passages, ils sont en Christ. Comme des sarments dans un cep, comme des membres dans un corps! (Jean 15: 5; 1 Corinthiens 6: 15). «Celui qui nous lie fermement avec vous à Christ,… c'est Dieu» (2 Corinthiens 1: 21).

 «Dieu nous a donné la vie éternelle, et cette vie est dans son Fils» (1 Jean 5: 11). Ce sont différents aspects de ce fait merveilleux que nous sommes «unis au Seigneur, un seul esprit avec lui» (1 Corinthiens 6: 17). Le Seigneur Jésus en avait déjà parlé à ses disciples, juste avant sa mort, quand il leur disait: «En ce jour-là, vous connaîtrez que moi je suis en mon Père, et vous en moi et moi en vous» (Jean 14: 20).

Cela étant, comment pourrait-on imaginer que ceux qui sont dans le Christ Jésus puissent subir une quelconque condamnation? Il faudrait que Christ lui-même soit condamné!

A la suite de cette pierre de fondement, voici une déclaration en rapport direct avec le dilemme du chapitre 7: «la loi de l'Esprit de vie dans le Christ Jésus, m'a affranchi de la loi du péché et de la mort» (verset 2). Nous retrouvons la loi du péché du chapitre précédent (verset 23), — non plus pour constater avec douleur notre asservissement à cette loi, mais pour constater avec joie que nous en sommes affranchis. L'état pratique du croyant est maintenant en accord — et non plus en contradiction — avec les grands faits exposés au chapitre 6.

Mais qu'est-ce qui a opéré ce changement? La loi de l'Esprit de vie. C'est-à-dire la puissance du Saint Esprit agissant dans l'âme du croyant. Au chapitre 7, ce qui était en activité, c'était le croyant lui-même, ses bonnes intentions, sa bonne volonté, ses efforts. Maintenant, le moi passe à l'arrière-plan.

Un passage de l'épître aux Éphésiens aide à comprendre la portée de l'expression «la loi de l'Esprit de vie dans le Christ Jésus». Il y est parlé de la puissance de Dieu «envers nous qui croyons», et il est dit qu'elle est «selon l'opération de la puissance de sa force, qu'il a opérée dans le Christ, en le ressuscitant d'entre les morts» (1: 19, 20). En d'autres termes, la puissance divine qui opère dans les croyants est la même que celle qui a opéré pour ressusciter Christ. Ces deux «opérations» sont associées parce que la nouvelle vie du croyant est la vie de Christ ressuscité. Et c'est la même puissance de Dieu qui est en activité pour les deux.

«Ce qui était impossible à la loi, en ce qu'elle était faible par la chair…» (verset 3). La loi n'était pas mauvaise, elle était faible. Faible, parce que la chair est mauvaise. Qu'est-ce qui était impossible à la loi? Selon le chapitre 7, deux choses: 1° libérer un homme pécheur de l'esclavage du péché, 2° lui faire porter du fruit pour Dieu. Mais ce que la loi ne pouvait faire, Dieu l'a fait. «Dieu, ayant envoyé son propre Fils en ressemblance de chair de péché, et pour le péché, a condamné le péché dans la chair» (verset 3). C'est la première chose. Lorsque Christ a été crucifié, «notre vieil homme a été crucifié avec lui» (6: 6). Alors, le péché dans la chair a été jugé, condamné. Ce grand fait est la base d'une marche où il est effectivement mis de côté, parce que tenu dans la mort. Quant à la deuxième chose, l'apôtre ajoute: «afin que la juste exigence de la loi fût accomplie en nous, qui ne marchons pas selon la chair, mais selon l'Esprit» (verset 4). Tout le bien que demandait la loi, et beaucoup plus encore, est accompli en nous si nous marchons selon l'Esprit. C'est-à-dire si nous nous laissons conduire par l'Esprit qui habite en nous, si nous le laissons agir. Il produit alors ce fruit magnifique de Galates 5: 22, que la loi ne peut qu'approuver. Mais ce n'est pas elle qui l'a produit!

«Car ceux qui sont selon la chair ont leurs pensées aux choses de la chair; mais ceux qui sont selon l'Esprit, aux choses de l'Esprit; car la pensée de la chair est la mort; mais la pensée de l'Esprit, vie et paix» (versets 5, 6).

La chair a sa propre sphère de pensées, de désirs et d'intérêts; l'aboutissement en est la mort. Mais il y a une autre sphère de pensées, de désirs et d'intérêts pour ceux qui sont nés de l'Esprit, et dont la vie tire son caractère de la présence de l'Esprit en eux. Là tout tend à la vie et à la paix. Ces deux sphères sont celles des deux natures — chair et esprit — dont le Seigneur a parlé à Nicodème (Jean 3: 6), et notre passage évoque leurs caractères et leurs fins.

«La pensée de la chair est inimitié contre Dieu, car elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le peut pas» (verset 7). Il est remarquable de trouver cette déclaration dans ce contexte. Il reste vrai, même pour le chrétien vivant pratiquement sa position d'affranchissement, qu'il y a au-dedans de lui un ennemi redoutable et sournois. Le caractère de la chair qui est particulièrement mis en évidence ici, c'est l'insoumission, la propre volonté. Cela peut se manifester sous des formes ouvertes, comme la désobéissance à la parole de Dieu, ou sous des formes plus subtiles, comme l'indépendance d'esprit (cf. 2 Corinthiens 10: 5).

Ce verset 7 aide à comprendre la dernière phrase du chapitre précédent: «Ainsi donc moi-même, de l'entendement je sers la loi de Dieu; mais de la chair, la loi du péché» (7: 25). Même s'il a saisi la plénitude de la délivrance que Christ lui a acquise, même s'il a expérimenté la puissance du Saint Esprit le conduisant dans une voie de sainteté et de justice, le croyant conserve en lui ces deux natures essentiellement différentes, prêtes à produire leurs fruits caractéristiques. Savoir que nous sommes exposés à servir la loi du péché bien que nous ayons tout à disposition pour ne pas tomber, n'est en aucune façon une entrave à notre joie chrétienne ou à notre paix intérieure. Mais cela nous donne une crainte salutaire et nous rejette entièrement sur le Seigneur pour être gardés de chute. La crainte de glisser nous pousse à tenir la main de notre Sauveur! Et tant que nous tenons cette main, nous marchons sans glisser.

«Et ceux qui sont dans la chair ne peuvent plaire à Dieu. Or vous n'êtes pas dans la chair, mais dans l'Esprit, si du moins l'Esprit de Dieu habite en vous; mais si quelqu'un n'a pas l'Esprit de Christ, celui-là n'est pas de lui» (versets 8, 9). En contraste avec la fin du verset 4, qui présente deux manières de marcher — selon la chair ou selon l'Esprit —, nous trouvons ici des expressions remarquables pour distinguer les chrétiens et ceux qui ne le sont pas. Les uns sont dans l'Esprit, les autres dans la chair. C'est leur position devant Dieu. Ceux qui sont encore dans l'état où ils étaient par nature sont dans la chair, l'expression se comprend facilement. Ceux qui sont nés de l'Esprit, et qui ont été scellés du Saint Esprit, sont considérés comme étant dans l'Esprit. Ils sont dans une condition caractérisée par la présence et la puissance de l'Esprit1.

1 Attirons ici l'attention sur deux importantes notes de la version J.N.Darby: A Romains 1: 4: «Esprit, et esprit, c.-à-d. le Saint Esprit lui-même aussi bien que l'état de l'âme caractérisé par sa présence et sa puissance». A Romains 8: 9; «L'Esprit lui-même, et l'état du croyant sont souvent trop intimement liés dans ces versets 1-11, pour faire la différence entre Esprit et esprit, et les séparer l'un de l'autre…».

«Mais si Christ est en vous, le corps est bien mort à cause du péché, mais l'Esprit est vie à cause de la justice» (verset 10). Le verset précédent vient de rappeler que l'Esprit, qui est «l'Esprit de Christ», habite dans le croyant. Ainsi, Christ habite dans le croyant par son Esprit. C'est ce que le Seigneur avait dit à ses disciples en les quittant, lorsqu'il leur annonçait la venue du Consolateur: «Je ne vous laisserai pas orphelins; je viens à vous» et «vous connaîtrez que moi je suis en mon Père, et vous en moi, et moi en vous» (Jean 14: 18, 20). Paul priait pour que les croyants soient fortifiés en puissance par l'Esprit, de sorte que le Christ habite, par la foi, dans leurs cœurs (Éphésiens 3: 16, 17). La puissance de l'Esprit en nous, la vie de Jésus en nous, tient effectivement dans la mort ce qui a été appelé un peu plus haut «ce corps de mort», — cette chair qui, lorsqu'elle agit, ne produit que péché et mort. L'Esprit, au contraire, donne son propre caractère à une vie qui se déploie dans le chemin de la justice. Tel semble être le sens de ce verset un peu difficile.

«Et si l'Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité le Christ d'entre les morts vivifiera vos corps mortels aussi, à cause de son Esprit qui habite en vous» (verset 11). La puissance de Dieu démontrée dans la résurrection de Christ a déjà opéré dans nos âmes pour nous amener à la vie, elle continue à y opérer pour y produire une marche selon Dieu (Éphésiens 1: 19), et au jour où Christ reviendra, elle opérera dans nos corps mortels pour les vivifier.

Chapitre 16 - Si par l'Esprit vous faites mourir les actions du corps

(Survol de Romains 8: 12-17)

 «Ainsi donc, frères, nous sommes débiteurs» (verset 12). L'apôtre ne dit pas à qui nous sommes débiteurs. Néanmoins nous pouvons penser à l'immense dette de reconnaissance, de louange et d'adoration que nous avons envers Dieu. Ce chapitre va continuer à déployer sous nos yeux les merveilleux privilèges chrétiens: «être conduits par l'Esprit de Dieu» (verset 14), avoir été «adoptés» par Dieu et placés dans la position de fils, et même d'héritiers de Dieu, de cohéritiers de Christ (versets 14-17), être introduits dans une telle intimité avec Dieu que nous pouvons l'appeler «Abba, Père» (verset 15), avoir au-dedans de nous-mêmes le témoignage de l'Esprit de Dieu, confirmant celui de notre esprit, que «nous sommes enfants de Dieu» (verset 16). Quelle sécurité! Quelle gloire! Quels sujets de joie!

«…nous sommes débiteurs, non pas à la chair pour vivre selon la chairIl est d'une grande importance pratique de savoir que nous ne sommes pas débiteurs à la chair. Nous ne lui devons rien. Elle n'a aucun droit à réclamer. Nous tenir nous-mêmes pour morts, c'est justement lui refuser tout droit.

«Car si vous vivez selon la chair, vous mourrez, mais si par l'Esprit vous faites mourir les actions du corps, vous vivrez» (verset 13). Continuellement, ces chapitres nous montrent que le résultat du péché, c'est la mort (5: 12, 21; 6: 16, 21, 23; 7: 5, 9, 13; 8: 2, 6, 10; cf. Jacques 1: 15; 5: 20). Ce verset 13 nous montre l'aboutissement d'une vie selon la chair et d'une marche par l'Esprit. Tout comme on indiquerait où conduisent deux chemins. Prenons au sérieux les passages qui nous placent devant notre responsabilité. Ils sont là pour que nous ne prenions pas le péché à la légère. Mais cet avertissement, si solennel qu'il soit, ne saurait rien enlever à la sécurité absolue de ceux qui sont «dans le Christ Jésus», pour lesquels «il n'y a donc maintenant aucune condamnation» (verset 1), dans lesquels l'Esprit de Dieu «habite» (verset 9), que Dieu a adoptés (verset 15), et que rien «ne pourra… séparer de l'amour de Dieu» (verset 39).

Le Seigneur Jésus s'est parfois aussi exprimé d'une manière qui lie la vie aux fruits qu'elle produit. Quand il parle de ceux qui, à sa voix, sortiront des sépulcres, il dit: «ceux qui auront pratiqué le bien, en résurrection de vie; et ceux qui auront fait le mal, en résurrection de jugement» (Jean 5: 29). Nous savons que notre salut dépend exclusivement de notre foi, aucunement de nos œuvres; une multitude de passages l'atteste (notamment Romains 4: 5-8). Mais le Seigneur nous rend attentifs au fait que, selon sa pensée, un croyant est quelqu'un qui aura fait le bien, et un incrédule, quelqu'un qui aura fait le mal.

Dans ce verset 13, nous sommes exhortés à faire mourir les actions du corps. Le corps, ici, désigne sans doute la chair. C'est l'application pratique, dans la vie journalière, de la grande vérité de notre mort avec Christ. Cet enseignement correspond à celui de Colossiens 3: 5, où nos «membres» — ceux du vieil homme — doivent être mortifiés. Nulle part nous ne sommes invités à faire mourir le vieil homme, mais bien à le tenir pour mort (Romains 6: 11). De même, ceux qui sont du Christ sont considérés comme ayant crucifié la chair, et non comme devant la crucifier (Galates 5: 24).

«Si par l'Esprit vous faites mourir…». Nous sommes sans doute ici devant un mystère dont nous ne pouvons pas comprendre le fond. Il y a d'une part l'activité de l'Esprit en nous, et d'autre part notre responsabilité. Il en est de même en Galates 5, quand il est dit: «Marchez par l'Esprit, et vous n'accomplirez point les convoitises de la chair» (verset 16) et «Si nous vivons par l'Esprit, marchons aussi par l'Esprit» (verset 25). L'Esprit est une personne divine. Il ne saurait être question de le mettre en activité ou de le diriger. Nous avons au contraire à être «conduits» par lui (Romains 8: 14; Galates 5: 18). Lui peut se servir de nous, pas nous de lui. Et pourtant nous avons la responsabilité de marcher de manière qu'il en soit ainsi. Chaque fois que nous nourrissons la chair, que nous prenons soin d'elle, que nous sommes occupés de notre moi, nous entravons l'action de l'Esprit en nous. Quand nous sommes remplis de Christ, quand notre volonté propre est brisée, l'Esprit est libre d'agir en nous, et il agit. (Voir Éphésiens 4: 30; 5: 18.)

À suivre