Zacharie

Henri Rossier

Introduction

Au moment d’aborder l’étude du prophète Zacharie, je crois devoir faire une remarque importante à l’adresse des chrétiens qui s’occupent de la prophétie. Tout en formant le vœu qu’ils l’étudient toujours davantage, je désire les mettre en garde contre le danger d’aborder ce sujet pour alimenter leur curiosité. Ceux qui cèdent à ce penchant du cœur naturel, s’intéressent à la prophétie en vue des événements futurs et ils en font le sujet de leur étude. Ils acquerront peut-être ainsi de la connaissance, mais elle laissera leurs cœurs indifférents ou mondains. Ils seront gardés de cet écueil s’ils ont compris et apprécié le but de la prophétie.

Elle est en tout premier lieu la révélation de la puissance et de la venue de notre Seigneur Jésus Christ (2 Pierre 1:16). Les disciples eurent la vision de ces deux choses sur la sainte montagne. Là se déroulèrent devant leurs yeux, comme en un tableau magnifique, les gloires futures de Christ dans son royaume: sa venue quand il saisira les rênes du gouvernement, et la puissance avec laquelle il établira son règne sur la terre.

Cette même scène fit passer devant leurs yeux la sphère céleste de ce royaume, dans laquelle le Seigneur, apparaissant en gloire, conversait avec Moïse ressuscité, et le prophète Élie transporté au ciel sans passer par la mort.

Mais d’autre part les prophètes, en nous révélant les gloires futures du Christ, ne peuvent se taire sur ses souffrances qui sont le fondement même de ses gloires. C’est pourquoi l’apôtre Pierre nous dit que l’Esprit, par les prophètes, «rendait par avance témoignage des souffrances qui devaient être la part de Christ et des gloires qui suivraient» (1 Pierre 1:11). L’apôtre ajoute: «Ce n’était pas pour eux-mêmes, mais pour nous, qu’ils administraient ces choses.» Les croyants futurs, qu’ils fussent chrétiens ou juifs, devaient avoir part à ces souffrances et à ces gloires. C’est pourquoi la première épître de Pierre caractérise si souvent par ces deux mots la part des chrétiens sortis du judaïsme. Seulement la prophétie n’a pas la position chrétienne pour sujet; on y trouvera bien plutôt, outre les souffrances et les gloires de Christ, celles du résidu d’Israël dont l’histoire se rattache intimement à celle de son Sauveur.

Enfin la prophétie a un but de la plus haute importance, celui de nous séparer du monde. La révélation de Christ attire nos cœurs vers Celui qui a souffert pour nous, et les occupe de ses gloires; la révélation des vrais caractères du monde parle à nos consciences et les sépare du milieu qui nous entoure et que nous sommes appelés à traverser. À ce point de vue, la prophétie est «comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour ait commencé à luire et que l’étoile du matin se soit levée dans nos cœurs» (2 Pierre 1:19). Si nous n’avions pas la lampe prophétique, nous perdrions notre chemin et tomberions dans les embûches que Satan place devant nos pas pour nous perdre.

Tels sont les divers buts de la prophétie, en y ajoutant encore l’espérance qu’elle entretient en nous au sujet des glorieuses bénédictions à venir.

 

Les Juifs, rentrés dans leur pays après la captivité de Babylone, ont eu pour prophètes Aggée, Zacharie et Malachie. Bien que leur objet fût différent, Aggée et Zacharie prophétisèrent ensemble (Esdras 5:1; 6:14), lors des événements rapportés au commencement du livre d’Esdras; après eux survint Malachie, dont la prophétie s’occupe des circonstances morales du peuple, révélées dans le dernier chapitre de Néhémie.

Les Juifs, par une proclamation de Cyrus, annoncé nominalement par le prophète Ésaïe (És. 44:28), étaient remontés à Jérusalem pour y bâtir le temple de l’Éternel. Ils avaient d’abord relevé l’autel, centre du culte, ensuite posé les fondements de la maison avec un zèle mêlé de joie pour les uns, de larmes pour les autres. Mais bientôt le roi Assuérus décréta la cessation du travail, et, depuis l’édit de Cyrus, dix-sept années s’écoulèrent sans que le temple s’élevât au-dessus de ses fondements.

En la deuxième année de Darius, roi de Perse, Dieu suscita Aggée et Zacharie. Leur influence eut pour résultat immédiat d’encourager le peuple à reprendre la construction commencée. Zorobabel, de race royale (1 Chron. 3:19), et Joshua, souverain sacrificateur, furent les chefs qui s’employèrent avec zèle à cette œuvre. Quatre années plus tard, la maison était achevée, et le peuple célébrait avec joie la fête de sa dédicace.

Ainsi la prophétie avait atteint son but immédiat en parlant à la conscience du peuple et en provoquant chez lui de l’activité pour le service du Seigneur. Mais jamais la prophétie de l’Écriture ne se confine à un résultat prochain; elle contemple un temps futur qui n’est autre que le temps de la fin. Quand le prophète Aggée propose au peuple la construction du temple, c’est en vue du jour où «l’objet du désir des nations» entrera dans sa maison et la remplira de sa gloire. Quand Zacharie leur parle de Jérusalem, c’est en pensant au jour où, posant ses pieds sur la montagne des Oliviers, Christ apparaîtra à son peuple comme Libérateur, puis entrera dans sa cité comme Roi de justice. Malgré leur action commune, l’objet de ces deux prophètes n’est pas le même. Aggée nous parle exclusivement de la maison. Zacharie est d’une plus large envergure. Il a pour sujet la ville de Jérusalem, le résidu de Juda et le dernier jour dans leurs rapports avec le Messie. Il nous donne en outre une vue générale des empires des nations et de leur condition morale aux derniers temps. Mais, plus que toute autre chose, il nous entretient des souffrances du Christ et de ses gloires variées, sujet sur lequel, dans le courant de cette étude, nous aurons constamment à revenir.

La division du livre de Zacharie est des plus simples. Après une courte introduction (chap. 1:1-6), il se divise en deux parties entièrement distinctes. La première est celle des visions (chap. 1:7 à 6). La seconde, celle des oracles, présente trois subdivisions: 1° «La parole de l’Éternel» à Zacharie au sujet des jeûnes et la restauration de Jérusalem (chap. 7-8). 2° «L’oracle de la parole de l’Éternel» au sujet des bergers et la restauration de Juda, puis d’Israël (9-11). 3° «L’oracle de la parole de l’Éternel» au sujet du dernier jour et de la restauration du pays (12-14). Remarquons toutefois qu’au milieu de toutes les scènes diverses qui se déroulent à nos yeux le «Leitmotiv» est toujours Jérusalem et le Messie.