Sophonie

Chapitre 2

Jugement d’Israël apostat et des nations. Formation d’un Résidu.

Israël apostat. Un Résidu fidèle est préservé. v. 1-3

«Assemblez-vous, rassemblez-vous, nation sans honte, avant que le décret enfante, avant que le jour passe comme la balle, avant que vienne sur vous l’ardeur de la colère de l’Éternel, avant que vienne sur vous le jour de la colère de l’Éternel. Cherchez l’Éternel, vous, tous les débonnaires du pays, qui pratiquez ce qui est juste à ses yeux; recherchez la justice, recherchez la débonnaireté; peut-être serez-vous à couvert au jour de la colère de l’Éternel» (v. 1-3).

C’est un appel général à la nation incrédule et sans honte, au moment même où le jour de l’Éternel va commencer. Déjà les nuages menaçants envahissent le ciel, déjà la voix du tonnerre se fait entendre. Il est peut-être encore temps d’échapper; plus qu’un instant, un dernier instant pour se repentir et être mis à couvert! Quelle patience que celle de Dieu, et comme on voit bien qu’Il ne veut pas le jugement, mais qu’Il veut la miséricorde!

«Assemblez-vous.» C’est le même appel que le «Assemblez le peuple», en Joël 2:15; seulement en Joël cet appel, qui ne trouve ici que des révoltés, est entendu des fidèles. Le peuple, la nation sans honte, se rassemble, mais avec le but de résister dans le jour de la colère, au «fléau qui inonde», avec la pensée qu’il ne viendra pas jusqu’à elle (Ésaïe 28:15). Ils se rassemblent pour leur jugement, comme Dieu va rassembler les nations dans le même but (3:8). Hâtez-vous, dit l’Éternel, avant que toutes ces choses vous arrivent. Si vous tardez jusqu’à demain il sera trop tard; le jour aura passé comme la balle dispersée par le vent.

«Cherchez l’Éternel...» (v. 3). Ici nous rencontrons pour la première fois la mention d’un Résidu. Au milieu de la nation sans honte une compagnie de débonnaires s’est formée, la famille des enfants du royaume, dont Jésus a dit: «Bienheureux les débonnaires, car c’est eux qui hériteront de la terre.» Ils marcheront sur les traces de leur Maître qui disait: «Je suis débonnaire et humble de cœur.» Ces quelques-uns, petits (Zach. 13:7), pauvres, méprisés, persécutés, occupent les pensées de l’Éternel. Nous les rencontrons partout, dans les Psaumes, dans les Prophètes, même dans les Évangiles avant qu’un nouveau corps de croyants, l’Église, ait été formé par la mort et la résurrection de Christ. On peut suivre l’histoire de ces débonnaires, depuis le moment où, après l’enlèvement de l’Église, Dieu renouera ses relations avec son ancien peuple d’Israël, jusqu’au moment où il les introduira, comme son peuple, désormais reconnu, dans la gloire de leur héritage terrestre. Ce sont les sages de Daniel qui enseignent la justice à la multitude et qui, après avoir été persécutés, martyrisés, chassés, haïs de tous, brilleront comme la splendeur de l’étendue, comme les étoiles, à toujours et à perpétuité (Dan. 12:3). Ce sont les membres de la congrégation de Joël qui pleurent entre le portique et l’autel au moment où se lève le jour de l’Éternel (Joël 2:17), et qui regardent vers Celui qu’ils ont percé (Zach. 12:10). Le rôle de ces quelques-uns est immense; à chaque pas nous les rencontrons, rendant témoignage au milieu du peuple sans honte. Le Seigneur pense à eux et les considère comme son trésor particulier (Mal. 3:17). Sur eux ses yeux se reposent.

Cependant eux aussi traverseront le jour de l’Éternel, car ils porteront le poids de la colère gouvernementale de Dieu, comme appartenant à cette nation qui a rejeté et crucifié son Messie. Mais si la nation incrédule n’a pas honte de son forfait, eux en porteront les conséquences avec de grands cris et avec larmes. Ils comprendront pourquoi ils ont été rejetés: «Délivre-nous», diront-ils, «de la coulpe du sang!» Ils tiendront pour juste le jugement dont ils sont atteints, mais le traverseront par la foi, comme nous le voyons en Habakuk. Ils diront: «Jusques à quand?» sachant que Dieu n’oubliera pas de marquer pour eux l’heure de la délivrance. Ils compteront sur sa miséricorde, comme leur seule ressource. Ils comprendront que «peut-être» (le «peut-être» de David, fuyant devant Absalom, en conséquence de sa faute: 2 Sam. 16:12), «ils seront mis à couvert au jour de la colère de l’Éternel» (v. 3). Ce «peut-être» sera changé, en certitude à l’heure de la délivrance. En attendant cette heure, ils «rechercheront la justice et la débonnaireté». Leur seul souci, dans ces temps calamiteux, sera de ne pas perdre de vue et de réaliser dans leurs voies, scrupuleusement attentifs à se préserver du péché, le caractère du Messie auquel ils appartiennent et contre lequel ils furent jadis si coupables. Aussi, même au sein de la détresse, ils éprouveront ce que c’est que d’être mis à couvert», comme jadis Israël, dans la nuit fatale où l’Ange exterminateur passait à travers le pays d’Égypte. Ils obéiront à cette parole: «Viens, mon peuple, entre dans tes chambres et ferme tes portes sur toi; cache-toi pour un petit moment, jusqu’à ce que l’indignation soit passée» (Ésaïe 26:20). Au jour de la grande persécution, assaillis par tous, poursuivis par Satan, ils trouveront un abri dans le désert des peuples, et quand plusieurs d’entre eux, témoins fidèles, tomberont comme martyrs sous les coups de leurs adversaires à Jérusalem, ils seront cachés au milieu des nations qui, bon gré, mal gré, les couvriront de leur patronage (Apoc. 12:6). Quelle source de confiance pour leur foi, que ce «peut-être» entendu de la bouche de l’Éternel! Nous allons les suivre, d’étape en étape, au cours de cette prophétie. jusqu’au jour du triomphe, de la joie et du repos final sous le sceptre du Messie!

Mais auparavant nous assistons aux terreurs du jour de l’Éternel sur toutes les nations qui ont asservi Juda.

 

Jugement des Philistins. v. 4-6

«Car Gaza sera abandonnée, et Askalon sera une désolation; Asdod, on la chassera en plein midi, et Ékron sera déracinée. Malheur à ceux qui habitent les côtes de la mer, la nation des Keréthiens: la parole de l’Éternel est contre vous, Canaan, pays des Philistins! et je te détruirai, de sorte qu’il n’y aura pas d’habitant.»

Les villes principales de la confédération des Philistins, sauf Gath, reconquise jadis par Ozias (2 Chron 26:6), sont mentionnées ici, avec des jeux de mots sur leurs noms, quelque peu semblables à ceux de Michée 1:10-16. La nation des Philistins est appelée: «Ceux qui habitent les côtes de la mer, la nation des Keréthiens.» Ils sont nommés de même en Ézéch. 25:16. Les Philistins étaient originairement des émigrés de la Crète et sont désignés aussi comme venus de Caphtor (Amos 9:7; Jér. 47:4). Arrivés en Canaan ils habitèrent «les côtes de la mer», le rivage de la Méditerranée. Toutes les prophéties relatives à leur destruction font allusion à leur défaite, soit par le Pharaon (Jér. 47:1), soit, dans ce même chapitre et dans notre passage, par Nebucadnetsar, soit par Alexandre le Grand, en Zach. 9:5-8. Mais ces événements historiques, comme du reste tous ceux de la prophétie, ne sont que les avant-coureurs d’une destruction finale dans les temps futurs, car «aucune prophétie de l’Écriture ne s’interprète elle-même» (2 Pierre 1:20).

Comme tant d’autres nations, les Philistins reparaîtront pour le grand drame du jour de l’Éternel. La ruine des «côtes de la mer» aura pour résultat de mettre à couvert le Résidu de Juda aux jours de sa tribulation. Jamais chose pareille n’eut lieu dans le passé. Sophonie nous le dit expressément dans ce passage: «Et les côtes de la mer seront des excavations pour les bergers, et des enclos pour le menu bétail. Et les côtes seront pour le Résidu de la maison de Juda: ils y paîtront; le soir ils se coucheront dans les maisons d’Askalon; car l’Éternel, leur Dieu, les visitera, et rétablira leurs captifs» v. 6, 7). C’est là qu’une partie du Résidu trouvera asile pour ses troupeaux et un repos assuré dans les villes dévastées de la Philistie. Les mots caractéristiques: «l’Éternel rétablira leurs captifs» ont toujours rapport aux jours de la fin. C’est un terme très fréquent, une locution spéciale, traduite littéralement «tourner la captivité» (Shub Shebuth), pour désigner le retour de l’ensemble des captifs en vue de sa restauration définitive. Or, jamais depuis la dispersion du peuple juif un fait pareil n’a eu lieu.

Le retour de Juda dans son pays, sous le règne de Cyrus, n’était pas le retour de l’ensemble du peuple, mais un retour partiel qui n’a pas mis fin à la captivité, même partielle, car Juda, rentré dans son pays, restait asservi aux nations et celles-ci continuent jusqu’à nos jours à «fouler Jérusalem aux pieds» (voyez Néh. 9:36, 37; Psaume 126:1 en opposition au v. 4). Le retour partiel de Juda était ordonné de Dieu pour qu’une fraction de ce peuple reçût le Messie en Judée et à Jérusalem. S’ils l’eussent reçu, la «captivité aurait été tournée» et le royaume d’Israël rétabli. Le crime du peuple en crucifiant Jésus a mis fin, jusqu’aux temps prophétiques, à l’espoir de voir «tourner sa captivité».

Cette locution indique donc un événement entièrement futur, et il est de toute importance de le remarquer, parce que l’histoire future d’Israël et le règne glorieux du Messie en sont inséparables. La restauration finale n’aura pas lieu seulement pour Israël, mais pour Moab, Ammon et d’autres nations aux derniers jours, cependant elle a trait spécialement au peuple de Dieu, au vrai Résidu, comme on peut s’en convaincre par les passages indiqués en note1.

1 Deut 30:3; Ps. 14:7; 53:7; 85:2; 126:4; Jér. 29:14; 31:23; 32:44; 33:7, 11, 26; Osée 6:11; Joël 3:1; Amos 9:14; Soph. 2:7; 3:20.

Il est donc certain que ce séjour du «Résidu de la maison de Juda» a trait au temps de la fin, puisque nous lisons: «Car l’Éternel, leur Dieu, les visitera et rétablira leurs captifs.» Et si même le séjour de quelques «réchappés» de Juda avait eu lieu en Philistie après la conquête de Nebucadnetsar ou d’Alexandre (ce que l’histoire ne nous fait pas connaître), cela ne changerait rien au fait énoncé par le prophète. La seule question qui pourrait être posée, serait à quelle époque de la «restauration» ce passage fait allusion, car la restauration d’Israël ne se fera pas en un jour. Nous avons émis autre part la pensée que ce fait pourrait avoir lieu lors de la rentrée du Résidu fugitif de Juda dans son pays, «avant la gloire», c’est-à-dire avant l’apparition de Christ et la destruction des nations assemblées autour de Jérusalem, y compris l’Assyrien. Cette pensée pourrait être contestée sans rien changer à ce que nous avançons. Nous verrons au chap. 3 ce qui motive notre assertion. Une chose est certaine, c’est que, lors de la distribution millénaire du pays d’Israël, la Philistie fera partie du domaine de Juda et de Benjamin (Ézéch. 48).

 

Moab, les fils d’Ammon, les Éthiopiens. v. 8-12

Ce qui caractérisait Moab et les fils d’Ammon, c’était d’abord l’outrage et les insultes dont ils avaient outragé le peuple de Dieu; ils faisaient ainsi la guerre à Dieu lui-même sans se rendre compte de la portée de cette haine cruelle contre Israël. C’était, en second lieu, l’orgueil qui les avait poussés à s’attaquer aux frontières de l’héritage du peuple. Aussi la vengeance du jour de l’Éternel sera exécutée sur eux par le Résidu: «Le Résidu de mon peuple les pillera, et le reste de ma nation les héritera» (v. 9). Jamais encore ce fait n’a eu lieu dans l’histoire et la rétribution finale attend encore ces deux nations. Même l’Assyrien prophétique, quand il envahira la Palestine aux derniers jours, ne les atteindra et ne les subjuguera pas (Dan. 11:41), car un autre sort leur est réservé. Édom subira le même jugement (voyez Abdias), mais plus terrible encore, car Édom sera entièrement anéanti sans avoir de «reste», d’une part par le Seigneur, de l’autre par Israël.

«L’Éternel sera terrible contre eux» (v.11). En effet, cette subversion sera terrible; leurs dieux, Kemosh et Malcam, de la protection desquels nous les entendons se vanter si souvent, seront détruits et n’empêcheront pas la désolation d’étendre son cordeau sur eux. Mais la malédiction de ces nations coupables n’est pas le dernier mot de l’Éternel à leur égard. Elles seront forcées de reconnaître la suprématie de Christ et de courber le genou devant Lui. Quelle grâce qu’il en soit ainsi, et que Dieu ne s’arrête pas au jugement de ses ennemis! Nous apprenons, sans doute, que cette soumission ne sera pas de «franche volonté» chez tous. Beaucoup d’hommes d’entre les nations, d’entre les «fils de l’étranger», se soumettront à Lui en dissimulant, en lui rendant une feinte obéissance (Ps. 18:45; 66:3), mais beaucoup d’autres, convertis par «l’évangile du royaume», reconnaîtront la Seigneurie de Christ. C’est ainsi que, dans la plupart des nations, il se formera des Résidus qui auront part à la restauration universelle. Les «îles des nations», les contrées les plus éloignées de la cité du grand Roi, reconnaîtront sa suprématie, «chacun du lieu où il est» (v. 11). Cela n’exclura nullement que, d’année en année, les Résidus des nations ne montent à Jérusalem pour se prosterner devant le Roi, l’Éternel des armées, et pour célébrer la fête des tabernacles (Zach. 14:16).

L’épée de l’Éternel frappera directement aussi les Éthiopiens (v. 12) auxquels Israël s’était autrefois confié et avait recouru pour obtenir du secours contre le roi d’Assyrie (És. 20:5, 6).

 

Ninive. v. 13-15

Ces jugements conduisent l’Esprit prophétique à s’occuper de Ninive et de l’Assyrie (v. 13-15). Au temps où Sophonie prophétisait, Ninive n’avait pas encore été détruite. Aussi annonce-t-il cet événement mémorable, la chute de Ninive, sujet spécial de la prophétie de Nahum, comme un fait à venir. Seulement Sophonie reporte, beaucoup plus que Nahum, nos regards vers les temps de la fin. En Nahum, l’Éternel détruit Ninive, et avec elle l’Assyrie, par des instruments choisis par Lui, par «ses hommes forts», les Chaldéens (Nah. 2:3). Ici, le jugement est exécuté par l’Éternel lui-même: C’est lui qui étend sa main vers le nord, lui, qui met à nu les lambris de cèdres. Non pas que Ninive doive, plus que Babylone, renaître de ses cendres aux derniers jours. Sa désolation est définitive, mais la destruction de l’Assyrien historique, entraîné à sa perte par la prise de sa capitale, ne l’est pas, et la Parole fait pressentir ici l’anéantissement direct de cette puissance, par la main de l’Éternel aux derniers jours. Ninive s’égayait, habitait en sécurité, disait en son cœur: «Moi, et à part moi, nulle autre!» Sa confiance en ses propres forces, son orgueil égoïste, ne tenant compte que de ses propres intérêts, son culte du moi, ne concédant aux autres aucun droit rival, tout cela devient la cause d’un jugement écrasant. Les mêmes principes sont hautement proclamés de nos jours par certaines nations, et aboutiront aux mêmes désastres.