Nombres

Chapitre 15

Les paroles qui ouvrent ce chapitre sont particulièrement frappantes quand on les compare avec le contenu du chapitre précédent. Là, tout paraît ténébreux et sans espoir. Moïse devait dire au peuple:

«Ne montez pas, car l’Éternel n’est pas au milieu de vous, afin que vous ne soyez pas battus devant vos ennemis». Et encore l’Éternel leur avait dit: «Je suis vivant…, si je ne vous fais comme vous avez parlé à mes oreilles…! Vos cadavres tomberont dans ce désert…! si vous entrez dans le pays touchant lequel j’ai levé ma main pour vous y faire habiter… Quant à vous, vos cadavres tomberont dans ce désert.»

Voilà pour le chapitre 14. Le chapitre 15 poursuit la narration comme si rien n’était arrivé, et que tout fût aussi calme, aussi clair et aussi certain que Dieu pouvait le faire. Nous lisons ces paroles: «Et l’Éternel parla à Moïse, disant: Parle aux fils d’Israël, et dis-leur: Quand vous serez entrés dans le pays de votre habitation, que je vous donne, etc.» C’est un des passages les plus remarquables de ce livre admirable. À la vérité il n’offre pas, dans tout son contenu, un passage plus caractéristique non seulement du livre des Nombres, mais de toute la parole de Dieu. Quand nous lisons la sentence solennelle: «Vous n’entrerez pas dans le pays», quelle est la grande leçon qu’elle nous donne? Celle que nous sommes si lents à apprendre; la complète indignité de l’homme: «Toute chair est comme l’herbe».

Et d’un autre côté, quand nous lisons des paroles comme celles-ci: «Quand vous serez entrés dans le pays de votre habitation, que je vous donne», quelle est la précieuse leçon qu’elles nous enseignent? Celle-ci assurément, que le salut est du Seigneur. D’une part nous apprenons la chute de l’homme; de l’autre la fidélité de Dieu. Si nous envisageons la question au point de vue humain, la sentence est: «Vous n’entrerez pas dans le pays!» Mais si nous l’envisageons au point de vue de Dieu, nous pouvons retourner la phrase, et dire: «Certainement vous entrerez».

Il en est ainsi dans la scène qui se déroule devant nous, et dans tout le volume inspiré, du commencement à la fin. L’homme tombe, mais Dieu est fidèle. L’homme forfait à tout, mais Dieu pourvoit à tout. «Les choses qui sont impossibles aux hommes, sont possibles à Dieu» (Luc 18:27). Avons-nous besoin de parcourir tout le canon inspiré pour le démontrer et le prouver? Avons-nous besoin de rappeler au lecteur l’histoire d’Adam dans le paradis? ou celle de Noé après le déluge, ou encore celle d’Israël dans le désert; dans le pays de Canaan; sous la loi; sous le culte lévitique? Nous arrêterons-nous au récit des manquements de l’homme dans le service prophétique, sacerdotal et royal? Montrerons-nous la chute de l’Église professante, comme corps responsable sur la terre? L’homme n’a-t-il pas manqué toujours et en toutes choses? hélas oui!

Ceci est un côté du tableau — côté sombre et humiliant. Mais, béni soit Dieu, il y a aussi un côté lumineux et encourageant. S’il y a le «vous n’entrerez pas», il y a aussi le «certainement vous entrerez». Et pourquoi? Parce que Christ est entré sur la scène, et qu’en lui tout est infailliblement assuré, pour la gloire de Dieu et la bénédiction éternelle de l’homme. Le dessein éternel de Dieu est d'«établir Christ comme chef sur toutes choses». Il n’y a pas une seule chose dans laquelle le premier homme a manqué, que le second ne restaure. Tout est établi sur une base nouvelle en Christ. Il est le chef de la nouvelle création, Héritier de toutes les promesses faites à Abraham, à Isaac et à Jacob au sujet du pays. Héritier de toutes les promesses faites à David concernant le trône. L’empire sera posé sur son épaule. Il revêtira ces gloires. Il est Prophète, Sacrificateur et Roi. En un mot, Christ restaure tout ce qu’Adam a perdu, et il apporte beaucoup plus que tout ce qu’Adam a jamais possédé. Aussi, de quelque manière que nous envisagions le premier Adam et ses œuvres, la sentence est: «Vous n’entrerez pas!» Vous ne resterez pas dans le Paradis — vous ne conserverez pas l’empire — vous n’hériterez pas des promesses — vous n’entrerez pas dans le pays — vous n’occuperez pas le trône — vous n’entrerez pas dans le royaume!

Mais d’un autre côté, de quelque manière que nous considérions le second Adam et ses œuvres, toute la série des négations précédentes doit être glorieusement renversée. Le «ne» doit être pour jamais rayé de ces phrases, car: dans le Christ Jésus, «autant il y a de promesses de Dieu, en lui est le oui et en lui l’amen, à la gloire de Dieu par nous.» Il n’y a pas de «non» quand il s’agit de Christ. Tout est «oui» — tout est divinement établi et fixé; et parce qu’il en est ainsi, Dieu y a mis son sceau, le sceau de son Esprit que tous les croyants possèdent maintenant: «Car le Fils de Dieu, Jésus Christ, qui a été prêché par nous au milieu de vous, savoir par moi, et par Silvain et par Timothée, n’a pas été oui et non, mais il y a oui en lui; car autant il y a de promesses de Dieu, en lui est le oui et en lui l’amen, à la gloire de Dieu par nous. Or celui qui nous lie fermement avec vous à Christ et qui nous a oints, c’est Dieu, qui aussi nous a scellés, et nous a donné les arrhes de l’Esprit dans nos cœurs» (2 Cor. 1:19-22).

Ainsi les premières lignes du chapitre 15 des Nombres doivent être lues à la clarté de tout le Livre de Dieu. Il fait partie de l’histoire entière des voies de Dieu envers l’homme en ce monde. Israël avait perdu tout droit au pays. Ce qu’ils méritaient, c’était que leurs cadavres tombassent dans le désert. Néanmoins, telle est la grande et précieuse grâce de Dieu, qu’il pouvait leur parler de leur entrée dans le pays, et leur enseigner ce qu’ils auraient à y faire.

Rien ne peut être plus béni et plus affermissant que tout cela. Dieu s’élève au-dessus de la chute et du péché de l’homme. Il est impossible qu’une seule promesse de Dieu n’ait pas son accomplissement. Se pouvait-il que la conduite de la semence d’Abraham dans le désert rendit inutile l’éternel dessein de Dieu, ou qu’elle empêchât l’exécution de la promesse absolue et sans condition faite aux pères? Impossible. Si donc la vénération qui monta d’Égypte refusait d’aller en Canaan, l'Éternel susciterait, des pierres mêmes, une semence à celui en faveur duquel sa promesse devait avoir son accomplissement. Ceci aidera à expliquer la première phrase de notre chapitre qui, avec une beauté et une force remarquables, suit les scènes humiliantes du chapitre 14. Dans ce dernier, le soleil d’Israël semble descendre au milieu de nuages sombres et menaçants; mais dans le chapitre 15 il s’élève avec une clarté sereine, révélant et établissant cette grande vérité que: «les dons de grâce et l’appel de Dieu sont sans repentir» (Rom. 11:29). Dieu ne se repent jamais de son appel et de ses dons; aussi, quoique une génération incrédule puisse murmurer et se rebeller des milliers de fois, il accomplira ce qu’il a promis.

C’est là qu’est le divin repos de la foi dans tous les temps — le port sûr et calme de l’âme au milieu du naufrage de tous les projets et de toutes les entreprises des hommes. Tout tombe en pièces entre les mains de l’homme, mais Dieu en Christ demeure. Dieu a élevé Christ en résurrection, et tous ceux qui croient en lui sont placés sur une base entièrement nouvelle ils sont introduits dans la société du Chef exalté et glorieux, et ils y resteront pour toujours. Cette merveilleuse association ne pourra jamais être dissoute. Tout est assis sur un fondement que ni les pouvoirs de la terre, ni ceux de l’enfer ne pourront jamais ébranler.

Lecteur, comprenez-vous l’application de tout cela à vous-même? Avez-vous découvert, à la lumière de la présence de Dieu, que vous avez véritablement failli; que vous avez fait naufrage en toutes choses, que vous n’avez pas une seule excuse à produire? Avez-vous été conduit à vous faire une application personnelle de ces deux expressions sur lesquelles nous nous sommes arrêtés, savoir: «vous n’entrerez pas» et: «certainement vous entrerez»? Avez-vous appris la force de ces paroles? «C’est ta destruction, Israël, que tu aies été contre moi, contre ton secours» (Osée 13:9). En un mot, êtes-vous venu à Jésus, comme un pécheur déchu, coupable, perdu par lui-même, et avez-vous trouvé, en Lui, la rédemption, la paix et le pardon?

Arrêtez-vous, cher ami, considérez sérieusement ce qui précède. Nous n’oublions jamais que nous avons quelque chose de plus à faire qu’à écrire des «Notes sur le Livre des Nombres». Nous pensons à l’âme du lecteur. Nous avons un devoir des plus solennels à remplir auprès de lui; c’est pourquoi nous nous sentons obligé d’abandonner, de temps en temps, la page que nous méditons, afin de faire appel au cœur et à la conscience du lecteur, pour le solliciter instamment, s’il est encore inconverti ou indécis, de mettre de côté notre livre, pour placer sérieusement devant son cœur la grande question de son état présent et de son sort éternel. Devant cette question, toutes les autres deviennent complètement insignifiantes. Que sont tous les plans et toutes les entreprises qui commencent, continuent et finissent ici-bas, si on les compare avec l’éternité et avec le salut de votre âme immortelle? Tout cela n’est que comme la menue poussière qui s’attache à une balance. «Que profitera-t-il à un homme s’il gagne le monde entier, et qu’il fasse la perte de son âme?» (Matt. 16:26).

Bien-aimé lecteur, nous vous supplions, au nom des motifs les plus sérieux qu’il soit possible de présenter à une âme d’homme, de ne pas abandonner ce sujet avant d’être arrivé à une solution incontestable. Par le grand amour de Dieu — par la croix et les souffrances du Christ — par le puissant témoignage du Saint Esprit — par l’imposante solennité d’une éternité sans fin — par l’inexprimable valeur de votre âme immortelle — par toutes les joies du ciel — par toutes les horreurs de l’enfer — par ces sept arguments solennels, nous vous sollicitons de venir à Jésus. Ne différez pas! Ne discutez pas! Ne raisonnez pas! Venez, venez maintenant, tel que vous êtes avec tous vos péchés; avec toute votre misère; avec votre vie mal employée; avec cette suite accusatrice de grâces dédaignées — venez à Jésus qui vous appelle, qui est là, les bras ouverts et le cœur plein d’amour, prêt à vous recevoir; à Jésus qui vous montre ses blessures attestant la réalité de sa mort expiatoire sur la croix; qui vous dit de mettre votre confiance en lui, et qui vous atteste que si vous le faites, vous ne serez jamais confus. Que l’Esprit de Dieu fasse retentir maintenant cet appel dans votre cœur, et qu’il ne vous donne aucun repos que vous ne soyez converti à salut, venu à Christ, réconcilié avec Dieu et scellé du Saint Esprit de la promesse!

Revenons maintenant à notre chapitre.

Rien ne saurait être plus intéressant que le tableau qui nous y est présenté. Nous avons les vœux, les offrandes, les sacrifices de justice, et le vin du royaume, — le tout fondé sur la grâce souveraine qui brille dès le premier verset. C’est un bel exemple, un magnifique symbole de l’état futur d’Israël. Cela nous rappelle les visions merveilleuses qui terminent le livre du prophète Ézéchiel. L’incrédulité, le murmure, la rébellion ne sont plus; ils sont oubliés. Dieu se retire dans ses conseils éternels et, de là, regarde en avant, au temps où son peuple lui présentera une offrande en justice et lui rendra ses vœux; au temps où les joies de son royaume rempliront pour jamais leurs cœurs (Ézé. 43:3-12).

Observons un trait bien frappant de ce chapitre: la place qu’occupe «l’étranger» — «Et si un étranger séjourne parmi vous, ou si quelqu’un est au milieu de vous en vos générations, et qu’il offre un sacrifice par feu, d’odeur agréable à l’Éternel, — comme vous faites, ainsi il fera. Pour ce qui est de la congrégation, il y aura un même statut pour vous et pour l’étranger en séjour, un statut perpétuel en vos générations; comme vous, ainsi sera l’étranger devant l’Éternel. Il y aura une même loi et une même ordonnance pour vous et pour l’étranger qui séjourne parmi vous.» (Vers. 14-16.)

Quelle place pour l’étranger! Quelle leçon pour Israël! Quel témoignage perpétuel pour Moïse, aimé et digne d’éloges! L’étranger est mis au même rang qu’Israël; «comme vous, ainsi sera l’étranger», et encore ceci «devant l’Éternel». En Exode 12:48, nous lisons «Et si un étranger séjourne chez toi, et veut faire la Pâque à l’Éternel, que tout mâle qui est à lui soit circoncis; et alors il s’approchera pour la faire». Or, dans les Nombres, il n’est point du tout fait allusion à la circoncision. Et pourquoi? Un point de cette importance pouvait-il jamais être laissé de côté? Non, mais nous croyons qu’ici cette ordonnance est pleine de signification. Israël avait forfait à toute obligation. La génération rebelle devait être mise de côté et retranchée; mais l’éternel dessein de Dieu, en grâce, demeure, et toutes ses promesses doivent être réalisées. «Tout Israël sera sauvé»; il possédera le pays; il offrira de pures offrandes, il rendra ses vœux, et savourera la joie du royaume. Sur quel principe? Sur celui de la grâce souveraine. Or c’est sur un principe exactement semblable que «l’étranger» est introduit, et non seulement introduit, mais «comme vous, ainsi sera l’étranger devant l’Éternel».

Le Juif trouve-t-il à redire à cela? Qu’il étudie les chapitres 13 et 14 des Nombres. Puis, lorsqu’il en aura reçu, dans son âme, la leçon salutaire, qu’il médite sur le chapitre 15; nous sommes assurés qu’il ne cherchera plus à repousser «l’étranger», car il sera prêt à s’avouer lui-même débiteur de la grâce seule, reconnaissant ainsi que la même miséricorde qui lui a été accordée, peut l’être aussi à l’étranger alors il se réjouira d’aller en sa compagnie boire à la source du salut ouverte par la grâce souveraine du Dieu de Jacob.

L’enseignement de cette partie de notre livre ne nous rappelle-t-il pas vivement l’admirable plan des dispensations, développé en Romains 9-11, et particulièrement cette magnifique conclusion: «Car les dons de grâce et l’appel de Dieu sont sans repentir. Car comme vous aussi (étrangers) vous avez été autrefois désobéissants à Dieu et que maintenant vous êtes devenus des objets de miséricorde par la désobéissance de ceux-ci, de même ceux-ci aussi ont été maintenant désobéissants à votre miséricorde (c’est-à-dire à la miséricorde offerte aux Gentils; voyez le grec), afin qu’eux aussi deviennent des objets de miséricorde (c’est-à-dire qu’ils viennent sur le terrain de la miséricorde — comme «l’étranger»). Car Dieu a renfermé tous [Juifs et nations] dans la désobéissance, afin de faire miséricorde à tous. O profondeur des richesses et de la sagesse et de la connaissance de Dieu Que ses jugements sont insondables, et ses voies introuvables! Car qui a connu la pensée du Seigneur, ou qui a été son conseiller? ou qui lui a donné le premier, et il lui sera rendu? Car de lui, et par lui, et pour lui, sont toutes choses! À lui soit la gloire éternellement! Amen» (Rom. 11:29-36).

Dans les versets 22 à 31 de notre chapitre, nous avons des instructions sur les péchés par erreur et sur les péchés par fierté — distinction très sérieuse et très importante. Il est amplement pourvu aux premiers, selon la bonté et la miséricorde de Dieu. La mort de Christ est présentée, dans cette portion du chapitre, sous ses deux grands aspects, savoir: l’holocauste, et l’offrande pour le péché; c’est-à-dire son aspect quant à Dieu, et son aspect quant à nous; ensuite, nous avons tout le prix, le parfum de sa vie et de son service parfait — comme homme dans ce monde; ceci est figuré par le gâteau et l’aspersion. Dans l’holocauste, nous voyons l’expiation accomplie selon la mesure du dévouement de Christ à Dieu, et du plaisir que Dieu y prend. Dans l’offrande pour le péché, c’est l’expiation accomplie selon la mesure des besoins du pécheur et de la nature odieuse que le péché revêt aux yeux de Dieu. Prises ensemble, les deux offrandes présentent la mort expiatoire de Christ dans toute sa plénitude. Puis, dans le gâteau, nous avons la vie parfaite de Christ, et la réalité de sa nature humaine manifestées, dans tous les détails de sa marche et de son service en ce monde. L’aspersion est le type de son complet abandon à Dieu.

Nous n’essayerons pas de développer, maintenant les riches et merveilleuses instructions qui ressortent des différentes catégories de sacrifices présentées dans ce passage. Nous renvoyons le lecteur, qui voudrait étudier plus pleinement ce sujet, aux «Notes sur le livre du Lévitique» (p.1 à143). Nous exposons simplement ici, de la manière la plus brève, ce que nous pensons être la principale signification de chaque offrande car ce serait répéter ce que nous avons déjà écrit, que d’entrer dans plus de détails.

Nous ajouterons seulement que les droits de Dieu exigent que l’on prenne connaissance des péchés commis par erreur. Nous pourrions être disposés à dire, ou du moins à penser, que l’on peut négliger de tels péchés. Dieu ne pense pas ainsi. Sa sainteté ne doit pas être rabaissée à la mesure de notre intelligence. La grâce a pourvu aux péchés commis par erreur; car la sainteté demande que de tels péchés soient jugés et confessés. Tout cœur sincère bénira Dieu pour cela. Qu’en serait-il de nous, si les précautions de la grâce n’étaient pas suffisantes pour satisfaire aux droits de la sainteté divine? Elles ne pourraient assurément pas être suffisantes si elles ne dépassaient pas la portée de notre intelligence.

Et cependant, quoique tout cela soit généralement admis, il est souvent affligeant d’entendre des chrétiens professants s’excuser de leur ignorance, ou s’en servir pour justifier l’infidélité et l’erreur. Or, très souvent, dans de pareils cas, on peut poser formellement cette question: Pourquoi sommes-nous ignorants de certains points de conduite, ou des droits que Christ, a sur nous? Supposons qu’un cas se présente, réclamant un jugement positif et exigeant une certaine ligne d’action; nous alléguons l’ignorance. Est-ce bien? Cela sert-il à quelque chose? Cela détruit-il notre responsabilité? Dieu nous permettra-t-il d’éluder la question par ce moyen? Non! nous pouvons être certains qu’il ne le fera pas. Pourquoi sommes-nous ignorants? Avons-nous déployé toute notre énergie, employé tous les moyens valables, fait tous les efforts qu’il nous était possible de faire pour arriver au principe, de la question, afin d’en obtenir une solution exacte? Rappelons-nous que les droits de la vérité et de la sainteté exigent tout cela de nous, et ne soyons pas satisfaits de quelque chose de moins. Nous ne pouvons nous refuser à admettre que s’il s’agissait, en quelque mesure que ce fût, de nos propres intérêts, de notre nom, de notre réputation, de nos biens, rien ne nous empêcherait de nous familiariser avec tout ce qui concerne ce cas. Nous n’alléguerions pas longtemps, notre ignorance en de telles matières. Si des informations étaient nécessaires, nous les obtiendrions. Nous ferions tout notre possible pour connaître tous les détails, le pour et le contre de la question, afin de pouvoir porter sur elle un jugement sain.

N’en est-il pas ainsi, lecteur? Eh bien! pourquoi alléguerions-nous l’ignorance lorsque les droits de Christ sont en question? Cela ne prouve-t-il pas que, lorsqu’il s’agit de nous-mêmes, nous sommes empressés, zélés, énergiques, très actifs, tandis que lorsqu’il s’agit de Christ, nous sommes indifférents, indolents, nonchalants. Hélas! c’est une vérité fort humiliante Puissions-nous le sentir et en être humiliés! Que l’Esprit de Dieu nous rende plus entièrement vigilants dans les choses qui concernent notre Seigneur Jésus Christ. Que le moi et ses intérêts diminuent, et que Christ et ses intérêts grandissent chaque jour dans notre estime. Puissent nos cœurs reconnaître notre sainte responsabilité d’examiner diligemment toutes les questions où la gloire de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ peut être intéressée, fût-ce au plus faible degré. Ne nous permettons jamais de parler, de penser ou d’agir comme si nous croyions que ce qui le concerne est un sujet indifférent pour nous. Que Dieu nous en préserve dans sa miséricorde! Estimons tout ce qui nous concerne, comme n’étant point essentiel; mais que les droits de Christ aient leur suprême autorité.

Tout ce que nous venons de dire au sujet de l’ignorance, nous l’avons dit dans le sentiment de notre responsabilité à l’égard de la vérité de Dieu et de l’âme du lecteur. Nous en sentons l’immense importance pratique. Nous croyons que très souvent nous alléguons l’ignorance, tandis que c’est indifférence qu’il faudrait dire. Cela est fort triste. Assurément si notre Dieu, dans son infinie bonté, a pourvu amplement, même aux péchés commis par ignorance, ce n’est pas une raison pour que nous nous mettions froidement à l’abri, derrière l’excuse de notre ignorance, lorsque nous avons à notre portée les enseignements les plus détaillés, et qu’il nous manque seulement l’énergie pour en profiter.

Nous ne nous serions peut-être pas arrêté aussi longtemps sur ce point, si nous n’étions pas chaque jour, de plus en plus convaincu dans notre âme que nous sommes parvenus à un moment sérieux de notre histoire, comme chrétiens. Nous ne sommes nullement porté à voir les choses en noir. Nous croyons que c’est notre privilège d’être remplis de la plus joyeuse confiance, et d’avoir nos cœurs et nos esprits toujours gardés dans la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence. «Dieu ne nous a pas donné un esprit de crainte, mais de puissance, et d’amour, et de conseil» (2 Tim. 1:7).

Il nous est néanmoins impossible de fermer les yeux sur ce fait saisissant que les droits de Christ — la valeur de la vérité — l’autorité des Saintes Écritures, sont de plus en plus mis de côté chaque jour, chaque semaine, chaque année. Nous croyons que nous approchons d’un moment où il y aura de la tolérance pour tout, excepté pour la vérité de Dieu. Il nous convient, en conséquence, de bien veiller à ce que la parole de Dieu ait sa vraie place dans les cœurs, et que la conscience soit, en toutes choses, gouvernée par sa sainte autorité. Une conscience délicate est un trésor des plus précieux à porter continuellement avec nous; j’entends une conscience qui réponde toujours avec vérité à l’action de la parole de Dieu — qui se soumette sans contester à ses simples directions. Lorsque la conscience est dans cette sainte condition, nous avons là une puissance régulatrice pour agir sur notre conduite et sur notre caractère pratiques. La conscience peut être comparée au balancier d’une montre. Il peut arriver que les aiguilles de la montre n’indiquent plus la bonne heure; mais tant que le balancier régule la force qui vient du ressort, il y a toujours moyen de corriger l’indication des aiguilles. Si la force du ressort cesse, il va falloir réparer la montre. C’est ce qui a lieu pour la conscience. Tant qu’elle continue à être sensible à l’action de l’Écriture appliquée par le Saint Esprit, il y a toujours une puissance régulatrice, sûre et certaine; mais si la conscience devient indolente, endurcie ou pervertie, si elle refuse de donner une réponse loyale à cette parole «Ainsi a dit l’Éternel», alors il y a fort peu d’espoir. On tombe dans un cas semblable à celui qui nous est rapporté dans notre chapitre: «Mais l’âme qui aura péché par fierté, tant l’Israélite de naissance que l’étranger, elle a outragé l’Éternel cette âme sera retranchée du milieu de son peuple, car elle a méprisé la parole de l’Éternel, et elle a enfreint son commandement: cette âme sera certainement retranchée; son iniquité est sur elle.» (Vers. 30-31.)

Ce n’est pas un péché par erreur, mais un péché volontaire ou par fierté, pour lequel il ne reste plus que l’implacable jugement de Dieu. «La rébellion est comme le péché de divination, et l’obstination comme une idolâtrie et des théraphim» (1 Sam. 15:23). Ce sont des paroles solennelles, dans un moment comme celui-ci, où la volonté de l’homme se développe avec une force si extraordinaire. On estime comme un acte viril, d’affirmer sa volonté; mais l’Écriture nous enseigne tout le contraire. Les deux grands éléments de la perfection humaine — de la parfaite virilité — sont la dépendance et l’obéissance. À mesure que l’on s’en écarte, on s’écarte du véritable esprit et de la véritable attitude qui conviennent à l’homme. De là, quand nous portons nos regards sur Celui qui fut le parfait homme — l’homme Christ Jésus — nous voyons ces deux grands traits distinctifs pleinement établis et pleinement développés d’un bout à l’autre. Ce Bien-aimé n’est jamais sorti un seul instant de la position de dépendance parfaite et d’obéissance absolue. Si nous voulions essayer de démontrer cette vérité, nous la retrouverions dans l’Évangile tout entier. Prenez la scène de la tentation; vous y trouverez un exemple de cette vie bénie. La réponse qu’il fait invariablement au tentateur est: «il est écrit». Aucun raisonnement, aucun argument, aucune question. Il vivait de la Parole de Dieu. Il vainquit Satan en retenant ferme la seule vraie position d’un homme — dépendance et obéissance. Il pouvait dépendre de Dieu, et il voulait lui obéir. Que pouvait Satan dans un tel cas? Absolument rien.

Tel est notre modèle. Ayant, la vie de Christ, nous sommes appelés à vivre dans une dépendance et une obéissance habituelles. C’est là marcher par l’Esprit. C’est le sûr et heureux sentier du chrétien. L’indépendance et la désobéissance vont ensemble. Elles sont absolument antichrétiennes. Elles se trouvent dans le premier homme, tandis que la dépendance et l’obéissance appartiennent au second. Adam, dans le jardin, voulut être indépendant. Il n’était pas content d’être homme et de rester dans la seule vraie place et dans le seul vrai esprit d’un homme; alors il désobéit. Là est le secret de la chute de l’humanité: — considérez-la où vous voudrez avant le déluge, après le déluge; sans la loi ou sous la loi; chez les païens, les Juifs, les Turcs ou les chrétiens de nom, vous n’y trouverez qu’indépendance et désobéissance envers Dieu. Sous quel caractère l’homme apparaît-il encore à la fin de son histoire en ce siècle-ci? Comme le «Roi qui fait sa volonté», et comme l’«Inique», l’homme sans loi.

Qu’il nous soit fait la grâce de bien peser ces choses, dans un esprit humble et obéissant. Dieu a dit «Mais c’est à celui-ci que je regarderai: à l’affligé, et à celui qui a l’esprit contrit et qui tremble à ma parole» (Ésaïe 66:2). Que ces paroles frappent nos oreilles; qu’elles descendent dans nos cœurs, afin que la constante aspiration de nos âmes soit: «Garde aussi ton serviteur des péchés commis avec fierté; qu’ils ne dominent pas sur moi»1.

1 Nous voudrions rappeler, spécialement au jeune lecteur chrétien, que la vraie sauvegarde contre les péchés commis par erreur, c’est l’étude de la Parole; et que la vraie sauvegarde contre les péchés commis par fierté, c’est la soumission à la Parole. Nous avons tous besoin de nous souvenir de ces choses, mais particulièrement nos frères plus jeunes. Il y a une forte tendance parmi les jeunes chrétiens à entrer dans le courant de ce présent siècle, et à s’imprégner de son esprit. De là l’indépendance, la forte volonté, l’impatience contre la surveillance, la désobéissance aux parents, l’obstination, l’arrogance, les manières prétentieuses, la présomption, l’affectation de se croire plus sages que ceux qui sont plus âgés — toutes ces choses sont odieuses aux regards de Dieu, et sont entièrement opposées à l’esprit du christianisme. Nous voudrions inviter vivement et affectueusement nos jeunes amis à se garder de ces choses, en recherchant l’humilité. Qu’ils se souviennent que Dieu résiste aux orgueilleux, mais qu’il donne la grâce aux humbles.

Il nous reste à faire remarquer le cas de celui qui profanait le sabbat; puis l’ordonnance du «cordon de bleu».

«Et comme les fils d’Israël étaient au désert, ils trouvèrent un homme qui ramassait du bois le jour du sabbat. Et ceux qui le trouvèrent ramassant du bois, l’amenèrent à Moïse et à Aaron, et à toute l’assemblée. Et on le mit sous garde, car ce qu’on devait lui faire n’avait pas été clairement indiqué. Et l’Éternel dit à Moïse: L’homme sera mis à mort; que toute l’assemblée le lapide avec des pierres hors du camp. Et toute l’assemblée le mena hors du camp, et ils le lapidèrent avec des pierres, et il mourut, comme l’Éternel l’avait commandé à Moïse.» (Vers. 32-36.)

C’était sûrement un péché commis par fierté — c’était désobéir résolument à un commandement très clair et très positif de Dieu. C’est là ce qui caractérise le péché commis par fierté, et le rend absolument inexcusable. On ne peut pas alléguer l’ignorance en face d’un commandement divin.

Mais, demandera-t-on peut-être, pourquoi devaient-ils mettre cet homme sous garde? Parce que, bien que le commandement fût explicite, la violation n’en ayant pas été prévue, aucune peine n’avait encore été prononcée. Pour parler à la manière des hommes, l'Éternel ne s’était pas attendu à une folie telle que la profanation de son repos de la part de l’homme. Il n’y avait, par conséquent, pas formellement pourvu. Nous n’avons pas besoin de dire que Dieu connaît la fin des choses, dès le commencement; mais, dans cette affaire, il avait laissé à dessein le cas indécis jusqu’à ce qu’une occasion se présentât. Hélas! elle arriva bientôt, car l’homme est capable de tout. Il n’a pas à cœur le repos de Dieu. Allumer du feu en un jour de sabbat n’était pas seulement une infraction positive à la loi; un tel acte manifestait le plus complet éloignement de la pensée du Législateur, puisqu’il introduisait, dans le jour du repos, ce qui était le symbole le plus frappant du jugement. Le feu est l’emblème du jugement, et comme tel il n’était nullement en rapport avec le repos du sabbat. Il ne restait donc plus qu’à appliquer le jugement à celui qui avait violé le sabbat, car «ce que l’homme sème, il le moissonnera aussi».

«Et l’Éternel parla à Moïse, disant: Parle aux fils d’Israël, et dis-leur qu’ils se fassent, en leurs générations, une houppe aux coins de leurs vêtements, et qu’ils mettent à la houppe du coin un cordon de bleu. Et elle sera pour vous une houppe; et vous la verrez, et il vous souviendra de tous les commandements de l’Éternel, afin que vous les fassiez, et que vous ne recherchiez pas les pensées de votre cœur, ni les désirs de vos yeux, après lesquels vous vous prostituez; afin que vous vous souveniez de tous mes commandements, et que vous les fassiez, et que vous soyez saints, consacrés à votre Dieu. Moi, je suis l’Éternel, votre Dieu, qui vous ai fait sortir du pays d’Égypte pour être votre Dieu. Moi, je suis l’Éternel, votre Dieu.» (Vers. 37-41.)

Le Dieu d’Israël voulait tenir son peuple dans une continuelle souvenance de ses saints commandements.

De là cette magnifique institution du «cordon de bleu» ordonné pour être un mémorial céleste, attaché aux pans mêmes de leurs vêtements, afin que la parole de Dieu pût toujours être remise en mémoire dans leurs pensées et dans leurs cœurs. Toutes les fois qu’un Israélite portait les yeux sur ce cordon de bleu, il devait penser à l'Éternel et montrer une sincère obéissance à tous ses statuts.

Tel était le grand but pratique du «cordon de bleu». Mais quand nous nous reportons au verset 5 du chapitre 23 de Matthieu, nous voyons le triste usage que l’homme avait fait de cette institution divine. «Et ils font toutes leurs œuvres pour être vus des hommes; car ils élargissent leurs phylactères et donnent plus de largeur aux franges de leurs vêtements.» Ainsi la chose même qui avait été établie pour les amener à se rappeler l'Éternel, et à montrer une humble obéissance à sa précieuse Parole, ils s’en servirent pour se glorifier eux-mêmes, dans leur orgueil religieux. «Ils font toutes leurs œuvres pour être vus des hommes.» Pensons-y sérieusement. Prenons garde de changer le mémorial céleste en un insigne terrestre, et de tirer de ce qui devait nous conduire à une humble obéissance une occasion de nous glorifier nous-mêmes.