Michée

Chapitre 2

État moral du peuple. Restauration finale du vrai Israël

Le chap. 1 prophétisait ce qui allait arriver à Samarie et à Jérusalem, avec cette exception toutefois, que, pour le moment, la calamité n’atteindrait qu’aux portes de cette dernière. Le chap. 2 décrit l’état moral du peuple qui nécessite un jugement si sévère. Cet état moral est celui des deux royaumes. «Malheur à ceux qui méditent la vanité et qui préparent le mal sur leurs lits! À la lumière du matin ils l’exécutent, parce que c’est au pouvoir de leur main. Et ils convoitent des champs et les ravissent, et des maisons, et ils s’en emparent; et ils oppriment l’homme et sa maison, l’homme et son héritage» (v. 1, 2).

Comme en Amos, on trouve deux «malheur» dans Michée. Le premier inaugure notre chapitre; nous trouvons le second au v. 1 du chap. 7. Le premier Malheur s’adresse à l’état moral du peuple, considéré ici sous un angle restreint. Il médite et exécute le mal quand il a le pouvoir de le faire; il convoite la fortune du prochain et s’en empare; il opprime les hommes paisibles, leur vole leurs biens et n’épargne pas les faibles et les petits.

Au chap. 7:1, le prophète prononce un second Malheur sur lui-même. Ces «Malheur» constituent une des nombreuses analogies de Michée avec Ésaïe, sauf que ce dernier est toujours beaucoup plus explicite que notre prophète. Il prononce, au chap. 5, six «Malheur» correspondant au premier, et, au chap. 6, un septième correspondant au second de Michée.

Les «Malheur» en Ésaïe stigmatisent:

  1. L’égoïsme qui ne pense qu’à s’agrandir et à tout garder pour soi (5:8);
  2. La recherche du vin et des plaisirs du monde (v. 11, 12);
  3. Ils signalent ceux qui font le mal sciemment, sans souci de Dieu et du jugement (v. 18, 19);
  4. Qui appellent le mal bien et le bien mal (v. 20);
  5. Qui ont une haute opinion d’eux-mêmes (v. 21);
  6. Qui emploient leur énergie à se dégrader, à justifier le méchant qui leur est utile, à noircir le juste dont ils n’attendent rien.

Mais Ésaïe, comme notre prophète, prononce le septième «Malheur» sur lui-même, car on trouve chez Ésaïe à la fois une plénitude de malédiction et une plénitude de bénédiction (11:2) qui n’appartiennent pas à Michée. Nous reviendrons sur ce dernier point au chap. 7.

«C’est pourquoi, ainsi dit l’Éternel: Voici, je médite contre cette famille un mal dont vous ne pourrez pas retirer vos cous; et vous ne marcherez pas la tête haute, car c’est un temps mauvais» (V. 3).

S’ils «méditent la vanité et préparent le mal», l’Éternel aussi médite le mal contre eux, et il les atteindra à coup sûr. Combien les hommes, tout remplis des mauvais desseins de leurs cœurs, pensent peu à ce qu’un Dieu juste et saint leur prépare dans le silence! Il sait attendre patiemment, mais quand la convoitise, ayant conçu, a enfanté le péché, et que celui-ci a été consommé, le jugement final arrive (Jacq. 1:15). Amos, qui prophétisait sous Ozias et Jéroboam, assez longtemps avant Michée, avait montré le rôle du sage dans les temps calamiteux de la fin, dont la description, comme celle de Michée, a tant d’analogie avec les temps où nous vivons. Il avait dit: «C’est pourquoi, en ce temps-ci, le sage gardera le silence, car c’est un temps mauvais» (Amos 5:13). Était-ce le cas d’élever la voix et de protester, quand Dieu lui-même méditait dans le silence? Le sage devait conserver la même attitude que son Dieu et s’en remettre entièrement à lui, sans chercher à intervenir dans les affaires de ce monde. Michée nous montre maintenant quelle sera l’attitude du monde, quand il plaira à Dieu d’intervenir: «Vous ne pourrez pas retirer vos cous de dessous le joug, vous ne marcherez pas la tête haute, car c’est un temps mauvais». Le fait est qu’alors, comme aujourd’hui, leur orgueil n’avait pas été abaissé devant toutes les calamités qui les atteignaient. Maintenant, le temps mauvais qu’ils avaient imposé à d’autres fond sur eux de la part de l’Éternel, et leur orgueil est écrasé sous le joug de l’esclavage.

«En ce jour-là, on vous prendra pour proverbe, et on se lamentera dans une douloureuse lamentation; on dira: Nous sommes entièrement détruits; il a changé la portion de mon peuple: comme il me l’a ôtée! À celui qui se détourne de l’Éternel, il a partagé nos champs» (v. 4). Devant ce jugement ils passent en proverbe, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent. Il faudra qu’ils reconnaissent leur entière destruction. Tout cela est-il très différent de ce que nous voyons aujourd’hui? On parle de ses droits acquis, de son peuple et de sa nation, quand on ravit les champs et les maisons des autres, attentats médités et préparés depuis longtemps dans le silence, alors que tous «passent en sécurité». Mais le moment est arrivé où Dieu intervient. Une subite destruction vient sur eux. Ils sont obligés de s’écrier: Il a changé la portion de mon peuple; eux qui avaient changé la portion des autres! Même ce qu’ils détenaient comme possession légitime leur est ôté. Leurs bornes sont déplacées. Dieu donne leurs champs, non pas à de plus justes qu’eux, mais à celui qui se détourne de l’Éternel! L’Assyrien, cet ennemi de Dieu, possède leur héritage. Quelle honte! Quelle humiliation! Dieu se sert contre eux de l’ennemi de Dieu lui-même, tandis qu’eux, s’appuyant sur leur prétention d’être le peuple de Dieu, se vantaient qu’Il les protégerait contre leurs ennemis. «Il a partagé nos champs», n’étaient-ce pas les champs de leurs frères (v. 2) dont, contre tout droit, ils s’étaient emparés?

«C’est pourquoi tu n’auras personne qui étende le cordeau pour faire un lot dans la congrégation de l’Éternel» (v. 5). Maintenant le prophète s’adresse à eux. Il envisage un temps futur où la congrégation sera rassemblée, non pas le retour de la captivité, mais la restauration finale du peuple dont ils seront exclus. Ils n’y auront point de part. La sentence prononcée sur eux pour un avenir prochain, où les temps mauvais de la captivité vont peser comme un joug sur leurs cous, ne sera pas le dernier mot de leur jugement. Le prophète nous conduit jusqu’à l’exclusion future et définitive du peuple apostat de la fin, de tout ce qui ne sera pas le vrai Israël, constitué par le Résidu fidèle (Ps. 16:6).

«Ne prophétisez point, prophétisent-ils» (v. 6). Ce passage, qui a beaucoup exercé les commentateurs, n’offre aucune difficulté si l’on distingue les interlocuteurs si fréquents dans Michée. «Les prophètes qui font errer le peuple» (3:5) prennent ici la parole. Ils ordonnent aux vrais prophètes, leurs contemporains, Ésaïe et Michée, de ne pas prophétiser. Michée leur répond: «S’ils ne prophétisent pas à ceux-ci, l’ignominie ne s’éloignera pas» (v. 6). Quel est le but d’un vrai prophète? C’est d’amener le peuple à la repentance en lui représentant l’ignominie de ses voies et les jugements qui en sont la conséquence. La prophétie a toujours un but de miséricorde car, en révélant le jugement, elle indique comment on peut y échapper, et par quel moyen Dieu amènera la délivrance. S’il n’y avait plus de prophètes de l’Éternel, il serait impossible que le jugement pût être évité, et c’est ce qui rend si infiniment coupable l’intervention de prophètes sans conscience, pour anéantir l’action des vrais. Si Dieu les laissait faire, ce seraient eux qui, en fin de compte, porteraient la responsabilité d’avoir rendu les arrêts de la justice irrévocables et l’état du peuple irrémédiable.

«Toi qui es appelée la maison de Jacob: L’Éternel est-il impatient? Sont-ce là ses actes? Mes paroles ne font-elles pas du bien à celui qui marche avec droiture? Naguère encore mon peuple s’est levé comme un ennemi: vous enlevez le manteau avec la tunique à ceux qui passent en sécurité, qui se détournent de la guerre; vous avez chassé les femmes de mon peuple des maisons de leurs délices; de dessus leurs enfants, vous avez ôté ma magnificence pour toujours» (v. 7-9).

L’Éternel prend maintenant la parole pour les confondre, par la bouche de son propre prophète. La maison de Jacob, Israël tout entier représenté par Juda, peut-elle accuser Dieu de manquer de patience? N’a-t-il pas averti Israël par tous ses prophètes, alors même que sa voix retentissait dans le désert? Ne voulait-il pas amener son peuple à la repentance? A-t-il frappé un seul coup prématurément et sans raison? Sont-ce là ses actes? N’a-t-il pas récompensé les hommes droits et montré une infinie patience envers les violents et les fourbes? «Mon peuple» (Remarquez ce «mon». À la veille du jugement définitif, l’Éternel se retient encore de prononcer Lo-Ammi) a joué le rôle d’ennemi envers des gens paisibles en tombant sur eux à l’improviste et en les dépouillant. Ceux qu’ils ont attaqués les avaient-ils provoqués? Et les femmes sans défense chassées de leurs maisons? Et les enfants, dépouillés pour toujours des biens que l’Éternel leur avait assurés?

«Levez-vous et allez-vous-en! Car ce n’est pas ici un lieu de repos, à cause de la souillure qui amène la ruine: la ruine est terrible!» (v. 10). L’indignation de l’Éternel, longtemps contenue, se donne enfin carrière. Qu’ils se lèvent! qu’ils partent! Qu’ils s’en aillent loin de sa face! Qu’ils soient errants loin de leur pays, d’un pays souillé qui ne peut plus être un lieu de repos et dont la ruine est imminente, une ruine terrible! Voilà ce que la bouche de l’Éternel annonce par le vrai prophète. Le Seigneur a dit: Allez-vous-en! et ne reviendra pas sur cette parole.

Mais qu’elle est sérieuse pour nous! Le monde est un lieu souillé sur lequel le jugement est suspendu. Pourrions-nous y trouver du repos? Nous qui cherchons la paix, qui nous détournons de la guerre, n’insistons pas sur nos droits. Laissons le monde nous ravir ce qui nous appartient. Nous avons un trésor, les paroles de l’Éternel, qui supplée à tout ce que le monde pourrait nous enlever! Elles ont la puissance de nous garder et de nous introduire à la fin dans notre héritage (Actes 20:32), et le monde n’y aura pas «son lot» (Col. 1:12).

«S’il y a un homme qui marche selon le vent et le mensonge, qui mente, disant: Je te prophétiserai au sujet du vin et de la boisson forte! il sera le prophète de ce peuple» (v. 11). Nous trouvons ici le contraste entre les prophètes prévaricateurs et le prophète de l’Éternel. Eux mentent, flattent les passions de ceux auxquels ils s’adressent, atténuent le mal quand il s’agit des convoitises des hommes, caressent leurs penchants au lieu de s’y opposer. N’est-ce pas, en tout temps, le résultat du ministère selon la chair auquel l’action de l’Esprit de Dieu est étrangère?

«Je te rassemblerai certainement, Jacob, toi, tout entier; je réunirai certainement le Résidu d’Israël; je les mettrai ensemble comme le menu bétail de Botsra, comme un troupeau au milieu de son pâturage. Ils bruiront à cause de la multitude des hommes» (v. 12).

En contraste avec le v. 10, où l’Éternel chasse ignominieusement de sa présence le peuple souillé, il s’adresse maintenant à Jacob tout entier, au Résidu d’Israël qui, dans l’avenir, formera le peuple nouveau de l’Éternel. Dieu a en vue ce peuple futur quand il dit: «Tout Israël sera sauvé». Pensée précieuse aussi pour les fidèles au milieu des ruines actuelles de la Chrétienté! Dieu a en vue un Résidu caché parmi ce qui a la vaine profession du nom de Christ. Ce Résidu, comme jadis celui d’Israël, à peine le reconnaît-on aujourd’hui, et cependant il existe. Quelques-uns, peut-être deux ou trois, se groupent autour du Seigneur, mais combien de brebis errantes qui ignorent ce rassemblement et soupirent dans cet isolement! En un clin d’œil le Seigneur, quand il viendra, les réunira en un immense troupeau céleste qui «bruira à cause de la multitude», comme il réunira le Résidu d’Israël pour son royaume terrestre millénaire. Si nos yeux sont éblouis devant la gloire terrestre d’Israël restauré, que devrait être pour nous la vision de la gloire céleste des rachetés, réunis autour du grand Pasteur des brebis, et célébrant ses louanges dont les échos se répercuteront à l’infini dans les espaces de la cité céleste! Et de qui découleront ces bénédictions futures? Le prophète nous le dit, de Christ seul:

«Celui qui fait la brèche est monté devant eux; ils ont fait la brèche et ont passé par la porte, et sont sortis par elle, et leur roi est passé devant eux, et l’Éternel est à leur tête» (v. 13).

Il semble actuellement que le rassemblement de l’ancien peuple de Dieu soit aussi impossible que celui de l’Église. Attendons que l’Éternel, le roi d’Israël, se mette à leur tête. Il est Celui qui «fait la brèche», qui renverse tous les obstacles. De même aujourd’hui, malgré notre ardent désir de voir le rassemblement du peuple de Dieu, il nous est impossible de renverser les obstacles. Mais Lui rassemblera son peuple et se mettra à sa tête.

Dans le cas d’Israël il fait la brèche pour les faire sortir. Christ se mettra à la tête de ce pauvre Résidu opprimé, de ses brebis, passera devant elles, fera tomber tous les obstacles, tout l’effort de Satan pour les détruire et empêcher leur rassemblement, les conduira dehors, les séparera de ce peuple rebelle. Elles le suivront, «passeront par la porte» et sortiront par elle.

Ce passage devient clair quand on voit qu’il a pour sujet le Résidu décrit comme le menu bétail de Botsra, comme un troupeau au milieu de son pâturage. Au v. 13, le Saint Esprit nous montre de quelle manière et par quelle merveilleuse délivrance son peuple est amené à jouir de cette bénédiction. «Ils ont passé par la porte», dit le prophète. Cette porte est Christ, leur Berger et leur Roi. Tout le passage de Jean 10:1-15 semble être un commentaire de ce verset de Michée. Le troupeau d’Israël (le Résidu) sera rassemblé; le Seigneur se mettra à leur tête; il sera reconnu par eux comme leur souverain pasteur et leur Roi, comme la seule porte de sortie du milieu d’un peuple apostat, comme la seule porte d’entrée dans les bénédictions millénaires. Il sera pour eux Celui qui fait la brèche, c’est-à-dire qui détruit les obstacles accumulés contre eux par Satan. Il leur communiquera la force nécessaire, le courage et la vertu pour remporter la victoire. On pourra alors dire d’eux: «Ils ont fait la brèche».

Ce passage contient encore une parole remarquable: «Celui qui fait la brèche est monté devant eux». La chose a déjà eu lieu pour l’Église. Toute la puissance de Satan a été réduite à néant par la résurrection de Christ qui a renversé l’obstacle et a fait la brèche. C’est aussi, en vertu de sa résurrection que rien, dans l’avenir, n’empêchera son peuple Israël de passer. Par le fait qu’il est monté devant eux, ils seront mis en pleine liberté, car ils sortiront sous la conduite du Berger, non pas pour être mis à l’abri, mais pour s’étendre, troupeau innombrable de l’Éternel, bruissant comme une ruche d’abeilles, et pour paître dans les pâturages de Canaan. «Leur roi est passé devant eux». Il est celui qui est entré par la porte en accomplissant toute la volonté de Dieu (Jean 10:2) et qui, de ce fait, a seul le droit d’être notre Sauveur, comme il sera le Sauveur d’Israël. Ce Roi, ce Sauveur, ce Berger, c’est l’Éternel lui-même: «L’Éternel est à leur tête».

Que de pensées bénies dans ce verset qui, tout en s’appliquant si merveilleusement à la délivrance et au rassemblement futur du peuple de Dieu, s’applique à bien plus forte raison à notre délivrance actuelle. Jésus nous a fait sortir et nous conduit: il nous fait entrer en toute liberté dans la maison du Père; nous y entrons pour jouir de la communion avec le Père et le Fils, et en sortons pour le servir. Il nous a donné la vie, bien plus qu’il ne l’a donnée ou ne la donnera jamais à ses brebis juives, car elle est appelée «la vie en abondance», la vie éternelle qui nous donne part et jouissance avec le Père et avec le Fils (Jean 10:9, 10). Toutes ces choses appartiennent à notre bénédiction actuelle; celle d’Israël, quelque merveilleuse qu’elle soit, dans les temps futurs millénaires, n’en approche pas. À bien plus forte raison lui sera-t-elle inférieure, quand le troupeau chrétien, l’Assemblée du bon Berger, aura été introduit dans la gloire, dans Sa propre gloire!

La première division de notre prophète s’arrête ici. Le Saint Esprit se complaît, après une vision de péché et de jugement, à considérer la Restauration future du Résidu tout entier, conduit par son Roi, le Messie, l’Éternel!